Les chemins d'une vie

Nuance, tout n’est toujours que nuance
Souffrance, tout n’est que souffrance
Errance, tout n’est à jamais qu’errance

Le regard des uns n’est pas le regard de l’autre
Le regard c’est en sorte la somme des regards
Et puis, peu importe quel est le regard porté
Il n’est jamais qu’un regard posé sans égard
Ce regard, c’est le tien, c’est le vôtre, c’est le nôtre

Indiscret, voyeur, inquisiteur, il s’immisce et interroge,
Celui qui le pose comme celui qui le découvre
Qu’il soit spectateur ou bien pris pour cible
Qu’il soit en mouvement ou bien immobile

Chaque sens sait prendre mille sens
Chaque sens sait éveiller nos sens
Ils révèlent, ils réveillent, ils interrogent
Ils piquent toujours notre curiosité

Flèches invisibles qui transpercent nos peaux
Par-delà les manteaux elles nous déshabillent
Elles caressent nos contours sans oripeaux
Elles percent à jour nos blessures, habiles

Mais au fond que cherchent-elles ces flèches impolies ?
Savoir sans comprendre, voir sans regarder,
Interroger sans écouter, dominer sans livrer,
Oh non grands dieux, elles sont trop polies !

Trop polies pour être honnêtes sans doute
C’est ainsi que le dicte la vox populi
Est-ce à cause de cela que le regard envoute ?
Ou bien qu’il pique et pique à l’envie ?

Nuance, tout n’est toujours que nuance
Souffrance, te voici en partance
Errance à jamais erratique tu danses
Ainsi s’en vont les chemins d’une vie.....






Retour aux essentiels

Retour aux essentiels, les éléments, ceux qui composent et dirigent nos vies, ceux qui bercent et dirigent nos sens, les basiques devenus méconnus car surement trop basiques… L’eau, l’air, la terre, le feu, le bois, la pierre, le métal, c’est par là que tout commence, c’est par là que tout s’achève, il n’y a pas plus de début que de fin, simplement un éternel recommencement, la vie. La vie justement, c’est ce torrent impétueux qui parfois devient fleuve tranquille, qui parfois gronde et monte, roule et ronge, s’obscurcit et emporte avec lui vos plus grands trésors laissant derrière lui le chaos. Du chaos naissent les larmes, amères et bienfaitrices, il faut savoir attendre, apprendre, cicatriser avant de s’essayer à sourire, sourire à la vie, qu’elle soit ruisseau guilleret ou fleuve amorphe. Il n’y a pas de méthode, il n’y a pas de tempo, à chacun son allure, à chacun ses travaux. Libre cours.

Voyageur assis sur le bord de son monde, il erre à la recherche d’il ne sait pas trop quoi, peut-être bien de lui-même, voyageur assis sans âme, ou presque. Partir, déménager, tout quitter, rompre le cercle comme pour rompre le sortilège mais il n’y a pas de sortilège, il n’y a pas de cercle, d’ailleurs, tout ne tourne pas si rond. Que faire alors ? Prendre le temps, son temps, digérer, effacer, sauf les leçons, avancer, construire, reconstruire, ici, ailleurs, mais maintenant et vient alors l’idée de base : les éléments. La pierre est solide, elle est bonne pour le pas, le bois pousse droit, il sera mur, le métal apportera sa résistance, ses éclats, le feu, l’eau et l’air s’en donneront à cœur-joie pour qu’ici naisse la vie, l’autre vie, celle qui ne fut pas jusque-là. Les couleurs y vont aussi de leur tonalité primaire, le naturel s’en vient au galop quand bien même il ne fut pas chassé, et lorsque le bois et le rouge s’épousent c’est tout de suite un feu de joie. Pas à pas, la vie se construit et même s’il en reste des brulures, les cicatrices font peau neuve. Le temps est un ami que l’on n’attend pas, que l’on attend plus, il nous a fait tellement faux bond, il s’est tant moqué de nous qu’on a passé quelques amertumes à lui en vouloir. Peu importe. Hier a fui et avec lui sont partis mille rêves de lendemain. Aujourd’hui sont les brumes d’un rêve dont on n’attend pas la fin. Silence, la plus belle des rimes à espérances. Il vit. Il y a la majesté d’un fleuve bien établi entre ses berges, il y a en lui la fraicheur du ruisseau, les sonnailles de la rivière et la force qu’il faut pour faire rouler les pierres. Il y a l’oxygène des arbres, la mousse des bois, les odeurs de fougères qui restent tenaces malgré les cultures traversées jusqu’à venir se frotter aux senteurs iodées du grand océan. Le fleuve est le trait d’union entre montagne et océan, entre deux mondes, entre deux passions. Les sommets, la neige, la flore du printemps, la chaleur de l’été, les grands pins buvant les marécages, les fougères épaisses, le sable brûlant d’une côte océane, comment résister ?


Le voyage est tout autant en odeurs qu’en couleurs, il y glisse ses pas. Parti de rien, revenu de nulle part, errance loin des souffrances, chemin sans croix, le pas léger et le bagage mince, de son calepin bien des papillons se sont envolés, normal, il n’y avait plus rien à voler. Voleur de temps, voleur de sourire, voleur de soin, voleur de rire, voleur d’ennui, c’est ennuyant les voleurs, ils s’en viennent tellement travestis que vous les voyez en ami lorsqu’ils ne sont que des voleurs de votre vie, des croqueurs de vos bonheurs vous laissant en retour que la paille de leur cachot, se croyant libre d’aller ainsi et d’être. Son cachot n’a plus de porte, il n’en a jamais eu, au fond, la porte de nos prisons n’est que celle de notre imagination, là est la clé. Partons. Soyons voyageur, immobile ou mobile, soyons créateur, il suffit d’être à notre écoute dans notre tempo, osons. Il n’y a jamais que les premiers pas qui coûtent, par le début recommençons. Du bois, de la pierre, du métal, de la terre, du feu, de l’eau et de de l’air, voilà les bases d’un monde nouveau ou plutôt d’un renouveau. Doucement, pas à pas, apprendre à réapprendre, apprendre à comprendre, poser son pas, ses pas, se poser et voir, prendre le temps de voir, alors, tout au bout du tunnel s’en vient la lumière… 

               

sans bruit, sans mot


Il est des temps et des périodes où la pause s’impose. Un silence, pas de bruit, plus de mot, l’encre sèche sans qu’elle ne jette l’ancre, il y a abandon du navire, peut-être pour réparation, quel que soit l’âge du capitaine. Sans peine. La vie est un manège qui ne tourne pas en rond. On y monte, on n’en descend jamais, on peut essayer mais non, c’est la vie qui décide. Le vent a soufflé et la plume s’est envolée, sans bruit, sans dire mot, partie sans laisser d’adresse, maladresse ou terrible adresse, elle vole aux vents pas toujours mauvais, seul l’agenda égrène les jours en jolies phrases sans pour autant éveiller la muse aux bois dormants. Le bois brûle dans la cheminée, il réchauffe l’air des soirées d’un printemps s’invitant en hiver. Les jours longs se parent des éclats de fleurs, bien trop belles, bien trop odorantes, bien trop tôt, c’est ainsi depuis quelques années, le temps jouent sans cesse à contretemps.  Qu’y pouvons-nous ? Rien, si ce n’est de vivre l’instant de chaque instant. Rien, si ce n’est d’éteindre les boites à misères qui sans cesse cherchent à placer le curseur sur la courbe des moyennes saisonnières, comme si le passé devait sans cesse rejouer son présent dépassé. C’est beau les statistiques, mais ça ne reste pourtant qu’un cimetière bondé d’évènements passés dont certains esprits malins se bornent à en tracer les contours et les courbes pour vous imposer leurs visions du futur. L’Homme est un grand reproducteur. Il se reproduit sans cesse. Il mange les mêmes plats à la même heure assis à la même place devant le même écran, il refait les mêmes parcours, les mêmes errances, il s’endort du même côté dans le même lit, cercle vertueux imposé depuis la naissance des gênes, où est la gêne ? Peut-on parler de gêne éthique ? Et bien non, les saisons ne suivent que les saisons et leur bon vouloir, il n’y a pas de raison que cela cesse, ce n’est pas parce qu’il a plu le même jour de l’an dernier qu’il doit pleuvoir ce jour-ci. N’empêche.


La pause. C’est beau et bon, ça vient ainsi naturellement, en silence. Sans bruit. Sans mot. Dire que ça fait du bien reviendrait à dire que la pause s’impose par cela mais il n’en est rien. Tout fait du bien, il suffit de le faire bien. Courir, grimper, marcher, tout cela peut faire mal mais fait tellement de bien. Paradoxe de l’être humain qui en prose cherche à traduire tout, les mots sont des boites à idées dont on oublie le sens. Imaginer un peu, dire « se faire mal fait du bien » peut-être perçu de mille façon différentes ou presque. Il y aura bien dans le tas quelques erreurs de compréhension, des non-sens, des mauvais sens, peut-être même pas de sens du tout. Qu’importe. Il n’y a aucune obligation à ne pas rester incompris, cela n’est pas plus inconfortable, ni même plus confortable d’ailleurs, non, tout ceci ne sont que des mots et les mots volent, et les mots se voilent, et rien n’est dévoiler. La pause ce n’est ni l’isolement, ni la foule, la foule fait peur, la foule saoule, l’isolement fait peur, l’isolement ennuie, il n’y a pas que les extrêmes, i l y a un juste milieu qui se balade entre deux extrêmes. La pause, ce n’est ni le vide, ni le plein, c’est un peu le couloir entre ces deux pièces, c’est un peu cette plage vide d’un jour de mars, c’est ce sentier enfin ouvert aux éléments dans sa solitude ensoleillée, c’est ce vide de mots, d’écrits, des cris, des choses fortuites et inutiles qui parfois noircissent le papier. La pause au fond, c’est la vie prise entre deux pointes, deux pointes d’envies, de saturations, deux sommets d’un monde qui court chaque jour un peu plus. A sa perte ? Non, c’est là une vision trop simpliste, le monde n’est jamais que ce que nous en faisons, que ce que nous en ferons. Voir la chute et la perte,  c’est voir le train partir devant nous en oubliant que nous sommes arrivés en retard sur le quai. La pause, c’est rester à quai, tout simplement, mais quel quai ? Quai des brumes, quai de lune, quai d’ici, de là, on se trouve tous un jour sur un quai, hésitant à monter en voiture, regardant passer les trains sans savoir. Sait-on jamais ?


La pause n’existe que parce ce blanc entre deux notes, entre deux temps d’occupation, la pause c’est ce silence qui s’en vient renforcer le mot, la note parce qu’elle laisse en suspens le sens, l’essence du sens. La pause, au fond, ça ne se raconte pas, ça se vit. Vraiment. Rien ne vaut la vie. Vraiment.  


Peint sot !


Le printemps approche,
Voici venu le temps de la peinture,
Sortez-vite vos pinceaux !
Et à ceux qui restent sots,
Sans vous offusquer, n’en n’ayez cure,
Sans couleurs la vie serait moche,

La peinture, c’est le pied,
Sinon pourquoi l’argot,
Noble langue populaire
Et ô combien tellement imagée
Qualifierait le pied de pinceau ?

De là à peindre avec les pieds,
Il n’y a qu’un pas…. Eh bé !

Qu’importe la façon de le tenir,
C’est le pinceau qui glisse et peint,
Avec force, timidité ou soupirs
C’est par lui que la toile se teint

Et si la toile ne suffit plus,
Le mur est là qui vous tend les bras.

Euh… Je savais déjà
Que les murs avaient des oreilles,
Mais si en plus ils ont des bras,
Ils n’ont qu’à se peindre eux-mêmes !

Il parait que c’est au pied du mur
Qu’on voit le maçon…
Qu’il peigne donc lui-même
Et retourne à ses oignons !

En plus, les oignons et les pieds,
Ça va parfois de pair,
Mais dans ces cas-là
C’est plutôt un enfer.
Voilà qui chauffe et brûle,
Je pose donc là ma plume
Et retourner à mes pinceaux.

Si le ciel peut attendre,
La peinture, elle, n’attend pas.




Sortie d'hiver

L’année avance, elle file, laissant sur place deux mois déjà, et dans cet hécatombe de jours disparus aux champs d’honneurs, s’en vient fièrement mars… et ça repart. Trop tard pour l’hiver dont l’entrée pourtant fut acclamée, les jours rallongent, les tempêtes ont beau tempêté (bien qu’une tempête tempêtant n’ait rien de beau) le combat du jour sur la nuit se gagne chaque jour un peu plus, la douceur du jour y retrouve du mordant et l’humeur des êtres bien de l’intensité. Désormais la vie s’extériorise un peu plus, et bien avant que la foule ne se presse sur ces chemins de sable, il est à présent l’heure de venir par ici respirer.

Ni rituel, ni fausse habitude, juste une nécessité, comment pouvait-il vivre sans cet air si puissamment iodé, comment pourrait-il se contenter d’une ou deux bouffées annuelles, non, désormais cet ailleurs était un ici, un essentiel, faut-il vivre  autrement, non, la vie s’équilibre toujours entre plusieurs pôles, un diamant ne brille que pas ses multiples facettes, cet ici en était une, essentielle certes, mais une. L’hiver est passé, il a rugit et vomi ses flots de bois, arraché les sables et bouger les rochers, la côte reprenait un air sauvage qui lui va si bien et à choisir, il préférait de loin cette image brute plutôt que celles des plages bondées aux odeurs âcres et sucrées des beignets et autres fritures d’un été à succès. Le monde. Personne. Plein. Vide. Subtil équilibre. Il n’y a pas d’antagonisme entre ces deux saisons, il y a deux facettes différentes mais tellement complémentaires, avoir la chance de vivre ici et de fréquenter cela était bel et bien une richesse. Pour l’heure, les pas étaient nonchalants, presque sans but, juste marcher, respirer, voir et reprendre contact avec le monde, ce monde de nature qui vient vous offrir en guise de bouquets des arbres arrachés on ne sait où. Quelques promeneurs cueillaient de ci, de là des morceaux de bois à la peau blanchie, futurs trésors pour de futurs bricolages sans doute tandis que des oiseaux froids rasaient les crêtes d’écumes à la recherche d’on ne sait quel autre trésor. Toute la subtilité de nos vies se résume ici : les trésors des uns ne sont pas les trésors des autres et si parfois comme ici chacun se complètent et s’oublient, il est des fois où les combats en découlent. « L’oiseau boit l’écume du jour, les hommes écument les bois du jour » inscrit-il dans un coin de sa tête, matière vivante rejoignant la matière cérébrale dans l’espoir de futurs jeux d’écritures… On a beau être en errance, on n’en oublie pas pour autant les instants d’écritures, ceux à venir dans l’avenir des fraiches soirées. Des aboiements le tirèrent de sa rêverie, reverrait-il sa verte prairie lui qui pour l’heure rêver sans bruit face aux tonitruantes vagues rongeant le sable d’une plage oubliée ? Les chiens aboient, la caravane passe, et elle avait maigre allure cette caravane-ci : trois chevaux promenant d’anonymes cavaliers au ras des vagues, voilà ce qui avait fait réagir un chien laisser trop libre qu’un maitre avait du mal à retenir fasse à ces équidés soudainement nerveux. Le partage des espaces publics présente parfois des frontières trop floues surtout en ces débuts d’années, malgré leurs similitudes de démarrage, faut-il interdire ou bien interdire d’interdire ?   Au fond, c’est là le prémices des jours plus chauds, les subtilités de la cohabitation entre bronzeurs et joueurs de raquettes, entre baigneurs et apprentis surfeurs, somme toute l’humanité se retrouve lorsqu’elle joint ses frontières. Encore une idée à noter dans un bout de matière grise, une image faisant le parallèle entre hiver et été, tout en se demandant ce qu’il préférait le plus ? « Ah oui, le printemps et l’automne, les jours y sont doux et la fréquentation pas démesurée, peut-être bien les meilleurs moments mais il n’empêche que profiter de chaque instant est encore ce qu’il y a de mieux » se dit-il. « Bientôt ».


Oui, bientôt. Il faut savoir aller au bout de ses rêves et vivre le maximum de la vie qui se présente car elle est unique et si rapide, et puis, nous n’avons jamais qu’une vie à la fois… Vivons !