vers l'infini

Ce n’est pas une fuite, pas même une disparition. Il n’est plus, simplement, tout simplement. Le temps pleure et s’engouffre dans son vaste couloir, il arrache les pages aux numéros successifs, passent les jours, les semaines et les mois, il n’écrit plus et ceci sans émoi. Autres temps, autres mœurs, tout se meurt sans heurt ni malheur, les jours sombres ne trainent pas leurs ombres c’est en cela qu’ils sont plus véloces que les beaux jours. Mais qui donc est-il apte à juger ? Le bien n’est mal que si on le compare au mal lui-même, est-ce un mal ou un bien, il n’en sait rien, et à vrai dire, il n’en a cure. Oublié, fatigué, loin d’ici, voguant vers l’eau de là, la voile claquante dans un ciel ni trop clair ni sournois, il glisse sur la mer des indifférences et s’éloigne vers d’autres ports, loin des porcs rugissant leurs haines à deux balles, des balles bien calibrées dont on torche les murs, les fauteuils, les décors rouge sang. Qu’importe l’avis, il y a toujours du pour et du contre, qu’importe la vie, il y a toujours des purs et des durs, qu’importe le lavis de ces jours trop gris.


Faire face, c’est être debout, là, même las, juste après la préface. C’est aussi tourner le dos à ce monde qui ne se colore qu’en éclats de morts, en guerre sournoise, en peurs viscérales. Il n’est plus. Paix à son âme. Mais que diantre ! Qu’on lui foute la paix, à lui et à son âme ! En quoi serait-il devenu anormal de préférer les senteurs iodées d’un jour qui se lève dans les frimas de la nuit noire et étoilée ? Pourquoi faudrait-il aimer d’autres tâches de sang que celle des fragiles coquelicots sous le Cers rageur ? Comment pourrait-on se passer de cet instant futile où l’on cueille l’ivresse juste dans un rayon de lune ? Son âme est en paix et quand bien même, en quoi cela gênerait-il quelqu’un ou quelqu’une ou bien encore quelque chose et en quelque chose? Faut-il donc se soucier des uns plutôt que de se soucier de soi ? Le bonheur est un imposteur qui ne nait pas dans l’autre mais grandit en soi et si la vie peut parfois paraitre dure, ses pentes n’en sont pas moins douces à qui choisit de les gravir plutôt que de s’en effrayer. C’est aussi cela faire face, au fond, les tracas ne sont que des grains de sel sur l’insipidité de nos vies, ils sont des grains de pollen qui bien digérés donneront le miel de notre vie. Allez donc butiner en vos prairies plutôt que de chercher ce qui pousse dans le jardin de l’autre, non pas que ce jardin soit secret mais parce qu’il fait si bon chez soi et surtout, parce qu’il n'est pas meilleur terrain que notre propre espace. Peu importe qu’il ne soit plus, peu importe que son pré carré devienne jachère, folles herbes ou vaste espace fleuri, ce n’était qu’un bout de vie posée sur un bout de monde. Peut-être bien même que ce n’était que quelques hoyas graciles sous le vent frais du soir peuplant un bout de dune arrosée aux embruns sauvages, loin des foules, loin des ports, de ces coins où seules se posent les âmes aimant à se ressourcer.

Le vent souffle, léger et froid, il soulève les grains de sables les plus légers, sait-on seulement où il les emmène ?  Entres vents et marées, il y a la dune, les vagues, il y a la lune, les étoiles, il y a des pas qui se perdent vers l’infini. C’est joli l’infini, c’est peut-être par là qu’il s’en est allé….