les pins sont perdus

Une vie dans une maison, des étapes, des constructions, dans tous les sens du terme, des démolissions, dans tous les sens du terme aussi, des chantiers qui progressent à des vitesses différentes, pour des raisons différentes, c’est tout cela qui fait la particularité d’un chez soi, parce que d’abord, chez soi, c’est chez soi, une chose personnelle, loin des standards, des modes, des modèles aseptisés que délivrent les jolis magazines, les belles émissions de décoration qui pullulent sur les étagères des marchands de journaux tout comme sur les lignes des programmes de télévision, à des latitudes fort variées, du chic et cher, limite élitiste de France 5 au rouges flamboyant étalés à vitesse grand V et donc, réception de chantier la nuit, histoire de moins voir les défauts , de M6 quand ce n’est pas « comment je dissimule les défauts pour pas cher avant de vendre » méthode M6 encore…. Tout comme dans la vie, de chaque expérience, il y a toujours une leçon à prendre et à apprendre, la visualisation du résultat permet de se donner une idée et de bâtir son propre scénario en fonction de ses volumes, des ses meubles, de sa vie parce que là est la clé, une maison n’est pas un tableau ni même et je dirai même, ni surtout un musée. Une maison vit, et aide à vivre, à apaiser, à s’y relaxer, à s’y retrouver avec plaisir, à partager aussi bien un café qu’un repas, aussi bien les rires que les larmes, la maison est un abri pour bien des choses, une porte ouverte sur notre monde. Mais la maison n’est pas qu’intérieure, elle s’entoure d’un terrain qui compose lui aussi un tableau, une œuvre vivante qui grandit, vieillit et nécessite une maitrise autre que l’art du pinceau et de la colle à papier peint, surtout lorsqu’il s’agit d’arbres.

Un arbre, c’est comme tout être vivant, on trouve cela joli, adorable tout petit, puis soudain on se retrouve avec un géant qui nous embarrasse de part des contraintes générées, simplement parce qu’en le plantant, on a oublié de mesurer la taille de l’adulte. Tout comme si l’enfant grandissant et devenant adulte devait se contenter de son berceau pour dormir, de ses layettes pour s’habiller, l’arbre étouffe et envahit un espace qui ne lui était pas dévolu au premier abord. Une erreur de jeunesse, un piège, peu importe, il est devenu temps d’y remédier, avec tristesse car il est toujours douloureux de tronçonner ces poumons de nature, mais les contraintes techniques, les fils téléphoniques, même posés en servitude non consentie en travers de leur parcelle, les fils électriques, non enterrés lors des récents travaux de voiries m’obligent à couper dans les chairs des mes pins, eux que j’ai semer, vu naitre, vu s’étioler en différents vase pour tenir jusqu’au jour où je pourrai enfin les planter en pleine terre, eux que j’ai planter, puis élaguer, parce que trop proches, eux que j’ai humé de leurs bonnes essences de térébenthine, eux que j’ai maudit des tonnes d’aiguilles roussies parsemées sur un sol devenu herbicide, eux pour qui j’ai tremblé lors des tempêtes de 1999 et de 2009, mes enfants, voilà que je me résigne à la séparation, avec comme piste première de voir si dans ma pinède je ne pourrai tout de même sauver une tête ou deux. Ces pins-là, ils furent graines tout d’abord, pignons ramassées dans le massif de la Clape, lors des heures armissanaises, récolte d’abord gustative, puis expérimentale en mode germination et plantatoire, l’idée derrière la tête était de border l’allée de ma future maison de ces gardiens odorant et gracieux, tout comme en était bordée l’allée qui menait à la maison de mon meilleur ami de collège. Le temps a passé, ils ont grandi, je les ai transplantés de pot en pot, au gré des diamètres, avec des rejets, avec des survivances, et puis un jour du siècle dernier, je trouvais la maison, ma maison, le terrain qui pourrait enfin les accueillir. Dans un péché de gourmandise, c’est en bosquet qu’ils furent plantés, une future pinède constituant un fond de décor, un futur lieu de repas, de lecture, de détente, hélas trop proche de la route et des ses passages poussiéreux et bruyant pour vraiment en profiter. Hélas aussi, nos maisons sont desservies par ces lignes encombrantes et inesthétiques qui guide la fée électrique et les voies de la communication de pavillon en pavillon, longeant pour cela mon domaine, le coupant même par le raccourci de la pinède, tout comme autrefois je coupais par la pinède pour rejoindre Vinassan depuis Armissan, un raccourci de la mémoire qui revient en écho à l’heure d’écrire ces lignes. Les branches jouent avec les fils, l’accès devient difficile et la taille délicate, sans compter aussi, l’évacuation et le déblaiement du chantier. Sans compter aussi, les joies de la vie d’équilibriste, une main avec le sécateur élagueur ou pire la tronçonneuse perché à plus de 7 mètres du sol, sur une échelle dont on apprécie la légèreté lorsqu’il faut la porter au sol, moins lorsqu’elle ondule sous les barreaux gravit, sa tête glissant sur la branche gracile, car, la nature étant bien faite, les branches d’en hauts sont les plus fines, les plus souples, les plus légères et les moins aptes à supporter l’échelle, le bonhomme et autres accessoires, sans compter l’aide du vent se mettant à faire danser les cimes et rendant la tétanisation des muscles à un niveau quasi maximal, de quoi bien mesurer ses erreurs commises lors de la plantation, se manque de vision de ce que sera le futur. Mais l’heure n’est pas aux regrets, ni même à revivre le passé, juste à trancher dans le vif, à imaginer ce que demain sera, imaginer l’espace libéré, analyser si un survivant aura droit de résister au déboisement, les pins ont de fragiles racines, tressées en boules à leur pied qui font qu’ils ne résistent au tempête que par l’effet de masse, très peu en solitaire, un risque à admettre, à mesurer, à calculer jusque dans son point de chute éventuel. Au final, ce coin de fond de décor ombragé et peu utilisé pourrait devenir un espace verdoyant et ensoleillé donnant de la profondeur à l’avant scène, mais une chose est sûre, le passage d’un professionnel semble inéluctable, le chantier d’un seul ne fut pas de tout repos, ni même aisé, sans compter les risques éviter de très très peu. Là aussi, c’est une leçon, il faut savoir se mesurer aux combats de ses propres compétences, il est toujours regrettable de regretter après l’accident plutôt que de ne pas aller le provoquer inconsciemment, parce qu’en toute inconscience.

C’est aussi une page qui se tourne, un changement de décor qui aidera aussi à changer de vie, une appropriation différente de l’espace, une forme aussi de réconciliation avec une espace qui ne fut que trop souvent un espace de passage, une forme d’enracinement ? Qui sait….


Frustation

Les temps changent, les modes changent, voilà désormais que le stress a disparu, désormais d’après le baromètre de nos dirigeants et de nos psychologues, le mal chronique dont souffre les gens s’appelle frustration. Qu’importe le contexte, on vous rabâche ce terme-là. Tantôt bouclier pour éviter d’affronter la réalité d’une mauvaise gouvernance, tantôt bouquet de roses à épines en guise d’explication sur le mal être qui enlise les entreprises, la frustration est totale, le stress à déserté voilà qui devient frustrant. Etonnant ces mots, ces sens, ces désordres qui vont et qui viennent, tout comme cette mode du coaching. Nos chefs sont désormais coachés, non pour être meilleurs, enfin, vus d’en bas, après tout ce ne sont pas des athlètes en quête de record, non plutôt de ce long travail de sape qui consiste à gommer les aspérités et les traits saillants de caractères, ponçage et polissage d’où ils sortiront lisses et brillants, plus polis, plus beaux vus d’en haut. Dans le grand jeu des « on ne dit pas… » les cours sont pleines et les leaders sont étrillés jusqu’au plus profond de leurs vocabulaires. Et oui, désormais, on n’est dans le moule ou n’est plus. Adieu caractère, créativité, bonjour la lobotomisation de masse, le doigt sur la couture du pantalon tous bien droits, bien alignés, bientôt nous aurons droit aux chants de l’armée rouge, si ce n’est pas le chant du cygne d’une société qui finit par disparaitre à force d’être devenue trop transparente. Corvéable à merci, convoqué pour dire oui, merci, telles devraient être les annonces des futures embauches de nos dirigeants. Dans la série des formations, nous avons : « j’ai l’air de t’écouter mais je suis en train de compter ma prochaine rallonge », « comment dire vous avez raison, mais nos contraintes budgétaires nous conduisent à d’autres choix », « je suis heureux parce que grâce à mon travail nos produits se vendent bien dans le monde », ….

Malaise ? Non ! Bien être ! Imaginez-vous, tout en haut de la pyramide, non, pas celle d’où 4 siècles d’histoire vous contemplent, faudrait pas non plus vous prendre pour Napoléon Bonaparte, non plus celle en verre qui embellit ou enlaidit la cour du Louvre, à chacun ses égouts, non, la pyramide, celle du pouvoir, de l’encadrement, celle de Maslow, imaginez comme il est doux de voir tous ces petits chefs venir brouter les miettes jetées à leurs pieds, comme ils sont beaux ces doux sans cervelles, prêt à se mettre en pièce pour attirer la complaisance de leur chef, décrocher un sourire et recevoir son sussucre…. Pendant ce temps-là ? Et bien il y a deux formes de frustrations, vous voyez, on y vient : les frustrés de ne plus pouvoir débattre véhément avec des chefs devenus aussi plats et insipides que des galets, propres à ricocher sur les problèmes et les conflits pour tenter de gagner l’autre rive, sans comprendre que les galets rebondissent sur l’onde mais finissent toujours par couler, et puis, il y a les frustrés de ne plus rien comprendre à cette société qui s’encrasse et s’enlise, de ces managers qui restent indéfiniment dans des postes qui auraient tant besoin de sang neuf, et il y a encore les frustrés de ne pouvoir être frustré puisque là est la mode. Cela fait trois formes ? Ah ? Zut ! L’encre est sèche et je ne peux corriger. Dommage, n’en soyez pas frustré pour autant. Chaque époque a son mal, tout comme Jean-Paul Gauthier eut le sien, guettons donc les prochaines maladies, après tout, nous avons vaincu le stress par la passivité, nous bannirons la frustration par…. Non mais ! Vous ne croyez pas que j’allais délivrer là l’ordonnance du vaccin, non ? Patience, ouvrons l’œil et restons critique, nuancé pour mieux pénétrer les rouages à lubrifier, le jour viendra bientôt…..

Un dernier point : Toute ressemblance avec des sociétés, des personnes, des hiérarchies connues ou semblant être connues ne seraient que pure coïncidence ou presque, après tout, il y e na bien qui gagne au loto, non ?