Moment présent

Le monde tourne et tourne sans fin, quand bien même il tourne vers sa fin, pourquoi en être triste, tout a une fin, et, plutôt que de s’appesantir de tristesse dans la perspective de ce bout sans perspectives, il est bien plus utile et ô combien puissant de se concentrer sur cette parcelle d’infiniment plus petit, plus court, ce présent qui court. Prenons conscience de notre chance à vivre le présent dès à présent sans attendre qu’il ne soit plus, qu’il ne soit plus qu’un passé à peine composé en attente d’être décomposé. Certes, il est des passés plus que parfait, et si leurs simples évocations donnent aux jours des goûts de miel et des parfums de fleurs, ils ne sont que trublions venant en tourbillons nous déconnecter d’un actuel vers un factuel aux contours souvent bien élimés au point d’en oublier quelques acidités. Encore faut-il aimer le miel et le parfum de ses fleurs là, il en est qui gardent et garderont longtemps un goût âcre, à jamais.

La solitude d’un passé ne doit jamais faire oublier la solidité d’un présent. C’est un roc inébranlable et tellement friable si l’on veut bien vouloir y creuser son sillon, il suffit pour cela d’y mettre toute son énergie sans la laisser divaguer vers des hiers partis ce faire embaumer. Le roc, c’est l’impossible dont on aime à qualifier le gravillon sur le chemin. On ne sait comment le contourner, on songe à des plaisirs enfuis, on s’affronte dans nos propres peurs et l’on perd ses moyens. Pourtant, avec un peu de concentration, nos énergies s’alignent et nous montrent la voie, notre voie, celle du moment, il est inutile de viser l’horizon tant qu’on n’a pas fait le premier pas, les sommets ne se gravissent pas que dans leurs derniers mètres. Pire, c’est dès les premiers pas qu’on se donne l’allant et le rythme pour la course entière. Partir trop vite brûlera les énergies dès le départ et la poursuite sera pénible et éprouvante. Partir trop hésitant endormira les énergies et il sera bien difficile d’accomplir son parcours. Ne pas avoir peur. Savoir s’écouter. Se faire confiance. Toute serrure possède sa clé, il n’est nul besoin de chercher un passe-partout pour vouloir les ouvrir toutes d’une même main, il est bien plus important de chercher chaque clé en soi. Toutes les réponses naissent dans la même source que la question-mère, cette source dont nous sommes le creuset. Au fond, on passe sa vie à creuser tout autour, dans les vies des autres, dans des puits de connaissances, mais on oublie toujours d’entretenir sa propre source, de l’entretenir, de la nettoyer, et surtout, d’y boire à petites gorgées cette eau fraiche et si bénéfique. On cherche trop dans l’autre ce qui n’est qu’en nous. Paradoxe de nos savoirs s’exerçant sans savoir que les lignes les plus difficiles à lire sont pourtant les plus accessibles.

A trop vouloir cataloguer, à trop vouloir étiqueter, ranger, classer, répertorier, le simple exercice de la méditation se trouve enfermé dans des boites aux noms spirituels, religieux, philosophiques, et pire, le voilà codifié selon des règles prêtant à sourire, des postures en jambes tricotées, des cailloux empilés en un subtil équilibre, et bien sûr, l’élévation se visualisant mieux sous une forme de lévitation, l’envie d’essayer se retrouve cloner sur le mauvais canal. Pourtant, à juste y réfléchir ou bien à y réfléchir justement, s’isoler en son for intérieur, visualiser sa plage de quiétude, laisser reposer son esprit lentement bercé aux rythmes des respirations n’est pas si compliqué, si étrange, si religieux, cela serait au contraire, la religion de la vie, la religion du soi et un grand cadeau à s’offrir pour apprendre à mieux se retrouver, pour mieux équilibrer ses propres dimensions. Une forme de rêve éveillé aussi, les pensées se libèrent tandis que les pressions s’effacent, l’âme lévite, palpitations légères dans ce corps oubliés. Dit ainsi, le sens est différent, la nature de l’exercice plus naturelle et surtout, plus personnelle, il n’y a donc plus d’obstacle à essayer. Et puis, si vous avez besoin de musique zen, de vous imaginer au Tibet, de prendre votre essentiel dans un référentiel plus collectif, faites donc, car dans la vie il n’y a jamais d’impasse, il n’y a que des chemins, tantôt autoroutes, tantôt chemins de traverses, tantôt parcours semés d’embûches, tantôt des demi-tours, mais on avance toujours, alors, il n’y a aucun risque à avancer et pire, il n’y a aucune raison d’avoir peur. Vraiment.

L'ivresse

L’ivresse est une caresse, riche de sens,
De sensations,
Plaisirs sensitifs et sensibles,
Ça tombe sous le sens.

 L’ivresse délivre et parfois livre bien des secrets,
Mais souvent,
Trop souvent,
L’ivresse ne s’exerce qu’en plaisirs solitaires,
Ephémères.

L’ivresse exalte ou exhume bien des sens,
Des abandons,
Des lâcher-prises, réels,
Parfois naturels.

L’ivresse est une maitresse, captivante,
Attachante,
Dévorante, exigeante,
Exclusive.

L’ivresse est quintessence de plaisir,
Distillation,
Destination le paradis
Artificiel.

L’ivresse n’est pas de boire, de fumer,
De jouer,
L’ivresse c’est vivre,
Essentiel.

L’ivresse s’abreuve à nos sources,
Et non l’inverse,
On l’alimente, plus qu’elle nous alimente,
Vivons !


Laissez-moi

Six mois, six mois qui passent et font passer la moitié d’une année, six mois étranges, vides et différents, six mois de vides, de buées, de larmes, de pluies, de manques, d’absences, de rendez-vous manqués à commencer par le soleil. Six mois, si moi, pas moi, pas toi, pas lui, mais encore ? Nous avons tous nos histoires personnelles, nos parcours, nos demi-tours, errements sans erreurs, erreurs sans errer mais non sans arrêt, le chemin est parfois semé d’embûches, mais plus que les obstacles, ce sont les pas qui construisent le chemin. L’approche de l’été, les premiers beaux jours ne font pas plus briller des jours encore trop vides si ce n’est de pensées et d’appels silencieux, simplement les rayons d’un soleil enfin chaud leurs apportent une lumière différente, une tonalité différente. Le chemin est toujours en direction d’un nouvel horizon et même si les pas sont lourds, même si la force semble manquer, c’est vers cet horizon-là qu’il nous faut avancer.

Un mauvais rêve. Oui, c’est cela, un mauvais rêve, un réveil douloureux qui n’est qu’un rêve, c’est ça, hein ? Dites-moi que ce n’est qu’un cauchemar, que tous ces vides ne sont que des messages vers des rendez-vous  manqués sur un répondeur grésillant ; Dites-moi qu’hier est encore à venir, que ces pas trop profonds sur un gravier trop mou dans ce cimetière trop quelconque ne sont que des frissons de nuits troubles. Dites-moi…. Non, ne me dites rien, laissez-moi me réveiller et comprendre, laissez-moi me réveiller et apprendre, laissez-moi résister à l’appel de la nuit, à cette nuit si longue et si paisible qu’elle en devient la dernière, laissez-moi admettre que les vies ne font pas une vie, que le visible n’est pas la seule réalité, que notre mode se peuple aussi de ses êtres qui l’ont dépeuplé, laissez-moi ainsi. Laissez-moi.

Qui, que, quoi, comment, questions toujours en quête de réponses, questions sans cesse posées, tourbillon qui tourne dans la tête, étourdissement, comment, quoi, que, qui…. Errances erratiques, thèmes thématiques, virage entre deux lignes droites, paradoxes de la progression, loin de ralentir la course, il l’accélère, tout comme la fusée prend son accélération en contournant la planète, ces instants d’hésitations, de méditations, de pensées, ces replis sur soi donnent le LA qui permet de reprendre le tempo, de jouer plus juste sa propre partition. Pas toujours bien compris, mais pour mieux s’accorder sur son propre tempo, pour bien trouver sa propre mélodie, il faut parfois savoir s’isoler. Ce n’est ni une cage, ni une prison, ni une boite étanche, juste un moment hors du temps des autres, juste un recentrage sur ses propres énergies. Comprendre n’est pas juger, ni tolérer, ni même gérer ou bien insister. Hier est mort et avec lui bien des âmes sont parties jouer les filles de l’air, laissez le temps au temps, laissez-moi ce temps-là.


Laissez-moi.

Les mots soignent les maux

Quel que soit notre parcours, il est une succession d’étapes, de vies, de bouts de vie, chacune se construisant selon les principes essentiels de nos dissertations du temps où elles s’appelaient encore rédactions : une introduction, un développement, une conclusion.

Passons sur l’introduction, elle est si rapide parfois qu’on n’y prête attention qu’une fois l’histoire achevée. Drôle de paradoxe, lire l’introduction à la fin, c’est une forme de nostalgie, une volonté de retourner dans le temps d’avant, le fameux « au temps pour moi » qui trahit l’envie de remonter ce diable de temps à contre-courant. Rapide mais efficace, l’introduction a permis de s’immiscer, de s’introduire et de glisser dans l’histoire pour y fondre de désirs, de plaisirs, d’envies. Puis elle est partie, sur la point des traits, elle a filé dans l’oubli, s’effaçant devant la présence du présent, ce fameux développement, cette histoire, riche, intense, tellement belle qu’elle nécessite toute la place, qu’elle remplit toute les cases de l’emploi du temps, ne laissant pas de place à ces petites lueurs de temps, ces rencontres amicales, ces pauses téléphoniques, ces verres pris, ces soirées à refaire le monde, ces repas partagés, ces cousins vus, ces parents à accompagner, ces loisirs simples jusqu’aux plages d’ennuis, un grand coup de balai ou plutôt, un rouleau compresseur qui écrase tout sur son passage et trace sa route. Tout cela sans prévenir, sans qu’on y prête vraiment attention, c’est un virus qui pénètre et se multiplie à l’envie, c’est une vie qui s’accroche dans la vie et dévore tout sur son passage, c’est un tourbillon de moments jolis et de folies, c’est un train qui sans cesse accélère au point qu’on ne voit plus ni les quais, ni les gares traversés.

Mais le mouvement perpétuel n’existe pas, et bientôt le train ralenti, il freine, vibre se secoue de spasmes, de cris, de douleurs, l’ivresse des premiers moments, les griseries de la vitesse ont fait tourner la tête et les maux sont pour ce plus tard qui aujourd’hui s’en vient. Les maux ne font jamais du bien, les mots essaient de faire du bien mais les mots peuvent-ils calmer les maux ? D’où pourraient provenir ces mots de réconforts, puisque le vide s’est installé, puisque toutes les cases de notre planning se sont nettoyées, époussetées, éjectées sous la pression du grand tourbillon, mais après la pression, c’est la dépression, inéluctablement, simple équilibre physique. Les cases brillent comme des sous neufs sans porte-monnaie, comme des vases soudain devenus trop vides, comme des étoiles perdues dans un ciel trop grand une fois les nuages partis. Mais où sont les mots de réconforts ? Dans ces livres qu’on peine à ouvrir, dans ces textes courts, ces phrases en citation qui incitent à réfléchir, à fléchir vers soi, à mesurer et à se mesurer sur sa propre échelle, désormais seul repaire dans ce train arrêté. Bizarre, mais il semble que la conclusion n’est pas été annoncée. Normal, c’est là qu’il faut conclure, ouvrir cet espace de temps pour y glisser ces belles plages et ces douces pages, peu importe la méthode, le tri et le rangement, le tout est que tout y rentre, que tout y contienne car la conclusion c’est le ruban adhésif qui s’en vient clore ce carton avant de le ranger sur l’étagère du passé. Bien sûr, les pages sont des anges qui parfois s’en viennent titiller notre esprit en souvenirs, elles viennent par-dessous, elles soulèvent le couvercle et c’est à ce moment-là que le ruban de la conclusion doit être suffisamment fort pour ne pas empêcher le présent d’être présent, pour ne pas croire qu’hier  est mort par notre seule faute. La conclusion n’est qu’un prélude à la future quiétude, elle s’écrit à quatre mains. On clôt en fermant les quatre côtés du carton, et si demain l’autre protagoniste devenu autre respire un nouveau présent, cela ne dévalue nullement notre présent, encore une fois, c’est une association qui a cessé par incompatibilité entre deux êtres à un moment donné, pas par la faute de l’un, ni de l’autre et chaque autre a droit de respirer les fleurs d’un autre présent juste parce que l’incompatibilité des uns ne fait l’incompatibilité des autres.



Petit à petit, l’emploi du temps désormais exposé au grand air s’oxyde et se rempli de choses anodines d’abord, de rendez-vous auxquels on n’avait pas accordé d’importance, aux soins du corps, aux soins de l’âme, puis le vieux calepin sort de sa quarantaine, les numéros tracés rappellent notre vie, nos histoires et ces numéros quelques fois aboutissent encore après quelques hésitations à des discussions, et de ces discussions naissent des mots, des mots qui écoutent, des mots qui se taisent, des mots qui comprennent, des mots qui soignent. Oui, les mots soignent les maux. A jamais.        

Il pleut, il pleut bergère

Il pleut, il pleut bergère rentre tes blancs moutons….

Mais les moutons sont partis depuis longtemps,
Mais les moutons sont parqués depuis longtemps,
Dans des hangars, bien serrés poussent les côtelettes,
Sur ces hangars, bien étanches glissent les gouttelettes.

La bergère est partie, ou du moins, elle a changé
Changé de vie, changé de métier, elle est PDG

Elle est fermière, exploitante exploitée à crédits
Elle est femme d’affaires à s’affairer à sa survie

Les moutons paissent une herbe au goût étrange
Les moutons naissent à l’abri sans que cela dérange
Les moutons on s’en fout, ce qu’on veut c’est du gigot
Les moutons, c’est comment déjà ? Noir ? Blanc ? Indigo ?

Il pleut, il pleut bergère, mais bergère n’est plus
Il pleut, il pleut peuchère, comme hier il a plu

Le monde conserve jusqu’au vivant en conserves
Le monde change le naturel en bio et en conserve

Processus sans fin qui lissent et étouffent les saveurs
Processus en procession qui dictent les labeurs
Standardisation des goûts, mondialisation sans fin
C’est l’euthanasie des variétés, la culture du déclin

Mais qui donc sommes-nous devenus pour accepter cela ?
Mais qui donc sommes-nous pour vivre ces choix-là ?

La richesse de l’Homme nait de la diversité,
A l’aseptiser, l’Homme est en train de se suicider

Il pleut, il pleut bergère, sort vite tes moutons
Qu’ils soient blancs, noirs, béliers, brebis ou agneaux
Qu’ils aillent paitre en des prairies vertes à foison
Mets vite ta capuche et cours respirer ce ciel d’eaux


Il pleut, il pleut bergère, mais la pluie, c’est la vie !


  

En d'autres mots....

Les mots sont des armes qui désarment où parfois blessent et tuent, mais ils ne sont pas les seuls responsables, nos modes de communication sont ainsi faits que chaque mot se trouve couché sur le papier ou l’écran recouvert d’une multitude de couches de sens, de non-sens et d’incompréhensions. Ainsi il est plus aisé d’échanger de vive voix, mieux encore, de visu et de vive voix, au moins les yeux, les visages traduisent des tas de synonymes s’ajoutant à la couleur des accents pour parfaire la transmission.


Les mots sont des jouets lorsque utilisés à bon escient ils vont et viennent dans les phrases, ils changent de place sous les jongles d’un joueur conducteur de travaux écrits, ils osent se métamorphoser en sons et se prendre aux jeux des échos, des homonymes, des synonymes, il y a du mariage pour tous dans l’air, les phrases écrites en sons prennent un drôle d’air et tant pis si la lecture trop rapide s’y perd.


Les mots sont dociles, mais aussi joueurs. Parfois on les cherche, le temps de les voir en pensées, les voilà déjà reparti en cache-cache, à croire que parfois ils sont cache nés voire nés cachés, chose qui complique lorsqu’on les a sur le bout de langue. Cela dit, à trop en perdre ainsi, on finit vite par se retrouver avec une langue chargée.


Les mots sont des mobiles, ils tournent au-dessus de nos têtes, parfois immobiles, parfois rapides, parfois ils tombent, venant troubler le sens d’un phrase et de là, briser le sens premier de quelques lignes tracées à la hâte non pas de ces lignes blanches conduisant dans l’enfer des paradis artificiels, non, plutôt des lignes bleues sur une page blanche, venant telles une armée  de vagues apporter un moment de bonheur dans un quotidien.


Les mots sont des mobiles à écrire, et peut-être plus tard deviendront-ils des mobiles à dire, en attendant d’être un jour des mobiles à lire. Les mots sont comme ça, même si parfois on les préfère autrement mais vraiment si le mot autre ment comment pourrait-on croire à d’autres vérités ?


Les mots sont des amis, ils viennent à l’improviste, s’installe, prennent leurs aises, puis peu à peu colonise toute la place, et nous, oubliant les choses que l’on avait à écrire, tout heureux de cette visite impromptue, nous voilà accaparé à tresser des pleins et des déliés pour mieux les enlacer, pour mieux les retenir, pour mieux les accueillir. Jusqu’à ce qu’ils repartent…


Les mots sont troublant, jamais trop blanc, d’ailleurs un blanc dans un texte n’est pas un mot, c’un silence qui s’exprime, un trou dans la rime, une jolie rime à fleur fraichement cueillie le matin même et qui se trouve orpheline, il n’est jamais facile de bien s’accorder avec le blanc.


Les mots sont et par ce simple fait, ils sont émotions. Que serions-nous sans les mots ?  S’il n’y avait pas les mots, j’aurais déjà fini mon texte, un texte vide de sens, sans mot, sans son, tout en silence, et vous, vous auriez déjà achevé la lecture, et peut-être même qu’à la place d’un sourire esquissé, vous auriez haussé les épaules, ce qui n’est pas très gracieux ni même bon pour le dos, et peut-être auriez-vous dit « mais de qui se moque-t-on ? » si tant est que l’on se moque comme on dit à London, ceci, je m’en excuse, n’étant que pour faire un bon mot….



Les mots sont bons, et même doublement bons, ils sont des bonbons, des friandises tantôt acidulées, tantôt rafraichissantes, tantôt piquantes, mais toujours un délice, un plaisir qui n’est pas que solitaire, non, un plaisir à offrir et pour cela, moi je dis « merci les mots ! »          

Une vague d'espoir

Il est toujours des écrits vagues
Parfois des écrits sur les vagues
Et quelquefois les écrits divaguent

Vague à l’âme ? Parfois
Vagues propos ? Des fois
Vague réponse ma foi

Parfois il croit, mais les croix sont des symboles
Rapide dessin clôturant parfois des desseins
Géométrie ou graphisme c’est tout un symbole
Parfois il croit, et croire c’est parfois sain

Mais si les croix croisent les vagues,
Cela arrive quelquefois,
L’écume comme bague,
Le bois en croix ma foi

Un rocher défiant les vagues
Un ressaut de terre
Aux ressacs de la mer
Un défi aux vagues

Sur ce rocher, une croix,
Fière, dressée, en bois,
Et si elle coule parfois,
Elle vainc à chaque fois

Qu’en conclure ?

Et bien, ma foi, tout simplement par-là faut-il y voir
Qu’il nous arrive d’avoir la tête sous l’eau quelquefois,
Mais qu’à toujours se battre, on s’en relève, un espoir
Que cet espoir soit notre lumière les jours où l’on se noie.




Douce nuit

Après la pluie vient le beau temps, tout comme un sourire du temps, le ciel bleu éclaire le vert éclatant des prairies gorgées d’eau, le soleil fait du bien même si le vent se rafraichit encore au contact des neiges quasi estivales. Etrange pied de nez de dame nature dans ces atermoiements incessants de réchauffements climatiques, l’eau du ciel est venue remplir les nappes phréatiques, les neiges se sont entassées sur nos montagnes et les chaleurs ne sont pas vraiment de mise, de quoi profiter encore quelques temps du coin du feu.


Il était là, sous l’appentis, occuper à fendre  les buches, gestes lourds et mécaniques, la hache se lève et tombe en un éclair sur le rondin de bois, l’éclatant en deux dans un craquement sec, puis le geste se reproduira pour ces deux moitiés, et les quarts de buches s’empileront en des tas esthétiques, odorant et craquant sous l’humidité des jours, le bois reste vivant jusque dans ses morceaux les plus petits. Ces gestes simples, quasi méthodiques, issus d’un processus où chaque étape a longuement été pesée, choisie et validée par l’homme, ces gestes ancestraux, répétés depuis la nuit des temps, il les faisait sans y réfléchir plus que cela, à vrai dire, il les faisait plus par nécessité que par envie. Sans être un passe-temps, c’était tout de même une façon de voir le temps défiler, de le comptabiliser en buchettes, tout comme les écoliers apprenant en compter leurs buchettes de bois dans la grande salle de classe chauffée par le poêle à bois, cette salle de classe près de laquelle il venait arranger le tas. Le village n’était pas grand, plutôt une collection de fermes isolées et de hameaux perdus à travers la montagne, mais il avait une âme, issue sans doute de ce collectif d’hommes et de femmes, enracinés aux rochers de ce coin des Pyrénées.  Un peu comme la force d’une équipe de rugby provenant du collectif, de ces liens invisibles et si solidement ancrés entres les membres, l’éloignement des grandes villes, les travaux des champs, les rigueurs du climat ont patiemment forgé cet esprit de corps issu de plusieurs corps. L’école survivait, encore quelques élèves et un maire vindicatif, refusant de s’associer aux villages voisins pour scolariser les enfants dans le gros bourg d’en bas, pourtant, le pays se mourrait, les jeunes partaient, les uns après les autres, d’abord pour des études, longues, très longues, ensuite pour un travail échappé aux logiques du temps, préférant s’enfermer sous les néons insipides que de respirer ce bon air libre de ces mouvements jusque dans ses coups de gueules en vent d’autan. Oh bien sûr, ils revenaient, mais petit à petit, ce n’était plus que des étrangers, oubliant peu à peu les murmures des sources cachées, le nom patois des lieux dits, oubliant les gestes si patiemment affinés, parlant de progrès, cet étrange animal qui dévore jour après jours le monde d’ici.


Depuis combien de temps n’avait-il pas vu les siens ? Les derniers échanges au téléphone n’étaient qu’incompréhensions. Il était question de quitter la maison familiale, de se rapprocher des enfants, là-bas, dans cette ville si étouffante et si bruyante, il fallait vendre les dernières bêtes, voir pour les terres et peut-être la maison, comment peut-on penser cela ? C’est ici qu’il était né, comme son père et son grand-père, comme ses enfants après lui, c’est ici qu’il voulait fermer les yeux, une dernière fois, son dernier souffle plein de ce plein air d’ici, et après lui le déluge, désormais, il ne se faisait plus d’illusion, les gens d’en bas vous parlent en billets bien loin du langage d’ici, en saison, en pluie, en soleil, en travaux des champs, en cochon à tuer, en veaux à naitre, en œufs tout frais…. Le progrès, lui, il s’en fout, il s’est inventé des supermarchés, où les œufs poussent en cartons de trente-six, les veaux sous cellophanes et le cochon en saucisses, tout cela contre ses fameux billets, que voulez-vous, le progrès parle pour eux et comme eux. La mauvaise humeur enveloppait ses pensées, la hache trop nerveuse faillit rater la buche, il était temps d’arrêter. De toute façon, la brouette était pleine, de quoi garnir un peu plus la réserve de l’école, puis il serait temps d’aller porter quelques herbes aux poules et aux lapins, ça sera la sortie de classe et les  enfants le salueront demandant des nouvelles des lapereaux à naitre, et combien d’œuf les poules ont pondu ce jour…. Voilà qui lui redonnait le sourire, la bonne humeur et l’insouciance des enfants, encore si fiers et si enracinés ici, encore insensible à son vieil ennemi qu’est le progrès. Puis viendra l’heure des frimas du soir, le temps de rentrer dans la vieille maison, de donner quelques coups de tison à la buche se consumant pour en éveiller quelques fumerolles annonciatrices de nouvelles flammes, puis d’y déposer une branche sèche, et une autre buche. Magie du feu, dès que les buches se rencontrent et se frottent entre elles, naissent des flammes de vies, des crépitements et surtout, cette belle odeur riche des essences d’hier. Cette flambée le réchaufferait, tandis qu’il s’installerait sur la chaise basse près de l’âtre, approchant la toupine de soupe et contemplant ce spectacle sans cesse renouvelé du ballet des flammes et des fumées. Alors le jour pourrait aller se coucher, laissant place à la nuit étoilée, lui fermerait ses volets, regarderait dans la carte des  étoiles la météo du lendemain, puis s’en irait rejoindre sa chambre et le vieil édredon de plumes, les oiseaux d’ici ne sont pas des oiseaux de nuit, c’est le jour qu’ils volent, dès l’aube et ses belles couleurs, heureux de vivre dans ces décors immenses et sans cesses renouvelés par la simple magie des lumières naturelles… Douce nuit.     

Musique!

Musique des mots, syllabes associées
Unique son haut, consonnes qui sonnent
Son sensuel, sibyllin, coquin qui résonne
Il vient repart sans partir, à l’oreille accroché
Quelconque fantôme qui erre sans errer
Uhuhu dit-il en son bas, vocalise exquise
Et de ce son bas nait une samba éprise

Musique des mots, musiques des sons
Un air sans avoir l’air s’en vient en sons
Sons associés, sons assonant, ils sont
Ils sont les sons du printemps, la mousson
Quels que soient les rythmes, dansons
Unis vers celle qui pose et dépose la partition
Elle, maitresse sensuelle sans qui nous ne serions

Musique des sons, musique des pas
Un pas par ici, un pas par-là,  un pas
Souliers vernis, talons ou bien à plat
Ils dansent, cognent, frappent les pas
Qu’en rythme, dociles ils marquent le pas
Un pas par-là, un pas par ici, un pas
Etrange ballet où tout s’accélère sans s’emballer

Musique des pas, musique des mots
Unis dans le rythme, unis dans les sons
Symphonie, des mots  dans l’émotion
Ils tournent, ils se cherchent, ils sont
Quelqu’un, quelqu’une en action
Union  de la plume et du violon
Ensemble, unis, c’est juste une chanson