Eloge du non

Comprendre hier, c’est écrire demain. Voilà, le sujet est lancé, vous avez deux heures pour plancher sur le sujet et rendre votre copie. Sujet sérieux, mais l’est-on vraiment ou letton, vraiment ou bien encore laiton, vraiment ? C’est quand même étranges que les doigts courent ainsi sur les touches juste excités par l’agitation de quelques neurones, jongleur de mots toujours, sourire aux lèvres et aux doigts, non pas pour fuir le débat ni le sujet, juste que là n’est pas le rôle ni l’objet de ce blog. Non. Ecrire, oui, disserter, non. D’ailleurs, comment peut-on dire que le passé est passé, le futur bien futur et que seul le présent est un présent du présent ? S’il n’y avait eu hier, il n’y aurait pas aujourd’hui, et demain serait à venir toujours et éternellement. Chaque temps a sa place, son temps, juste qu’ils sont à prendre dans leur temps, pas à contre temps. Hier ne se vivait qu’hier, aujourd’hui est présent. On construit toujours sur les fondations faites précédemment, on dresse des murs en projetant le toit qui viendra les abriter, simple parcours logique en étapes successives, chronologie à respecter. Alors voilà, c’est comme ça, même si hier est mort, c’est quand même grâce à lui que nous sommes et que nous sommes qui nous sommes aujourd’hui. Aucune nostalgie, aucun regret, c’est aujourd’hui que je vis, que je suis, des leçons du passé sont restés les enseignements, et le ciel est bleu, bien plus bleu que les heures les moins grises, goûtons aux charmes du moment, osons vivre et pire, vivons.

Nous sommes tous de passage, certains plus que d’autres, certains passeront plus de temps, d’autres moins mais la règle de base est la même, passagers, locataires temporaires et non propriétaires, il n’y a pas de place pour s’attarder sur hier, ni à rêver de demain, vivons nos vies plutôt de les rêver. Le temps bat régulier, ce n’est pas notre combat, juste le sien, nous, poussières en mouvement, nous volons vers nos vies sans parfois les comprendre, comme si elles nous échappaient, bien que nous en soyons le capitaine, le seul maitre à bord, celui qui doit savoir dire oui ou…non. Et c’est là que le bat blesse et non que le bas blesse, ou diantre serait l’élégance, les fardeaux seuls usent l’existence, raison de plus de s’en alléger. Savoir dire non, c’est accepter de se dire oui à soi, c’est s’autoriser à choisir plutôt qu’à faire des non-choix. C’est aussi beau et aussi fort qu’un « oui », un « non », et même plus beau parce que plus rare, si rare, trop rare. Oh bien sûr, il ne s’agit pas de dire non à tout bout de champ, non, comme en toute chose, de trop servir elle s’use, diminue et passe inaperçue, il ne faudrait pas par la suite se mettre à apprendre à dire oui pour compenser. Dire non. Facile trouvez-vous ? Et bien essayez ! Non ? Ah ! voilà qui soudain parait moins docile, une forme de refus dans la bouche, une gorge qui se serre, une salive aux abonnés absents, des cordes vocales paralysées, inertes, immobiles un son qui ne sort pas, un oui qui en profite pour se faufiler sous divers formes d’emprunts, « je vais voir », « ok, je te dis ça », « pourquoi pas » et tant d’autres que le malin prend plaisir à user en travestissement de la vérité, celle toute vraie qui peine à sortir des neurones, celles qui fera naitre les regrets.

NON, N, O, N, trois lettres pour beaucoup d’effet. L’assurance de prendre assurance de soi, l’assurance aussi de grandir dans l’estime de l’autre, parce qu’après la sortie de l’asservissement contrôlé que trop de béni oui-oui on lentement mais surement tissée, une cage en fil d’acier, solide au plus haut point mais pas au assaut de non affirmativement posé. Parce qu’à l’heure de faire des choix, le non est aussi fort sinon plus que le oui, et quand bien même il intrigue, cela aiguise l’appétit, donne l’envie de connaitre et d’aller plus loin, bien plus qu’un oui peu générateur de débat et si débattre était enlever le bat ? S’alléger d’un poids en le laissant s’échapper sous forme de mots plutôt que de maux ? Bien malin alors qui y prendrait de la peine, au diable l’avarice des échanges, la clause libératoire devient oratoire, loin d’une joute, elle lèvera les doutes, sans doute, et il n’y a pas à dire non, non ? bon, faudrait savoir, doit-on dire non ou non ? Juste que tout reste toujours à consommer avec modération, le vin comme le non, le oui comme le sel, trois lettres qui finiraient par peser beaucoup si vous n’y allez pas avec le dos de la cuillère, gardez toujours en tête la grâce d’une écuyère sur son pur-sang, légère et virevoltante, elle mène pourtant d’une main de fer son fier alezan. C’est cela la vie, légère, virevoltante, nécessitant une main de fer enserrant les deux rênes, celui du « oui » comme celui du « non », votre direction, votre chemin de vie vous appartient, alors choisissez. C’est simple, non ? En tout cas, il n’y a pas de mal à essayer…..

La douceur du temps

La douceur du temps, peut-être parce que nous sortons d’une longue période de froid, semble être un printemps déjà là, et même si le vent reste refroidi par les neiges pyrénéennes, profiter des doux rayons du soleil fait du bien. Des jours qui rallongent, la douce lumière, autant de motivation aux envies de sortir de chez soi, c’est aussi cela le printemps, l’émergence de la vie, la renaissance ou plutôt, la sortie de la torpeur d’une trop longue hibernation, hibernation qui chez l’homme dure parfois de très longues années…. Et oui, on vit, on s’enferme dans une forme de vie pour ne plus en bouger, pour ne plus en bouger, jusqu’au jour où les parois de la caverne se brise et le soleil brûle les yeux. C’est à la fois fort et fragile une coquille, on s’y croit à l’abri, on s’y repose à en oublier le temps qui passe et on se trouve fort dépourvu lorsque la brise fut venue…. Jeu de mots bien sur, c’est plutôt la brisure, ou mieux dans certains cas, on parle de rupture. Ces vies en pas de deux qui deviennent des pas hésitants sur la corde raide de l’existence, cette sortie de chrysalide où certes, la chenille devient papillon, mais à cet instant, les ailes sont des étrangères, des morceaux fragiles qui tirent sur le corps, déséquilibre par simple déplacement du centre de gravité, jusqu’à accepter ce changement, jusqu’à mesurer combien rien ne gravite autour que ce qu’on ne croit voir. Et le papillon mesure ses forces nouvelles, il apprend à remuer ces ailes, à se les approprier pour enfin s’en servir et partir s’enivrer de cette vie en trois dimensions en oubliant bien vite, cette première partie de l’existence passée à ramper.

Nous sommes tous des papillons, seule la durée de notre vie d’avant transformation diffère, rapide pour certains, lentes voire même jamais pour d’autres, sans qu’il n’y ait de bien ou de mal à cela. Il est des êtres parfaitement adaptés et parfaitement bien dans leur vie purement terrestre, il en est d’autres bienheureux de découvrir le monde d’en haut, à un moment donné de leur existence, parce que peut-être celle d’en bas fut sans éclat ou bien encore trop parsemée d’éclat. Des hauts et des bas, c’est cela aussi la vie. Des hauts qui font des bas, des bas qui montent haut, montagnes russes de l’existence, plaisir du présent, hier s’enfuit, hier s’en fut, place à la vie, celle d’aujourd’hui, soleil ou pas, neige ou pas, pluie ou pas, qu’importe le temps c’est aujourd’hui qu’on vit. Vivons, portons haut les couleurs de notre vie, soyons nous, cueillons nos joies dans chaque lumière, semons ces graines de rires, à coup de sourire, arrosons les de dialogues, nourrissons-les d’échanges vraies, parce que la seule vérité est bien d’être soi, d’être vivant et de sourire à la vie. Ce n’est pas par des en bas que l’on insuffle la lumière, non c’est le ciel, le soleil, celui que vous mettrez dans vos mots, dans vos yeux, dans vos rires qui viendra illuminer la vie des êtres autour. En bas, ce sont les racines, liens invisibles sous nos pieds qui s’en viennent canaliser les énergies reçues pour qu’elles puissent circuler librement, de haut en bas, de la lumière vers les ténèbres, du ciel vers la terre. Oui, nous sommes terriens et humains, oui nous appartenons à cet amas de poussière perdu dans l’univers, cette planète Terre qui elle ne nous appartient pas. Oui nous sommes de passage, parfois même de repassage, (celle-ci, je ne pouvais la louper), transition ici, mais une vie à part entière. Et oui, nous sommes élément d’une communauté, ce microcosme dont les durées de vies sont différentes, les dates de venues aussi et les dates de départs toujours émouvantes. On a tous des êtres chers qui ne sont plus, on a tous des êtres chers qui sont, mouvance continue, agitation permanente, comme les grains de sable dans le sablier qui s’écoulent, lentement mais surement.

C’est joli un papillon, il semble hésitant dans son vol, peut-être trop léger pour échapper aux courants d’air, peut-être aussi que voler de ses propres ailes nécessite des forces qu’il n’est pas toujours facile d’alimenter en continu, mais il vole, il se pose parfois, fleur parmi les fleurs, s’abreuvant de douceur, reprenant des forces pour reprendre son vol qui n’est pas une course, il n’y a pas d’accélération subite, juste un vol à l’allure régulière, une belle allure. Etonnant comme les mots diffèrent de sens selon les utilisation, non ? Qu’ont en commun la belle allure du papillon avec une voiture allant à belle allure ? Que celui ou celle qui répond le pare-brise sorte immédiatement ! Non mais ! Imaginez un peu, si vous étiez papillon. Laissez votre esprit vagabonder dans la campagne, imaginez-vous prendre de la hauteur, voir plus loin que l’odorant genêt qui vous masque la vue d’hominidé, juste parce qu’en quelques battements d’ailes vous vous êtes élevé. Vous voyez ce vieux muret en pierres sèches, seul vestige de l’ancienne remise ? Vous sentez par-dessus l’odeur acre et prenante des genêts éclatants, la senteur fruitée du volubile chèvrefeuille sauvage ? Les cistes aux fleurs froissées et sans odeur éclairent votre route, le thym odorant illumine sont vert de gris de fines tâches blanches, mauves, et de rares géraniums botanique intrigueront bientôt les premiers marcheurs. Voila, respirez, et puis lentement, reprenez vos esprits, ouvrez vos yeux et secouez vos membres endoloris par le vol au cœur du maquis. Quelques secondes de bien être, une phase de relaxation, une respiration et une pause au cœur de la vie, parce que la vraie vie est ainsi, des choses incontournables mais toujours la place pour s’aérer l’esprit et mieux encore, pour le faire partager. C’est léger un papillon, tout comme nos vies, ne nous appesantissons pas sur ce qui est déjà lourd, prenons conscience que nos ailes nous appartiennent et qu’il ne tient qu’à nous de nous en servir pour nous élever et continuer à grandir. Toujours.

Carnaval

Il y a dans l’air ce petit plus qui donne le peps, ce petit plus qui au sortir des jours trop courts de l’hiver, au sortir des jours trop froids de l’hiver vient titiller les êtres, redonner un peu de vigueur et rendre festif ces jours pas encore de printemps. C’est peut-être pour cela que carnaval est là, blotti entre quelques dates du calendrier, plus tout à fait ne hiver, pas encore au printemps, mais déjà des fourmis dans les membres et l’envie de s’en aller fêter ces jours qui commencent à durer, ces nuits qui commencent à pâlir. Et comme le soleil traine un peu ses rayons encore trop horizontaux pour réchauffer les vents froids, alors partons faire la fête, explosion de couleurs, de bruits, de rires et de musiques pour vaincre le pâle hiver qui hier encore nous mordait, pour se défouler, se dérouiller le corps et s’étire tout au long des rues des cités comme un chat au sortir de sa trop longue sieste. C’est bien cela, après des semaines de torpeurs à peine ponctuées par les fêtes de nativités et de début d’an, place au réveil des marmottes, à la montée de la sève, venant parcourir ces rameaux de vies endormis pour y gonfler les bourgeons et faire exploser les fleurs d’un printemps tout proche.

Carnaval. Joie parmi les joies de l’enfance, souvenirs à la fois sucrés et festifs, déguisements sortis des vieilles malles du grenier après avoir salivé devant les panoplies toutes prêtes dans les magasins de jouets, ces grands magasins du centre ville, seules boutiques d’alors où l’on trouvait ces graines de rêves qui s’en vont germer dans le cerveau des enfants pendant de longues et longues nuits de ces vies où le temps ne sait pas ralentir. La plus belle des richesses reste l’imagination, cette source qui abreuve la créativité, qu’elle soit réelle, ou bien songeuse, elle reste une maitresse tout au long de notre vie, pour peu qu’on s’en serve dans la créativité, source des arts, toujours. Un vieux chapeau défraichi, un pantalon trop grand, une chemise immense et nous voilà Robinson Crusöe, ou bien épouvantail ou bien encore clochard, paré au défilé, sinon ce baril de lessive, du temps où ils étaient en carton, les barils métalliques eux servant de corbeilles à papier, ce baril de lessive donc, à coup de ciseaux, de colle et de papier d’aluminium devenait casque de cosmonaute, robot du temps de la quatrième dimension des frères Bogdanov en noir et blanc sur la télé familiale, masque à pas cher respectant le modeste budget mais grande joie et plaisir qui me donne encore des frissons de bonheur à l’écriture de ces souvenirs-ci. Sucré, par les merveilles, les oreillettes et autres beignets, je me souvient aussi de ces formes en aluminium, étoile, rond crénelé, carré, fixés au bout d’une tige métallique et qu’on trempait dans la pâte légère et parfumée au jus de citron, d’orange et surtout aux râpures de zestes d’agrumes, avant de leurs apprendre à nager dans l’huile bouillante d’une marmite au fond bien culotté par des années d’expérience aux fourneaux. Un temps que la chimie n’avait pas encore envahie, parfums naturels et fruits non traités, pâtisseries maison et non industrielles, œufs des poules de notre poulailler dont le jaune était bien plus orange que le pale beige d’aujourd’hui. Tout était odeur, couleur, parfums, saveurs, plaisirs. Sans oublier non plus les apprentis maquilleurs que nous étions : bouchons de lièges brulés à la flamme pour se noircir le visage, rouge à lèvre chipé dans la salle de bain, tentative d’aquarelle ou de gouache sur peau, il est vrai qu’en ces époques, notre cuir était du genre costaud.

C’est cela le carnaval, du sucré, de la douceur, des odeurs, des saveurs, du festif, de la couleur, des rires, des bonheurs, et jusque dans la destruction par les flammes du roi carnaval, et même si après nous ne comprenions pas toujours cette période de carême où les bonbons étaient bannis, quand bien même nos parents ne nous faisaient pas faire pitance, mais les grands-parents nous racontaient toujours leur époque plus respectueuse de ces diktats, encore qu’en prenant conscience aujourd’hui, c’était bien toute leur vie qui fut carême, une alimentation plus pauvre que celle de nos jours de diète actuels. Alors, oui, fêtons ce printemps pas encore là, colorons nos vies, libérons nos esprits d’une morosité entretenue, et même si nous ne nous déguisons plus, profitons des défilés, il y en a partout et sur plusieurs dates, des grands et des petits, ceux des écoles ayant ma préférence, non pas les écoles de samba de Rio de Janeiro, non, plutôt voir ces bouts de choux défiler hésitant, parés de somptueuses couleurs dans des tenues que des mamans couturières ont patiemment assemblé, parfois même des armures de cartons joliment peintes, avouez que c’est tout de même plutôt attendrissant. Et puis, les bonbons, les confettis, sont là pour rappeler que c’est la fête, les derniers jours de pitance grasse, mardi gras avant de descendre en mercredi des cendres, et même si les défilés sont parfois anti datés, ne boudant pas notre plaisir, courront vite s’abreuver à ces sources de joies, joies simples, les plus belles, toujours.

Plaisirs d'hiver

Enfin le retour aux joies hivernales, et avec la pratique des raquettes qui plus est dans de belles conditions, quasi le rêve, un cocktail au savant mélange : un bel endroit, une belle neige, un bel azur. Ajoutons-y un groupe sympa, des franches rigolades et un abandon sans limite au plaisir de vivre et de vivre un bon moment. Qu’il est doux de prendre ainsi du bon temps dans la joie de l’effort, les bienfaits du sport loin des grincheux, au cœur de somptueux paysages, qu’il est bon de cueillir ses énergies à la source même de la vie. Il est encore dans nos belles vallées pyrénéennes de jolis petits villages, de gros bourg, des hameaux, des petites villes qui fleurent bon le vrai, le vécu, le respect, l’amitié, la communauté, tout en gardant fièrement et non pas jalousement, leur cachet, qui affiche la pierre de ses habitats, qui dresse ses toits plus hauts, plus pointus, qui les limites de pignons à pas d’oiseaux, qui se pare d’une grande en équerre pour se protéger des vents dominants, chacun, chacune a son histoire, son caractère, ses traits bien édictés et bien affichés. C’est par là que commence les bonheurs d’une randonnée, qu’elle soit pédestre ou en raquettes, apprendre à lire l’histoire du paysage au fur et à mesure de son élévation nécessite certes d’ouvrir les yeux, mais plus encore, d’ouvrir le cœur. Voir, comprendre, chercher à comprendre, apprendre, écouter, regarder, savourer. Quelle que soit la saison, l’habitat, sa disposition le long des courbes de terrains, serré autour du clocher, sa construction en adret, c'est-à-dire sur le versant ensoleillé, celui qu’ici nous nommons « la soulane » par opposition à l’ubac nommé ici « l’ombrée ». Sans chauvinisme aucun (quoique) avouez qu’il est plus clair et plus logique de parler de « soulane » et « d’ombrée » plutôt que de parler « d’ubac » et « d’adret » termes peu bucoliques et faiblement représentatifs du moins l’occitan que je suis. Au-delà des mots, c’est le dessin de ces hameaux qui ponctuent la course de nos yeux, et quelque part, peut servir à guider notre orientation, les anciens avaient ce sens pratique, ce bon sens même pourrait-on dire, qui sans ordinateur savait placer l’habitat là où le chauffage serait tout naturellement effectué par le soleil, dans une disposition permettant de moins subir les affres des vents froids, tout en tournant les grosses pierres pour qu’elles se dorent bien au soleil et restituent la douce chaleur dans l’humble demeure. Nature et naturelle, la vie d’alors se résument au nécessaire dans une communauté d’idée, un partage de moyen, un communauté de vie, et ce sont ces forces-là qui ont forgé à la fois les caractères des hommes mais aussi ceux des lieux. Et justement, c’est ce caractère qu’il me plait à trouver, à parcourir, à découvrir à chacune de mes escapades, puis à le faire partager. Ce n’est donc pas l’exploit sportif qui prime, cela n’a jamais été le cas, mais bel et bien d’être humain et de mesurer la force, la magie, les bonheurs et les joies simples de notre belle planète.

Aujourd’hui, c’est tout blanc, et malgré ce nappage peuplé de milliers d’étoiles qui viennent scintiller sous le soleil jusqu’à nous en éblouir, let même si les toits sont blanc, si les cheminées s’époumonent en volutes bleutées, même si peu d’habitants s’affairent sur leur pas de porte, ce sont les mêmes repères, les mêmes accroches de lumière sur la page blanche de ces paysages d’hiver. Qu’il est agréable de gravir la pente, de quitter la civilisation de la petite station familiale ou glissent les adeptes du ski de fond, qu’il est magique de traverser la forêt de sapin en se rêvant explorateur du grand nord canadien, qu’il est bon de rire et de plaisanter dans la marche, parce que parler veut dire que le souffle est à bon régime et donc l’effort à bon dosage, parce que rire est le propre de l’homme et qu’il est bon d’être vivant de même qu’il est bon d’être entouré de partager, de discuter, d’échanger, d’écouter et d’apprendre, de dire et d’informer, parce que chacun de nous n’est qu’un maillon d’une grande chaine d’information, et parce que même si aujourd’hui nos outils de communications sont savant, rapides et puissant, ils en restent quand même impersonnel, froids et distants. Dans toute l’humanité, la longue tradition orale a été la grande courroie de transmission des savoirs, aujourd’hui comme hier, n’oublions pas cela. Parler dans notre monde réel, c’est aussi se donner les moyens de guetter le signe d’une incompréhension, une tension dans le regard, un étonnement, et donc de modifier les phrases, d’adapter le vocabulaire, de répéter différemment la même idée. Emetteur et receveur, et non plus émetteur simple. Voir ce qui n’est pas vu, savoir qu’entre deux personnes la référence commune n’est pas entière, que ce mot-ci prend le sens de ce mot-là lorsqu’il est reçu par notre interlocuteur. S’abreuver de réalité, c’est s’enrichir de nos différences, c’est s’offrir la jouissance d’apprendre, c’est se donner les moyens de trouver le terrain d’entente qui permettra le débat d’idée. Et oui, ça va loin la raquette, tout en gravissant les pentes, nous escaladons notre bien-être, pour peu qu’on ait envie de grandir, d’offrir et d’être. Et quand tout cela se rythme au défilé des paysages, quand la course lente du soleil s’en vient modifier sa lumière comme pour mieux nous enchanter, c’est tout de suite une très belle journée qui se dessine, quand bien même on ne sait pas dessiner. Alors, il y a ce boitier de métal, ce petit clic qui vient stocker sur la carte mémoire ces trésors de nature, ces personnages d’un jour, et en complément, la mémoire y associe les rires, les intonations de voix, les phrases sonores et comiques sans oublier les situations cocasses que parfois la chute provoque. Remarquez, une chute pour une histoire, c’est tout de même naturel, non ? Et d’ailleurs, en parlant de chute, nous voilà déjà presque à la fin. Presque ? Oui, la fin est proche, le bord de la page s’approche tel un précipice vers lequel glissent les idées, il est temps de stopper la course sous peine de voir les idées disparaitre, et puis zut ! C’est la fin.

Jeûne est-ce?

Dernière période grasse, voici que pointe à l’horizon la période de carême celle qui succède au gras, dernier jour mardi, mardi gras et donc festif comme pour mieux entrer en disette en faisant des réserves au préalable. Au-delà du religieux, cette période vieille comme le monde, au moins celui de la chrétienté, n’est que sujet à la mode dans tous les magasines du printemps à venir : faisons régime, nettoyons notre corps, débarrassons nous du surplus pour arriver le cœur léger à l’été. Mais avant la religion, il y avait déjà l’homme, le païen, celui qui vivait dans ses propres limites, ses propres contraintes, sans avoir au-dessus ce conseil de bien-pensant pour dire « ceci est bien » ou « ceci est mal » pour promettre et pour punir, étrange équilibre où la punition est ici et la récompense au-delà. Dans ce temps là, avant le carême religieux, l’homme connaissait déjà le festif et la diète au gré des chasses, au grés des saisons dictant les cueillettes, au gré de l’union comme de la solitude, et notre espèce évolua et prospéra avec et par ses propres règles. Des années d’éducation religieuse, des siècles d’endoctrinement nous ont ainsi forgé, génération après génération, la tradition orale de parents à parents, les livres après les livres, l’école après l’école, chaque couche, chaque étape est une pierre ajoutée au mur de nos carcans, ceux sans qui nous ne serions pas nous tout en n’étant pas nous-mêmes. Comprendre, apprendre, mesurer, prendre conscience et s’éveiller, se réveiller de cette torpeur, bien sûr la religion n’assure plus son matraquage faute d’écoute béate et de présence massive, mais il faudra encore du temps pour que l’homme redevienne homme, pour que la femme redevienne femme. Bien sûr, on cherche pourquoi la chandeleur apporte les crêpes, tout en s’appelant « présentation » dans le calendrier, bien sûr on songe aux bugnes, aux merveilles, aux oreillettes de mardi gras et pourquoi les cendres s’en suivent avant d’aller en carême, tout comme on pourrait s’interroger pourquoi le carême et pourquoi le ramadan, tout comme on doit s’interroger sur tout, non pas pour remettre en cause systématiquement tout mais parce que des questions naissent les réponses, parce qu’aussi de la critique nait l’intérêt et la connaissance.

Je n’ai pas de réponse, du moins pas à fournir ici, pas plus que tomber dans la technicité de préceptes religieux qui de toute façon ne seraient que sources de débats et d’opposition, quelques questions parmi d’autres juste réveillées par la proximité de date et la réflexion autour du carnaval, pourquoi et comment, au-delà des cultures, bien avant les traditions, d’où viennent ces déguisements et ces besoins de se déguiser, cette fête et cette communion, ce procès d’intention qui finit en bûcher pour le roi carnaval. Des mots naissent les mots, pour peu qu’on sache jongler avec, non pour les mélanger mais pour mieux les ordonner, le sens des mots dépend du sens dans lequel la phrase se construit, exercice délicat et périlleux, mais un bonheur avant tout, un plaisir surtout. Alors oui, de la chandeleur j’ai l’odeur des crêpes, les images d’enfance aux saveurs sucrées des confitures maison, la pate universelle à tartiner les noisettes n’étant pas forcement présente dans nos placards de famille modeste, ce qui me fait mesurer aussi, combien l’enfance est aveugle car elle ne voit pas l’assiette plutôt maigre des parents à peine cachée par l’assiette bien garnie des enfants, et oui, j’ai la joie des souvenirs d’apprenti pâtissier autoriser à découper le ruban de pate à l’aide d’une roulette crantée de plastique rouge afin de produire des formes rigolotes, qui deviendront de gouteuses oreillettes finement saupoudrées de sucre, mes préférés étaient ces cercles emportées dans la pate plus épaisse à l’aide d’un tout bête verre à moutarde, sûrement fort surpris de se voir le cul par-dessus tête à mordre la pate pour en ôter une future merveille que d’aucuns nomment bugnes par là, au-delà de la ville frontière entre nord et sud, j’ai bien entendu quasi désigné Montauban. Et bien sûr j’ai souvenir de ces masques de plastique à l’odeur de…plastique, personnage de bandes dessinées, ou héros aujourd’hui désuet, tout comme j’ai souvenir de cet élastique à passer derrière la tête, qui un jour de faiblesse, tirant un peu trop sur la corde, arrachait l’agrafe du plastique quand il ne rompait pas, tout comme je me souviens de l’agrafeuse familiale et ses recharges cuivrées dans une boite violette aux initiales BB, bien avant Brigitte, d’ailleurs BB, n’est ce pas pour Bien avant Brigitte ? tout comme je me rappelle le tiroir secret du meuble de couture où dormait le précieux élastique pour raccommoder tout seul le précieux compagnon de jeux parfois solitaire mais peuplés de bien d’êtres imaginaires.

Il n’y a pas que Proust qui aime les madeleines, et même si mes madeleines à moi sont crêpes, merveilles ou oreillettes, elles gardent profondément ancrées le souvenir d’une modeste demeure, de ma mère bien sûr et de tant sucré qu’il serait difficile de jeûner et d’y résister. Jeûner ? Oui, c’est nécessaire mais plutôt qu’un carême je préfère une distribution quasi à la source, mieux vaut donc pour moi, jeûner entre les repas.

Complément

Que dire de plus ? Il y a tant à dire, après le sujet, le verbe, après le verbe, le complément, c’est là le schéma classique, un lien direct même avec l’indirect, et puis, il y a toujours matière à compléter, c’est bien là le rôle du complément. Dire « je vais » ne nous mène nulle part, d’ailleurs, on ne sait même pas s’il s’agit d’un déplacement ou bien s’il s’agit d’un état, et même dans ce cas, on attend, on espère un « bien » qui sonnerait mieux que « mal » encore que l’accumulation de bien ne doit pas être un but en soi, ce qui somme toute ne serait pas plus mal. Et si je dis, jeudi ou bien un autre jour, si je dis « je vais à la gare » nous voilà déjà un peu plus fixé, quoique, des gares il y en a ! Gare de trains, souvent sises le long des rails, ce qui en soit est un détail pratique et quoique comme le fit remarquer mon maitre Alphonse Allais « on ne sait plus si les rails passent là parce qu’il y avait la gare ou bien si la gare fut mise là parce qu’il y avait des rails » encore que parfois les rails déraillent. Enfin non, plutôt les trains, et encore pas tous, heureusement pour les gares qui sont juste à côté. Mais revenons à nos moutons, quoique des moutons prenant le train, nous voilà bien avancé, mais là est le sujet, enfin, celui-là. Donc la gare, oui, mais quelle gare ? Celle de Perpignan est au centre du monde, le grand Salvator Dali le fit ainsi, pourtant ce n’est point celle que j’affectionne le plus et d’ailleurs, même si je suis amateur de train, ferrovipathe dans l’âme, qui dit qu’il s’agit de gare pour les trains ? D’ailleurs, les gares sont-elles faites pour les trains ou bien pour les voyageurs ? A moins que ça ne soit pour que les deux s’y rencontrent ? Plutôt de biais, ça fait moins mal. Mais à force de biaiser on finit par se défiler et ne jamais monter dans le bon wagon, ou pire, rester à quai. Du coup, ben le complément n’est pas de grande utilité, puisqu’on ne sait toujours pas sur quel quai nous sommes ni encore dans quelle gare… Je sens que je déraille.

Et si la gare était une gare de téléphérique? Ah là, de suite, nous prendrions de la hauteur, de quoi élever les débats, prendre l’air et cueillir l’oxygène dans ses plus hautes puretés. Question précision, nous ne voilà pas très précis, sur quelle montagne, à quelle altitude et où ? Là le complément se trouve bien démuni lorsque la bise fut venue. La bise ? Ben oui, si je vais à la gare, je vous dis au revoir, d’abord parce que je pars, et puis et surtout parce que je souhaite vous revoir, bien que certains aux revoir sonnent comme des adieux, encore que dire a dieu c’est se donner rendez vous quelque part et donc souhaiter se revoir…. Allez donc comprendre ! Me voilà donc avec un complément qui me perd, et dans le lieu, et dans l’espace et dans les cieux, bigre ! Sinon, je vais…. Mais où ? Qu’importe le lieu, tout est matière à apprendre, source de savoir, leçon de chose pour leçon de vie. Alors tout va bien, et je vais bien. Sujet, verbe, complément, pilepoil ça rentre, ça s’emboite bien, le plaisir est là, vive la vie, les mots, les jongleries, non ?

Et si la gare était la gare de péage d’une autoroute ? Ah là, déjà, voilà bien moins d’oxygène, et bien plus de passages, sans parler de la manne financière dûment collectée à chaque levée de barrière…. Beaucoup moins poétique, non, je ne suis attiré par cela, je m’en vais à Lleures, village catalan au cœur de nos tendres et belles Pyrénées, à moins que je parte ailleurs ? De toute façon, je vais….

Directement ou indirectement, tout complément n’est pas un supplément mais un guide de sens et de bon sens lorsque la phrase se dessine, après tout, on a toujours besoin d’un guide pour prendre la bonne orientation, non ? Gare ou pas gare, sinon, gare aux mots, petits ou gros, ils construisent ou détruisent le dialogue, selon le sens mis, le sens pris, le sens offert, le sens perçu, le sens reçu, le sens compris voire le non-sens. Alors parlons, de vive voix et de bon sens, prenons plaisir à vivre nos sens, soyons nous et tout tombe sous le sens, non ?

Sujet, verbe, complément…. Complétement, verbalement assujetti à la prose qui propose le sens de quelques pensées, plaisir des mots, plaisir d’écrire, mot à mot ainsi se construisent les phrases et les textes, ceux-ci comme ceux-là…

Verbe

Il n’y a rien d’étrange sur cette terre à avoir le verbe haut. Ce pays est venté, non pas temps par les moulins qui ponctuent les collines, non, je crois même que les moulins furent implantés après, histoire de s’en aller dérider leurs ailes et leurs toiles aux vents légers du lauragais, histoire aussi de braver les colère d’autan, ce joli vent d’ici qui emportent à la fois les poussières des terres nourricières jusque dans le cœur des maisons et qui emportent aussi la raison de ceux qui surement ne sont pas nés ici. Et oui, le verbe est haut, sonore et rocailleux, chantant et souple, coléreux sans colère, râleur sans raison, il y use un vocabulaire souvent poétique que d’autres prendraient pour des insultes. Par ces grands temps de grands brassages culturels et géographiques, il arrive souvent qu’on mesure la portée de cette zone d’incompréhension, avec parfois une volonté de l’envahisseur de s’en venir contrôle notre diatribe verbale. Non mais ! Occitans nous sommes, oui bon, encore quelques-uns à avoir échappé au bucher, et non vous n’aurez pas tous les cathares et autres « pas comme vous » et si le pouvoir est d’en haut, nous sommes aussi en haut de nos ocres collines, dans ces terres qui abreuvent les plus grands paysages quand bien même les eaux en soient parfois cruellement absentes.

Terroir, nom pas seulement employé pour du vin, noble invention de l’homme, victoire sur le raisin, non, le terroir est partout et chacun défend le sien, ici comme ailleurs, le verbe sert à conjuguer les états d’âmes comme les états de l’homme, les discours se ponctuent de joyeuses virgules, les mots s’échappent parfois dans de vieux dialectes que d’aucun reprennent sans vraiment comprendre la haute précision pifométrique d’un « à bisto de nas » chez les gens du cru, et là, j’avoue que ce n’est pas tout cuit. Un pays qui s’en vient titiller la capitale Toulousaine pour ensuite s’en aller visiter le Tarn et l’Aude, frontières si indécises puisque non tracées par le sillon d’un soc du cru. Il n’y a pas de frontières, mais un pays, des villes comme des villages de marché, des briques rouges qui flamboient sous le soleil couchant, un vent qui chasse loin d’ici les nuages et les pollutions, des familles éclatées sur quelques hectares qui se retrouvent pourtant à l’occasion des travaux comme des veillées, des épreuves de la vie, fussent-elles joyeuses ou tristes bien qu’encore la tristesse s’évanouit dans le partage d’un repas qui pourrait paraitre festif à qui n’est pas d’ici, longues tables dressées sous le hangar, « monjetade » servie, du temps d’avant l’appellation luxueuse de « cassoulet »…

Et oui, je l’aime ce pays, ces racines, cette terre, un endroit à parcourir à pied ou en 2CV, un pays à découvrir jusque dans ces moindres petites routes, un pays à part, mais est-il un pays qui ne soit pas à part ? Certes, Brassens l’a chanté, il est partout des « imbéciles heureux qui sont nés quelque part », ici comme ailleurs, mais il n’est aucun chauvinisme, j’ai longtemps rejeté ces racines et cette terre, parce qu’écœuré d’en avoir trop bu en d’interminables parcours de toussaint, par des séries de bises à moustaches et de dialectes non compris, mon tort étant d’avoir été à l’école française. Et puis, les pages se tournent, celles des grands-parents, tout deux natifs d’ici, le mythique d’alors n’était pas virtuel mais lien de gens d’un même clocher, le cimetière se referma sur deux êtres de chair très chers à mon cœur, les leçons non écoutées revinrent soudainement à la mémoire, les noms des fermes, joyeux inventaire à la Prévert, soudain sortaient de mes neurones pour trouver place sur la carte du terroir familial. Alors, oui, j’en suis revenu et oui, j’y suis revenu et je découvre et je parcours et j’apprends sans avoir mes mieux maitres pour y ajouter ces anecdotes qui s’en viennent si joliment égayer le tableau, coup de pinceau soulignant le détail, trait de génie de mes humbles géniteurs et des géniteurs de mes géniteurs. Merci à vous, d’avoir la patience devant l’étourdi que je fus, souvent résonne en moi les mots qui enseigne, l’art de la coupe, la description d’une terre, la leçon de vos vies.

Alors oui, on parle haut et fort, alors oui, on est fiers et heureux d’être d’ici, alors oui, on cueille chaque jour aux sources d’un passé composé les promesses de lendemain plus serein. Et même si le temps à changer, surtout parce que nous n’avons plus le temps de le prendre ni celui de le mesurer pas plus que celui de la mesure qui nous ferait comprendre que le temps n’est qu’un allié, même si les villages sont moins familiaux et plus hétéroclites, cette terre ne bouge pas ses courbes, les moulins sont tombés, quelques uns se relèvent, le vent lui ne faiblit pas et surtout ne disparait pas. Alors oui, le verbe est fort, mais le verbe est la vie, tout comme la bible nomma ainsi le fils de l’homme c’est bien signe aussi de l’importance du verbe et du besoin de le porter haut.

Alors oui, ici le verbe est haut et tant que soufflera l’autan, autant sera la verbe. Il est bien des horizons par le monde, celui des ces croupes dorées, alanguies en courbes sensuelles restera un écrin pour le cœur et les pensées voyageront souvent par ici. Par ici et par là, car les pensées ne sont jamais immobiles, les balades sans cesse parcourent les paysages, et comme le vent je voyage…

Sujet

Epoque épique que cette période-ci, la trêve des confiseurs est passée, le confit lui est en pleine cuisson, bien sûr, région oblige, c’est de canard qu’il s’agit, oh, non pas ces canards de plastique qui trônent dans les salles de bains, parfois en y prenant froid au point d’en trembler et de devenir vibrant, non, des ces braves canards musqués, à l’œil brillant et à la plume d’un noir éclatant, mais là n’est pas le sujet…

Nous voilà donc quelque part entre janvier et décembre, plus près du début que de la fin, ce qui avouez-le est plutôt de bonne augure, car même si la fin justifie les moyens, mieux vaut vivre léger qu’accumuler des moyens inutiles, mais bon, là n’est pas le sujet.

Et bien nous y sommes dans cette période, juste après la chandeleur et bien avant mardi-gras, l’heure est à la pitance et point à la pitié, de toute façon, vu le temps, il fait bon être derrière les fourneaux, ce qui avouons-le est assez mal placé pour la cuisine, mieux vaut être devant, mais là n’est pas le sujet.

Né et élevé dans une famille où la cuisine était la pièce maitresse de la maison, tant par la disposition géographique que par culture gastronomique, et oui, dans cette époque-là, les maisons n’avaient pas encore inventé de salle à manger-séjour-living-room aux proportions dignes d’une salle de bal, non, l’habitat comportait une pièce à vivre, puis une ou plusieurs pièces à dormir. La pièce à vivre comportait le foyer, cette grande cheminée ou n’en finissait plus de fumer un morceau de bois, rêvant en de maigres volutes à une belle flambée tout en parfumant la pièce de cette belle odeur qui chatouille encore ma mémoire olfactive. La porte, lourde et robuste, surement par crainte de rayer le sol en terre cuite qui pourtant en avait vu d’autres, tâchait de s’en tenir écartée de quelques bon centimètres, servant par-là même avec la complice cheminée de ce que nous appelons aujourd’hui VMC, ventilation mécanique contrôlée, bon, côté contrôle c’est surtout Eole qui opérait, mais là n’est pas le sujet.

Les fenêtres étroites et hautes, décorées de rideaux dont on aurait pu dire qu’ils furent blanc un jour, surement par jalousie y allait aussi de leur abus de défaut de jointure, tant et si bien que s’asseoir à la longue table de bois sombre relevait en premier d’une stratégie des courants d’airs dignes des plus hautes études d’un ingénieur de la mécanique des fluides pour calculer la place la plus éloignée de ces parcours invisibles. Croyez-moi si vous voulez, mais cette place-là existe, elle est celle du maitre de maison. Plus loin, la pierre grise d’un évier, des monceaux de vaisselle tels des voyageurs dans la salle des pas perdus, qui arrive ? Qui part ? Nul ne sait, les choses sont ainsi, les torchons raides et rêches ne sont pas là pour trahir, pas plus que le néon perché au dessus du miroir, ni même ce joyeux serpentin de papier attrape-mouche et non tue-mouche comme on entend trop souvent, les mouches s’y font prendre, elles s’en suicident lentement en des grésillements atroces que balaie le lourd balancier d’e le grosse pendule, déclamant les secondes, les minutes et les heures, à coup de tic et de tac, à coup de gong sonore pour qui vient là pour la première fois, à coups de gong inaudibles pour l’habitué des lieux, mais c’est un autre sujet.

Cet habitat, plus tard par commodité sans doute fût agrandi de ce que nous nommerons des commodités. Pourquoi ? Comment ? Toujours est-il qu’aller visiter l’étable en cas de besoin ou bien se tailler la moustache devant le vieux miroir ébréché, le nez au-dessus des casseroles ne devaient plus pouvoir se faire, cela fut sous-traité en ces lieux nouvellement créés, création datant d’avant l’invention du chauffage, de toute façon, personne ne savait encore ce qu’était le chauffage. Certes, les chambres étaient plutôt bien exposées et climatisées, du temps où climatisé ne voulait pas dire « aller à l’encontre des saisons » mais bel et bien froid l’hiver et chaud l’été, les draps épais et durs étaient bien vite dégeler grâce aux moines qui s’y couchaient un peu avant les occupants. Aucun sourcillement à avoir, ces moines-là ne portaient pas la bure, oui la bure, toujours la bure, non, ces moines-ci étaient certes ventrus et bâtis comme des barriques, de bois courbes coiffés de deux planches entre lesquelles on glissait une casserole emplie de braises chaudes cueillies au foyer. La chaleur et l’odeur de la fumée venaient adoucir le coucher et conserver les viandes tout comme toutes bonnes fumaisons, mais là encore n’est pas le sujet.

D’ailleurs, c’est quoi le sujet ? J’ai bien peur de m’en être égaré au point d’avoir perdu le fil, les neurones parfois ont des drôles de fonctionnement qui s’en viennent rafraichir le présent des buées du passé, c’est tout de même marrant de cueillir les odeurs et les sons de la vieille ferme sans se rappeler s’il y faisait froid. Peut-être tout simplement, parce qu’il y faisait bon. Oui, il y faisait bon et ce sont des bonnes heures qu’on y a vécu, des bonnes heures et des bonheurs, même si les heures sont parfois teintes de chagrin, les vies ne disparaissent pas, elles s’effacent pour s’en aller ailleurs surveiller le foyer et les générations qui viennent l’entretenir.

Carnaval blanc

Carnaval blanc, telle est la fête sur nos routes et nos paysages, et si le décor de blanc s’est paré, les confettis de givres et de glace ne font pas que des heureux. La mode est au blanc, dans une thématique monochrome, et si les thèmes à tiques ont du mordant, celui du froid sibérien qui règne sur nos plaines est d’un mordant bien plus sournois, il s’immisce dans les plus parfaites des isolations pour donner cette impression de froid qui nous fait rajouter une bûche dans le foyer, monter d’un cran le devenu trop modeste radiateur, et rêver en des fééries autres, pleine de couleurs aux accent de Samba, allongé sous les palmier inclinés de Copacabana. Du blanc à l’explosion des couleurs, il n’y a qu’un pas, que quelques mots pour le décrire, tout comme l’artiste en quelques coups de pinceaux va faire disparaitre l’immaculée dans la conception de sa toile, le ciel de nos paysages devient soudain plus bleu, plus pur, la lumière quasi surnaturelle des nuits de pleine lune est sublimée par cette blanche réverbération. Certes, il y a le froid, il y a la glace, il y a tout cet inconfort qui n’est pas né de ces derniers événements mais de notre trop grand confort, celui-là même qui nous a éloigné de notre mère nature, celui-là même qui nous fragilise et nous a transformé en assistés, plus enclin à râler contre les autres, oui, les autres, ceux qui ne font pas ce qu’il faudrait pour que nous allions bien, pour que nous ne soyons pas privé de nos choix, de nos liberté…. Les autres….

Mais nous ? Qui sommes-nous ? Peut-on se regarder dans une glace lorsqu’il est devenu si facile de râler contre l’autre au lieu d’agir, de comprendre que parfois si ce n’est souvent, la solution première passe par soi et nait de soi ? que faisaient nos parents, nos grands-parents ? Attendaient-ils que tout soit bloqué pour sortir la pelle, pour avancer le bois, pour protéger les conduites d’eau et stocker quelques provisions ? Il est où le bons sens ? Nous ne sommes que des locataires de la planète terre, non des propriétaires. Notre mission première est de l’entretenir pour les générations à venir et pour l’avenir, issus de nous, issue par nous, surtout pas sans issue, le voie n’est impasse que si nos yeux se ferment, alors ouvrons-les, agissons et balayons devant notre porte plutôt que de se comporter en assisté notoire. L’épisode froid actuel ne fait que mettre en évidence les études faites sur des valeurs moyennes et non pas accidentelles. Chauffage sous-dimensionné, canalisation trop peu enterrée, évacuation de surface, le progrès fonctionnerait-il à l’envers ? Les économies sont partout, mais celles faites à la conception se transforment souvent en dépenses par la suite. Quoi qu’il en soit, il n’y a pas d’évolution dans la passivité. Nous sommes acteurs de nos vies, à nous de nous approprier notre vie, de nous positionner et d’agir pour que notre vie soit notre vie. Ni notion de meilleure ou de pire, c’est qui est une qualité pour l’un est parfois un défaut pour un autre, tout est subjectif donc concentrons-nous sur ce qui est notre vie selon nos critères, et avançons dans l’action. Les intempéries restent des intempéries, c’est la façon dont nous fonctionnons avec et pendant qui compte, sans se mettre dans l’attente de ce qui pourrait ou devrait être fait. Attendre, c’est s’oublier soi en tant qu’acteur, c’est être passif, mouton sous la houlette d’un berger qui ne vient pas. Intempéries ou pas, l’attente n’est pas constructive, et pire, elle entraine par le bas une vie qui ne devrait rêver que de haut. Soit.

Alors, que faire ? Se lamenter de nos paysages blancs aux routes verglacées? Euh, ça change quoi ? Cela fait-il fondre la neige ? Cela brise-t-il la glace entre des gens qui ne se sont jamais parlés ? Faut-il sortir la pelle et s’en aller noircir de bonheur les autoroutes de nos circulations ? Pourquoi pas, si le cœur vous en dit, je ne vois pas quel mal il y aurait, après tout, la mode est à l’écologie et aux économies, je n’ai rien contre des chasse-neiges humains, mais soyons réaliste, commençons par nos bouts de trottoir, non, pas de vision péripatéticienne des choses, juste que c’est par ces morceaux là que nous avons pignon sur rue, alors oui, de la pelle, du courage, libérons aux piétons, qu’ils soient jeunes lycéens en mal de cours non tenus ou bien encore personnes âgées préférant risquer le col de leur fémur plutôt que le bout de tôle de leur fidèle auto, rentrons nos poubelles en attendant d’avoir une information officielle du jour où la tournée pourra reprendre, n’oublions pas que ces déchets sont d’abord nos déchets et qu’avant de s’en aller faire le trottoir, ils battaient le pavé de notre cour ou peuplaient nos placards, garons nos véhicules sur nos parcelles afin que les engins, fussent-ils maitrisés ou non, de déneigement, de salaison, de livraison ou de simple transportation puissent circuler en toute liberté parmi les creux et les bosses glacées de nos routes hivernales. Simple mais efficace, d’ailleurs, ce ne sont pas les choses les plus compliquées qui ont le plus d’effet. Vider sa cheminée c’est en cueillir les cendres, version écologique et économique d’un produit ô combien déneigeant. Allez, un peu de sourire, ce printemps vous aurez de belles fleurs, la neige apporte là un lot d’azote qui verra verdir le gazon et dopera nos plantes printanières. La vie au fond n’est qu’un grand carnaval, dans le défilé de ces chars il y e na pour tous les goûts, certaines n’aimeront pas mars ou avril, d’autres maudissent déjà février à peine né. De toutes les heures qui sonnent, choisit-on une plutôt que l’autre ? Oh oui, j’entends le chœur répondre midi, tandis que le cœur répond minuit, mais au-delà des chiffres et des nombres, toutes brillent du soleil que vous y mettez. Il en est ainsi des mois de l’année, des jours de chacun des mois aussi. Alors ? Et bien, portez-vous bien, en votre âme et prudence qu’il vous sied, et si l’hiver est là et que glissent des luges, rien ne dit non plus que le printemps ne sera pas déluge. Pour l’heure, il fait très beau. Froid, mais très beau.