Un autre éclat


Depuis quelques temps déjà, les lumières lui paraissaient d’un autre éclat, les couleurs lui semblaient plus lumineuses, le monde s’éveillait différent. C’est là un juste retour des choses, lorsque quelque chose nous parait différent, c’est que ce quelque chose a changé, pourtant, entre deux pôles, celui qui montre et celui qui voit, pourquoi dont-on focaliser que sur celui qui montre ? Diantre, il est difficile de se dire que l’on a changé, après tout, ce sont toujours les autres, humains, événements, lieux, qui sont les fauteurs de troubles, c’est si facile et terriblement humain, tellement plus court de dire que c’est sa faute à lui plutôt que se tourner la phrase à la première personne, se recentrer dans l’action pour mettre en lumière les actions qui nous feront grandir et sortir de l’ornière. Las, il était là à regarder cette atmosphère particulière, à noter ces couleurs plus intenses, ces odeurs si nouvelles, et l’idée lui vint : et si c’était lui qui avait changé, modifié son regard, ouvert ses sens, pris un autre angle, et si c’était lui qui venait de changer de perspective et au fond, de regarder avec le cœur ? Antoine de Saint Exupery fit dire au petit prince « on ne voit bien qu’avec le cœur » et cela le fit sourire puis rire de bon coeur, parce qu’à s’élever, parce qu’à s’alléger, ses rires n’étaient plus coincés sous une chape de plomb, au contraire, ils pouvaient se déployer, s’échapper en criant leurs bonheurs, ils pouvaient circuler librement, le monde s’ouvrait à eux, comme l’oiseau quittant sa cage, les ailes déployées, les petits cris perçants devenant peu à peu un langage de joie. Quel éclat, quels éclats, de rire et de couleur, une vraie lumière de bonheur qui éclairait le monde et lui renvoyait des images bien plus intense. Comme la lune qui éclaire si bien en renvoyant les rayons du soleil caché de l’autre côté du monde, les choses nous apparaissent selon l’intensité qu’on leur envoie.

Au fond, rien n’a changé, l’arbre est toujours arbre, l’herbe toujours verte, simplement, aujourd’hui, il est assis ici à contempler ce paysage vu des milliers de fois, et pour la première fois, il voit. Il voit les couleurs, riches de nuances, il en voit les vibrations dans cet halo étrange qui habille les contours des branches, il voit les odeurs douces et acres, suave mélange, unique parfum de ce coin de terre si familier. Au fond, tout a changé, les feuilles ont grandi, certaines sont tombées, d’autres se sont flétri, même l’herbe s’est couchée par endroit, le vent ou bien une bête, peut-être tout simplement un homme à la recherche d’un je ne sais quoi, un trèfle à cinq feuilles, un champignon, les premières châtaignes, peu importe, l’herbe est couchée, elle a plié sans rompre, elle s’est avachie mais se relèvera, juste dans son temps à elle, ni rapide, ni lent, une vibration personnelle pour un paysage commun. Il est assis là, sur ce caillou qu’il aime, devant ce paysage qu’il adore, au loin les sommets commençant à mettre leurs cheveux blancs, là-bas le fier château, et plus proches, ces fermes éparpillées dont les sonnailles rappellent que les troupeaux ont quitté les estives pour s’approcher des bergeries et autres étables, ce joli tintamarre joué tout au long des courbes de niveaux, chante au fond, la mélodie de la vie, celle d’ici, celle riche en couleurs, celle de son monde. Un nouveau regard sur ces choses si connues, une nouvelle vie par la perception, enfin, de sentir et de ressentir, de profiter pleinement de ces sens en tout sens, voilà qui est de bon sens. Il sourit à nouveau en écoutant les cloches égrener un temps, battre le tambour en sonnant les heures, mais quel que soit le nombre de coup, l’heure qu’il est, il s’en fout, c’est son heure, comme la précédente était la sienne déjà, comme la suivante le serra encore, parce que le temps des hommes n’est plus tout à fait le sien, parce que le temps qui est sien désormais, c’est celui du jour qui décline, offrant ses variations chromatiques à ces paysages si tranquille.

Le monde n’est monde que par notre perception, le regard sombre n’y verra que du noir, le regard clair n’y verra qui feu, c’est les yeux bien ouverts jusqu’au fond du cœur, l’âme offerte aux découvertes, même des choses si familières, on est parfois si surpris de tout ce qu’on croit connaitre, dès lors qu’on accepte de les voir en grand… Ce petit prince avait pourtant bien résumé les choses, mais les lectures ne servent à rien si l’on ne prend pas la peine de les mettre en pratique, essayer du moins.  

Calendrier


Halloween, Toussaint, Jour des défunts, trois jours qui se suivent et se mélangent dans l’esprit des gens et pourtant, trois jours bien séparés et dans leur contenu et sur le calendrier.

Halloween, le 31 octobre, c’est l’influence du monde anglo saxon, celtes ou bien encore mercantile, et si la tradition se perd dans la nuit des temps, son apparition quasi surnaturelle dans nos vies est bien réelle. L’occasion de faire de bons potages à base de cucurbitacées, encore qu’il ne soit pas nécessaire pour cela d’attendre ce jour précis mais plutôt le jour de la maturité, l’occasion aussi de voir tous les enfants du quartier quémander à grand coups de sonnettes, bonbons et friandises pour remplir leurs paniers sous risque de sort, mais au fond, lorsqu’on nous jette un sort, nous voilà assorti d’un sort venant du dehors, non ? Un sort qui rentre, contre un bonbon qui sort, voilà qui parait une transaction fort équitable….

Toussaint, la fête de tous les saints, celles aussi de tous les siens, ceux du monde des vivants, prenez patience, la fête des défunts est pour le lendemain, une suite logique, la vie avant la mort, non ? Qui fête ces êtres proches et vivants ce jour-là ? Qui a l’humeur festive alors que nos paysages sont couvert de chrysanthème et que par la faute du lendemain l’anathème de ces pourtant si belles fleurs est fait ? Pourtant, c’est là un jour de fête et même un jour férié, une pensée pour l’ensemble des vivants sans calculer si leur prénom figure ou non sur le calendrier, alors, par avance, puisqu’il est de bon ton de souhaiter les fêtes en avance et les anniversaires à l’heure, je vous souhaite cher tous, une belle fête de toussaint, je suis désolé si l’image première qui nous vient tous est celle du lendemain….

Le jour des défunts, la fête de tous les morts, même si cela n’est pas festif, sauf peut-être pour les fleuristes et quelques professions de service se servant de l’émotion des personnes les plus affaiblies par les souvenirs en affluence pour en soutirer quelques billets. J’avoue avoir peine aussi devant ces concours du plus beau vase, du plus bel espace fleuri surtout lorsque le reste de l’année, les pierres brillent par leur nudité. 
De ces deux dernières dates, depuis toujours je me demande s’il est la peine d’avoir des jours spécialement dédiés pour que chacun au fond de nous fasse amende honorable et sache exprimer par la façon la plus personnelle l’affection envers ses proches, vivants comme décédés. On a tous notre propre histoire, notre propre culture, nos propres ressentis devant cela, il n’y a tout simplement pas de règles, pas de lois, pas de conseils, pas de modes opératoires, juste que chacun en son âme et conscience puisse s’exprimer et exprimer ses sentiments par la manière qui lui sied le mieux.

D’halloween, je n’ai rien à dire, après tout, nous avons su rajouté la fête des grands-mères, celle des secrétaires pour laquelle je n’ai jamais compris, par mauvaise volonté je vous l’accorde, s’il s’agit du personnel ou bien du mobilier, ceci bien sûr, afin d’attirer les foudres des rires majeurs sur ces phrases mineures. Alors oui, halloween, bon, c’est une occasion festive dans la grisaille de l’automne, c’est une forme d’exorciser nos peurs chroniques, parfois maladives, de la mort jusque dans ses squelettes ricanant….Les dieux du commerce sont décidément trop forts. Vous l’aurez compris, la lecture nécessite le sourire et la couleur que les fleurs de chrysanthèmes viennent apporter en ces jours plutôt moroses. Une pause récréative et une juste remise à jour des jours qui trop souvent se mélangent et finissent par disparaitre en un seul vêtu de crêpe noir. Pour l’heure, je vous abandonne, ma soupe de potimarron m’attend, et ça, c’est bien du réel…
    

Ma bohème


Comment penser à la Bohème sans imager cela d’une belle bohémienne ? Mes souvenirs s’en vont à la voix pure De Noa interprétant « bohémienne » le temps d’enregistrer le disque de Notre Dame de Paris et alors l’esprit voyage et s’en va visiter Victor Hugo et les soubresauts de cabri de la belle Esméralda….

Comment ne pas songer à ce temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaitre comme le chante si bien Charles Aznavour ? C’est donc cela la bohème, loin des puissantes béhèmes qui remplissent les parkings de banlieue ?

Comment ne pas songer aux accents grinçant des vieux bois d’une roulotte, celle-là-même qui logeait encore une bohémienne au cœur d’or, qui sur ces maigres économies de ses maigres allocations, m’achetait des soldats de plastique qui devenaient les héros de mes jeux d’enfants lorsque j’accompagnai ma mère venant y faire son ménage dans mes après-midi de mercredi sans école ?

Comment ne pas entendre au creux de l’oreille grincer ces violons tziganes en de romantiques et mélancoliques mélodies à la simple évocation de ce mot de bohème ? C’est un peuple qui raconte son histoire, c’est une histoire qui raconte son peuple, ce sont des notes qui courent de corde en corde, chipées par les crins d’un archet, une note par homme et par femme, par enfant et par anciens, dispersés aux quatre coin du monde, transmettant à qui veut les légendes et les contes, les musiques et les traditions d’un peuple éternellement exilé...

Comment arriver à transcrire, l’émotion et les sons que ce mot « bohème » s’en vient colporter, trace colorée, plaintive et festive, gens de peu qui offrent tant, gens de nulle part qu’on retrouve partout, gens de roulotte toujours par les routes ?

Comment traduire la couleur, les images, les mémoires, sans en galvauder les sens ni l’essence, parce que nos dictionnaires sont trop pauvres et parce que nous les appauvrissons chaque jour davantage en privant de sens des mots à multiples tiroirs ?

Comment ne pas sourire en s’identifiant bohème, du papier, un stylo, un cahier, un crayon, assis dans un avion, ou bien encore dans le train, au chaud devant la cheminée ou bien encore respirant l’océan, parcourant les sentiers bien plus que les routes, s’émerveillant devant les trésors que la nature donne, sans forcer, sans attendre qu’on le lui demande, sans priver qui que ce soit  de quoi que ce soit ?

C’est tout cela ma bohème, n’en déplaise au grand Charles, Aznavour, je précise, on peut être grand par les talents sans l’être de taille, bien que ce monsieur le soit aussi, un artiste de taille. 

Oui, la bohème, c’est écrire et dessiner, écrire ou dessiner, penser, regarder, profiter, être libre au fond et n’avoir pour maitresses que le temps, la nature et l’inspiration….
  

Eau salée salie


Se délasser dans l’eau salée,
Et sans délaisser l’eau salée,
Respirer l’air iodé, tout simplement
Oui, respirer l’air, eau, iode, salées,
Et là, soudain voir partir ses tourments
En vérité, noyés dans les eaux salées

L’eau sale est-elle salie ou salée ?
L’eau salie, salée ou non, se lave à l’eau
L’eau salée, salie ou non, se lave au beau
Les salins remplient d’eaux salées
Et en vérité quand bien-même salies
Se parent pourtant de blanc immaculé

Le sel de l’eau salée ne la salit donc pas
Mais comment pourrait-on croire au fond
Que c’est l’eau claire qui salit l’eau salie
Difficile d’imaginer au jour qui pâlit
Une eau sale laissant voir son fond
Non, vraiment, je ne le crois pas

Mais l’eau est claire et le sel pur
Comment l’eau salie peut-elle naitre
De ces deux composants de nature
Il doit y avoir autre chose à connaitre
Peut-être est-ce nos yeux trop salis
Ou bien de l’homme une anomalie

La terre et la mer sont des présents pour nos enfants
Et un présent pour leurs enfants et les enfants de leurs enfants
Alors chacun de nos gestes, si anodins qu’ils nous paraissent
Est un message que l’on laisse, blessure ou caresse,
C’est à nous de choisir le présent à présent.

Nouvelle adresse


Il vient un jour où le vent se pose, il vient un jour où la vie se pose, non pour autant qu’elle devienne inactive, non, juste en phase avec elle-même, une sorte de vibration en harmonie, loin des dissonances du passé, et ce jour sans vent, ce jour en harmonie résonne d’une douce mélodie. Cela faisait du bien d’entrer enfin dans sa vie, après des années d’errances, après des années d’errements, des recherches de soi à travers l’autre, des recherches de l’autre à travers soi, des rencontres futiles bien plus qu’inutiles, chaque pas fait avancer, chaque caillou fait dévier, chaque mètre parcouru est un maitre à penser. D’hier en aujourd’hui, quel parcours ! Tout juste pourrait-on parler de victoire mais victoire n’est pas le résumé des épisodes du passé, victoire serait un faux miroir d’une réalité, est-on victorieux lorsque les blessures, les blessés et les cadavres se comptent par millier ? Qu’importe si c’est l’automne de sa vie ou bien encore son printemps, ce n’est peut-être plus l’été, ce n’est peut-être pas l’hiver, juste une ivresse, celle d’être vivant parmi les vivant, échoué au milieu de la vie, seul et sans attache, naufragé volontaire de tant de naufrages, épuisé tout en étant plein de force, vivre comme une raison de vie, être comme une force première, vivant plus que vivant.

Le recul nécessaire, l’abstraction utile, les passions comme saisons, l’appropriation comme solution voilà ce qu’il fait qu’il est lui aujourd’hui. Les choix les plus simples sont toujours les plus inattendus, un jour vient où l’envie de tout foutre ne l’air s’en vient, tout, à commencer par soi, le plus simple, le plus radical, le plus accessible et le plus ratable ce qui pourrait en faire le plus désastreux, si la vision première n’était d’être là une deuxième chance. Partir ailleurs fut refusé, il était donc temps de partir ailleurs, non pas au-delà du pays des rêves, mais bel et bien dedans, au cœur de ses rêves, loin des tourments, quitte à s’isoler ou plutôt à paraitre s’isolant, les gens aiment bien qu’on leur tienne la main, sans vraiment voir ni comprendre que parfois leur main pourrait aussi se tendre. Détaché du monde, partit d’une adresse, plongé au cœur d’une autre adresse, un nouvel endroit, un nouvel espace, fait de murs à tomber et d’autres murs à relever, fait de choses si réelles, d’instants vrais, le partage des émotions, la richesse d’un moment, une pause café, un feu de bois, une lumière tamisée, des coups de marteau, des coupes claires, une poussière de plâtre, une lumière qui enfin traverse, habiter ici n’a plus rien à voir avec l’ancienne adresse. Partir pour repartir, se lancer pour se relancer, c’était sa clé, un credo parmi tant de lecture, un moment à soi parmi tant de dons de soi, il est, et surtout, il est bien, en phase avec sa vie, ni nouvelle, ni ancienne, les découpages en phases de vies n’implique que la responsabilité de ceux qui manient le couteau ou bien la hache, il est si facile de juger, de ne pas comprendre et enfin de rejeter ceux qui vous échappent sans vraiment voir ni comprendre que pour faire tenir un lacet, il faut deux boucles qui se croisent, s’enlacent et nouent ensemble le lien. C’est un mode humain de ne voir que la responsabilité de l’autre, surtout, ne jamais s’impliquer, parce que le risque de se remettre en cause, le risque de grandir serait fort. Trop fort.

Changer d’adresse. Comme hier le nomade courant de place en place, comme le pèlerin qui franchit les étapes, comme l’œuf  devient chenille et la chenille papillon, évoluer, changer d’air, changer de vie, de couleur, d’apparence mais au fond, l’essence de soi reste soi, juste qu’elle n’est plus dévaluée par les mauvais regards, les ceux-qui-savent, les ceux-qui-jugent, les ceux-qui-voudraient-qu’on-soit-comme-eux, les autres…. Les autres autres…. Le temps est un allié pour qui ne le compte pas, la quête est offrande pour qui ne cherche pas, la vie est bienveillante pour qui ne la viole pas. La solitude est partout, même dans les couples les plus soudés, elle est le refuge de l’homme, le cocon du futur papillon, elle est un état transitoire entre deux mode d’association, elle est et savoir cela c’est accepter de vivre avec et du coup, ne plus vivre tout à fait seul. Les projets dessinent leurs plans dans la réalité, la poussière blanche des anciens murs détruits deviendra bleu, jaune ou rouge, grise ou verte, blanche aussi, larme de couleurs, mise en peinture, tissage fin de papier peint, décoration et appropriation d’un espace à peine modelé, d’une vie sans cloison, d’une vie à foison, richesse des couleurs, richesses des mariages, mélange des genres, sorti de route pour créer son modèle, son chez soi, pour enfin se poser dans son monde à soi, une bulle qui sera bulle de partage, salle de lectures ou de soins, repos de l’âme et repos de l’homme, cocon du papillon, enfin seul dans son monde.

L'oeil ne voit pas ce qui le crève...

aimer n'est pas qu'un verbe


Les premiers frimas de l’automne jettent un coup de froid en rappelant combien hier devient hier et combien demain sera…un autre jour. L’été s’enfuit quand bien même il eut prolongé son automne dépourvu de sonotone, la jeunesse des beaux jours laisse place à d’autres jeunesses, le froid, parait-il est un excellent conservateur. Hier la pluie dans ses gros nuages noirs a noyé les paysages et le moral des noceurs, puis, d’un malin plaisir, Eole s’amusa a bousculé les choses, colorant de bleu les cieux, éclairant de soleil les premiers tours de roues et s’exerça à maintenir ce climat propice durant toute la fin de journée. Voilà, c’est la magie de mon pays, ce comté toulousain qui se forge le caractère sous les assauts des pressions et des dépressions venues d’Espagne, d’océan ou de mer, se cognant aux reliefs des Pyrénées ou bien du massif central jusqu’en montagne noire, deviner ce qu’il va advenir du temps nécessitent non pas des sacrifices sanguinaires mais une culture et une lecture de tous ces petits indices fortuits qui d’ici ou de là, laisse quand même transparaitre ce qu’il sera.

Sous le soleil, la mariée était belle, le marié aussi et la noce tout autant. Une pause dans la course du temps, des instants forts, des moments uniques et intimes d’une intimité partagée à une trentaine, un espace clos dans la coque d’une péniche voguant au long cours sur le canal du midi, c’est un repli sur les autres, une communion de conversations, une découverte des autres, une découverte de soi. L’eau verte du canal du midi chantait Nougaro, oui, par endroit elle est même mordorée, de ces couleurs d’automne que les feuilles de platanes flottant sur l’eau donne au parcours aquatique. Un moment fort sympathique, mais d’ailleurs, quand dans la journée cela ne le fut pas ? De belles images, de plaisantes conversations et des larmes d’émotions, parce que la joie, parce que les fleurs, parce que les rires se traduisent aussi en pleurs, parce qu’il y a un vécu avant d’avant ce moment-là, parce que partager, exprimer, s’est aussi ce rappeler ces moments où nous fûmes.  Cette magie fut prolongée jusque dans la nuit qui danse son heure à l’envers, repos mérité et accordé, fraicheur du temps et temps de couette, flambée de chêne en cuisinière de fonte, avant de repartir prolonger la fête, dire au revoir à tous ceux qui de loin viennent et prolonger les rires, les belles tranches de vie, oui, c’est cela la vie.

Le vent souffle et fait craquer les branches, novembre se profile déjà en octobre moribond, il va être le temps de s’accorder de belles balades, non pas en sommets pyrénéens mais en courses maritimes ou bien campagnardes, la parka en protection, le sourire toujours face aux éléments, aimer n’est pas qu’un verbe, c’est un état d’esprit, une philosophie. J’aime la vie dans ce qu’elle m’apporte, les rires et les chants, les pleurs et les fleurs, le temps qu’il fait comme celui qu’il fera, le soleil de l’été comme le froid de l’automne, ce froid qui n’est pas encore en hiver et du coup montre peut-être plus les dents, à moins que ce ne soit notre chair trop tendre et trop faible, mais dieu que la chair est faible et le cœur encore plus, l’âme navigue parmi ces éthers, que serions-nous si nous n’étions pas ?

La voie romaine


Le monde se construit-il ou bien est-il à son apogée, peut-être même a-t-il amorcé la courbe de son déclin, peut-être juste évolue-t-il, change sa fréquence de vibration, se prépare à un cycle de régénération, entrainant avec lui des générations de parasites lui chatouillant le caillou, c’est un fait, ou non, une future vérité ou non, plan ou contre plan, mais au fond, qu’y pouvons-nous sinon suivre avec lui cette nouvelle phase et se transformer à notre tour, s’adapter aux nouvelles fréquences, même si elles nous fatiguent aujourd’hui, nourrissent nos céphalées, dressent des maux aux jointures des éléments trop rigides de nos vies, pour grandir, il faut avoir garder sa souplesse, fut-elle celle de l’esprit. La rigidité est une frigidité qui  prive du plaisir d’apprendre, de comprendre, d’être. Un jour bientôt il sera temps d’apprendre et de dire aux gens les choses telles qu’elles sont, et ce jour-là, bientôt est proche, tout proche. Qui est-il, que sait-il, pourquoi dit-il tout cela ? Les arbres dans cet automne peinent à perdre leurs feuilles qui sont encore bien vertes, lorsqu’on n’est pas été grillées, brulées, desséchées par le printemps sans eau et l’été trop sec. Le bois souffre mais il résiste, il vibre étonnamment, et le ciel se pare depuis un bon bout de temps d’une lumière assez nouvelle pour ne pas dire étrange car étrange est un mot si riche de sens et pourtant si enfermé dans un sens unique fort déprimant. Pourquoi attendre, pourquoi ne pas donner les clés ?

Apaisement. Détente. Repos. Dans des sens non à plat mais plutôt tout plein de sens et de dimensions, car l’activité n’est pas inactivité tout en favorisant la détente, l’apaisement, le repos des neurones, bouger c’est s’oxygéner, c’est travailler aussi des tas de muscles dans des gestes pourtant si basique, et ces muscles tissent une toile solide qui maintient les os en place même lorsqu’ils prennent de mauvais angles et s’entrechoquent avec douleur….A une lette près, la douceur est douleur. Enfin la phase tant attendu est là, proche, elle arrive et le monde s’ouvrira sur d’autres lumières, d’autres compréhensions, il suffit de regrouper les clés, ces fameuses clés qui glisseront dans les serrures d’une agressivité de plus en plus fermée à double tour, enserrant le monde dans une impasse d’où il ne peut fuir. Treize clés, treize serrures, treize tours de clé, et la chape de plomb s’effondrera sous le poids de la conscience, et le monde basculera dans son temps d’où il n’aurait jamais dû être kidnappé. Justice ? C’est marrant come l’homme a appris la justice, et surtout, comment il a appris à s’en servir. Justice ? Non, retour aux choses dans leur cours, ce fameux cours des choses. Peu importe qui il est, qui elle est, qui détient les clés, qui détient l’ordre, l’endroit, l’envers, en vers ou en prose, le jour où le moment sera venu, tout sera si évident et si naturel que la surprise ne sera pas. Etrange, dérangeant pour notre monde si civilisé, si précis en toute chose, si calculé, si prévisible. Clés, chiffres, codes, énigmes, jeu de pistes, jeux de vies, les jeux naissent de la jeunesse, les jeux troublent les mots comme je trouble les maux, mais les maux sont en phase de guérison, et le souffle de la vie reste plus fort que d’autres idées bien plus raccourcies de la vie.

Chemin étonnant, mais chemin de vie, et sans impatience avancer et profiter de chaque instant, sentir et ressentir les hautes vibrations, les basses résonnances, voir les couleurs changer, le monde évoluer, c’est un temps majeur de nos vies. Il n’y a aucune règle, aucun précepte, aucune recommandation, si ce n’est d’être soi, en phase avec soi, en harmonie avec soi, cela parait si simple mais au fond, l’est-ce vraiment ? Laisse, vraiment…. Qu’importe si c’est par le Yoga, la lecture, la méditation, le bricolage, la décoration, la prière, le sommeil, le sport, tout cela ne sont que des vecteurs d’évènements, des pistes, des voies, des chemins et comme tous les chemins mènent à Rome, et que Rome reste la ville éternelle, que chacun choisisse son chemin, nous verrons bien si les étapes à venir font que nos chemins se croisent ou pas, s’ils se rejoignent ou pas, Rome est une grande ville, il y a de quoi s’y perdre, il y a aussi des points clés pour guider les pas et y trouver sa voie.

Une voie romaine…..

  

L'art et la manière


Il y a dans l’art, une manière d’exprimer les sens qui donne ce qu’on pourrait appeler l’essence de l’œuvre et que d’aucuns se plaisent à disséquer en l’art et la manière. Définir l’art sans faire de manière ne serait pas chose aisée, mais en faire des manières compliquerait un peu plus la tache. De là à dire que la tache soit une œuvre, il n’y a qu’un pas et même si parfois on peut entendre qu’un œuvre fait tache, il est plus rare qu’une tache fasse un œuvre. Enfin, tachons de tirer cela au clair, mais pour cela, doit-on considérer que tout art génère des œuvres, ou bien encore que l’art ne génère que des œuvres, mais au fond, qu’est que l’art, qu’est-ce qu’un art, qu’est ce qu’une oeuvre ?  Un sujet bien vaste, à prendre par le petit bout de la lorgnette, et surtout, avec humour et dérision, toujours, mode décodeur en marche, mode déconnait en force, tant pis pour ceux qui descendent au premier degré. D’un temps lointain dit de ma jeunesse, la bonne vieille ortf, soit l’office de radio télédiffusion française pour les souvenirs effacés, les leçons du professeur Al Zheimer, les trop jeunes, les pas assez vieux, les arrivants d’un autres temps ou bien encore d’un autre monde, bref, à ceux qui ont oublié ou bien n’ont pas eu la chance de connaitre le petit train rébus, bonne nuit les petits ou encore interlude qui coloraient de noir et de blanc nos écrans fièrement bombés de nos télévisions monocanal, bref, l’ortf nous affichaient crânement ces fameux chefs d’œuvres en périls qui à l’évocation du mot œuvre s’en vient rebondir dans ma tête vide.

Images du passé, image d’un passé où tout semblait possible encore, redresser les murs abattus, remonter les remparts, refaire les toitures et sauver un patrimoine sans calcul moderne de rentabilité post opératoire. Le sourire est aux lèvres ce que la vertu est au vice, à l’évocation de tout cela, on mesure aussi que les prix des matériaux ont subi une courbe exponentielle proportionnellement inverse à la courbe du courage des fiers bâtisseurs traversant les âges et les générations. Là où le sourire faiblit légèrement, c’est lorsque ces imbéciles de neurones encore synapsés se mettent à transposer du bâtiment au médical cette évolution… Et oui, le corps aussi tombe en décrépitudes et s’imaginer l’objet d’expertises en défilé pour statuer sur le montant d’un devis d’avant travaux ponctué selon les normes actuelles d’une évaluation du retour sur investissement basée sur la rentabilité au taux actuariel brut pondérés des lois de finances et de la cotation des marchés à l’exportation à part égales des robustas africains et des arabicas scandinaves, là, je reconnais que l’achat d’acide acétylsalicylique et surtout la prise journalière pour ne pas dire quotidienne s’avère rapidement nécessaire sans omettre de songer à l’herbe qui fait rire ou bien encore aux champignons hallucinogènes pour retrouver le sourire…. Et oui, c’est la crise, le jeunisme a fait long feu, et de ce feu il ne nous reste qu’à descendre les cendres en notre panthéon. Du coup, me voilà à regarder mon médecin d’un autre œil, et, depuis le temps qu’on se connait, puisque lui m’a connu très jeune, il doit avoir pris une sacré avance, forcément non remboursable en matière de devis et de cotations, ce qui, visite d’expert après visite d’expert, renforce son expertise sur le sujet, le maitre dépassant parfois l’élève d’un bon mètre, peut-être parce qu’il se courbe sous les efforts et élève son élève au niveau auquel il ne peut accéder lui-même, de là naquit sans doute les maisons à étages, les immeubles et peut-être bien les gratte-ciels, comme quoi, chercher du bon dans les banlieues reviendrait à regarder d’abord tout en haut. Il suffit pour cela de passer l’entrée et de gravir les odorants escaliers, une forme sans doute d’ascension sociale. Moi qui vit en ré de chaussée, même si loin de la chaussée et de la maréchaussée, la mesure d’une quelconque rentabilité est vite effectuée et voisine d’un niveau zéro…..

Sourire. L’art mène à tout, comme toute chose, l’essentiel est dans sortir, avec ou sans manière mais toujours avec dérision et autodérision, d’ailleurs, il n’est pas nécessaire d’être en voiture pour cela, l’autodérision est un principe de conservation actif, après tout, il faut bien que les cons servent. Comme conclusion, je rajouter de la modération, herbes, champignons ou bien encore acide acétylsalicylique ne sont pas des prescriptions mais des citations, je réserve les herbes pour mes assiettes, elles se cuisinent fort mal, les champignons pour mes cueillettes, et l’aspirine pour ma tête, le vide entrainant le vide, elle se remplit de courant d’air, de là à dire que le vide est plein d’air, c’est un raccourci fort littéraire et trop peu scientifique, alors, la parole est en l’air, et la place sur la page se vide…          

Un mur qui tombe


Un mur qui tombe, c’est la lumière qui circule, c’est la communication entre deux mondes clos et séparés qui enfin se fait, c’est l’unité qui se créée, l’union sacrée de deux parties qui fusionne en une entité. Dans une époque qui se cherche, dans un monde qui ne cesse de cloisonner, d’étiqueter, c’est le contrepied paisible et libératoire qui permet d’enfin s’unir, un nouvel espace en somme pour une nouvelle vie…. Mais où diable est parti l’esprit des gens qui hier encore célébraient la chute du mur de Berlin ? Actualité, mise en lumière soudaine et devenant exacerbée au point de rendre violente même les plus fortes images de paix, cette lumière trop blanche attire les papillons à la recherche de la dernière mode à la mode, de la dernière fête à fêter, un flot quasi incontrôlable qui se meut, de sujet en sujet, oubliant dans l’ivresse de la dernière actualité la précédente à peine refroidie. Le mur est tombé sous les coups et l’énergie rassemblée de milliers de personnes emportant avec eux le souvenir de ces instants jusqu’en des morceaux de gravas désormais éparpillés tout autour de la planète. Le mur est tombé et de ces deux allemagnes, une seule est née. Voilà, la chute d’un mur a construit la nouvelle vision d’un monde.

L’espace d’un instant devient un nouvel espace, le moment où la destruction devient construction, une forme de renaissance, une transformation… Que tombent les murs et qu’enfin la lumière soit… Après la mise en carton, après le déménagement, après la tendresse d’entasser des années stockées sur étagères en cartons, des cartons empilés en murs et puis des murs qui tombent, des papiers qui se déchirent et s’arrachent, des lustres qui ont perdu leurs lustres et s’en vont lustrer d’autres cartons, et la poussière blanche et fine du plâtre rendu à la lumière qui s’insinue jusque dans les moindres endroits des espaces qu’on croyait clos. Appréhension des premiers pas, des premiers coups, des premiers morceaux qui tombent, éclatent, et dévoilent une lumière, une nouvelle perspective, de nouvelles orientations, des choix différés qui soudain deviennent différents, parce qu’il est temps un jour de poser sa vie et de poser dans sa vie tant de projets qui l’accompagnent depuis tant de temps en volant au travers des rêves, au cours des méditations, ou bien encore des flâneries, parce que ces pauses pensives volent au final les rêves et puis parce que les rêves sont fait pour être vécus. Ainsi se dresse un jour le déclic qui s’en vient bâtir le projet tant de fois repoussé, tant de fois différé, parce qu’au fond, on a toujours de bonnes raisons, de saines occupations, du temps à passer ailleurs, des liens virtuels et réels qui sont des priorités dans notre vie sans que le degré des priorités associé en retour ne soit le même ni même existant. Qu’importe le retour, le chemin de l’aller n’en sera pas différent parce qu’au fond, il n’a jamais été calculé, parce que les dons n’existent que pour être donnés, parce que le temps coule insaisissable entre les doigts même en les gardant bien serrés au fond des poches, alors, autant les délier, autant se servir de ses mains, autant bouger, autant vivre, construire même si pour cela il est nécessaire de démolir. Une étape, une pause l’espace d’un instant de ces virtuelles réalités pour une réalité et la construction d’un nouvel espace.

C’est amusant de songer combien les bruits se déplacent : silence ici, coups presque assourdissant là, on devient transparent ici tandis qu’on se couvre de blanc là, tout est contraste, tout est fragile, futile, notre monde, notre époque, les mots, les liens, les croyances, les addictions, les sentences, les peines, les joies, et c’est tant mieux comme cela, il serait bien trop monotones de ne voir la vie que d’un seule couleur, tiens, tout comme cet automne qu’on dit peuplé de mille couleurs mais qui au fond ne ressort sur les toiles qu’en un même camaïeux de roussi, et même si les feuilles tombent et recouvrent une après l’autre jusqu’à former un linceul crissant sous nos pas qui masque le vert des prairies ou bien encore les écrits trop verts et trop acidement perçus, l’automne monotone n’est pas mien, la monochromie sied aux monocles, mais la vie est riches de facettes et sait briller de mille étincelles, de mille feux, de mille envies, quand bien même, tout n’est pas écrit, pas plus que tout ne sera jamais écrit, c’est aussi pour cela qu’il faut savoir lire entre les lignes sans se tromper de sens car les sens importent quand bien même l’essence l’emporte. Croire comprendre n’est pas comprendre, croire n’est pas être, on peut croitre, on peut croire, il vient un jour, tôt ou tard où l’on est, un jour divin où l’on nait. Automne, mon automne, non, tu n’es pas monotone mais plus riche et plus engendreur et plus enchanteur que le plus beau des printemps.

Paix et lumière, et que tombent les murs….

Reconnaissance


Ce que j’aime dans ces activités de randonnées pédestres, disons ce que je préfère, ce sont ces jours de reconnaissance, où l’on se retrouve en petit comité, entre animateurs pour parcourir des paysages dont nous ne connaissons que la version imprimée sur les cartes de l’institut géographique national, dans un exercice nous permettant de faire travailler nos années d’apprentissage passées au gré des formations, jouant de la boussole, de la lecture de carte, de l’observation du paysage, ici une colline, là une doline, pourquoi ce ruisseau sur la carte n’est pas visible ici ? Ah, justement, voilà le talweg ! Tout cela à notre rythme, sans pression d’un groupe à gérer, à encadrer,  dans la bonne humeur et la détente et surtout, un des rares moments où l’on se retrouve « entre nous » alors que lors de nos sorites du week-end, nous sommes dispersés dans les différents groupes à encadrer, nous ne nous voyons qu’au départ et à l’arrivée, parfois sur le lieu d’un repas commun lorsque les itinéraires s’accordent.

De cela, hier fut une belle journée, nous partîmes neuf et point de prompt renfort, nous arrivâmes neuf au port, n’en déplaise au Cid de Corneille, Pierre de son prénom, grand auteur de notre pléthorique dix septième siècle et non chanteur du vingt et unième, n’en déplaise aux autochtones. Le port, lui est bien réel, celui de Port-la-Nouvelle, sis dans le magnifique département de l’Aude, le seul de France à posséder, mer, montagne, plaine, viticulture, agriculture et élevage, villes et campagnes, et cela je le tiens de source sûre, puis c’est un audois qui me l’eut dit et même répété, je le cite avec reconnaissance. Port-la-Nouvelle, je connais les lieux pour y être allé plusieurs fois, même en reconnaissance d’ailleurs, et d’ailleurs j’y suis en toute connaissance. Boulangerie, tiens, celle-ci est à vendre ? Café, place pour faire faire demi-tour au bus, et oui, la logistique fait partie du travail premier. Enfin, nous voilà à pied d’œuvre et donc à pied pour s’en aller parcourir la lande et le maquis des corbières tout près des grands ventilateurs, dont je me demande encore si ces régions sont ventées parce qu’il y a des éoliennes ou bien s’il y a des éoliennes parce que ces régions sont ventées…. Un coup d’œil qui se régale d’embrasser la mer qu’on voit danser le long du golfe clair, la belle ile ou presque de Sainte Lucie, un de mes terrains de jeux favoris, sa cousine de Saint Martin de l’autre côté de ce bout de mer, jouant à cacher Gruissan et mes souvenirs, et bien sûr, le massif de la Clape et mes jeunes années. Oh, Trenet n’est pas loin, Narbonne la grande fière jusque dans les tours de sa basilique aux deux saints (l’orthographe est la bonne bande de mécréant !)  Saint Just et Saint Pasteur réunis pour un joyau d’architecture et de fascination. Ailleurs ? La brume cache le mont Saint Clair situant Sète et l’ami Brassens, tandis que le Canigou se pare de ses premières neiges sous un ciel azur. Quelle belle journée, pas de vent, beau temps, température agréable, et si la météo a prévu de grosses rafales de vent pour l’après-midi, cela met en rage les moustiques qui d’un coup se prennent pour des tigres et s’en viennent mordre nos morceaux de chair offerts aux éléments. Sac à dos au dos, carte à la main, nous voilà parti à travers les signes géométriques et colorés qui balisent un même sentier de plusieurs parcours locaux dont nous n’avons pas la clé. J’ai beau y retourner régulièrement, je reste stupéfait par ces paysages si arides et si désertiques vu de loin, loin d’être arides et désertiques dès lors qu’on ose s’y aventurer. La richesse botanique, la diversité des paysages, cultivés, anciennement cultivés, récupérés par ces plantes si odorantes du maquis, plantation de pins, anciennes bergeries, plantations de ventilateurs, nouvelles maçonneries,  alignement de pierre sèches formant des murets, probables anciennes clôtures pour d’anciens troupeaux de moutons en vacances d’hiver, tout est trace humaine et réflexion des premiers pas, surtout, lorsqu’on essaie de faire coïncider le terrain avec la carte… Parcours atypique pour coin atypique, une bande de joyeux lurons travaillant fort sérieusement tout en s’amusant, car là est un secret de l’existence, il faut savoir faire sérieusement son boulot sans se prendre au sérieux. Alors que nous étions tout près des éoliennes, une opération de maintenance en cours nous permit d’entendre les moteurs électriques réglant le pas des pales, suivi d’effet, la vitesse de rotation prenant s’accélérant au fur et à mesure de l’augmentation du pas. Que l’on aime ou que l’on n’aime pas, ce sont des bijoux de technologies dont la maitrise permet d’enclencher ou non la rotation, de produire ou non la dive fée électrique afin de coller aux besoins.

 

De parcours en détour, d’hésitation en décision, le lieu de repas fut agréé et même…testé ! Vu sur la mer et le village de La Palme, mais que se passe-t-il ? La mer semble s’agiter, des traits blancs d’écume ponctuent son dos, le vent se lève, ce que semble confirmer la rotation accélérée des grands ventilateurs derrière nous. Cela n’entravant pas la bonne humeur, loin de là, mais dès le café avalé, les sacs garnis et remis aux dos, la suite fut sans moustiques ou alors, la force du vent nous empêchant surement de les voir, le pas ferme et décidé à vaincre sans péril pour triompher sans gloire de ce parcours, sans oublier, métier oblige, de se tromper d’embranchement pour accomplir un joyeux détour et un aller-retour sur nos pas, le temps de rejoindre les autres partis couvrir une autre variante du retour avec, je l’avoue, un peu plus de succès que nous. Retour au minibus, moment tant attendu que celui de l’extraction pédestre, déchirant adieux entre orteils en compote façon terrain caillouteux et chaussures aux principes rigides et bien serrées. Un peu de tenue, sèche et odorante dans des variations différentes de celle quittée, retour au bercail non sans avoir au préalable débattu de concert de la journée devant la quasi obligatoire mousse à la buée sur le verre, dont le principe actif permet l’élimination de l’acide lactique des muscles usés, à laquelle nous nous soumettons sans d’autres plaisirs, si ce n’est celui de se refaire une santé. Retour vers la ville, la notre, un peu fatigué sans savoir si cela est du à des sommeils entrecoupés ou bien au réveil tôt ou encore aux marches presque improvisées. Qu’importe le flacon, pourvu qu’on ait l’ivresse, celle des sommets, celle de marcher, celle surtout de s’en régaler, et là, je reconnais avec reconnaissance combien j’aime m’en délecter. 

Mode de vie


Parce que la vie n’est pas toujours rose, ni bleue, ni noire, ni verte, elle fluctue et nous fluctuons avec elle, à cause d’elle, malgré elle, contre elle, c’est ainsi. Parce qu’écrire se fait avec le cœur, l’âme, les états du cœur, les états d’âme, les mots, les phrases, les textes, les livres ne peuvent être perçus de la même manière, selon aussi l’état du cœur, les états d’âmes, la culture, le vécu du lecteur. Parce que l’auteur de ces mots n’est pas un marchand de guimauve ni un bonimenteur ou bien encore un marchand de rêves, tout cela en dépit des considérations propres à chacun, ceux qui n’aiment pas lire autre chose que du sirupeux, du doux, du suave, du sucré s’arrêteront ici. C’est ainsi, merci, au revoir et à la prochaine prose. Ceux qui poursuivront au-delà, devront comprendre que personne n’est tout à fait la même personne, un jour puis l’autre, ni même la même personne que son voisin, c’est notre avantage d’humain de n’être pas des robots reproduits à l’identique. Croire connaitre quelqu’un en se rappelant comment il fut, comment il était, c’est fermer la porte à l’évolution, c’est se mettre les œillères et se démunir du l’étendu des sentiments face à celle ou celui qu’on croit connaitre.

L’année n’est pas finie, pourtant le bilan est dur, des amitiés perdues, victimes de la route, victimes de la vie, victimes de la maladie, victimes de ce foutu crabe. De cela, que mesure-t-on ? Un vide, certes, mais surtout, des actes manqués, des rendez-vous jamais pris pour n’être jamais tenus, et au bout du compte, cette grande leçon : NON, nous n’avons pas toujours le temps ! Alors, s’il vous plait, parlez-vous, vivez, n’attendez pas, ne remettez pas, foncez ! Que vous soyez seul ou en couple, que vous soyez en amitié ou en amour, je citerai Khalil Gibran dans son livre « le Prophète » :
« Vous êtes nés ensemble et ensemble vous resterez à jamais. Vous resterez ensemble quand les ailes blanches de la mort dissiperont vos jours. Oui, vous resterez ensemble jusque dans la mémoire silencieuse de Dieu. Mais laissez des espaces dans votre unité. Et laissez les vents célestes danser entre vous. Aimez-vous l’un l’autre, mais de l’amour ne faites pas des chaines : Qu’il soit plutôt une mer se mouvant entre les rives de vos âmes. Remplissez vos coupes l’un pour l’autre mais ne buvez pas dans une seule coupe. Donnez-vous du pain l’un à l’autre mais ne mordez pas dans le même morceau. Chantez et dansez ensemble, et soyez joyeux, mais que chacun puisse être seul, comme sont seules les cordes du luth alors qu’elles vibrent de la même musique. Donnez vos cœurs mais pas à la garde l’un de l’autre. Car seule la Vie peut contenir vos cœurs dans sa main. Restez l’un avec l’autre, mais pas trop près l’un de l’autre : car les piliers du temple sont éloignés entre eux, et le chêne et le cyprès ne poussent pas dans l’ombre l’un de l’autre. (…)
Je pars avec le vent, mais non pour m’enfoncer dans le vide ; Et si ce jour n’est pas l’accomplissement de vos aspirations et de mon amour, qu’il soit alors la promesse d’un autre jour. Les aspirations de l’homme changent, mais pas son amour ni le désir qu’il a de voir son amour satisfaire ses aspirations. (…) Vous mesurez à l’aune de votre action la plus infime c’est évaluer la puissance de l’océan à partir de la fragilité de son écume. Vous juger sur vos échecs c’est reprocher aux saisons leur inconstance. »

Je pourrai citer et citer, encore et encore, peut-être aurez-vous juste envie de lire et de découvrir ces écrits, non religieux au sens folklore du terme mais philosophique et vrai, du moins tel est mon ressenti. Pour le reste, je vis, sans fantôme, sans peur, sans regret, ni à l’écart, ni au milieu, à la place qui me semble mienne, de moins en moins virtuelle parce que tout se joue en réel, sans combat, avec amusement sur des aigreurs et des révoltes du passé, parce que prendre du recul, c’est mesurer la futilité des choses, on ne rejoue pas son passé, on ne revit pas ses lumières, ni ses colères, ni ses troubles, parce que derrière chaque lumière, derrière chaque colère, parce que derrière chaque trouble, il y a une réaction qu’on nomme évolution, qui passe par des cycles qui pourraient s’appeler digestion, intégration, compréhension ou bien encore leçons, qui fait que celui d’aujourd’hui n’est pas celui d’hier, ni tout à fait le même, ni tout à fait différent, juste un être, ici et aujourd’hui.

Ne me juge pas sur hier, ne me juge pas sur aujourd’hui, contente-toi d’aujourd’hui plus que d’hier, vis aujourd’hui car hier est mort, sois toi aujourd’hui, bien plus qu’hier.
Un principe de vie, un mode de vie, une vie….  

Au-delà de nos tours


Faire les choses sans conviction, c'est se perdre dans l'absurde et refuser de se donner la vie.... On a tous nos vies, nos éléments de vies, nos bouts de vies, nos bagages, le savoir aide à comprendre que nul autre n'est pareil à ce que nous sommes, pas plus qu'à ce que nous ne sommes pas, et si étrange que cela puisse paraitre, la recherche de son double pour en faire sa moitié n’est que mauvaise utopie, un clé pour un devenir bien contingenté dans le périmètre de sa zone de confort. C’est qu’il n’est pas simple ni facile de bouger, de bien vouloir pousser ses murs, de quitter ses positions bien assises pour aller cueillir le risque d’apprendre, le risque de connaitre autre chose, la vue de l’extérieur, celle qui montrera peut-être que les murs bien propres et bien lisses de notre intérieurs ne sont que lézardes et dégradations de l’extérieurs. Sans un regard neuf, un regard vrai, un regard extérieur, comment pourrait-on grandir, apprendre à briser les murs, à repousser ses limites, à comprendre ce qui blesse, ce qui est, mesurer toute la difficulté de la communication dans des mondes qui n’ont pas le même dictionnaire, le même amour, le même humour ? A trop vouloir être léger, on en devient lourd. A trop vouloir être sérieux, on ne fait pas sérieux. Miroir mon bon miroir, ce n’est pas de toi dont on a besoin, car toi qui réfléchis si bien, sans te mouiller, sans t’embrumer, tu ne renvois que l’image que nous voulons bien y voir, avec nos œillères, avec notre regard borné par notre monde étroit.

Il n’y a pas de leçon, pas de condition, pas de raison, chacun voyage comme il veut, dans ses propres pas tout comme dans les traces d’autres pas, c’est cela la force de l’être, il sait être et même s’il veut être, il se doit d’être pour être. Il n’y a pas de bon ou de mauvais chemin, il n’y a pas de bonnes ou de mauvaises leçons, il y a la vie, son parcours, son immensité et à travers elle, notre parcours, notre périmètre que nous nous accordons. L’immensité fait peur, l’étranger fait peur, alors on se réserve une miette du gâteau, alors on se bâtit un logis, puis on met des clôtures tout autour, la mode est même aux hauts murs en attendant d’y élever des miradors car dehors est le danger, dehors est l’adversité et notre cocon est si protecteur, une véritable armure. A l’intérieur de nos murs, nous avons établi nos propres codes, notre propre langage, un mot veut dire cela pour nous, mais a-t-on pris conscience qu’il peut être différemment perçu dehors ? A trop vivre reclus dans nos tours d’ivoire de béton ou de bois, a-t-on conscience que dehors il y a d’autres modes, d’autres vies, d’autres codes ? Et si l’on s’ouvrait à dehors ? Et si l’on faisait tomber notre mur de Berlin ? Et si l’on prenait les reproches dans leurs sens positifs : l’image qu’un miroir ni trop poli, ni trop déformant mais terriblement vrai nous renverrait juste pour que nous prenions conscience que nos mots peuvent blesser, que nos attitudes peuvent abimer, que nos comportements peuvent détruire. Et si ce retour sur image nous offrez l’occasion de rectifier le tir, de comprendre que ce qui se dit ici, dans nos murs, n’est pas traduit pareil dehors ? Et si nous descendions du piédestal sur lequel la vie nous a juchés ? Pas facile hein ?

Le retour est parfois plus difficile que l’aller, mais il est bon d’ouvrir sa conscience et d’avoir un vrai réseau de personnes vraies qui savent vous dire les choses telles qu’elles sont et non telles que vous les voyez, juste pour que vous puissiez les argumenter, juste pour que vous puissiez saisir qu’il y a dans la communication plusieurs facettes, et comme tout prisme, la lumière qui le traverse s’en trouve déformée et différente selon l’angle de vue dans lequel vos interlocuteurs sont placés. L’erreur est humaine, ne l’oublions pas, et justement, cette erreur-là vous rend humain, elle vous colore de chaleur au lieu de paraitre distant et froid, trop fier et trop sûr de vous, et puis, ces différences dans les échanges ne sont que des sources d’enrichissements et de progressions, alors, pourquoi s’en priver ? Il y a un monde autour de vos tours, il y a du monde, des autours, des vautours mais il y a des vrais reflets de votre personnalité, celui des vrais amis qui savent vous dire les blessures infligés, les incompréhensions et plutôt que d’y voir des reproches mal fondés, voyez-y l’occasion unique et belle de mesurer combien votre fonctionnement à leur égard est incomplet dans sa transmission de code, resserrez ces liens de vérités car ils sont rares et très utiles, le monde a plutôt tendance à fuir ce qui le blesse sans mot dire tout en maudissant, mieux vaut maudire et mots disant, car le dialogue est la base de tout échange, de toute volonté d’apprendre, de grandir et gage de transformation. Une évolution, une révolution, une prise de notre bastille permettant sa destruction, non pas le lieu de refuge mais les murs hauts et de haut teint, les murs hautains qui brisent au fond bien plus votre champ de vision que la vision des autres, car les autres, eux, ils se moquent de votre façade, ce qui compte c’est le cœur. On ne voit bien qu’avec le cœur disait le petit prince. Merci Antoine de Saint Exupery.

L'âme d'enfant


Pour aller loin, il faut ménager sa monture dit le proverbe qui doit remonter du fond des âges, d’un temps où les relais n’étaient pas encore des pauses gourmandes mais plutôt l’occasion de changer de monture pour reprendre sa course. Bien sûr, il n’est point de lunettes dont il s’agit lorsqu’on parle de monture, mais bel et bien de ces nobles chevaux dont l’entretien courant oblige à se pourvoir en cartographie des points relais avant de fixer son parcours, tout comme il conviendrait de le faire de nos jours pour un départ en vacances en voiture électrique. Et oui, kilowatt contre cheval vapeur se trouve comparer au cheval tout court, le cheval tout court étant un crack hors pair qui remportait toutes ses courses d’une courte tête, cela va sans dire, on pourrait dire en somme, qu’il se ménageait… Ménageons donc nos montures, à voile ou à vapeur, électrique ou à explosion, à pied, à cheval ou en voiture, sans oublier les deux roues, les trois roues, et zut, toutes les roues! Mais ça veut dire quoi « ménager » ? Faire le ménage? Bonne idée, débarrassons-nous de l’inutile, des choses qui pèsent, au propre comme au figuré, ce sont des poids qui nous retiennent, nous empêchent d’avancer, comme les sacs de lests empêchent la montgolfière de décoller. Il y a dans chaque objets, un part de vie, d’une vie, un bout de souvenirs, un lien vers un passé, il y a dans chaque pensées, un regard en arrière, une ancre plantée dans les sables d’hier, il y a parfois des aigreurs, des regrets, ceux d’une fin non attendu, ceux d’une fin provoquée mais mal pesée aux regards d’aujourd’hui, ceux de mots non dits, ceux de mots dits, maudis mots qui sortent ou ne sortent pas quand il le faudrait… Mais tout cela ne sont que des lests, des occupations de la mémoire à considérer comme abusive parce que la vie est si riche, si généreuse qu’elle offre tant et tant de trésor à chacun de ses instant, encore faut-il être prêt et disponible pour en cueillir quelques uns. On ne trouve pas de champignons en regardant le ciel, ni sans être attentif, l’esprit allégé des errements du passé. Etre en paix avec soi-même, là est une des clés pour avancer sur le chemin.

Place nette. Feuille blanche, pourquoi cela engendrerait-il l’angoisse ? C’est beau une page blanche, c’est super un espace à aménager, à repenser, même si la nature a horreur de vide. Posons-nous, prenons la mesure de l’espace, du temps, des lumières, des couleurs, jouons de nos neurones pour modeler, restreindre ou bien agrandir les volumes, puis après les formes, les couleurs, les textures, les matériaux. C’et vrai que nous sommes dans une civilisation de prêt à porter en toute chose, du prêt à consommer, du prêt à poser, autant de cubes qui s’empilent, de couleurs choisis parce que c’est la mode ici, mais cela est-il notre touche personnelle ? Pourquoi diantre la créativité a-t-elle disparu de notre monde ? Je parle ici de créativité personnelle pas de la patte de tel ou tel designer. Pourquoi lorsque la mode est aux murs jaunes, le sentiment de trop vu se dégage-t-il visite après visite du chez soi de nos amis ? Bien pensant, bien agissant, bien portant…. Et puis zut ! Tout est bien et même mieux, tout est encore mieux si cela est votre création, votre vision, votre conception. On e fout que tel pot de peinture soit vendu avec telle autre couleur complémentaire, les associations certes sont faites selon des canons en vigueur, des aides pour des cerveaux vides, mais nous ne sommes pas des cerveaux vides, alors asseyons-nous, essayons ces couleurs, remettons nous à la gouache, à l’acrylique, à l’aquarelle, aux pastels, aux feutres, aux crayons de couleurs pour dessiner sur notre page blanche notre palette chromatique afin qu’elle nous aide aux choix, nos choix, notre choix, personnel, notre façon de voir, notre façon d’être. Visitons les lieux, expositions, magasins, revues, reportages, prenons le temps de voir, de comprendre aussi que la lumière saturée d’un grand magasin aux plafonds hauts ne montrera jamais le résultat d’une pièce exigüe, de valider que la couleur d’un pot de peinture n’est pas le reflet exact de la peinture une fois absorbée par le mur et soumise à d’autres éclairages. Imaginons les meubles, les tableaux, les objets, les petites touches qui vont venir traduire votre intérieur comme étant de votre identité, raisonnons en trois dimensions, en résonance et en dissonance, il n’y a pas de projet sans étude de projet.

Comment angoisser d’une page blanche, lorsqu’elle redonne l’âme d’enfant, le plaisir d’aiguiser ses crayons, de sentir l’odeur du bois fraichement taillé ou bien encore l’humidité des couleurs de la gouache, de s’offrir le plaisir d’associer le gris pale au violet lumineux, de mesurer la chaleur d’un rouge et son rayonnement nécessitant d’en tempérer les ardeurs par ce beige si pale et si naturel ? Replongeons en enfance, n’est pas replonger aux cœurs des souvenirs mais plutôt de retrouver cette fraicheur d’esprit, cette intelligence d’être que nous avons au fond de nous mais que se trouver verrouiller par des années d’endoctrinement scolaires, professionnels, culturels et j’en passe, à trop apprendre les choses, à trop devenir un exécutant, on en oublié l’essentiel : nous, notre propre essence. Y revenir c’est l’essentiel. Vraiment.

Démenagement


Parce qu’un jour le chemin arrive à un terme, une intersection, une place des choix pour trouver une place de choix, parce que la vie n’est jamais faite que de choix, parce qu’on avance qu’un pas après l’autre, le voilà arrivé à cette fameuse intersection, à la croisée des chemins, au bout d’un parcours. Des sentiments étrange l’habitaient, celui de clore une page, un chapitre, un livre, celui de n’être plus en phase avec ces corps qui jusqu’ici le véhiculaient, celui de devoir aussi fermer une adresse, un carnet d’adresse, son adresse. Partir. Changer d’air, changer d’aire,  errer ailleurs, être en phase avec ses inspirations, sa vérité. Une attitude calme, peut-être le calme avant la tempête, c’est si facile ce genre de préjugé, car s’il est des tempêtes qui détruisent, il en est d’autres qui construisent, après tout, le phénix renait de ses cendres. Le calme, c’est peut-être plus une phase de repos, une respiration après le tumulte, une sortie de la tête de l’eau après les grosses vagues et les grands creux de la vague. Une renaissance, qui comme le papillon, nécessite de briser le cocon pour s’en extraire et vivre encore mieux et encore plus fort dans un cadre à sa valeur. Il y a du déménagement dans l’air.  C’est bizarre de mettre sa vie en carton, de fermer ces sarcophages riches de trésors, de vider les lieux et d’avoir sur ces endroits désormais nus un regard neuf. Ni agitation, ni fébrilité, juste nécessité. Il était calme et serein, ni abusé, ni désabusé. Non, ce n’était pas une fin, une page tournée appelle un autre page, un chapitre clos aspire à l’ouverture d’un autre, un livre qu’on referme laisse place à un autre, rien ne se compare, rien ne se ressemble, le seul point commun reste l’acteur. Partir n’est une fuite que si l’on n’a pas mis en paix les choses que l’on fuit ; Le temps apporte la sagesse lorsqu’on sait apprendre et se donner le temps de comprendre. Le temps n’est pas un ennemi si l’on en fait un ami.

Quelques photos prises de cet avant, quelques idées éprises de cet après, une aspiration vers demain qui l’inspire et lui donne le sourire à l’occasion de cette mise en boite. Une étape personnelle qui ne se partage pas, d’ailleurs, qu’est que le partage, si ce n’est un acte à double sens, un échange, une communion ? Une forme de transition, plus dans un mode de fondue enchainée que dans un clash chaotique, loin des tempêtes, loin des ouragans, loin des tornades, loin des expulsions, c’est posé et tranquille, relativement zen qu’il rassemblait son petit monde dispersé dans la pièce en quelques coquilles de carton. Il était rare ces moments à soi, ce temps à se poser dans son antre, celle-là même qui ne fuit bien trop souvent que lieu de passage, rarement seul, souvent à accueillir, souvent à offrir, les flammes d’une cheminée, la douceur d’un café et des mots échangés, l’écoute, le soin, l’âme en phase, ou bien encore lieu de nuit, canapé ou lit, entre deux voyages, entre deux échappées, mais au fond s’échappe-t-on vraiment lorsqu’on part sans cesse pour revenir à ce lieu de nuit sans en avoir fait un lieu de vie. Le sourire aux lèvres, car la mise ne boite fait rejaillir des objets de leur immobilité, et chaque objet porte en lui son histoire, le pourquoi il est là à prendre la poussière sur une étagère. Comment est-il arrivé, un cadeau, un achat, une trouvaille, une préméditation, une surprise, un souvenir d’un voyage, les raisons sont multiples, raisonnables ou bien déraisonnables, mais l’objet est là, l’objet est roi pour ramener aux mondes des vivants des souvenirs enfuis, quand bien même les images n’en sont pas toujours très nettes. Les objets, puis les meubles, puis derrières les meubles, la poussière grise trace de passage des temps, les odeurs exhalées de ces mouvements, c’est un retour à la vie de ces mondes dormants. Soudain, la logique de construction de la pièce apparait en même temps qu’apparait la logique de l’installation des meubles et étagères, et au final, tout cela lui paraissait moins logique, moins construit, parfaitement modelable autrement, à colorer différemment, quand bien même cela serait en le colorant de blanc, paradoxe suprême ou l’absence de couleur redonne de la couleur aux projets et aux idées. C’est bizarre l’inspiration, c’est un phénomène qui travaille à l’aspiration, ça commence par un petit bout, un petit coin, une idée, une couleur, un mur qui tombe, un espace qui se redessine, qui s’affine, qui s’exprime pour ensuite appeler d’autre modelage, d’autres chutes de cloisons inutiles, d’autres appels de lumières, des envies de décrocher les lustres, de faire disparaitre ces points de lumières qui de leur verticalité imposent une disposition des meubles, une quête vers un champ infini de création et une faim de recherches, un œil neuf en visitant les catalogues, les revues et les magasins de bricolage et de décoration. L’écrin à venir nait sur l’écran des idées, avec pour vrai mode de fonctionnement, le cran de le faire et d’aller loin, très loin. 

C’est bizarre les adverbes et les adjectifs, ça nait riche de sens et ça meurt dans un sens que l’on croit ainsi défini. L’espace-temps n’est pas le seul espace de nos vies, on a trop souvent tendance à se contraindre et se réduire au final, à se cloisonner dans un espace étriqué, peut-être par peur, par doutes, par volonté d’être rassuré. Pour lui, ce temps-là était révolu, l’heure au contraire était au grand large, à la lumière, non, aux lumières, et surtout, au décloisonnement, perte d’espace, perte de temps, il y a trop de contours à contourner pour avancer et aller ainsi fidèlement à sa vision et a sa foi, droit au but, sur le chemin de la sincérité et de la franchise sans quoi la relation quelle qu’elle soit passe ou casse mais surtout offre un gain de temps même lorsque le temps ne se compte plus qu’en trésors connus et surtout, à connaitre. 

Aux séants des océans


L’océan qui gronde et agite de bruits le silence de la nuit est un professeur de vies, il nous apprend combien les creux de la vague sont suivis de nouveaux rouleaux plein d’impétuosité et riches de franches écumes. Il nous apprend aussi que les mots écrits sur le sable s’effacent d’une gerbe d’eau claire, que les pierres roulent pour que leurs angles s’arrondissent, avant de se transformer en simples graviers puis en grains de sables, ainsi s’en vont ces objets impurs qui perturbent la beauté de la plage. Ainsi s’efface les traces de passage, le sable est une belle ardoise, il n’y a aucune magie là-dedans, juste une leçon, ne t’attarde jamais sur les êtres de passage.

L’océan est un monde, immense, impressionnant, dont on se plait à s’amuser de ses forces tout en gardant à l’esprit que nous ne sommes que bien fétu de paille broyable à tout moment si l’attention se relâche. Une autre leçon, ne jamais sous-estimer les forces en présence.

L’océan me berce de ses ronrons de gros chats, et même s’il fait le gros dos ou bien s’étire paisible jusqu’à chatouiller la dune, il reste un félin dont les griffes sont prêtes à sortir à tout moment. Cela n’implique pas la peur, ni ne doit la générer, juste éveiller la conscience.

L’océan ce soir bout et danse sous la lune claire, l’air frais traverse les mailles d’un tricotage toujours trop léger face à ces éléments, mais les vrais frissons viennent d’ailleurs, ils viennent du plus profond de nous, parce que nous sommes éléments, particule au cœur des éléments, un soupçon de vie dilué dans l’immensité, voilà ce qui nous fait frissonner.

L’océan est un ami fidèle, compagnon des heures grises comme des heures bleues, toujours là et pourtant jamais le même, calme ou rebelle, chantant ou hurlant, joueur ou bien professeur, j’aime nos retrouvailles, à tout heure du jour ou de la nuit, à tout heure de l’année, parce que c’est ainsi.

L’océan est….et c’est là mon essentiel !




Impression


C’était marrant de le voir évoluer, grandir, mesurer pas après pas son entrée dans le monde des grands, oh non, pas celui des grands hommes, juste celui des adultes, dans toute la maturité de sens que ce mot veut dire, ce sens qui ne s’associe pas à un âge, pas de façon aussi réductrice qu’une formule mathématique « adulte = plus de dix-huit ans ». Non, la maturité, c’est le moment où l’on sort de l’école de la vie avec ses diplômes, et comme toutes études, le parcours diffère pour chacun, certains redoublent, d’autres passent, d’autres quittent les cours, pour tout un tas de raison, toutes valables, parce que sinon, il n’y aurait pas de raison, n’est-ce-pas ? Le parcours, son parcours était digne des montagnes russes, et même si souvent les anges gardiens avaient su veiller et l’aider à faire les choix, les bons, peut-être bien, le temps jouait en même temps sa partition, diable de temps qui se moquent des trains en retard, des trains qu’on rate, des époques où il est bon de faire les choses, de faire un pas plutôt qu’un autre, plutôt que plus tard… C’est cela la magie de la vie, on nait, on grandit, on se construit dans des étapes, bébé, enfant, adolescent, jeunesse des rêves, des projets, des envies, avec des sources d’inspirations abreuvées par nos cultures, nos histoires familiales, nos lectures, nos relations, comme un puzzle patiemment construit, pièce par pièce, morceau de vie après morceau de vie. Enfant, on joue à s’imaginer grand, avec femme et enfant, une vie de rêve bordée de maison, de piscine, de belles voitures, et puis la vie ajoute ses ans, année après année, et le rêve s’estompe dans des réalités parfois plus éloignées. Des leçons, des étapes, des années qui font que la vie d’un ne ressemble jamais tout à fait à la vie d’un autre, ce qui n’aide pas à la bonne lecture, l’esprit ayant souvent besoin d’une référence acquise pour comparer des informations reçues et s’en faire une idée ; S’en faire une idée, c’est là la sagesse de la vie, nous ne détenons de vérité que la nôtre, jamais celle des autres, juste une idée de vérité, une nuance tout en nuance qui devrait souvent nuancer les propos, les mots, les visions…

Il était là, calme, presque détendu, impression de détente dans un corps peut-être moins détendu, peut-être crispé, sûrement moins lié aux ordres d’un cerveau semblant parler dans le vide, son corps lui échappait, se contentant de grogner par douleurs diffuses et tenaces, tantôt ici, tantôt là, tantôt fortes, violentes, comme des coups de piques d’un destin farceur ne piquant jamais au même endroit. Le calme dans l’apparence, le calme dans l’existence, sans qu’il soit besoin d’aller se réfugier au fond d’un monastère ou bien au cœur d’une forêt profonde, non, l’époque actuelle nécessite simplement de désactiver quelques clés pour cela, quelques codes, quelques pages, le réel du virtuel, sans compter que le temps qui court et fait courir les êtres, leur donne la puissance de prendre et de ne plus connecter ces embryons de vies, d’amitiés ou autres formes d’amour, de relations ou autres plus ou moins sincères, jamais tout à fait désintéressés, résultats d’un monde devenu très intéressant et surtout très intéressé. Difficile de vivre dans ce genre de monde lorsqu’on ne joue pas sa partition, lorsqu’on donne sans demander. Maitriser le sens des choses, être un relais des mondes, savoir écouter, soigner et guérir, les âmes, les corps et les esprits, c’est intéressant, captivant utile aux autres, utile pour les autres. Un café, un repas, un soir, un jour, une promenade, un coup de main, une soirée où l’on s’échappe de sa triste réalité, une éponge, une épaule pour y déposer des larmes de passé, c’est bien, utile et biodégradable, il suffit de prendre, de profiter et de disparaitre. Un crayon dans un pot à crayon, là, présent, à disposition, inerte, pas besoin de vérifier la présence, l’état, il est là, disponible, un nom, une suite de chiffres dans une liste d’autres chiffres, d’autres noms, d’autres crayons ou pas. De ces années de présence dans d’autres vies, le temps a glissé ses cartes, ses grains de sables peut-être bien ceux-là même qui bloquent et irritent la grande mécanique, réveil douloureux aux sortir d’une vie ou sa propre vie est passée à côté de sa vie.

Il est là, détendu, détaché, comme un pantin désarticulé dont les fils sont rompus, plus de liens entre commande et articulation. L’air paisible, il n’y a pas de guerre inutile, il n’y a pas de combat inutile, il n’y a pas d’abandon, jamais, à quoi bon ? Le mouvement du corps s’adapte à la souplesse des muscles qui le contrôlent, étrange équilibre en ce qui est et ce qui fut. Peu importe l’existence, peu importe ce qui fut, ce qui est, ce qui sera, sera ou ne sera pas, juste une concordance des temps. Bien sûr il y a la fameuse ligne de conduite, les regrets, les mots dits et les mots non-dits, les discussions absentes, les conclusions à voix unique, mais à quoi bon tout cela ? On ne rejoue jamais l’histoire, les lests des passés sont des attaches à dépasser pour avancer. Sérénité, oui, c’est cela, et c’est là la maturité qui fait qu’un homme devient un jour adulte. Il était temps ! Peut-être, peut-être pas, et même si le temps glisse ses grains de sable hors des sabliers, l’important est ailleurs, dans la vie et surtout, dans ce qu’on en fait. Alors oui, le monde est plein de faussaires, de profiteurs, mais on ne donne que lorsqu’on veut donner, on offre que lorsqu’on veut offrir, chaque action qui nous impacte détient notre vérité, notre part de responsabilité qui nous replace si l’on veut bien le comprendre dans notre rôle, une clé majeure de notre existence, une action plutôt qu’une soumission. Alors oui, il est là, paisible, déconnecté, et de plus en plus détaché, mais c’est aussi peut-être parce que sa vie prend cette place-là, la place qui est sienne. Exit ce monde ancien qui n’est plus sien. Exit. Il vit. Parfois le ralenti n’est qu’une impression. Gare aux impressions….

Soir d'automne


Il est bon de descendre en son jardin
Lorsque le jour touche à sa fin
S’asseoir sur l’herbe encore sèche
Regardez les chats avoir la pêche
Courses poursuites et bagarres
De vrais mâles ces matous roux
Pas grand chose qui les sépare
Ils jouent, courent et s’ébrouent
Puis s’en viennent se faire câliner
Décident seuls d’être ou non caressés
Et si nous jouons à chat-perché
Et bien le croyez-vous, perchés
Au plus haut du plaqueminier
Ou bien encore de l’amandier
C’est encore eux qui gagnent !
Et comme chaque jeu à sa fin
Voilà qu’il se fait faim

Chats et homme rentrent à l’unisson
Tandis que le jour a fuit à l’horizon
Au final, voila un soir bien ordinaire
Une tranche de vies sur terre
Un moment avant l’interstellaire
Un crépuscule de lumière
Pour une aube nourricière
Le ciel peut bien attendre
Mais devant la gamelle
La place n’est pas à vendre !

Et oui, la vie est belle
Et encore plus belle dès lors
Que nous prenons du temps
Pour transformer en printemps
Chaque instant en devient de l’or
Là est le vrai trésor
Dedans, comme dehors