Saturnin


Aujourd’hui, saint Saturnin, alors bonne fête aux Saturnins !

Comment ne pas voyager dans les temps ancestraux de l’enfance à l’évocation de ce prénom ? Multiples facettes, il y aurait celle, par exemple, de la jeunesse regardant sur la première chaine en noir et blanc les aventures d’un petit canard portant ce prénom…. Vous souriez ? Tiens, vous connaissez ? Et oui, c’était un temps d’avant les monstres, les robots, les violences inter-héros. Qu’est ce qui distrayait alors le jeune public et le public resté jeune ? Des marionnettes, filmées image par image, sorte de desseins animés où le manège était enchanté ou bien encore nous visitions la maison de toutou quand ce n’était pas Aglaé et Sidonie, Saturnin, bien sur, Nounours et tant d’autres…. Allez, avouez, des mélodies vous reviennent en tête… Des images, des couleurs en dégradé de gris, avant des couleurs plus seventies et Casimir… Raconter à la jeunesse actuelle que le cul sur une chaise en bois après avoir calé la fréquence du poste sur la première chaine, encore en huit cent dix neuf lignes, ajusté le son car dans ce temps pas si lointain, nous n’avions ni zapette, ni portable, ni tablette, dessiner se faisait à la main, crayons de couleurs ou feutres sur papier, bon, ok, parfois papiers peints, mais juste une fois parce que ….souvenir cuisant…. En ce temps là l’ardoise était noire et la craie blanche, l’éponge n’avait de magie que de se gorger d’eau et d’en mettre partout, le pschitt n’était pas encore une drogue ni même une fanta –sie…. Et nous ? Et bien nous vivions heureux, satisfait d’un gouter quatre étoiles en tranches de pain et barre de chocolat à faire frissonner un pingouin sortit du réfrigérateur, la menthe à l’eau était exquise et nous aux anges sans se vautrer sur d’inexistants canapés….  Alors, oui, merci Saturnin d’avoir donné de la couleur à nos jours d’enfance !

Un autre Saturnin célèbre ? Ah mais oui, sans quoi, comment pourrions-nous évoquer la belle et grande ville rose ? Que serait Toulouse sans saint Sernin, raccourci liturgique et littéraire de saint Saturnin dont le parcours en les murs de la cité se mesurer en toponyme, hélas, comme souvent, plus par le supplice que par la vie. Imaginez un peu l’époque, nous sommes en deux cent cinquante, la fin du monde n’est pas pour demain, les romains ont la Gaule, ils aiment les jeux, plutôt du cirque, ils aiment leurs dieux, nombreux, trop sans doute pur en tolérer un de plus venu d’orient, alors pensez-vous, ces prêcheurs venant prêcher la bonne parole et convertir gaulois et gauloises sans mégotter, là, ça ne passe pas, à croire que la fumée les irrite. Un jeu comme un autre, un jeu romain en ce jour qui se veut jour de sacrifice d’un taureau pour la gloire du grand empereur, un jeu qui consistât à attacher le malheureux futur bienheureux Saturnin à la queue du dit taureau, animal dont au fond, on connait mal le côté joueur ou bien son envie de jouer. Les voilà partis, l’un derrière l’autre, du Capitole, temple ancien qui n’était pas alors situé place du Capitole, erreur de cartographie sans doute. La course se déroula par l’actuelle place du Capitole, oui, je sais, ça complique, mais c’est sympa comme endroit et puis c’est comme cela que la transmission orale et troubadourienne s’appliquât, puis, de là, par les rues de Toulouse, en ce temps-là bien moins fréquentées et surtout embouteillées. D’abord la rue de Cahors, devenue depuis, rue du Taur, Taur pour taureau, bien sûr, rien à voir avec Michèle Torr qui aurait sans doute bien voulu l’amener danser ailleurs, où le corps de l’évêque se détachât de son moyen de locomotion, peut-être en l’endroit de Notre Dame du Taur ?  Le taureau, continua sa course folle avant d’être enfin maté dans le secteur de l’actuelle gare Matabiau, Matabiau pour « mate-bœuf », et là, j’avoue ne pas savoir si le taureau est devenu bœuf ou si le langage d’alors ne portait pas aussi bas les précisions sémantiques. Quelques siècles après, la belle et ô combien emblématique basilique Saint Sernin fut érigée, les reliques du malheureux devenu saint y reposent encore.
Quiconque s’en vient à visiter notre belle région, saura apprécier et faire hommage à ces deux saturnins, au saint homme, par la visite de la ville dans son cœur, ses rues, ses ruelles et ses édifices religieux jusqu’à l’architecture de la gare, à l’animal de nos jeunes années, par les produits issus de ses nobles descendances, qu’ils soient grillés, fumés ou bien confits, qu’ils soient au torchons, en terrine, en verrine ou bien poêlés. En quelque sorte, la foi et le foie, ma foi, pour une fois que le choix échoit entre deux mondes qui ne peuvent que ravir les émotions, gustatives, culturelles, visuelles, olfactives, les sens en éveil, entre la chair rosée d’un magret grillé et la brique rose de la ville, comment pourrait-on s’imaginer en péril ? Venez sans crainte, les taureaux sont matés et ne foulent plus le pavé, les matadors sont hors de nos murs, et comme le chante si bien notre troubadour national, Claude Nougaro « L'église St-Sernin illumine le soir, d'une fleur de corail que le soleil arrose, c'est peut-être pour ça malgré ton rouge et noir, c’est peut-être pour ça, qu’on te dit « Ville rose »….ô Toulouse, ô moun païs, ô toulouse !

Viendez z’y !

Adiessas !

Voyages dans le temps


Quelques notes prises au cours de voyages dans le temps et l’Histoire, quelques mots, quelques histoires qui, on ne sait pourquoi, se sont perdues au fil du temps….

« Ma mie Nette » c’est ainsi que Louis XVI aimait à appeler Marie-Antoinette, c’est vrai que quand même, ça fait long comme prénom pour se faire passer le sel à table au point de laisser refroidir le potage, si long que de là, sans doute, naquit l’expression « long comme un jour sans pain » puisque l’époque voulut que le peuple réclamât du pain, tout comme ce peuple réclamait des jeux du temps des romains et du très haut-débit de nos jours, comme quoi, ce peuple-là ne sait pas ce qu’il veut… Bref, notre monarque, enfin, celui en cours à l’époque des faits ici rapportés dit ainsi « Ma mie Nette, notre Louis dort malgré les protestations de la rue ; Cette révolution, quand bien même je l’installe aux pouvoir, ne fera guère mieux que nos ministres, j’en mettrais ma tête à couper !  Ma mie Nette, n’êtes vous point en accord, je vous vois si pâle ? – Mon bon mari Louis, ne dites point cela, j’en perdrai la tête ! » Dire que ce fut là leurs derniers mots, serait raccourcir l’histoire de ces deux personnages, ce dont d’ailleurs la révolution se chargera plus tard… Autres temps, autres mœurs, le remède du docteur Guillotin avait plus de vertu pour soigner le mal de tête que notre noble acide acétylsalicylique actuel. Que dire encore de ce Roi, si ce n’est qu’il n’hérita pas du trône de son père, mais de son grand-père, tout comme lui-même le tenait du sien, de grand-père, évitez de vous perdre tout de même… Pour résumer, nous pourrions dire que nous avons eu des dièses et des fadaises, sinon des bémols et des trémolos, à moins de ne compter en quinte et quart de quinte, sinon, nous pourrions aussi dire que nous eûmes Louis quatorze, Louis quatorze et demi, Louis quinze, Louis quinze et demi, Louis seize, Louis dix sept en arrondissant le seize virgule neuf, Louis dix huit, Louis disparait, Louis Philippe ….. Et comme disait Jacques Prévert, « et plus personne plus rien, qu’est-ce  que c’est ces gens-là qui se sont pas foutus de compter jusqu’à vingt ? »….

Plus près de nous, à moins que cela ne soit plus loin ? On s’y perd à circuler ainsi dans les couloirs du temps, c’est un vrai labyrinthe ! Imaginez un peu, nous vivons dans une époque bien définie, bien ordonnée où tout est bien classée en deux tiroirs : Avant JC, après JC, du coup, tout est plus facile et même de nos jours actuels, on ne dit quasiment plus « nous sommes le vingt sept novembre de l’an de grâce deux mille douze…. » Ou bien « Votre rendez-vous est confirmé pour le trente novembre deux mille douze après Jésus Christ » Mais voilà qu’à voyager dans le temps, on a vite fait de presque une bifurcation, de se rater le panneau « sortie zéro : JC » et zou, ça file direct au milieu de diplodocus, ou bien encore en pleine opération de tagage sur les parois de la grotte de Lascaux….Hein ? Non, non, je n’ai rien dit…. Imaginez un peu ces années d’avant le zéro, chacun y allait de son propre calendrier, et si on ne parle ni chinois, ni hébreux, ni mayas il devient difficile de s’y retrouver dans la chronologie. Sans compter qu’en ces temps de Genèse, vivre neuf cent cinquante ans était monnaie courante, heureusement que cela a bien évolué, sans quoi nos pauvres caisses de retraites seraient soit trop pleines, soit définitivement à sec. Non, finalement, ce zéro JC, ça a fait du bien. Bon, il paraitrait que le zéro ne soit pas très bien positionné, une sorte de décalage ou de réglage, un peu comme sur la balance familiale ou avant la pesée, il fallait bien aligner l’aiguille sur le zéro, ou pas, selon l’envie de paraitre ou pas, disons, plus léger ? Donc, d’après son représentant le plus haut placé dans la hiérarchie cathodique, il s’avérerait que des erreurs de calculs se soient avérées dans la datation et qu’il serait né non pas en zéro mais en moins cinq ou moins six. Bon, déjà que zéro ce n’est pas chaud, s’il faut descendre encore le berceau de nos calendriers, oh ! sans aller jusqu’aux calendes grecques, juste de cinq ou six crans, sauf que, quand même, cela fait tout de même près de deux mille treize calendrier à reprendre et à réviser, car, s’il est facile aujourd’hui de dire que nous serions en deux mille dix huit et qu’ainsi, la fin du monde de deux mille douze et bien ça serait de l’histoire ancienne, n’oublions pas que toutes nos vies sont chronologiquement chronométrées, répertoriées, informatisées, hiérarchisées et archivées selon le même système, non pas féodal, ça nous enlèverait mille ans à rattraper, non, pire, biblique! Lorsqu’on sait que la bible est le livre le plus vendu et le plus lu au monde, je vous laisse imaginer le prix des corrections….
Oublions le côté et le contexte religieux référent à l’ouvrage, apprenons à y voir par contre, le fantastique recueil d’histoires, d’actes, de scènes, de nouvelles, de contes, et même de proverbes, plutôt que de résumer la bible a une seule cène. 

Bible, bibliothèque, «biblios »…. Livres…. Ecrits…..Ecriture…. Voyages… Allez zou, je repars, dans le temps….j’ai le temps…. Tiens, il pleut, plutôt fort, un vrai déluge !

Un coin de montagne


Etrange nuit, peuplée de rêves, défilés d’images, dans toute la puissance de l’imaginaire avec toutefois ce lien dans la réalité, ces visages familiers, ces paysages connus, un mélange si détonnant où pourtant tout s’enchaine et se construit si bien, et même mieux, un vrai délire dont il se réveille apaisé, tranquille et serein, amusé de ce drôle de film. Le soleil brillait déjà sur les montagnes face à la maison, il brillait chaud et fort au point de l’aveugler lorsqu’il ouvrit les lourds volets de bois, loin derrière l’épaisse muraille qui séparait la fenêtre de sa protection de bois. Cette épaisseur l’avait toujours amusée, enfant, il aimait à s’y asseoir pour dévorer livres et bandes dessinés. Combien sont-ils, ces héros de papier, venus peupler ce lieu sans même peut-être le savoir ?

Il s’étira face aux paysages riants sous le feu d’un matin plutôt pas mal entamé, comme il faisait bon cueillir ainsi l’énergie, la sentir circuler, progresser, parcourir tout le corps, comme il faisait doux de se sentir léger, détaché, libre et vivant. Il adorait cette maison, vieille ferme de pierre construite en toute utilité, fonctionnelle et minimaliste selon l’architecture des gens de peu, des gens du terroir : Le bas dédié aux bêtes, et là, cette ferme trahissait une condition déjà riche pour le pays, puisqu’elle possédait étable, bergerie, porcherie et lapinières, tandis que l’étage se résumait à trois pièces, la principale, qui dans un vocabulaire actuel se nommerait « pièce de vie » un association entre cuisine et séjour, une seconde pièce servant de « pièce de nuit », vaste salle carrée, peuplée de deux grand lits puis une souillarde, cette sorte d’antichambre entre le monde d’en bas et le monde d’en haut, juchée au dessus du fond d’étable, des stalles des veaux dont elle était reliée par une échelle de bois jouant aux escaliers. C’était là que les vêtements du dehors étaient autrefois entreposés, les sabots, les ficelles, ce qui n’est pas utile dans la maison, ce qui sera utile pour dehors. Au dessus de l’habitat, un vaste grenier, une charpente vivante et vibrante de courbes pleines et déliées, d’un temps où la menuiserie n’était pas encore industrielle, d’un temps où les arbres ne poussaient pas tous droit. Ce qu’on appelle ici des rames, troncs de noisetiers droits et alignés entre deux poutres, servaient à faire sécher, maïs, haricots et autres plantes gardées ici pour reproduire le cycle de la vie d’avant les hybridations : une graine devient une plante qui fournit d’autres graines dont certaines seront consommées et les autres semées pour le cycle suivant. Un grenier peuplé de courants d’air, glissant sous les tuiles, passant entre les voliges tordues et non aboutées, de ci, de là des fougères sèches essayaient d’assurer une sorte d’étanchéité, en pure perte. Tout le côté de l’habitat était une vaste grange, plateau de stockage des maigres fourrages qui par un jeu d’astucieuses trappes dans le sol venaient remplir les râteliers des bovins. Tout cela, c’était avant, quelques vestiges avaient servi de témoins au moment de la transition, au moment où ses parents avaient acheté cette presque ruine, cette pas tout à fait ruine. Des heures et des heures de boulot, des litres de sueurs, des matériaux plus tard et cette ferme était devenue résidence secondaire au confort minimum mais si dépaysant, si enrichissant parce qu’au fond, il ramenait aux valeurs simples de la vie, c’est peut-être pour cela qu’il avait toujours aimé cet endroit. Et tant pis s’il fallait franchir deux marches pour quitter la souillarde devenu sa chambre et rentrer dans le logis, et tant pis si les toilettes étaient à l’extérieur, et tant pis si la salle de bain était sur le balcon, c’était cela aussi qui faisait le charme de ce vieux vaisseau de pierre de mille huit cent soixante dix comme l’affichait fièrement sa façade.

Le printemps était dans la force de l’âge lui aussi, mais il savait se lever chaque jour un peu plus tôt, se coucher chaque jour un peu plus tard, parfumant les belles soirées de ces odeurs de foin qui enivrent, tandis que les roses grimpaient le long des treilles savamment tressées le long du balcon et de la grange. Le petit déjeuner sera déjeuner aujourd’hui, une solide collation pour prendre des forces, sur la vieille table de ferme au soleil de cette grange devenue salle de spectacle sur la nature. Ces haies de noisetiers, ces prés qui l’un après l’autre, espace clos après espace clos, gravissent les pentes avant d’atteindre la forêt, tant de pas, tant de courses, bien moins nobles que de longues randonnées mais si belles et si agréables que bientôt cela sera le programme du jour, un parcours sans but, si ce n’est d’aller voir là-haut si la source murmure toujours, si les chemins sont encore accessibles, si les bois n’ont pas trop soufferts des derniers gros coups de vents trop vite joués en tempêtes. Voir la vie dans ses formes naturelles, croiser peut-être le chevreuil ou le cerf, marcher sans but précis si ce n’est précisément de marcher et de vivre. 

Toujours.

Egoïste


C’est à peine croyable cette météo qui joue au yoyo, de quoi faire flipper le mercure qui descend et remonte dans son tunnel de verre. L’automne était bien engagé, la pluie et le froid étaient venus battre le rappel des troupes, ces troupes de migrateurs désertant enfin le bord de mer pour regagner le nid chaud des grandes cités. Lui était là, encore et toujours, dans son monde de sable, ce monde magique où le sable se change en eau, ou bien est-ce l’eau qui se change en sable, de toute façon, le ballet est si dense, si serré qu’il ne saurait à qui attribuer la primeur, et puis, à quoi bon ? Que serait le sable sans eau si ce n’est un désert sans fin ? Que serait l’eau sans le sable, subtil contraste des couleurs, mariage sans cesse renouvelé sous des gerbes de blanche écume.

Combien de fois est-il venu ici, à voir se spectacle sans cesse changeant, ce monde en construction et en déconstruction. Il n’y a plus la foule, il n’y a que des rideaux baissés, il n’y a plus de monde, il n’y a que des plages désertes à disputer aux oiseaux, il n’y a plus ce bras, léger et frêle posé sur le sien, il n’y a plus tout ça, mais de toute façon, il n’y a déjà plus de saison. Peut-on parler de mélancolie lorsqu’on est devant pareil paysage ? Peut-on parler de tristesse lorsqu’on est devant pareil tableau ? Ce n’est pas mélancolie, ce sont étapes de la vie. Hier fut ainsi, demain sera autre, aujourd’hui il n’y a pas de lourdeur, pas d’aigreur, pas de regret, les forces océanes sont là pour insuffler la vie, les pas sur le sable ne sont pas solitaire, tant et tant de traces viennent, gravent et disparaissent, la vie, la nature sont les plus grandes gommes de notre existence. Un temps pour soi, dans un été de la saint Martin à peine en retard et dont le soleil venait réchauffer l’espace de jour encore court qui se bat contre la longue nuit. Un peu son état d’esprit, une courte journée qui avait suivi une longue nuit, qui engendrera une autre nuit, plus fraiche, plus froide, plus sombre mais ce n’est que pour mieux voir les lumières de l’aube, cela, il le savait. L’existence est toujours surprenante, elle associe, elle rétrécie, elle remplit, elle vide, tout cela, c’est bien jolie, la seule leçon c’est qu’on la traverse toujours en compagnie du même personnage de sa vie : soi. Etre soi, non pas contre les autres, être soi avec les autres, parmi les autres, sans omettre de ne pas oublier, de ne pas s’oublier, penser à soi, être égoïste, mais non pas l’égoïste seul au monde qui oublie et écrase les autres de son arrogance, de son outrecuidance, de sa main mise sur tous les autres. Non, l’égoïste qui pense à lui en pensant aux autres, qui ne s’oublie pas dans la distribution des rôles, bons ou mauvais, parce que la vie est un échange entre soi et l’autre, entre soi et les autres, entre soi et soi, introspection, horizon personnel, souhait, période de calme, isolement, tout est utile et non futile. Etre soi, se soigner soi, s’occuper de soi, c’est s’aimer et s’aimer pour mieux aimer. Comment vouloir y voir clair lorsqu’on garde le regard trouble sur sa propre existence ? Quelque chose ne va pas ? Quoi ? Pourquoi ? Comment le ressent-on ? Comment va-t-on y faire face ? Apprendre à traverser cette étape, sans calculer si elle est bonne ou mauvaise, elle est là, point. Le gagnant du loto doit-il refuser ses gains sous prétextes qu’il n’est pas prêt ? Le malade doit-il refuser sa maladie sous prétexte qu’on est jeudi ? Non ! Il n’y a pas plus de jeudi que de vendredi, les semaines défilent dans leurs chronologies, il n’y a pas de règles à être plus sourd un jeudi qu’un mardi, juste que là, on se pose et on va penser à soi, non, pas soi tout seul, soi, parmi son monde, soi, parmi sa foule. La foule de ses questions, la foule de ses peurs, la foule de ses ressentis, la foule de ses sentiments. Il est où le problème ? L’annonce ? Non, ça c’est fait. L’appropriation ? C’est vrai que c’est plus dur mais nécessaire, on ne peut combattre qu’une chose reçu comme telle, comme à soi.

Le vent soufflait léger mais déjà froid, comme pour lui rappeler que les jours ne sont pas éternels, quand bien même le soleil n’était pas encore bas dans sa course de plus en plus horizontale. Il serra son parka et reprit la marche, le regard perdu entre pas du passé, pas dépassés, et vagues joueuses aux babines noyées d’écume. Encore quelques pas et bientôt le vieil escalier de pierre et les trottoirs de la ville. Encore quelques pas et la clôture d’un livre, d’u chapitre, d’une page….. Comment y voir la tristesse, lorsque la page appelle une autre page, lorsque le chapitre appelle un autre chapitre, lorsque le livre appelle un autre livre ? Pourquoi ne voir que le verre à moitié vide ? Ouvrez les yeux : L’océan, luit d’un vert toujours plein….

Le collier


Il est des jours dans l’existence
qui sont plus beau, plus bleu même s’il pleut.
Il est des jours dans l’existence
qui sont plus laids, plus noir, même s’il pleut.

Il est des jours dans l’existence
qui sont plus tristes, plus gris, même sans pluie.
Il est des jours dans l’existence
qui sont plus rieurs, plus jaune, même sans pluie.

Alors ça veut dire quoi tout ça ?
Que le temps ne fait rien à l’affaire,
Que les couleurs ont autre chose à faire
Et que la vie, c’est comme ça.

Qu’il pleuve ou qu’il n’y ait pas de pluie,
Que les murs soient gris, jaune, noir ou bleu
De toute façon vous n’y verrez que du feu
Parce que chaque jour, un nouveau jour luit

Chaque goutte de pluie est une larme des cieux
Chaque goutte de pluie est une vie en devenir
Sans savoir si le ciel pleure de tristesse ou de rire
Sans savoir si le message vient des anges ou d’un dieu
Sans savoir si c’est pour aujourd’hui ou pour demain
Sans savoir si c’est pour la chute ou bien pour la leçon
La chute apprend à savoir se relever dès le lendemain
Et si les leçons sont parfois dures, leçons elles sont.

De chaque jour qui peuple ton existence
De chaque jour qui colore ton existence
N’oublie jamais de t’en faire un collier
De ce collier ne t’en fais pas un bouclier
Plutôt un pinceau pour peindre le monde
Et montrer à tous combien il fait beau
Il fait toujours beau, même si l’orage gronde
Même si le soleil luit, toi, toi tu sais qu’il fait beau.a 

Errare humanum est


« Errare humanum est » disait (et écrivait) nos ancêtres latins, ce qui pourrait se traduire par : « erreur humaine est » ou, plus sérieusement : « l’erreur est humaine ». Et c’est effectivement très sérieux de mesurer combien l’humain est fragile, certes perfectible, mais surtout, terriblement humain par ses erreurs. Que celui qui ne s’est jamais trompé fasse donc la première lettre, encore faut-il savoir reconnaitre ses erreurs, encore faut-il pour cela, voir ses erreurs. Le caractère hypermétrope de l’humain l’empêche de voir la poutre dans son œil alors qu’il distingue très nettement la paille dans l’œil du voisin, les rapports ne peuvent en être que faussés. Pourtant, apprendre à voir ses erreurs, apprendre à les corriger, c’est apprendre à vivre, se perfectionner et grandir. De même qu’il serait froid et dramatique de n’avoir que des êtres parfaits, n’en déplaisent aux généticiens de quelques époques troubles de l’histoire. C’est si important l’humain, si touchant et si réconfortant. Je n’ai pas dit qu’il fallait pour autant se tromper sans cesse, reproduire les erreurs à l’envie, car tout de même, cela ne donne pas envie non plus. Un juste équilibre, celui qui nous fait tenir debout, celui qui nous fait avancer chaque jour sur la corde raide de nos vies, la tête droite et le regard posé vers l’horizon de notre but, humain, équilibré, serein parce que confiant dans sa vulnérabilité, apte à mesurer ses erreurs, à corriger son balancement pour éviter la chute, pour soi, pour l’autre, pour avancer.

Le mode d’emploi ? Il n’y en a pas..un mais plusieurs, en fait, il y a en a un, propre à chaque situation pour chacun, l’humain n’est pas une machine et c’est tant mieux ! Une machine est programmée pour effectuer un certain nombre de tâches sans se tromper. L’être humain, même conditionné, aura toujours la faculté d’analyser, de réagir, à moins d’être lobotomiser. L’Homme dispose de ses cerveaux, de sa rationalité pour guider sa vie. La raison, le cœur, les sentiments sont autant de voix au chapitre, autant d’influences qui agiront sur le pilotage des actions. Quel bonheur d’être humain, quelle richesse de se tromper, de comprendre, de rectifier ou bien de mesurer ce qu’il a manqué pour en être là. Comment pourrait-on vivre dans un monde parfait, entouré de gens parfaits ? Les seuls parfaits de notre monde disparurent sur le bûcher des vanités d’une église tremblant de perdre sa domination quasi dictatoriale au nom d’un « tuez les tous, Dieu reconnaitra les siens ». Autres temps, autres mœurs, parait-il…. Non, c’est vrai qu’il n’y a plus de massacre au nom d’une idéologie, on nom d’un peur ou d’un appât du gain, non tout cela est révolu dans notre monde parfait, tolérant et apte à apprendre de l’autre…

L’erreur de l’Homme, c’est d’être perfectible et de chercher la perfection. L’erreur de l’Homme, c’est de voir en ses erreurs des échecs bien plus que des chemins. L’erreur de l’Homme, c’est d’en perdre l’ordre de ses priorités. Culture, enseignement, course aux premières places, courses à la perfection, regardez les publicités, les messages, mesurez ces messages de « plus mieux que mieux » qui s’en cesse s’en viennent suggérer, appuyer, dicter, commander notre route, imposition gratuite et permanente, diktat de quête de supériorité. Non, l’humanité n’est pas de ce côté-ci, quel confort avons-nous à vivre pareil combat ? On fait tous des erreurs, n’importe qui autour de vous aura le plaisir de vous dire les vôtres, avouez que cela est fort sympathique, bon, admettons, mais pourquoi cela se complique lorsque vous allez vous mettre à dénoncer à l’intéressé ses propres erreurs ? Miroir, mon beau miroir…. Quel que soit le chemin, il traversera toujours des routes, des ruisseaux, il y aura toujours des cailloux, des pierres, voire même des rochers à contourner, un arbre en travers générant des hésitations : « Faut-il passer dessous ? Dessus ? » Pourtant, arriver à votre but, de quoi vous rappellerez-vous ?  Des parties plates et lisses ou bien des quelques difficultés qu’il vous aura fallu éluder, de la façon dont vous les avez maitrisées pour arriver ici et aujourd’hui ?  On n’a rien sans rien, on mène tous un combat, on traverse tous des épreuves, chacun a son parcours. Ne pas communiquer ne veut pas dire oublier, mais il arrive que le regard s’accroche à l’horizon pour que la rage de vivre et de vaincre s’exprime et lève les obstacles du temps. L’erreur est humaine mais l’humain n’est ni une erreur, ni en erreur lorsqu’il choisit de vivre, d’assumer son chemin, de se battre pour encore longtemps avoir le droit de faire des erreurs, d’affirmer son humanité.  

Marguerite


Marguerite, mais quelle belle évocation ! Au chapitre des nobles proverbes il y aurait bien celui-ci :  « si à la saint Valentin, elle te prends la main, attends donc la sainte Marguerite…. » proverbe que je n’ai jamais compris, d’une part parce qu’entre le quatorze février et le seize novembre, cela     fait long à attendre, ensuite parce que mon expérience des rimes est sans aucun doute très faible, allez donc faire rimer Marguerite… Frite ? Le mauvais gout dirait que là c’est plutôt pour Jeanne dont on prétend de celle D’arc, (une sœur de Mireille ?) qu’elle à frit donc qu’elle a tout compris, le poseur de mots chercherait plutôt la rime en « écrite » mais non, je ne vois pas, alors ? Rite ? Désormais les rites n’ont plus court, l’époque est au moderne, bref, cherchez la rime n’est pas chose aisée, n’en déplaise à Marguerite… Mon gout des arts me ferait trouver une rime en Magritte, mais pour autant dois-je déclamer « Ceci n’est pas une pipe ? »

Marguerite tout droit sortie des arts… Le premier exemple qui me vient, ne soyons pas vache, c’est bel et bien du septième art. Mais combien de fois ai-je vu dans mon enfance « La vache et le prisonnier » ? Mais combien de fois ai-je senti une larme inconnue rouler sur ma joue lorsqu’en guise de fin, cet excellent Fernandel prend le train qui le ramène au point de départ ? Pourtant, je soupçonne l’éruption lacrymale à la triste séparation du prisonnier de sa compagne pourtant vache mais bienveillante, duo inédit et inoubliable de nos mémoires. Combien de cornes furent portées par des Marguerites dans les vertes prairies depuis la première projection ? Un grand nombre, je suis sûr, je me rappelle d’une, à la robe beige, aux cornes en bataille dont une était même sciée, la plus reconnaissable, la plus docile du troupeau, la seul dont on osait s’approcher et lui caresser les pis pour faire naitre dans notre casserole cette mousse tiède et onctueuse recouvrant un lait on ne peut plus pour agrémenter nos gouter, quand il ne terminait pas dans ce drôle de moule au fond caramélisé d’où sa rencontre avec des œufs tout aussi fermier faisait exploser nos papilles sous forme de flan maternel.

Marguerite encore, ces fleurs belles et hautes, facile à cueillir et dont on faisait des bouquets champêtre puisque cueillies dans les champs où l’on menait paitre les bêtes à corne d’alors, hommes et bovins mélangés sous le regard bienveillant d’un canidé somnolent. C’est vrai quoi, les pâquerettes sont toutes menues, pas facile  à ramasser avec la queue, et on a beau dire, quand c’est trop court, c’est trop court, difficile de trouver un contenant approprié. La marguerite, elle, elle assure ! Même les poètes et les chansonniers qui parfois le sont sans que cela soit réciproque, savent l’effeuiller et la conter, preuve que son port altier l’adresse à prendre plus de hauteur que sa modeste cousine dans les textes et les têtes.

Marguerite enfin, qui peupla sous bien des appellations mes livres d’Histoire, la grande avec un grand « h », une passion encore, magie des époques, des noms, il est vrai que les rôles étaient vite réparties, les Rois s’appelaient toujours Louis, parfois Henri, parfois François, jamais Nicolas, quand aux Reines elles venaient tout droit de l’autre bout de l’Europe et de la famille, les prénoms certes plus variés, dieu que les femmes sont coquettes, mais Marguerite fut de Bourgogne, de Navarre, de Valois ou de Provence, les branches cadettes de nos meilleurs Bourbon ayant pour fâcheuse habitude de se décliner en province. La magie du petit écran attira le féru d’histoire à suivre l’excellent Jean Pia dans la restitution de l’œuvre de Maurice Druon, les Rois Maudits ou Marguerite de Valois devint plus célèbre sous le nom de Margot, mais, n’en déplaise à mon maitre Georges Brassens, je n’ai point souvenance qu’elle trouvât dans l’herbe un petit chat….  Erreur de scénariste ? Oubli de l’auteur ? Le sang et la rudesse du personnage prit le pas sur la poésie des champs de marguerites….

Alors nous y voilà donc en ce jour de Sainte Marguerite. Avant toute chose, bonne fête aux Marguerites et aux amoureux qui attendent ce jour depuis la Saint Valentin…


Je ne vois toujours pas pourquoi….

Repaire


Moment de calme parmi les tempêtes, moment de répit, de souffle ou de recherche de souffle, la vie est ainsi faite de ces cycles de courses et de pauses, tout comme le jour se décompose en jour et en nuit, la nuit ne nuit pas au jour, elle le complète, en assure le repos histoire de mieux vivre les jours de plein jour. Il était là, assis devant sa petite table qui lui servait de bureau, quelques feuilles éparses, l’éternel stylo feutre bleu, un décor hétéroclite autour, photos de tranches de vies, photos de paysages amis sur les murs de cette petite pièce lui servant de refuge, fenêtre ouverte sur le jardin, un faux pigeonnier pour de vrais moments. Comment pourrait-il la qualifier cette pièce ? Bureau, non, voilà qui ferait trop pompeux, trop rangé, trop rigide… A voir le capharnaüm et la diversité des objets, le terme de cabinet de curiosité trouverait toute sa place, si la place n’était pas si petite. A défaut de nom, quelle en est la fonction ? S’isoler ? Se ressourcer ? Ecrire ? Dessiner ? Penser ? Méditer ? Soigner ? Comment cerner le tout en un vocable ? Isoloir est trop restrictif, trop étroit ; Boudoir ferait plutôt antichambre et il lui arrivait d’y dormir ce qui deviendrait donc antinomique ; Ecritoire, voilà qui mobilise le mobilier ; Dessiner, oh mais ce ne sont que des schéma, des croquis, des idées mis en lignes, en pointillés ; Penser, méditer, soigner, cela se fait partout, pourtant certains endroits aident au calme et à la concentration et là, c’était le but de cette pièce, une sorte de cocon, pour lentement opérer les transformations, mettre en mots, en croquis des idées, transformer le temps en allié, alliage de temps de choses et d’énergies pour aider et guider, pour être et mener vers ces autres paliers. C’est presque cela cette pièce, un palier entre ciel et terre, bâtit sur l’eau, l’eau, source de vie, à jamais…

Assis entre ciel et terre, le vent glissant entre porte et fenêtre, l’eau vive dessous, le feu de la bougie ajoutant cette touche de mystère à l’endroit, le sable dans le verre pour tenir la flamme, les quatre éléments sont bien là, subtil équilibre et points de repères stables dans ce monde sans cesse en mouvement. Quelques livres se reposent sur une étagère, entre deux lectures, entre deux prêts, c’est ainsi que fonctionne la maison, une sorte d’espace de discussion, de moments partagés, un carrefour d’échanges, de ces échanges de mots, d’idées, de recettes, de trucs et astuces, de rien, de livres, d’outils, de conseils, de raretés que l’on nomme amitiés. S’il devait refaire sa vie, cette partie-là serait essentielle et donc conservée, peut-être juste déplacée au bout du monde, à la croisée de chemins, peut-être un refuge en montagne, une auberge en bordure de chemins de Saint Jacques de Compostelle, une ferme où la grange servirait de logis à quelques vielles autos ou autres passions, quelques chambres aussi en soupente toujours prête à héberger le voyageur fatigué en échanges de pensées, de discussions…. C’est étonnant comme l’humanité a perdu son essentialité, son essence même, son humanité. A trop courir dans des courses pouvant paraitre futiles, à trop modifier l’ordre de ses priorités, elle transforme les individus en individuels, elle développe un mauvais égoïsme et isole les gens alors qu’ils n’ont jamais été aussi proches, aussi nombreux à se croiser. Il se met à rêver de cette bâtisse qui ne serait point château, non, juste une chaumière, une ferme de pierre à l’espace principal dévolu à la grande table au bois épais, au mur occupé par la grande cheminée, aux chaises de bois et de paille qu’on racle au sol pour les avancer de la table au devant de la cheminée pour discuter de tout et de rien en de longues veillées. Une sorte de croisées de destins qui se croisent sur les chemins de randonnées tout comme sur les chemins de la vie, être ici, là et aujourd’hui, pouvoir échanger, partager, apprendre…car on apprend toujours et à tout âge et de tous quel que soit leurs âges… Ces pensées lui apportaient chaleur et bonheur, joies et essentialités, mots à croiser sur la page blanche pour qu’ainsi naissent des histoires, des phrases, des phases, des nuits, des jours, des lumières en poussière d’étoiles ou bien en rayon de soleil, mais au fond, qu’est-ce que la vie sans cela ? Que serait le miel sans le soleil qui vient le colorer d’or ? Que seraient les étoiles sans un regard qui s’y perd par un soir très noir ?

La bougie s’est éteinte, noyant sa cire dans le sable ocre, la nuit était tombée sans un bruit, le vent plus frais qui caresse les étoiles était venu le réveiller, un frôlement, un chuchotement, de la poussière d’anges offerte par la nuit, l’heure de quitter le repaire à rêves pour regagner le logis, non sans avoir commis une autre page, une autre feuille, comme l’arbre au printemps fait éclore d’un bourgeon une feuille nouvelle…            

Et revoilà le beaujolais...


Et revoilà le beaujolais, c’est pourtant pas nouveau, ça tombe chaque année le fameux troisième jeudi de novembre ! Que dire ? De la banane, de la cerise, du géranium, du trèfle ??? En tout cas, du blé fait à partir de raisin, c’est pas mal, non ? Mais comment un si petit vignoble peut produire autant de bouteille de beaujolais nouveau puis autant de « vrai » beaujolais ? Et dire que d’autres ont suivi, même nos petits vignobles se sont mis à faire du primeur, avant de déchanter, que voulez-vous, tout a un prix, et dès lors qu’on ne peut vendre à n’importe quel prix, voilà qui complique la jachère….
Aussi vite venu, aussi vite parti, quelques bouteilles encore, chaque année un peu moins, qu’importe le flacon pourvu qu’on ait l’ivresse, qu’importe l’ivresse pourvu qu’elle soit contenue dans le flacon, goutez mes amis, mais restez sobre et surtout….piétons !

Au-delà du commerce, n’oubliez jamais le côté festif, il n’est nul besoin de vider beaucoup de verres, mais plutôt de partager le moment, de vider beaucoup de verres à plusieurs, un ou deux chacun, de savoir ne pas tancer le chauffeur qui restera sobre, les plaisirs de la chère doivent rester des plaisirs vivants, fussent-ils divins, et…du vin ! Dieu peut attendre, d’ailleurs, il attend sans attendre, buvons et levons nos verres aux amis, aux proches, à la vie, à l’humour, à l’amour, aux amours devrais-je dire, ceux des plaisirs simples, ceux des bonnes et belles choses, ceux des vies, celles qu’on croise, celles qu’on partage, celles qu’on vit, vivre ne se résumera jamais en un seul mot….
Alors, oui, pour le beaujolais, vous me raconterait, je vais en faire l’impasse, pas d’impair, je passe, juste que j’ai depuis quelques temps déjà, des vins primeurs que j’aime, ceux de vignes autrefois vendangées, ceux de vignes parcourues et dévorées des yeux de tout un tas de points de vues, de pas, de marche, de balades et de modestes randonnées. Ces vins-là, rouge ou blanc, issus des corbières valent pour moi bien des plaisirs, des histoires, des trésors et surtout de vraies émotions.


Consommez avec modération. S’il vous plait.


Merci.

Résonance


De l’homme qui pose sa plume, on dit qu’il se déplume, mais est-ce pour autant de bon gout ? D’ailleurs, qu’est-ce-que le « bon gout » ? Sujet subjectif, prenons garde que l’acide ne nous éclabousse, il est de bon ton de se tenir loin des gens qu’on conspue car l’acide ronge et fait des trous, il dévore à un point que même la plus belle des reprises ne pourra jamais effacé le trou fait, faible trophée, lorsque le mal est fait, il est fait et bien fait. Rumeur, discours incessant de tout puissant communicateur qui à court d’arguments accourt prendre les devants et annonce ou dénonce, c’est selon le pas gauche ou droit fait en premier sans doute, l’information capitale qu’il détient de celui qui a connu l’ami de l’autre en qui on ne peut qu’avoir confia   nce et qui sait bien de quoi il en retourne puisque lui-même le tient d’un autre digne d’aussi bonne foi, et la foi, ma foi, c’est sacré comme dirait un père pénitent. Alors, oui, vivre pépère n’est pas si pépère pour qui espère le silence à son encontre, l’inconnu fait peur, mieux vaut supputer en toute bienséance, ce qui du coup, nous montrerait presque une racine commune entre la supputation et la péripatéticienne, enfin, encore un pas à franchir, fut-il sur le trottoir.

Plume ou non, les écrits sont écrits, les paroles volent d’oreille en oreille transitant par des bouches qui feraient sans doute mieux de tourner autour de leur langue avant d’aller s’enterrer dans le bush si cela ne devait pas polluer hélas nos amis africains, et si l’Afrique reste un continent sacré, le fric des incontinents ça crée des torchons d’informations, des illusions de nouvelles, des vitriols sur des vies à jamais brulées. Vive l’humanité mature, ne vaudrait-il mieux pas la préférer à son berceau, dans ses racines noires, jaunes, rouges ou bleues, du temps des pères des pères de nos pères et avant, lorsque dire était transmettre, lorsque communiquer était plus mettre quelque chose en commun que niquer l’autre ?  Aujourd’hui, la plume est leste, elle vole de vitriol en vitriol, elle assassine, elle décrit plus qu’elle n’écrit, elle s’use à voler dans les plumes, sans raison, sans fondement, à part celle d’exister. Ainsi va le monde, il a perdu au passage les trois passoires de Socrate, et non Socrate n’est pas un joueur de foot brésilien, et oui, il fut un de nos plus grands philosophes, mais au fond, qu’est que la philosophie lorsqu’on a perdu le sens de « philo » et de « sofos » ? Aimer n’est amer que sans « i » qu’importe la couleur, met si c’est un « i » vert, séquence écolo…. La sagesse ne se résume pas à quatre dents dans la bouche d’un adulte, enfin, durant si peu de temps, l’arrachage quasi impératif de ces molaires traduirait-il l’absence de sagesse de notre monde adulte ?

Alors oui, la plume se pose parfois, sans amertume, sans pour autant se déplumer, juste parce que c’est ainsi et comme cela, point de draps blancs, de tuyaux partout, à moins que ce ne soient tuyaux du gaz, gaines électriques et tuyaux de l’eau, pas de quoi faire des étincelles, ni reconstruire Beaubourg en son jardin, non, il n’y a pas de norme, ni de devoir, devoir être, devoir faire, non, faire ses devoirs, oui, on ne sait jamais sous quels yeux ces mots pourraient tomber… La plume se pose, la vague noie le sable et l’azur s’est offert une écharpe de gris, prolongement d’une saison littéraire par la lecture plus que l’écriture, prolongement d’une saison à contre temps qui revient sonner son temps à temps pour profiter encore et toujours des bienfaits de notre monde naturel, loin des bruits colportés par ces cloportes infâmes qui décidément doivent bien s’ennuyer. C’est au contraire si facile d’échapper à l ennui, peut-être même qu’un jour les hommes mettront la même énergie à déplacer les montagnes que celle qu’ils déploient à refuser de balayer leur pré carré. A-t-on besoin de quérir un service pour retrouver dans la multitude numéros d’un bottin personnel celui qui pourra le rendre ? A-t-on besoin de chirurgie esthétique pour sourire à l’inconnu ? Est-il besoin de deviner pour se la raconter sur ce qui n’est pas ? L’avantage de l’homme sur la machine, c’est que même reproduit à la chaine, il ne sera jamais deux êtres pareils, du coup, c’est vrai que vouloir comprendre relève du défi, chaque pas de chaque homme ne laisser jamais la même empreinte dans le sable, mais la vague, elle, les effacera toutes. Doit-on pour autant avoir peur de la vague plus que des pas et des hommes ? Doit-on avoir peur ? Peur de quoi ? De qui ? De soi, peut-être, parce qu’au fond, à défaut de se connaitre, voilà bien la seule personne que l’on peut interroger au plus profond d’elle, au plus profond de soi. L’écho répondant à l’écho, dissonance à mettre en harmonie, en résonance, non en raisonnements.
         

Albert


Aujourd’hui, saint Albert, bonne fête à tous les Albert, mes pensées vont particulièrement à ce fidèle et discret personnage qui s’en vient parfois croiser ma route. Souvent le soir, lorsque je rentre du travail avec une nette préférence pour la belle saison, sinon dès que je descends à mon jardin, pour y cueillir le romarin ou d’autres herbes qualifiées de mauvaises juste parce qu’on ne sait pas comment les accommoder, elle si accommodantes s’amusant à pousser parmi les plantations plus en vue. Et oui, l’existence ne tient parfois qu’à peu de chose, sortir du lot, pousser une tête au dehors des ombrages, se montrer quitte à se trouver déraciné, telle semble être la quête de ces fidèles, sitôt arrachées, sitôt elles repoussent, un jeu entre le piètre jardinier que je suis et la nature vivace. Albert ? Monsieur Albert, voilà qui ferait presque princier, ce qui lui va bien, tant il semble être le roi dans mon domaine, mais le terme de monsieur Albert pourrait paraitre familier, aussi, je propose que l’on dise monsieur Albert Muda, puisque c’est ainsi qu’il se nomme, enfin, c’est ainsi que je le nomme, que voulez-vous, on ne se refait pas ! Etrange personnage digne des contes de fées, il va et vient, croise mon chemin, parfois aussi celui des chats assez surpris de cet être étrange qui semble refuser le jeu, à moins qu’il n’en comprenne pas les félines règles, ou bien qu’à son âge, il ait passé l’âge de jouer ? Quel âge a-t-il au juste ? Cela fait un bail que je le connais, à vrai dire, je l’ai toujours connu aussi gros, ce qui lui donne cette démarche chaloupée, cet air débonnaire et placide qui en ferait presque un compagnon agréable, mais voilà….non, pas vraiment !

Peut-être un jour, une princesse esseulée, ou bien une vierge éplorée, ou bien, ce qui statistiquement parlant serait quand même l’option la plus envisageable, une personne d’un sexe ou de l’autre, seule et désœuvrée pourrait tenter de l’embrasser, oh ! non, je ne parle pas de lui rouler une pelle, ni même d’y donner un coup de pelle, sacrebleu non ! Juste un baiser délicatement déposé sur la couenne molle de cet olibrius, histoire de voir si Albert devient prince, voire roi, qui sait, déjà qu’il croit qu’il coasse à vous rendre coi devant tant de sonorités lugubres, profondes et si noctambules. Et oui, Albert Muda est un amphibien de la famille des bufos ce qui en occitan voudrait dire qu’il souffle, mais cela, je pense que le latin et l’occitan n’ont pas pris le même virage au même moment. Crapaud donc, pourquoi pas, éviter d’en faire une grimace, cela ne change rien à la nature, ni à la nature des choses, et s’il venait à le découvrir, soit par ce texte, soit pas cette fantastique rumeur qui colporte si bien les choses les plus fausses, il en ferait peut-être une maladie. Crapaud, oui, hôte de mon jardin, ou bien peut-être bien que je m’occupe moi de son jardin, il va et vient sous les lavandes, à pas de velours pourrait-on dire, mais j’avoue n’être jamais allé vérifier les dessous de la chose.  A toute fin utile et bien qu’il ait son utilité dans mon coin de nature, si une personne est tentée par l’expérience, merci de me le faire savoir, car moi-même je suis tenté de vérifier l’exactitude des contes de fées, et comme ce sont toujours les jeunes filles qui embrassement les crapauds pour en faire des princes, mesdemoiselles, prenaient votre ticket et venez faire la queue, sans équivoque, peut-être, verrez-vous cela plus tard, avec le prince…. Qui sait ? Alors, pourra-t-on dire : « à la Saint Albert, on s’envoie en l’air »… Ceci est un proverbe aéronautique, bien sûr !

Non mais !

 Belle journée !

Quelques pas dans la montagne


Quelques pas dans la montagne, quelque part dans la montagne, sans chercher l’ivresse des sommets, ni la haute montagne, non, juste marcher, respire, voir, s’émouvoir, opérer ce changement tant bénéfique qui consiste à vider ses neurones et à remplir ses mirettes, qui consiste aussi à cracher ses poumons, enfin, plutôt à expulser un air trop vicié coincé dedans pour aspirer à grandes lapées cet air frais et pur même si c’est en faisant de petites enjambées. Au fond, c’était juste cela ses courses, qu’elles soient en solitaire ou bien en groupe, qu’elles soient tranquilles ou bien un peu plus sportives, il parcourait ainsi le monde, son monde, celui-là juste au bout de ses pas. Depuis combien de temps marchait-il ainsi ? Peut-être bien depuis toujours, ce toujours qui nait avec les premiers pas, et ses premiers pas, c’est ici, au cœur des Pyrénées majestueuses, dans ces Hautes-Pyrénées qu’il les avait faits. Cauterets, Gavarnie, des lieux qui resteront à jamais magique parce qu’à jamais associés aux premières souffrances des premiers pas. Ces pas premiers qui génèrent tant d’effort à acquérir la posture verticale à grand coup de maladresses, ces premiers pas qui génèrent tant de sourires et d’applaudissement des ces adultes qui décidément ont du oublier combien il n’était pas facile de couvrir de la distance ainsi érigé. C’est qui se croiraient drôles en plus de reculer au fur et à mesure que l’on approche du but, négligeant l’effort surbambin de ce pas après l’autre. Tout cela le faisait sourire en revenant dans le film de son enfance tout droit sorti des ses souvenirs, juste parce qu’il était revenu ici, sur ce grand chemin qui monte vers le fond du cirque de Gavarnie. Comment ne pas être émerveillé par cette muraille si impressionnante et dont la nature, n’en déplaise à Roland, à Durandal et aux chansons de gestes, avait ébréché la roche d’une dent de moins donnant toute caractéristique au lieu. Comment ne pas retomber en enfance devant le défilé paisible des ânes portant les promeneurs ? Comment ne pas s’émouvoir du chant du Gave de Pau qui essaie de répondre en écho au grondement de la grande cascade ? Comment ne pas s’émerveiller de voir ces magnifiques sapins, droits, résistant aux vents, aux aiguilles plates, si riche de vert bien plus majestueux que celui du jardin familial ? Tout ici n’était qu’énergies, joies et sourires, parce que l’enfant y a gratté ses premiers genoux à trop tomber, l’adulte qui y revient aujourd’hui voit ses yeux s’embuer de douce mélancolie.

Sac sur le dos, chaussures hautes, c’était pour ainsi dire sa seconde peau, tant de fois habillé ainsi et à vrai dire, bien plus à l’aise que dans les déguisements de villes de son autre vie, celle de la semaine, aux courses moins poétiques, aux files interminables de voitures plus ou mien alignées le long des axes routiers. Là, il était lui, le béret vissé sur la tête, les pensées légères, il quittait la piste large pour attaquer la grimpette en direction du refuge, il quittait aussi la foule pour le début de l’échappée solitaire, l’échappée belle… Quelques pas sur ce sentier en lacet, et déjà les mètres de dénivelé s’empilaient, le voilà dans une prairie coincée entre rochers et sapins, entre délicats colchiques et mousses gorgées d’eau. Le refuge semblait en équilibre sur le bord du rocher, petit, frêle mais…loin…encore loin. Rien ne sert de courir, il faut savoir partir à point, marcher, un pas après l’autre, s’élever sans s’enivrer de ces fausses ivresses, voir, goûter à la fois des paysages et de la texture du sol sous les souliers, lire dans la nature les traces anciennes, celles des hommes, celles des animaux, celles de la flore qui vient faire pousser ici une bruyère, là un champignon et puis, juste après ce lacet, trouver enfin la bifurcation, celle qui part sur la droite, tout droit vers la paroi lisse. Serait-ce un piège ? Une impasse ? Non, au fur et à mesure des pas, le sentier oblique vers la gauche, la paroi s’ouvre et se dégage, laissant place à une autre paroi qu’on dirait décorée pour l’occasion, de multiples petites fleurs émergeant des mousses accrochées on ne sait comment à la roche.

Il est parfois des surprises belles lorsqu’on quitte le droit chemin. Certes, la course est la même si on n’en retient que le point de départ et celui d’arrivée, mais au lieu du chemin monotone qui embarque les hommes et les ânes vers le cirque, ce sentier en balcon ajoute bien plus de rythmes et de couleurs et ne dévoile le but qu’au dernier moment. C’est là une leçon de la vie : il faut savoir quitter les chemins tout tracés pour redonner à sa vie un sens, le sens. Quitter les rails, c’est se mettre en danger, se mettre aux aguets, raviver ses sens et prendre conscience de tant de choses qui existent mais restent invisibles vues de l’autoroute, trop de bonheurs devant lesquels on passe si près tout en étant si lointain parce que fermé, parce qu’aveugle de trop voir, de trop connaitre, de trop savoir où l’on est. Chercher sa route, c’est la trouver bien plus que lorsqu’on glisse sur les rails des indifférences.

Aujourd’hui, ici, dans ce lien du présent ayant avivé son passé, il sait qu’il a trouvé sa voie, quand bien même chacun de ses pas n’aura jamais l’assurance d’un parcours sans difficulté.

Aujourd’hui, ici, il vit.    

Putain de crabe


Putain de crabe qui jour après nuit ronge le corps de mes amis, le corps de mon sang, le cœur des proches, mon cœur aussi, parce que quand même moi aussi j’ai un cœur quoi qu’on en dise. Un cri de colère, en toute impuissance devant ce démon d’adversité, un ras le bol devant ce fléau qu’on n’arrive jamais vraiment à endiguer, en dépit des rayons, de la chimie, vraies guerres de notre troisième millénaire, une explosion d’être touché encore de plein fouet et de près, merde, ras le bol, zut ! Se sentir impuissant même lorsqu’on bénéficie de « don du ciel » qui arrive à soulager et soigner tant et tant de personne, arriver à calmer la douleur sans la détruire, merde, je ne supporte plus. C’est quoi ces récidives qui s’en viennent récidiver juste quelques jours après que la séance de radiothérapie s’annonce bonne, juste après des scans manuel qui ne détectent plus de chaleur, juste après ces jours de mieux à cueillir les bonnes énergies du bel océan ? C’est quoi cette merde qui s’acharne, pas après pas, jour après nuit, chair après chair, émotion après émotion ?

Putain de crabe, j’ai la rage de te subir, parce que tu es un pire chauffard que le pire des chauffards qui dégomme à coup de virage mal négocié, de vraies belles amitiés et plus si affinité, parce que tu es aussi con et aussi aveugle que toutes ces erreurs judiciaires, erreurs médicales qui s’en viennent nettoyer une à une les lignes de mon répertoire ou du répertoire de vie de mes proches, mais qui tu es à la fin et non qui tuer à la fin ! STOP ! La colère n’est que mauvaise conseillère, mais elle reste libératoire, exutoire de tensions, de peurs, d’émotions en tout genre débordant d’un vase trop plein, et si ces mots sont sombres, explosifs, violents, ils n’en demeurent pas moins inquisiteurs, car ils interrogent vraiment au plus profond du soi pour mettre en lumière ce qui est réellement le sens de nos vies et l’ordre de nos priorités. A quoi serviraient les leçons si elles n’étaient pas suivies de remise en cause ? A quoi servent les panneaux indicateurs si nous nous croyons au-dessus des lois ? A quoi bon les alertes si nous pensons avoir le temps pour nous, le temps de voir, le temps de faire ?

Putain de crabe, devant qui on se sent impuissant, devant qui on se prosterne en larme, membre après membre. Difficile de ne pas reconnaitre ta victoire devant tant et tant de pièces importantes tombées, mais, comme aux échecs, c’est la position du roi qui détermine l’issue de la partie, et là, le roi est debout, il te regarde droit dans les yeux, et il changera ses stratégies afin de te vaincre, quand bien même tu feras tomber mes pions, mes tours, mes fous et ma reine, non, sois en sûr, tu ne vaincras pas, ta facilité de prendre les gens en traite ne t’auréole d’aucunes gloires, tu pues la mort, ta propre mort, oublie ce chemin, tu es encore au seuil d’une impasse qui ne sera que ton champ de défaite. Mais qu’est-ce que tu crois ? Qui que tu sois il y a toujours un plus fort que toi, un crabe supérieur qui vient te cueillir en traite au réveil de jour de fête, parce que vivant, parce qu’heureux, parce qu’enfin …bien. Et non, les victoires ne te sont ni dues, ni offertes et surtout pas méritées. Profite, la tienne approche, tu crèveras de ton arrogance, de ta facilité à faucher de ci, de là, pédant impudent, trop fier et trop sûr de ton métier, c’est par cela que tu disparaitras. Sois en sûr.

Qu’importe la couleur des rubans, la pousse des moustaches, le combat est partout, fort, intense, mais n’oublions jamais que la partie d’échec ne se termine que par la prise du roi, et que le roi ici, chez nous, c’est nous et nous seul, qu’en dépit des alertes, des atteintes, la foi, notre foi, notre intégrité devant ce qui reste l’ennemi ne peut-être que notre moral, notre faculté à soutenir à sourire, à apporter amour et réconfort à toutes les personnes, proches, très proches, frappées de ce fléau. Combattre par la vie ce putain de crabe moqueur qui ne doit jamais prendre son rôle dominant pour mieux le dominer et le mettre hors d’état de nuire. A jamais.

Courage et pensées, parce que nous sommes tous là pour toi….

Voile de conscience


Il y a comme une magie dans ces paysages d’automne, lorsque la brume envahit la lande, estompant les contours trop familiers de ces repères de lieu, lorsque le givre des premières gelées s’en vient enrubanner les brins d’herbe pour éclater en crissement de tendresse à chacun de nos pas. Le vent s’était enfin posé durant la nuit, cessant de secouer les chênes et d’en faire choir les glands dans un bruit de mitraille se mêlant au martèlement des pluies incessantes de ces derniers jours. Il s’était levé très tôt, avant même le soleil, bien visible en cette aube claire, les rayons timides jouaient avec la brume, faisant des paysages connus un théâtre d’ombres chinoises. A voir ainsi le jour se lever tandis qu’il achevait son petit déjeuner lui donna l’envie de s’en aller se dégourdir les jambes et, ni une ni deux, il rassembla quelques affaires dans son sac, quelques aliments, de l’eau, s’habilla et se mit en route, direction ce point magnétique où les montagnes rencontre l’océan. La période était la plus propice, les hordes de touristes avaient déserté le littoral, la vie semblait s’être mise en harmonie avec le calendrier des vacances scolaires, seules quelques maisons allumaient l’aube de leurs fenêtres éclairées. Les sonnailles trahissaient le réveil des troupeaux tandis que l’humidité de l’air excellait les parfums de la terre. Le froid était vif, avec cette étrangeté qui le fait sentir plus vif au fil des heures du jour naissant, comme si le combat entre le gel de la nuit et la chaleur solaire restait à l’avantage des glaçons.

Premiers pas, à travers cette lande, spectacle quasi féérique, où le ciel et l’eau, la roche et la lande, le relief et les vagues se confondaient dans une même palette de coton gris. Les oiseaux criaient leur joies de jouer ainsi à cache-cache entre les éléments, les vagues mugissaient plus fortement comme pour en chasser la brume qui leur collait à l’écume tandis que les buissons d’ajoncs fleuris s’éveillaient sans bruits, juste révélaient-ils par l’aide de l’humidité nocturne, des pièges de toile fine savamment tissés par des armées d’arachnoïdes en quête de pitance. Premiers pas surement ce matin sur ce sentier, le village disparaissait derrière, peu à peu la brume éteignit les lumières trop artificielle, peu à peu la brume l’enveloppa, comme pour mieux l’isoler des choses des hommes, comme pour mieux lui offrir la nature et ouvrir son esprit à ce qui est plus que tout notre monde. Le brouillard est un être triste, quasi maléfique, la brume est une fée qui sait jouer les muses en gommant les murs qui contraignent que de trop les neurones. Comment était-ce avant ? Ces paysages sans humains, cette lande dévorant à foison l’espace, juste limitée par la roche des montagnes et par l’eau de l’océan, un désert de végétation, une lande sans fin, une chose somme toute étourdissante. Car sans l’homme, point de chemin, pas même de sentier, peut-être quelques sentes animales.  Mais si la promenade est aujourd’hui possible et facilement accessible, c’est bien par ce travail effectué, par ces barrières posées, par ces zones aménagées, par ces repères en couleurs traçant les parcours, et même si certains n’en comprennent pas le sens, et même si certains jouent à masquer, à détruire peut-être parce qu’inconscient du rôle de chacun, ici et là.


Il s’arrêta un instant contempler ces couches de gris d’où jaillissaient ces sons, souriant à ce juste équilibre d’être ici, seul à profiter de l’instant tout en étant au cœur des réalisations humaines, proche de ces communautés dont on ne perce jamais les liens mais qui œuvre dans l’ombre de notre conscience pour qu’un quidam comme lui, puisse par un matin éteint profiter de ce coin de nature en toute assurance. Il reprit la marche, le sentier grimpait plus fort désormais, il se rappelait bien cette montée, la barrière de bois, les buissons taillés, la vue sur la baie, enfin, pas encore, mais est-ce parce qu’il se rapprochait du ciel et du soleil qu’il semblait y voir plus clair ou bien est-ce la montée trop rude pour la brume qui la faisait s’époumoner ? Le voilà ce moment délicieux, cet instant quasi de grâce où d’un coup le voile se déchire et révèle aux yeux présents et ouverts le spectacle du monde. Saisissant. Rien que pour ce moment-là, être là, être venu, avoir marché dans le froid du matin, ne pas avoir attendu que le jour soit plus haut. Etre là et en être heureux, parce que la communion nait de ces charmes opérant, parce que le monde ne se révèle qu’à ceux qui veulent bien le voir, sans forcer personne, sans contrainte, juste un rendez-vous intemporel, une émotion qui nait de la croisée de deux mondes, celui de la nature dans ses phases de vies, celui de l’homme qui s’offre ce luxe gratuit de vivre et ressentir les choses au plus près de leurs berceaux. De ce moment magique, il sut que désormais, la journée sera belle, et qu’après ce jour, d’autres jours et d’autres émotions viendront réveiller en lui la magie de cet instant présent. 

Pluies océanes


Pour bien connaitre un endroit, pour bien connaitre un ami, il faut avec lui traverser mille étapes, mille temps, il faut avoir mis le temps de côté pour vivre pleinement l’endroit, pour connaitre toutes les facettes, voir briller sa vérité jusqu’en des gouttes de pluies. Aujourd’hui, de ce côté-là, nous voilà servi ! L’océan est gris mais non triste, il fait le gros dos et se moque de ces gouttes de pluies tombant en rafale qui ne le mouillent pas, seul peut-être le sable se fait plus collant, l’air de dire « s’il te plait, amène-moi au sec ». Bien sûr, il n’y a personne, qui serait assez fou pour s’en aller sur la plage un jour de novembre où la pluie tombe en trombe ? Un fou ? Peut-être, mais la folie n’est-elle pas la vie ? Un grain de folie pour mettre un peu de piment, d’Espelette bien sûr, dans la vie, ou plus simplement, un amoureux de ce coin de terre, un ami de l’océan, un assoiffé de nature et d’embruns, tel était l’homme qui marchait en ce jour de pluie.

La tête coiffée d’un béret, traditionnelle coiffe de nos montagnes, étrange assemblage d’un brin de laine roulé, puis foulé qui vivait aux intempéries en servant tout autant de pare soleil que de parapluie, matière naturelle laissant respirer le cuir chevelu ou bien, comme aujourd’hui, en gardant le poil au sec, le corps au chaud dans la parka étanche, il marchait sur ces chemins déserts, avant de gravir la dune puis de s’approcher des rouleaux d’écumes, attirant comme des aimants. L’instant d’un week-end, une pause qui se pose naturellement au plus près des éléments, dans ce coin de terre-ci, si familier et si étranger, si enrichissant, parce qu’ici les énergies ne sont pas fortuites, qu’elles y sont gratuites, qu’il y fait bon s’en nourrir, quel que soit le temps, qu’il fasse rire et chant, soleil et chaleur, qu’il fasse pleur et froid, pluies et pluies. La saison était passée depuis quelques semaines et la plage si propre hier était jonchée déjà de bois, de bout de filet, de bidons, tout ce que la tempête avait su y raccrocher. Il se dirigea vers un tronc et s’assis face aux éléments, le visage détendu et souriant devant tant de force, tant d’immensité, tant de tumultes dans un calme parfait, une belle leçon encore de dame nature. C’est devant tout ce spectacle sans limite que l’on mesure le mieux la futilité des choses, des choses dites comme des choses non dites, des envies de tout arrêter comme de la folie de poursuivre, un juste retour des choses, oui, c’était bien cela. Tant de temps avait passé depuis les derniers voyages ici, tant d’épisodes, d’épreuves, qu’il est bon de pouvoir y venir aujourd’hui, pour des retrouvailles, vivantes et vivifiantes, une perfusion de vie qui s’en vient irriguer les veines et nourrir la vie de vies, d’énergies, apaiser les angoisses, panser les blessures, soulager les peines. Comment pourrait-il ne pas venir et revenir ici, comment pourrait-il s’en éloigner à jamais ?

Magie du cycle des marées, la voilà qui remonte et la pluie comme effrayée s’éteint, laissant un sable humide, des pins tristes dégoulinant de pleurs à chaque aiguille, des oyats gardant tête basse devant ce ciel bas et gris. Le gris de l’océan répondant au gris des nuages, mais si le premier sait garder ses reflets vert tout en se parant d’ocre à l’approche de la plage, les cieux jouent en palette de gris clair en gris foncé, mais au fond, le bleu semble vouloir déchirer ce gris trop clair, trop fin. Les oiseaux de mer ou plutôt d’océan restent à l’abri dans les grands bassins de décantation, utilisation naturelle des constructions humaines, c’est assez surprenant de voir ces oiseaux blanc sur l’eau sombre et immobile, c’est aussi l’occasion de les voir de près. L’homme était devenu un oiseau posé, assis sur son perchoir de bois flotté, il regardait l’horizon sans bateau, puis les limites qu’offrait aujourd’hui le paysage : au sud, la brume en fermait le regard, une ligne diffuse entre océan et ciel, tandis qu’au nord, l’entrée du bord, la jetée, dentelle de bois posée sur l’eau, les bâtiments dessinant la côte, fermée par ce grand cube de briques rouges pour sportifs en phase de reconstruction, il en sourit en songeant que là-bas on soignait les corps tandis qu’ici, l’océan soignait les têtes… Il est vrai que les soins commencent par la déconnection, le relâchement, le détachement, l’apaisement que ces lieux de nature ne peuvent qu’apporter, instants si puissant qu’ils savent prendre le pas sur les futilités de notre monde, sur l’inutile en rapprochant le corps de l’esprit, en recentrant les choses sur leur juste équilibre, ce juste équilibre qu’il nous manque parfois de retrouver, par manque de temps ou mauvais priorité.

Le ciel s’assombrissait en venant d’Espagne, la lumière baissait les l’humidité de l’air semblait retrouver du mordant. Il était temps de rentrer, des pas lourds sur le sable lourd, il n’était jamais agréable de quitter cette endroit, tout comme il n’est jamais agréable de se séparer, si les joies sont aux retrouvailles, le cœur se serre lorsqu’il se sépare…

Majorité et maturité


Lettre ouverte à un grand bonhomme. Et oui, bientôt tu vas avoir dix-huit ans, tu vas être majeur, le monde t’appartient, tu vas pouvoir enfin faire ce que tu veux, comme tu veux, quand tu le voudras, finis les ordres des adultes, tu seras enfin un adulte. Enfin, ce n’est pas si simple mon grand. D’abord parce que majorité ne rime pas avec adulte, ni en vers, ni contre tous, certaines personnes ne réussissent jamais à être adulte, quand bien même elles vivent très vieilles, d’autres au contraire, n’attendrons pas d’avoir deux chiffres à leur âge pour déjà être adulte. C’est dur la vie quand ça donne des leçons. Toi, tu vis dans un monde où la terre est bien ronde, où l’argent même sans couler à flot arrive par les petites rivières des parents, des grands parents, des voisins, des amis, de la famille et, c’est bien connu, les petits ruisseaux font les grandes rivières, et toi, tu navigues sur ce fleuve. Un sourire, à peine charmeur, un presque claquement des doigts, et voilà, l’argent est là, un blouson, des chaussures, un portable, des jeux, le code, le permis… Comment t’en vouloir ? Le système actuel est ainsi, tu t’en sers sans le savoir et en tout cas sans réaliser combien il y a eu de peines, d’efforts, pour que naissent ces ruisseaux qui t’abreuvent. Il fut un temps où l’on disait : « tout travail mérite salaire » désormais on devrait dire « tout salaire mérite travail » car au fond, que fais-tu en retour pour ces personnes qui t’alimentent ?

Bien sûr, il y a les copains, les jeux en lignes, internet, ces jeux vidéo, bref, un autre ordre de priorité, ton ordre, tes priorités. Dans ces presque dix-huit ans, j’ai grandi à tes côtés, j’ai été là, souvent, très souvent même, un rôle à part, une complicité à part. Aujourd’hui, nos chemins se séparent, je ne t’apprends rien, non que je n’ai plus rien à t’apprendre, mais juste que tu n’es plus disponible pour apprendre, tu traverses une phase de l’adolescence où l’on croit tout savoir, où l’on croit avoir tout compris, où l’on croit être grand, adulte. C’est ton  chemin, ton parcours, ta vie. La mienne est plutôt derrière moi, et je te regarde t’éloigner, pire, je te sers de taxi pour mieux t’éloigner. Des gens que tu quittes, il y a des visages que je connais trop bien, une lumière sur des actes de mon passé que je lis aujourd’hui à travers tes gestes. Papy n’exprime rien, un presque sourire de bonne figure, un masque qui cache la douleur de l’incompréhension, surtout lorsqu’elle devient mutuelle. Mamie s’enfonce un peu plus dans le triste, la fatigue et cesse de combattre face à ses douleurs. Elle accuse le coup, elle sombre, elle est sombre et humide de pleurs. Cette mamie qui te pleure, cette mamie que tu ignores par complexe de supériorité face aux temps, prends garde mon grand que ce ne soit pas là ses derniers instants, parce que pleurer en portant des fleurs à une tombe froide n’effacera jamais le loupé du présent. Cette femme, elle t’a nourri, elle t’a bercé, elle t’a torché bien plus que ta propre mère, cela, ne l’oublie jamais. Ce grand-père, il en a fait des kilomètres pour toi, des bricoles, des choses immenses pour que ta vie te paraisse douce, joyeuse, et brillante. Peut-être aussi, parce que la première génération de ses enfants, sa propre chair, il devait écumer les routes, faire des journées de travail à rallonge pour que vive les siens, cela, ne l'oublie jamais. Tu vois mon petit gars, ça, je l’ai compris que très tard, parce que je mangeais la viande dans mon assiette sans voir qu’il ne restait que des légumes pour mes parents. Parce que j’ai compris la valeur d’un franc bien avant qu’on ne joue en euros, parce que le poids des charges se mesure en agios et en découverts certains mois de l’année, j’aimerai être assez fort pour arriver à ce que tu réalises cela. Bien sûr, nous avions la chance de vivre avant internet, avant les portables, avant les fringues à la mode dont les prix à trois chiffres valent des quatre chiffres de nos francs. Bien sûr tu vis dans un monde ingrat et difficile, mais tu as des mains et surtout des cœurs autour de toi prêt à te venir en aide, en conseils, pour t’aider à mettre la lumière sur tes zones d’ombres, mais là où je ne pourrais jamais te comprendre, c’est dans la souffrance que tu laisses grandir chez les tiens, surtout lorsqu’ils sont miens.

Voilà, parce que te parler devient dur, parce que tu préfères des écouteurs au fond des oreilles et le son à fond, parce que tu te coupes toi-même du monde, je t’écris, peut-être me liras-tu, peut-être pas, peut-être le feras-tu un jour où il sera trop tard, pour les miens, pour moi mais pas pour toi, parce que si ce jour-là tu cherches à comprendre, les larmes qui sortiront de tes yeux auront comme couleur l’amour d’une mamie amoureuse de toi comme de personne d’autre, les larmes d’un papy trop fier pour te les montrer et pourtant, si tremblant d’émotion de de peines, les larmes d’un parrain qui aura essayé, au moins essayé, de te tenir la main.

Voilà, cette main est partie… Bon vent…

Cèpes


C’est pas la première fois que les cèpes sont là

Cèpes là, cèpes ici, c’est parti pour la chasse aux cèpes

Ces pas par là, c’est pas par là, c’est par ici, cèpes aux pas

Cèpes, cèpes, nous voilà, amateurs, randonneurs, cèpes

C’est pas le bon jour, pas la bonne lune, c’est pas le tout

Un bol d’air, de la bonne humeur, des pas, c’est pas mal

Cèpes, cèpes, cèpes venez mes amis, du bois au panier,

Un berceau de fougère pour une ambiance légère

Un panier en osier, pour qu’ils restent bien aérés

Une chasse à plusieurs, pour la bonne humeur

Un jour d’automne, non monotone,

C’est cela le bonheur

Cèpe ou pas cèpe
Là, n’est pas la question


Allons bon !