Echéances de fin d’année, succession bien rythmée de date à
une semaine d’intervalle, pour la première fois depuis longtemps déjà,
succession de case vide ou bien de notes noires jouées en trois temps, trois
mouvements, ainsi va la vie. Paradoxalement, ce vide, ces absences ne sont pas
un manque, un creux, mais plutôt une façon de désynchroniser d’un mode trop
imposé et trop imposant depuis ma nuit des temps. L’année n’est pas encore
achevée que son bilan est déjà bien plein, riches d’émotions, belles et cruelles,
douloureuses et heureuses, les notes basses répondant aux notes aigües,
accords, désaccords, ainsi s’en va la vie. Naissance, maladie, accident de la
route, accident cardiaque, mariage, chacune des notes à son propre poids, sa
propre tonalité qui résonne et persiste jusqu’au plus profond du corps. Lorsque
on est né en fin d’année, il n’est déjà pas simple de trouver la place de sa
date au milieu des dates imposées, il n’est pas simple d’être festif lorsque
l’année dresse son bilan, encore moins lorsque la même date vient frapper un
nouveau coup, lorsque la veille déjà un autre coup avait déjà frappé. Les
basses résonnent, vibrations sourdes et prenantes jusqu’au plus profond de mes
os. Un ras le bol, mais au fond, que pouvoir y faire ? Un envie de dire
stop, mais personne n’écoute. Un repli, un oubli, un abandon, non pas de soi,
mais des dates, des coups, un mode sourire et soutien, utiliser l’énergie pour
faire du bien, répondre aux coups par des sourires, resserrer la voile autour
des siens, proches ou amis, ceux qui sont là, vraiment, détacher les cordes des
lests, des ballons, des boulets, des faux liens, exister dans son périmètre,
être.
La vie est faite de choix, d’épreuves, d’expériences. C’est
ainsi que se pave notre chemin, ainsi que se déblaie notre route, ainsi que
nous dressons notre être face à l’adversité, par les leçons, par les réponses
que l’on donne aux coups et au cours des choses. Bien sûr, lorsque je regarde
dans le rétroviseur, je reconnais que parfois, l’envie de descendre, l’envie de
se battre contre des moulins à vent mauvais ont pris le pas, inutilement. On ne
combat pas l’inutile, on ne descend pas du train en marche parce qu’on n’a pas
aimé la gare précédente, non, on avance, on apprend, on construit, on se
construit. Hier est passé, il a donné sa vision des choses, ses leçons ;
On les a reçues avec le regard d’alors, les envies d’alors, il est inutile de
les juger avec la vision d’aujourd’hui. Demain ne sera que si l’on vit
aujourd’hui. Il n’y a pas de segmentation du temps, un livre pour le passé, un
livre pour le présent, un livre pour le futur, non, tout est en continu, tout
comme sur nos bons vieux Bescherelle égrenant les conjugaisons et les temps de
chaque verbe sur une seule page. On est tous une seule et même page, notre
page, et c’est nous qui l’écrivons, alors prenons notre temps, prenons notre
inspiration, notre respiration et écrivons, remplissons-là de notre plus belle
écriture, avec patience et réflexion, il n’y a pas de Blanco, pas de gomme,
juste de l’encre, je pourrais dire, de l’encre de Chine comme on disait dans ce
temps où cela était signe de qualité… Evitons les ratures, écrivons nos vies,
et si parfois le rythme se ralenti, se pose parce qu’une note basse est venue
frappée le désaccord, ce n’est que pause, leçon, digestion, arrêt sur image le
temps de reprendre ses esprits et de reprendre son chemin, le chemin.
La maxime populaire dit qu’on apprend à tout âge. C’est
clair que chaque jour distille ses leçons, on a le choix de les apprendre ou
pas, de les retenir ou pas, de toute façon, une leçon non retenue se
représentera à vous tôt ou tard, parce que la vie n’est qu’une évolution,
qu’elle vous conduit à grandir, à vous construire quitte à ce que cela soit
malgré vous. Cette année est une année blanche pour cause de notes noires,
c’est ainsi, demain sera un autre jour, l’année qui viendra aussi sera une
autre année, avec bien sûr, son lot de naissances, de maladies, d’accidents, de
mariages, de leçons, de décès, de pleurs et de rires, mais elle sera autre, et
vous la verrez autrement parce que vous serez autres, parce que vous serez
différents, ainsi va la vie, les vies, la loi de la vie. On écrit tous sa page,
son histoire, on frappe tous les coups de notre horloge selon notre rythme.
Aujourd’hui plus qu’hier, je sais et je sais que demain je saurai encore plus,
ce n’est pas le vide d’aujourd’hui qui l’emporte mais plutôt la richesse du
plein qui le complète. Il y a un temps pour tout, une marche après une autre,
un pas après l’autre. Toujours.
1 commentaire:
Mon professeur de phylosophie me disait toujours ceci :
"Je ne veux voir aucune gomme, aucun blanco effacer quoique ce soit. Si vous vous trompez, vous barrez proprement et vous écrivez à côté, la suite de vos pensées. Je veux voir la faute. C'est comme dans la vie, on efface rien. On barre l'erreur et on continu d'avancer dans la réflexion."
Je n'ai pas retenu grand chose de mes années d'études longues et fastidieuses pour moi, mais cette phrase est restée. Toujours. Et elle m'a énormément servie par la suite lorsque j'en ai vraiment compris le sens.
Encore aujourd'hui, face à cette fin d'année plus que grise pour moi aussi, cette leçon d'un prof d'hier me revient en force lorsque je lis ta phrase sur l'encre de chine.
Natacha
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