Bon appétit!

L’automne est là et avec lui les citrouilles et bien sûr l’importation d’outre-Amérique d’Halloween et sa quête de bonbons mais si trouille il y a, non pas pour qui quête, bien sûr, ce n’est au fond qu’un puissant succès commercial en plastique orange délaissant nos chères citrouilles à leurs champs et jardins. Tant mieux, il est temps pour elles de passer de vie à trépas !


Dans la noble famille des cucurbitacées assez fournie il est vrai, en se concentrant sur les produits d’automne et donc en laissant de côté les melons et autres concombres, j’aurais quelques appétences pour les pastèques à confiture, plutôt sous forme de pot, pour le potimarron ensuite, plutôt sous forme de soupe, tellement facile à faire et ne nécessitant que si peu d’ingrédients. Voyons, un joyeux potimarron à l’orange luisant et au pédoncule à peine détaché, un bain d’eau fraiche pour lui lustrer le poil de sa peau glabre, un bon couteau pour le réduire en morceaux après l’avoir épépiner, le tout dans une grande cocotte à peine recouvert par l’eau pour quelques minutes de bain de vapeur, accompagné d’un filet d’huile d’olive et de quelques pincées de poudre de piment d’Espelette sans oublier le sel sans lequel la vie serait bien fade. Un grand feu pour mettre la pression, quelques minutes à suer puis on coupe le sifflet et sans attendre le mixeur plonge et réduit tout non pas en miette mais en purée plus ou moins consistante. Simple, efficace et même succulent. Ce délicieux goût évoquant la châtaigne ferait presque fondre un chat teigne. Au fond, je comprends tous ces vols de sorcières à la nuit tombée, glanant de portail en portail quelques bonbons à défaut de bonne soupe…


La citrouille elle, si elle subit à peu près le même sort, nécessite qu’on la déshabille avant de la mettre en quartier, c’est un peu plus long, un peu plus délicat, mais le gout est plus suave et plus fade, voilà qu’il faut agrandir le cercle et s’empresser d’ajouter quelques fonds de jambon ou tout autre exhausteur de goût bien naturel bien sûr. La citrouille est plus grosse aussi, mais elle sait se mettre en quatre pour mieux répondre à vos attentes et patiente, elle peut très bien dormir dans un coin du congélateur ainsi débitée. Elle y rejoindra la courgette, dont les cubes verts attendent qu’on brise la glace pour quelques autres soupes d’hiver. Il y a bien d’autres rondeurs pour se réjouir le palais, à chacune sa préparation, soupe ou purée, gratin ou gâteau mais que serait un repas d’automne sans quelques châtaignes jouant dans les flammes et un peu de vin nouveau pour arroser le bal ? Je ne sais pas vous, mais moi, avoir l’eau à la bouche devant de tels mets ne me met nullement en transe, je préfère un bon vin, bien sûr avec modération, sans pour autant qu’il soit rance à moins qu’il ne soit né quelques part sous le soleil des Pyrénées-Orientales, tout près de Maury. Un Rancio, un vrai, un pur mais non dur, voilà qui serait un doux mélange, l’ambre du Maury Rancio sur les accents orangés d’une assiette fumante de potimarron, quelques châtaignes grillées relevant de traits noirs et sucrés ce modeste repas à peine collation…


J’aurais pu imager tout ceci, mais je ne sais pourquoi l’assiette s’est si vite vidée, peut-être qu’une autre fois le petit oiseau sera plus prompt et le photographe moins affamé….. 



Bon appétit !           

Uniquement

Unique, mais uniquement
Unique ment, pourquoi ?
Pour quoi ? Il reste coi
Il reste quoi ? Plus rien

Plus rien que le silence
Plus rien que le vent
A quoi sert de se taire ?
Il se tait et se terre

Unique, mais s’il ment
Facilement, c’est inique
Inique, non, vraiment
Oui, vraiment inique

Comment croire, comment savoir
Au fond, il n’est pas si unique
Combien mentent, faudrait voir
Combien se mentent en pratique

Mentir pour fuir
Fuir pour ne pas être
Ne pas être, se mentir
Mentir pour se mentir

Rien n’est unique
Rien n’est inique
Uniquement rien
Uniquement bien

A la fois tous uniques
A la fois tous différents
Complexité pratique
Pour sortir du rang

Unique, mais uniquement
Uniquement unique
Rester coi vraiment
Faire taire la clique

Le silence est doux
Le silence est bon
Il permet l’écoute
Il s’ouvre aux sons

Etre là et se taire
Invisible et sans voix
Voyageur solitaire
Voir, entendre, par choix

Uniquement unique
Etre sans paraitre
Revêtir l’invisible tunique
Celle de disparaitre

Celle de s’ouvrir aux mondes
Dans leurs grandes profondeurs
Car au fond, les silences de l’âme
Révèlent souvent bien des douleurs



Bon vent

Vie trépidante qui s’envole tout comme les feuilles légères et craquantes usées par les soleils d’été, elle glisse sans s’accrocher aux grains de sable du temps, non pas qu’elle ne les fuit, juste que le temps et la vie ne font pas toujours bon ménage, la vie passe trop de temps à chercher le temps, ce diable de temps qui lui manque tant, tout le temps, amour passion, déchirant, « je te suis tu me fuis, je te fuis tu me suis » course de longue haleine, le temps, la vie, l’amour…. Combien sommes-nous à soudain réaliser que la durée s’est écoulée sans en avoir mesuré le ruban ? Exit Octobre ou presque, le voilà monté dans sa citrouille pour fuir vers d’autres cieux tandis que Novembre sonnera ses fêtes, d’abord les vivants, ceux qu’on oublie tout le temps, puis les défunts, ceux qu’on n’oublie jamais aux travers de ce qui n’est au fond que notre manque personnel.


Période automnale, le vent souffle froid et emporte les feuilles, elles volent, s’envolent, se déposent et s’amassent pour mieux faire craquer nos pas. Epoque épique des trésors de rousseurs et de douceurs, châtaignes, champignons et même si ce n’est pas à foison, le peu apporte la richesse, celle de goûter et de ne point gaspiller. Prise de conscience. L’année déroule ses souffles sans s’essouffler, chaque saison est un livre rempli de poésies, encore faut-il l’ouvrir, cueillir l’envie, lire, voir, apprécier, dessiner, photographier, écrire et dompter ces couleurs nouvelles ou tout simplement observer et s’en régaler. Pire, chaque saison n’est pas la redite des saisons des années passées. Mieux, nous ne sommes plus les mêmes. Dans un monde où tout bouge, tout change, comment pourrait-on voir toujours les mêmes choses si ce n’est qu’en refusant de voir ? Contraste. Le ciel d’un bleu pur se change en gris profond, l’air si chaud devient un vent glacial, le vert tendre devient un rouge craquant, et nos pas sont des pas différents pas si différent au fond, tout juste si les chaussures se sont un peu plus fermées, à peine si les pieds restent nus mais bien au chaud dans les chaussettes épaisses. L’appareil photo n’est pas toujours là, et quand bien même il est de sortie, le voilà qui ne peut toujours traduire la vision et la perception de l’homme, preuve si l’en était besoin que les machines ne seront jamais les égales des hommes, preuve encore qu’il est plus important de voir par soi-même plutôt que de se limiter aux belles images toujours trompeuses.


Les jours sont courts, ils marquent le pas, laisse place à la nuit, ces nuits trop vite arrivées qui transforment les longues randonnées en moments de fébrilités, il est temps de rentrer, de se blottir devant la cheminée, d’écouter le bois craquer, se détendre et partir en fumée, de regarder les danses lascives des flammes déroulant leurs ballets, peut-être même de sortir la vielle poêle rouillée dont le fond troué laisse passer les flammes pour mieux griller les marrons, leurs tirant quelques gémissements et quelques larmes parties en suées, avant qu’ils ne se colorent de noir, alors il sera temps de les serrer bien fort dans un épais journal durant de longues minutes, juste pour que la peau épaisse s’humidifie assez pour mieux se détacher de cette chair savoureuse dont les doigts se réchaufferont bien avant le palais. Les feux de joies sont multiples qu’ils logent au creux de l’estomac ou bien encore dans l’âtre du foyer, ils vont jusqu’à faire danser leurs flammes dans les regards pétillants au cœur de ces moments de partages simples, mais au fond, pourquoi se compliquer la vie ? Humilité. Nous ne sommes que des passagers de ce temps, de cette vie, éternels voyageurs nous croisons ici mille lieux, milles rivages, mille cieux, mille visages, nous échangeons parfois quelques mots, quelques sourires, parfois plus, parfois moins, la fragilité du cours des choses nous porte bien vite au-delà, peut-être est-ce pour cela que nos répertoire sont comme des arbres sur lesquels se perchent mille noms, mille numéros, puis un beau jour sans qu’il soit forcément d’automne, ces noms, ces prénoms, ces numéros s’envolent et disparaissent, autres routes, autres répertoires, autres arbres de nos forêts immenses, c’est aussi cela la vie. Vivre. Profiter de chaque jour. Construire. Se construire soi par plaisir, par envie, découvrir et se découvrir, être et savoir être. Aimer et savoir aimer. Est-ce donc si compliqué ? Changeons nos regards, notre regard. N’attendons pas, surtout pas ce « trop tard » qui n’arrive que trop tôt. Savourons ces instants de vie et laissons s’envoler les oiseaux et les feuilles de notre arbre, nous n’en sommes pas le propriétaire, juste saluons non pas le départ, mais les instants partagés, vécus et si enrichissant.



Volez aux vents, feuilles, oiseaux et papillons, savourez vos voyages tout comme j’ai savouré ces moments délicieusement délicats de nos rencontres et convergences. Bon vent, nul ne sait jamais la teneur du voyage mais plutôt que de focaliser sur le but, apprécions chaque pas, chaque pause, chaque moment car là et là seul est le voyage.       

Elle n'est pas belle la vie?

L’été s’en revient par le soupirail de l’automne, il vient de ses rayons puissant surchauffer les journées aux contours grisés, qu’on le nomme « été indien » ou bien « été de la saint Martin » selon surement son arrivée puisque la Saint Martin se fête le dix novembre et que nous ne sommes que le dix-huit octobre jour de la Saint Luc, un jour béni pour tous les paloumayres, un peu moins pour les palombes… Mais « paloumayres », qu’es aco ?

Les paloumayres ce sont ces gens qui à la venue de ces jours d’octobres aiment à se percher dans de drôle de cabane, parfois dans de singulier terrier pour traquer ce bel oiseau bleu si emblématique de nos chères montagnes dans le but ô combien ancestral et traditionnel de le capturer. Ah, nous parlons de chasse, il y a donc les pours et les contres et avant de partir en pugilat, prenons un peu de hauteur sur tout cela et savourons l’authenticité des scènes, des chasses et des lieux. Tout d’abord, chasser ne se fait pas qu’à grand coup de filet ou bien grand coup de fusil, j’en connais qui chasse tout autant du regard voire même habilement équipée d’un appareil photo à longue portée, et, je dois dire, c’est là la chasse que je préfère tout en reconnaissant une certaine utilité aux chasseurs armés en regard de la pullulation de certains gibiers, de l’élévation des risques accidentogènes que cela entraine sans compter les dégâts énormes sur les  cultures et paysages. La palombe est un oiseau dont les effectifs à ce jour sont considérés comme « préoccupation mineure » en terme d’évolution, c'est-à-dire par menacé ni menaçant. Les paloumayres sont dans le même cas, l’esprit est plus à vivre pleinement ces instants de convivialités et de partage qu’à faire un carton plein lors de passages, autrefois voulus à la Saint Luc et désormais bien erratiques. Ces passages, ce sont ces vols migratoires que les palombes ou pigeons ramiers font pour s’en aller passer l’hiver au chaud en Espagne, empruntant les voies royales des Pyrénées en quelques cols devenus célèbres pour tous les amoureux de ces oiseaux. Je referme ici le sujet, il n’y a pas de polémique à créer ni à défendre, un de mes plaisirs reste la photo, et lorsque mon appareil dort profondément au fond du sac ou dans le coffre de la voiture, ce sont mes yeux qui seuls se régalent de ces moments de nature, ces heures délicieuses où le soleil peine à se lever en déchirant lentement sa couette de nuage sur nos sommets posée.


Alors oui, il fait beau, il fait chaud, c’est l’été en automne, c’est le jour qui sonne, c’est l’envie qui frissonne, c’est l’appel de la nature, ce sont les derniers instants de vraiment chaud, enfin presque, il arrive parfois que l’été ait oublié son retour et s’en vienne en quelques coups faire éclats en décembre parfois. Chaque chose en son temps, profitons, profitez, sortez, visitez, venez donc voir ces coins si intimes où les montagnes se baignent dans l’océan fougueux, thalassothérapies pour leurs vieilles pierres, regain d’énergie jusqu’aux pointes de leurs jeunes sommets, les couleurs y sont magnifiques, les routes presque désertées, les journées très belles et contrairement à ces vieilles légendes à peaux dures venant de pays voisins et jaloux sans doute, il n’y pleut pas de façon continuelle ni systématique. D’ailleurs, mon appareil photo n’est même pas étanche ! De toute façon, il n’y a qu’une raison, la sienne, il n’y a qu’une solution, vérifier par soi-même, et puis après tout, quel risque si ce n’est celui d’y prendre du plaisir ? Il est vrai que la sagesse veut depuis de nombreuses années, qu’en un premier rendez-vous il faut sortir couvert, mais ne prenez pas pour autant une protection trop lourde, elle finira par vous peser sur les bras. Quelques jours de week-end, quelques jours de congés, allez, un peu de routes, il existe tout plein de charmant endroit pour loger, et beaucoup plus encore pour respirer, il serait dommage de ne pas en profiter…. Non ? Et comme la nature est belle et bien faite, les assiettes d’ici savent retranscrire aussi ces beautés, ces couleurs en mille saveurs, mille parfums, mille plaisirs, il faudrait vraiment être difficile pour ne pas y trouver son bonheur, ou tout simplement, mettre tout plein de bonne volonté à refuser de le cueillir…. Lâchez prise, laissez-vous faire, il fait si bon être et être ici. Respirer, marcher, se balader, voir, entendre, se laisser porter par ce temps sans heure, ce temps sans heurt, planer sans planning, c’est plutôt bien et tellement plus positif, il y a là de quoi recharger ses batteries, faire le plein de ces douceurs ensoleillées pour mieux affronter la grisaille et l’hiver qui tôt ou tard nous tombera dessus, ainsi va la course des saisons, ainsi va nos vies, nos phases de vies, nos périodes de souffles et de respirations.



Mais basta, à chacun de se faire son opinion, à chacun de choisir, de vivre et de choisir sa vie, il n’y a pas de méthode rigoureuse, de case à cocher, de planning à respecter, non, il y a la vie, il y a tout un chacun et un chacun ne fait pas tout, mais chaque chacun compose un tout, franchement, il y a bien là de quoi en être fier, non ? Elle n’est pas belle la vie ?       

Pensées

Contre toute attente, il n’y a que l’arrivée. Trop de gens vivent dans l’attente et en souffre, pourtant, il suffit que la chose attendue arrive pour voir arriver la fin de l’attente. A choisir, mieux vaut donc cesser d’attendre et faire en sorte que les choses arrivent.

C’est au pied du mur qu’on voit le maçon. En fait, tout dépend de la taille du mur, du côté du mur duquel on se place et de la hauteur de l’échafaudage. Cela dit, on peut croiser le maçon ailleurs, par exemple, sur la route, en faisant ses courses ou en réglant le montant de la facture.

Dire d’une facture qu’elle est salée, c’est l’avoir goutée, chose peu commune voire dangereuse pour peu qu’on soit au régime sans sel. De toute façon, il parait qu’on consomme trop de sel. L’idéal serait de se passer de facture, mais hélas, par les temps qui courent, il est de bon ton d’avoir des factures sous peine de dissimulation ou de non preuve de garantie. Comme la facture est salée, du coup, elle se conserve mieux.

Il est plus facile de décrocher la une que la lune. Faire la une mérite pourtant de sortir des simples faits divers, chose un brin délicate qui requiert aussi un engagement important dans cette voie-là, mais aller décrocher la lune, déjà, faudrait y voir un intérêt quelconque… Même si de drôle de truc ne brille pas toutes les nuits pareils, comme dit la sagesse populaire « tant que ça marche, n’y touchons pas ! »

Prendre quelqu’un à revers, c’est un peu lui tourner sa veste. Mieux vaut attendre les jours meilleurs où il tombera lui-même sa veste. Ah, j’oubliais, il vaut mieux cesser d’attendre….

On parle souvent de l’homme qui a vu l’ours, rarement de l’ours qui a vu l’homme, du moins, chez les hommes parce que chez les ours…..je ne sais pas, je n’en ai jamais vu. En plus, je ne parle pas le slovène.

A trop tirer sur la corde, elle finit par casser. Peut-être, mais encore faudrait-il y voir la notion de solidité chez les cordes, je connais quelques cordes vocales qui mériteraient la rupture, non pas la leur, paix à leur voix, mais celle de mon attention à défaut de mon audition. Pour peu qu’elles aient voix au chapitre, là, écrire devient un sacerdoce.

Brûler la chandelle par les deux bouts est assez imbécile et finit par nous brûler les doigts sans compter que les tâches de cire sur le tapis ne sont pas des plus simples à faire partir, surtout lorsqu’on s’éclaire à la bougie.

On peut rire de tout, enfin presque, on peut rire de toutes ses dents, de toute son envie, de toute sa joie bref, de tout ça.

Le cordonnier est le plus mal chaussé. En même temps, ce n’est pas en restant dans son échoppe qu’il ait utilité à bien se chausser, et comme les affaires ne sont pas des plus florissantes, il finit par mettre ses chaussures au clou.

 Les affaires florissantes des fleuristes s’appellent des invendus.

Il ne faut pas confondre penser et panser. Si l’un conduit à la pensée, l’autre conduit au pansement, les mots sont différents, les maux aussi, d’ailleurs.

On ne peut être et avoir été, on ne peut naitre et avoir tété par contre on peut être né et téter, même grand, d’ailleurs on vous pose souvent la question « t’étais où ? »

Une histoire sans parole, c’est un dialogue de sourd chez les muets. Les paroles s’envolent, les écrits restent, pas de parole, pas d’écrit, nous voilà manchot ne soyons pas aveugle. De toute façon, seuls les sentiments comptent et bien plus que cela, l’amour qui les entourent. Vérifiez toujours l’emballage, parfois certains amours ont pris en goût de fiel en vieillissant, c’est assez bizarre ce revirement du miel en fiel, ce ne sont pourtant pas deux lettres proches, sauf sur la bande FM… « Méfi » comme disaient les ménines par chez nous…

Sauter du coq à l’âne devient de plus ne plus dur, les coqs finissent dans le vin et les ânes braient à tue-tête pour un rien. Cela dit, rien ne vaut un bon coq au vin…



A table !        

Un tube en or

Juste comme ça, par pur plaisir, un petit retour sur un tube planétaire, enfin au moins francophone ce qui revient au même d’ailleurs, non, je déconne…. C’est l’histoire de trois coureurs africains des hauts plateaux de l’Afrique, ce qui tombe bien au fond, non ? Tous les matins depuis tout petit, les voilà partant en courant à l’école distante de plusieurs dizaines de kilomètres, et tous les matins, ces petits gars se font la course, je te double, tu me passes, je te gagne mais toujours, au moment de passer le portail de l’école, les voilà à le franchir d’une même foulée, parce que c’est ainsi la vie sur les hauts plateaux, il y a le sport, les défis mais par-dessus tout, l’amitié, la fraternité, la vraie, celle-là même qui tend à disparaitre des cours de nos écoles, des cours de nos lycées, des cours de nos facultés, du cours de nos vies…


Chaque jour, du moins les jours de classe, c’est toujours la même course, les mêmes règles et petit à petit ces petits grandirent et tout en grandissant, ils ne cessèrent pas de courir, ni de lutter ni de gagner ensemble. Ils étaient devenus une vraie légende dans le pays puis par le jeu du bouche à oreille, dans les pays voisins et bientôt plus loin, si loin qu’un émissaire s’en vint, du verbe s’en venir et non le nombre, imaginez un peu cent vingt émissaires s’en venant en même temps, nos trois coureurs auraient pris leurs jambes à leur cou ! Cet émissaire donc s’en vint voir de plus près ce qu’on lui avait raconté, et il se posta près de l’école un matin, de classe, c’est mieux. Bientôt il vit un nuage de poussières à l’horizon, puis trois garçons courant, se dépassant en riant, et sur le pas de la porte, se regrouper pour entrer tous les trois d’une même foulée. Amusé et ravi de voir qu’on ne lui avait pas menti, il revint le lendemain avec un fusil, deux bâtons et un chronomètre… Que croyez-vous qu’il advint ?

Première proposition : 

Exténué par sa longue nuit blanche peuplée de rêves étranges, il s’endormit et rata le passage des petits gars, dans son sommeil, son corps lourd chuta et fit basculer le fusil qui dans une grande détonation brisa la carrière d’un tapis volant qui eut le malheur de passer par là ce matin-là. C’est d’ailleurs depuis ce jour que le vol de tapis est sévèrement réprimandé par la loi.

Deuxième proposition : 

Il s’installa dès l’aube, et les nuits sur les hauts plateaux étant plutôt fraîches  il se réjouissait d’avoir emporté avec lui deux bouts de bois pour se faire une belle flambée. Malheureusement, notre homme ne fumait pas et n’avait point de briquet. « Qu’à cela ne tienne, un bon coup de feu sera d’un bon secours pour mettre le feu aux poudres » pensa-t-il. Il tira sur le bois qui loin de prendre feu se brisa en deux, la détonation réveilla le voisinage et l’homme fut emprisonné pour tapage nocturne. Relâché après de nombreuses années, il fut prié d’aller s’immiscer ailleurs, un comble pour un émissaire.

Troisième proposition : 

Rien de tel qu’une bonne nuit pour être en pleine forme. Reste que se lever tard ou du moins après le passage des coureurs n’est pas une bonne chose… Qu’à cela ne tienne, il reviendra demain…. Cela dit, demain, je ne suis pas sûr qu’il y ait école…

Quatrième proposition : 

A l’aube naissante, l’émissaire émis l’idée d’aller se poster près de la porte de l’école. Ayant au préalable repéré le trajet des coureurs, il planta un bâton sur le bord de la piste, puis mesura à grandes enjambées ce qui lui sembla une distance nécessaire et à sa mesure. Là, il planta le second bâton. Mais le fusil me direz-vous ? Et bien le fusil, ce n’est pas tant pour les moustiques que pour les lions toujours affamés à leur réveil et n’oublions pas, nous sommes à l’aube d’un nouveau jour…

Que croyez-vous qu’il arriva ?  

Facile !


Trois coureurs dans un nuage de poussière…. Arrivés au premier bâton, le premier s’en saisit tout en se faisant doublé par les deux autres. S’en suivit une course étrange ou à tour de rôle, ils se passaient le bâton, jusqu’à la porte de l’école et le rituel de la même foulée pour franchir la ligne. Amusé l’émissaire les attendit jusqu’à ce que la cloche eut sonné et que l’école fut finie. Il les prit sous sa protection puis les dirigea sur de longs entraînements avant de les inscrire à une compétition officielle, loin, très loin, dans la froide Europe. Surpris et un peu déboussolés, nos trois amis (depuis le temps, tout de même, ce sont des amis !) se concertèrent et décidèrent de leur stratégie : courir vite, courir groupés, gagner puis en chœur ils crièrent « à l’or, on danse » dans un cri de guerre synonyme de chant de victoire…. Et ils gagnèrent, tous les trois dans la même foulée, pour la surprise générale, enfin, pas pour vous, vous, vous le saviez déjà et comme prévu les voilà qui se trémoussèrent en chantant « à l’or, on danse »…. Un tube vous dis-je….      

L'abri côtier

Il existe là-bas, une page blanche posée sur une vieille table de bois et tout près d’elle, un vieil encrier, non, ne riez pas, c’est là comme un défi au temps, une page encore vierge et une encre encore fluide toute proche de s’associer mais elles n’ont pas encore franchi le pas. Pas le pas de la porte, non, la page s’envolerait sous les souffles d’Eole, l’encre coulerait et imbiberait le sol jusqu’aux pluies d’un soir plus gris, cela n’aurait aucun sens. La porte est en bois, vieux bois élimé par les éléments, et limé par l’homme de temps en temps, histoire de fermer encore convenablement, à en juger par l’aspect, la porte et la table doivent être de même génération. Mais si la porte est étanche, le soleil entre par une petite fenêtre, elle aussi d’un autre âge, usée par les vents, aux carreaux ternis par les embruns, décorée de quelques toiles d’araignées cherchant la pitance en cet endroit. Les murs sont en pierres, solides et épais, ils résistent contre vents et marées, depuis temps et temps d’années… Une cabane, une maisonnette, un refuge, un abri contre les jours d’intempéries, contre les jours gris, contre les jours de gris, un coin où il fait bon s’asseoir, sur le banc, devant la table, devant la feuille et pourquoi pas écrire de cette encre violette qui fleure bon tant de souvenirs d’enfance.

L’exercice est délicat, de nos jours, les ustensiles sont autrement plus serviles et dociles, ils se retiennent d’exploser en tâches multiples, de couler et de faire des pâtés, ils glissent tout doucement sous la main experte de tant d’années d’apprentissage à leur contact. Ecrire à l’encre, c’est d’abord choisir sa plume, petite boite de plastique vert dans laquelle se cache parait-il un sergent major, en tirer une plume pas trop oxydée, pas trop abimée, pas trop pliée, puis l’enficher sur le porte-plume en plastique orange, qui semble en avoir vu des tonnes si l’on s’en réfère aux traces d’encre sur son corps. Commence alors le travail de chauffe, après un délicat mouillage, la plume jette l’ancre sur un bout de papier, elle vide son encre à coup de pleins et de déliés que la main essaie de lui faire tracer en virtuose. C’est pas gagné mais le son en vaut la chandelle, la calligraphie s’apparente aux dessins et les mots partent à dessein vers leurs nouveaux destins. Cela va bien pour les titres, tout au plus quelques lignes de-ci, de-là. Disons que pour la pleine écriture, c’est un tout autre trésor qui en sera complice, posons-là le sergent major et toutes ses plumes, et tirons du plumier de bois, ce corps lisse et oblong dont le capuchon se dévisse lentement dévoilant une belle plume dorée. Dévissons un peu plus haut et voici que le corps de bakélite révèle en ses entrailles une bien étrange seringue, ou plutôt, un piston dont la tige chromé aspire à son corps défendant tout ce qui veut bien entrer dans le réservoir de verre transparent. Repoussons les limites et par la même occasion le piston, puis partons en plongée dans le bocal d’encre, oh ! Point trop profond sous peine de nettoyage fastidieux, non, trempons juste la plume comme pour tâter du terrain et voir un peu la température. Là, sans relever la plume, tirons délicatement sur la tige chromée, et observons l’encre s’élever dans le réservoir. Il y en a assez, sortons la plume de son bain, puis approchons là de ces fantastiques buvards, sortes de « bois sans soifs » révélant des maximes publicitaires ou d’autres messages inversés selon leurs états de fraicheur. Une belle tâche apparait aussitôt sur le rouge délavé du papier buvard. Voilà que la plume est prête pour des kilomètres de lettres parfois reliées, des mots en cadence selon la tempérance de l’auteur. L’exercice est plus leste, les mots plus rapides, l’encre toujours aussi violette, la feuille de moins en moins vierge, tout cela hors du temps, dans cet endroit hors d’âge, et si parfois les mots voyagent et les lettres semblent dessiner comme des vagues, c’est bel et bien des vagues qui dessinent l’essentiel du paysage où des bateaux voyagent.


Ce n’est pas un moulin, tout juste un abri côtier, niché dans un bout de falaise, suffisamment escarpée pour ne pas être trop fréquentée, suffisamment caché pour ne pas être visible, un endroit tranquille où les pensées voyagent du puissant océan à quelques pages blanches, de vagues d’écume à quelques pensées envolées sans jamais être prisonnières de quelques écrits. L’exercice n’est ni simple, ni compliqué, et au fond, ce n’est pas un exercice, du moins pas dans le sens strict et contraint que l’on nous a que trop souvent rabâché. Peu importe de savoir si les muses sont aériennes ou océanes, l’essentiel est bien de se trouver là, ici et maintenant, et si la patine a su polir chaque pierre, chaque pièce de bois qui compose cet écrin, c’est parce qu’au fond il ne sert jamais à rien de s’accrocher quelque part mais au contraire de courber l’échine et de laisser glisser les mauvais temps sur soi, mieux vaut profiter des beaux jours à venir et il y en a toujours…            

Soyez-vous!

Dans nos sociétés désormais trop formatées, il serait bon que l’individu pense à exister, non pas comme on entend trop souvent « à trouver sa place » ce qui se traduirait en « rentrer dans le moule » mais plutôt exister en existant soi dans sa propre vie, oser, tester, vivre, exister en tant qu’individu. Hélas cette composante semble disparaitre devant l’uniformité, on pousse de plus en plus l’individu dans un moule, on brise la créativité, on standardise et on vend du prédigéré. C’est là se priver de la plus grande richesse de notre monde : la multitude d’individus et de donc de caractères qui le compose. De même que l’individu y perd de sa matière en se fondant dans la masse, il se prive de mille éclats en ne jouant plus qu’un rôle de composition de façon trop récurrente. Par quelle contrainte ? Pour quelles raisons ? Peu importe, l’essentiel est ailleurs, l’individu est auto programmable, il détient son propre code, ses propres clés, reste d’avoir envie de se les appliquer et de s’en servir. A tout moment, à toute heure, il a la possibilité de décider de sa vie, de ce qu’il a envie de faire, de tenter, de tester sans pour cela devoir recevoir un ordre extérieur. Oser, tel est le maitre mot, il faut oser, sans cesse, oser, tenter, tester, faire, être, devenir, apprendre par l’exemple, le sien, se donner la richesse de perdre, de rater, pour en comprendre le sens, pour en apprendre les raisons, pour pouvoir tester à nouveau, corriger le geste, rectifier le tir, réussir et savourer ce succès, avancer et grandir.


Qu’il s’agisse de bricoler, de cuisiner, de jardiner, de peindre, d’écrire, de faire du modélisme, des maquettes, du sport, l’approche est toujours la même, l’étape la plus essentielle reste le premier pas, oser s’y mettre, se retrouver devant sa feuille blanche, sa pièce vide, son mur blanc et oser se tromper, oser changer de couleur, oser poncer et tout refaire, oser découvrir qu’au fond on n’est pas si mauvais, oser voir apparaitre un résultat qu’on n’aurait même pas imaginer, oser être satisfait, doublement, par le résultat et par l’action personnelle ayant engendrée ce résultat qui devient ainsi notre chef d’œuvre, ne soyons pas modeste, osons nous couvrir de lauriers, cela est bon pour l’âme et pour le corps, c’est du baume et au cœur et l’envie de renouveler l’expérience, de se lancer d’autres défis, d’exister autrement, pleinement, de faire naitre cet individu qui dort dans la masse des autres individus. Comment peut-on passer ainsi à côté de sa vie, comment peut-on n’écouter que les mauvaises langues qui depuis votre enfance vous rabâchent que vous n’êtes bon à rien ? De toute façon, il vaut mieux être un bon à rien qu’un mauvais en tout, et tant que nous n’avons pas tout essayé, nous ne pouvons pas avoir la prétention d’être mauvais en tout, voilà qui semble évident. Souvent on dit d’une personne qu’elle a deux mains gauches, mais c’est faire injure aux gauchers qui je suis sûr aimerait bien avoir deux mains gauches…. Il n’y a aucune limite à la créativité, physique comme cérébrale, soyez-en sûr, laissez-vous faire, tentez, renouvelez vos expériences, prenez confiance en vous, laissez éclore l’âme artiste qui vous compose, faites fi des mauvaises langues et des conseillers, soyez acteur de votre vie, lancez-vous, faites-vous plaisir !


C’est aussi un axe que devrait prendre ou plutôt reprendre les fabricants de boite de jeux. De nos jours, les briques à monter, les jeux de pièces métalliques ne se vendent que par coffret permettant de réaliser un modèle précis et donc préétabli. Mais où est la créativité ? Formons-nous des robots ou des individus ? Qu’est ce qui manquent le plus à nos sociétés sinon des idées novatrices, des visions hors du cadre de nos processus vieillots et devenant chaque jour un peu plus limites dans leurs fonctionnements. Osons, redonnons à l’individu sa place dans la société, si les individus composent la société ce n’est pas à la société de composer les individus ! Quel avenir peut-on envisager lorsqu’on reproduit sans cesse les modèles finissants en se posant jour après jour les mêmes questions, les mêmes visions ? On continue à mettre quatre pieds à une chaise lorsque le modèle le plus stable et le triangle, on passe son temps à refuser de réinventer la roue, on offre au monde des grands diktats de modes, de couleurs qu’aussitôt les foules reproduisent à leur niveau, tout comme l’enfant contraint de monter ses lego selon le plan imposé. Mais oh ! C’est ça la vie ? C’est donc ça le rêve de notre vie ? Prenez donc votre vie en main, refusez de composer selon des plans préétablis, imaginez donc un peu si nous parlerions de Picasso si Picasso avait poursuivi la voie des Rembrandt et autres Renoir ?  Vous possédez la latitude, usez-en, osez en user, tester, soyez, faites-vous plaisir, c’est par là et seulement par-là que vous vivrez en tant qu’individu. Soyez vous-même !



   

Le bon sens paysan

Quelques nuages gris, quelques gouttes de pluie puis plus rien, il ne pleut plus même s’il a plu c’est l’automne qui s’annonce. Les nuages ont grossi, le ciel est devenu gris, la pluie est retombée, à grosses gouttes, de plus en plus nombreuses, c’est-il l’été qui pleure son départ ? Car c’est bel et bien un orage d’été qui éclate et déchire nos habitudes de douces températures et de réconfortants rayons de soleil, même les sols trop secs ne peuvent boire cette eau tombée en abondance. Faut dire qu’on l’avait presque oubliée cette pluie, depuis tellement de temps, depuis tellement de chaudes et belles journées, et dans ces premiers jours d’octobre, on peinait à comprendre pourquoi les plantes dehors, pourquoi le jardin semblaient éteints et flétris. Voici que la vie tombe en goutte, de quoi requinquer le moindre brin d’herbe, peut-être bien ouvrir les yeux des humains encore à l’heure des vacances.


La pluie choit, drue et tiède, il ne pleut pas des cordes, ça y ressemble pourtant mais en beaucoup plus humide. L’occasion aussi de se replonger dans ses intérieurs et se consacrer à tant de petits chantiers sans cesse repoussés, l’occasion aussi de profiter d’un coin confortable pour lire ou écrire, dormir peut-être, bricoler, rêver, il y a tant et tant de choses à faire bien plus occupante que de regarder la pluie tomber derrière les carreaux. Au fond, il pleut, mais qu’est-ce que ça change ? La pluie nous enquiquine lorsque nous sommes dans nos positions de dominants, coincés sur le périphérique dans nos boites de conserves nous servant de véhicules, ou bien à l’abri dans le confort de nos logements, mais la pluie en randonnée, là, c’est une toute autre histoire… « le crachin du matin n’arrête pas le pèlerin » c’est vrai, cela dit, la pluie du soir non plus, parce que de toute façon, s’arrêter sous la pluie c’est choisir de se mouiller tandis que marcher sous la pluie peut nous offrir ce moment magique où l’on marche entre les gouttes, cela dit, personnellement, je n’y suis jamais arrivé mais bon, ce n’est pas non plus faute d’avoir essayé. On ne choisit pas ses parents, on ne choisit pas sa famille, on ne choisit pas non plus la météo pour marcher, pas plus que nos anciens ne choisissait la leur dans leurs travaux et vies tellement plus extérieures. Je me souviens des bergers en pèlerine, raides comme des cierges sous un ciel de baptême dont leurs grands parapluies les protégeaient, scrutant le troupeau paissant l’herbe mouillée du pâturage dans un temps où les ours et les loups se tenaient à l’écart des hommes. Simple rapport de force inversé, désormais c’est l’Homme qui se tient à l’écart des loups et des ours ainsi que des troupeaux, qu’il pleuve ou qu’il vente… Marcher à bonne allure sous la pluie, c’est être aussi trempe mais de l’intérieur que de marcher plus lentement couvert de ces bouts de plastique, qu’ils se nomment poncho, pèlerine ou bien autre imperméable, leurs fonctions d’étanchéité étant très bien remplie à l’arrêt, elle en deviennent néfaste dès lors que le corps exulte et surchauffe en mouvement. Tout comme hier, rien ne vaut un bon, grand et solide parapluie, le manche fermement tenu en main, il protègera de la tête aux pieds en couvrant aussi le sac. Certes, vous voilà du coup plus encombrant, les petits sentiers en sous-bois en sont moins accessibles mais après tout, dans la forêt dense, la pluie glisse sur les feuilles et le parapluie est aisément remplaçable par le moindre couvre-chef, de préférence un béret dont la laine feutrée est à la fois étanche et respirante, le confort en plus d’être au sec, on en regretterait presque qu’il ne pleuve pas plus souvent…. Là encore, nos anciens avaient dû expérimenter pour s’équiper aussi efficacement.



Marcher, randonner, vivre pleinement en extérieur se passe aisément des modes, reste à déjouer les pièges du commerce et du marketing, mais comme ne toute chose, il est bon de réfléchir un peu, de suivre les conseils des vieux sages aussi mais surtout de laisser agir le bon sens paysan qui sommeille en nous…        

Quel bordel !

Partir mais partir loin, sans revenir. Disparaitre sans disparaitre, juste n’être plus là, plus ici, sans vraiment être ailleurs. Sentir ce juste moment, ce juste point devenant peu à peu un point de non-retour, parce que… Des « parce que » il y en aurait tout plein, un « parce que » c’est assez con au fond, ça pousse comme du chiendent, comme la misère sur le monde, comme des coquelicots dans un monde qui a appris à mesurer ses pesticides…. N’avez-vous pas remarqué combien nous jouissons désormais de superbes champs de coquelicots jusqu’en bords des routes depuis que certaines sonnettes d’alarmes sur l’usage trop intensifs de la chimie dans le monde agricole ont ainsi prouvé qu’elles n’étaient point sornettes ? Mais pour autant, un « parce que » n’est pas un coquelicot, le coquelicot, c’est beau, c’est joli, c’est fragile, ça ne se cueille qu’en peinture ou bien qu’en photo les coquelicots, et ça ne doit rien à un couturier japonais… Quant au chiendent, ça pousse bien, ça file droit à travers les pelouses, et si certains jardiniers s’évertuent à les arracher, un petit bout suffit pour refaire toute une histoire, et le jardinier peut recommencer son ouvrage ou bien encore aller se brosser… de sa brosse en chiendent bien sûr…. La magie de la botanique fait qu’il ne faut point confondre le chiendent avec la dent de chien, petite fleur que nous croisons parfois sur les bords des chemins de randonnées…


Mais tout cela ferait presque fuir les « parce que ». Pourquoi ? Il est vrai que les « pourquoi » n’habitent jamais bien loin des « parce que » qui à en avoir des dialogues de sourds « pourquoi ? Parce que… » Et comme il y a beaucoup de « parce que » il y aura donc beaucoup de « pourquoi » parce que le monde cherche à comprendre toujours même et surtout lorsqu’il n’y a rien à comprendre voilà aussi une des raisons qui donnent parfois envie de partir, mais partir loin, sans revenir, de disparaitre sans disparaitre, de n’être juste plus là, plus ici, plus vraiment sans vraiment être ailleurs, sans forcément rien comprendre ni qu’il y ait quelque chose à comprendre. Crever la bulle pour s’en échapper et se construire sa propre bulle, juste à côté peut-être ou non, l’important n’est pas le lieu mais la bulle, non pas pour coincer sa bulle, non, juste respirer, souffler, couper les sons extérieurs et enfin se donner son temps, son tempo, s’attendre et s’entendre, respirer et expirer, se recentrer, se retrouver, parce que le chemin a été long, parce que le sentier a parfois été très mauvais, parce que à flirter avec le bout de la vie on prend peut-être conscience de ce qu’on est prêt à perdre, parce que parfois il faut prendre de la hauteur pour mieux Visualiser les tours et les contours, les détours et l’entourage, bref, le microcosme de sa vie, c’est peut-être con mais ça fait du bien, un peu comme s’il fallait avoir la peur de sa vie pour avoir envie de l’aimer à nouveau.


Ce n’est pas une question de temps, le temps est une matière si fluide qu’on lui prête toutes les formes, qu’il soit question de quitter une conversation sous prétexte de manque de temps, qu’il soit question de refuser d’avancer parce qu’on n’aura pas le temps, cela est devenu tellement humain de se parer sans cesse du bouclier temps, peut-être même bien plus que le bouclier « âge »… « A ton âge… » « Vu ton âge… » C’est passé de mode, la faute au temps sans doute, ce prétentieux magnifique qui dresses ses barrières de temps face aux vies des Hommes. Puis un jour vient où le temps nous quitte, pourquoi, parce que, il y aurait mille raisons à disserter et cela serait s’appesantir sur le temps, en oubliant de vivre et de profiter de ce temps sans temps… Le temps n’est que contenu dans le sable du sablier, il en suit chaque grain dans sa chute inexorable, mais au fond, la chute du temps n’est que la cause de la gravité, voilà qui n’est pas pour autant une raison de ne voir dans le temps qui file qu’une source de gravité… Sourire. Le monde est beau, c’est la vision des humains sur le monde qui le dessine en gris. Mais à quoi diable sert l’arc en ciel si c’est pour ne retenir des couleurs que le gris des nuages ? Faut-il donc attendre d’être mouillé pour comprendre qu’il pleut ?


Ce n’est pas une question de ras le bol, pour cela il faudrait avoir du bol et l’envie de se le laisser remplir à bord, ce n’est pas une saturation, les couleurs les plus saturées en sont vives et exaltantes, c’est juste parce qu’il est temps de partir, mais partir loin ou non, sans revenir, de disparaitre sans disparaitre, de n’être juste plus là, plus ici, plus vraiment sans vraiment être ailleurs, sans forcément qu’il y ait quelque chose à comprendre ni comprendre, peut-être bien parce que sorti du cercle des humains qui ne se déplacent plus qu’avec force repère et donc ont besoin de coller des étiquettes sur tout, mais après tout, nous ne sommes pas non plus des pots de confitures et nous avons le droit d’avoir plusieurs goûts, plusieurs parfums, ce qui en langage humain pourrait se traduire par « plusieurs étiquettes » Mais alors, comment les coller, laquelle mettre en premier, en avant, dans quel sens ?


Quel bordel !   

Poussin

Lorsque les pages de l’album de famille se tournent et deviennent des buées de temps, on mesure, certes avec tristesse, la fragilité de notre petit monde et surtout, son intemporalité. C’est là le réflexe premier, puis, avec un peu de recul, on réalise combien nous sommes chanceux d’avoir partagé, d’avoir vécu tant et tant de moments avec ces êtres, et combien ces phases-là font parties de notre apprentissage de la vie. Bien sûr, lorsque la fréquence des départs semble se précipiter dans un relatif court laps de temps, on peut être enclin à y rechercher de l’injustice, mais il n’en est rien, ainsi sont les choses, ainsi sont écrites nos pages, ces départs ne sont en aucun cas une fin.


La tristesse, ce n’est pas le départ de l’autre, c’est de ne pas se sentir capable de vivre sans. On ne pleure pas l’autre, on pleure sur soi mais comme toujours, les choses les plus simples restent les moins visibles à nos yeux. A noter que cet état de fait n’est pas uniquement lié au départ de l’âme, c’est tout autant la même chose lors d’une séparation de corps, peut-être même plus difficile car il y a dans les cérémonies d’adieux aux défunts un ancrage acté d’un état définitif alors qu’une séparation laisse la porte ouverte à d’éventuels retours. Au fond, la dernière personne dont on s’occupe, c’est bien soi, on se laisse porter par mille pensées vers l’autre, vers les autres, vers ces visages soudainement affichés par l’album photo, on en entend les voix, les rires, on revit ces pages écrites il y a plus ou moins longtemps, mais on oublie trop souvent de se situer soi au cœur de l’histoire, de profiter de ces rediffusions de nos souvenirs pour en visualiser les messages, pour en entendre le sens, pour apprendre et grandir, évoluer soi dans sa propre vie, celle d’aujourd’hui, sans fantômes, sans vides, sans manques, parce que là sont les leçons, parce que là sont les raisons de ces flash-backs familiaux.


La tristesse n’est ni une fatalité, ni une légitimité, ni une fidélité. Beaucoup de nos pas sont des pas assistés, peu sont des pas assurés, c’est ainsi que nous avons appris, grandit, c’est ainsi qu’on nous a construit, mais la clé est en nous, et si un jour notre main a su lâcher celle qui nous tenait pour nos premiers pas, pourquoi nos neurones resteraient à jamais attachés aux tuteurs de l’enfance ? Par peur sans doute, mais dans le grand catalogue des peurs, qu’elles sont celles vraiment en jeu ? La peur de réussir ? La peur de grandir ? La peur d’exister ? La peur de sortir de sa coquille ? Diantre, le poussin ayant épuisé ses ressources nutritives devrait donc avoir les mêmes peurs et ne jamais percer sa coquille pour découvrir ce vaste monde tellement inconnu…. Notre grande chance, c’est tout de même de vivre chaque jour dans des situations tellement différentes et tellement extérieures à notre coquille, que nous sommes à même de maitriser nos peurs, mieux, de débrancher notre cerveau reptilien et nos instincts de survie : il n’y a pas là de notion de survie mais de vie ! Quel danger y-a-t-il ? Tomber ? Aucun danger, le danger serait de refuser de se relever. Se mettre en échec ? Oui, et alors ? Les échecs sont faits pour être compris, vaincus et devenir forces. Encore une fois, c’est penser plus à tomber qu’à se relever. Que croyez-vous que le poussin devienne dans pareille situation ? Il a tout consommé à l’intérieur mais il refuse de briser sa coquille, certes elle est perméable à l’air mais pas aux nutriments, et vivre de l’air du temps n’a jamais nourri son homme, fut-il un poussin… C’est mignon tout plein un poussin, du duvet jaune, des petits piaillements, mais comment le savoir ? Il est là, dans sa coquille bien au chaud, bon, le ventre gargouille un peu, faut dire qu’il n’y a plus rien à becqueter là-dedans, le frigo est vide et il est bien connu qu’on ne fait pas d’omelette sans casser les œufs… Alors ? On poursuit dans l’idée de ne pas faire un pas en avant, de ne pas vouloir briser sa coquille ? Bigre, cela n’est pas un échec puisqu’on ne tente rien, quant à tomber, cela sera d’inanition dernière étape de la plongée fatale… Là oui, l’instinct de survie fera qu’en tombant le bec tout neuf, tout aiguiser de frais va choir sur la coquille et la briser, un trou devenant source de courant d’air mais aussi des débris à picorer, la vie est belle et bien dehors…



Et nous ? Sommes-nous donc plus stupides qu’un poussin pour fermer notre bec et se laisser choir dans notre coquille vide à désespérer de tout ce que nous n’avons pas, de tout ce que nous n’aurons plus ? Sommes-nous si stupides pour choisir de choir plutôt que de se relever ? De mourir plutôt que de vivre? Comment peut-on lire un livre sans en tourner les pages, en revenant sans cesse sur les pages déjà lues ? Comment peut-on voir une série en visualisant sans cesse les premiers épisodes ? Comment peut-on ne pas honorer ceux qui nous ont appris à marcher en refusant de se lever et de marcher ? Plutôt que la plume des anges, préférez le duvet des poussins…