Des vagues à l'âme

Le temps passe, les images restent, quelques éclats de sons sont parfois là mais ce ne sont que des bribes et cela laissent une douceur amère à la vie. La vie, ce n’est pas du gruyère, c’est de l’emmental, tout plein de trous, ce qui en donne la saveur, la texture, c’est la matière que l’on croque aujourd’hui mais il y a un trop plein de vide, des bulles d’absence. Il ne passe pas une journée sans que les pensées viennent, sans chercher au fond des tiroirs à souvenir ce que tu aurais dit, ce que tu m’aurais appris, conseillé… Et là s’en viennent toutes ces leçons qui n’étaient que des bouts d’amour, tous ces moments que je n’ai pas partagé, parce que trop tôt, parce que trop jeune, parce que trop con, parce que dans ces années on se croit maitre du temps et pire, on croit à l’éternité. Et puis un jour, l’éternité tire sa révérence, et les soldats tombent sous les balles à deux balles de cette putain de vie. Et les larmes coulent, parce que quand même, cela fait beaucoup mais alors beaucoup de trous, beaucoup de vides, beaucoup de manques et que naturellement, la nature ayant horreur du vide, j’en ai le vertige. Alors oui, je te parle, je t’écris peu parce que notre communication était orale, peuplée d’accents, de tendresses, d’Amour, de rire, de taquineries mais surtout de beaucoup d’émotion ; tout cela je le comprends à peine, je le lis à peine dans les silences, dans les vides, dans les leçons non apprises qui se terminent en recettes ‘à bisto de nas’ parce qu’un jour la vie est là, sans filet et qu’il faut bien se jeter à l’eau.


A l’eau ? Mais l’eau mouille, c’est pour ça que mes yeux sont embuées, c’est pour ça que parfois les sanglots longs et non monotones résonnent dans la solitude des souvenirs à jamais non partagés, c’est donc la faute de l’eau. J’ai peut-être fait le con, j’ai peut-être oublié d’être là, d’écouter les leçons, de bien vouloir les retenir, de bien vouloir les apprendre mais par contre il en est une qui demeure à jamais gravée dans mon cœur, une qui en appelle d’autres, parce que tout est lié : L’Amour se partage et ainsi se multiplie. C’est un peu mon arc-en-ciel sur mes gouttes de pluies, parce qu’il fait toujours très beau après l’averse, parce que lorsqu’on n’a plus l’accès aux réponses et bien on bouge son cul pour les chercher voire même à les construire ou bien parfois les inventer. Alors oui, je teste, je me plante, parfois je découvre, parfois je fais autrement mais c’est toujours selon les quelques bases que tu as su me donner, et au fond, si l’emmental de ma vie d’aujourd’hui a quelques saveurs, c’est aussi par les trous du vide que tu nous as laissé, peut-être bien par la malice de nous mettre devant notre propre existences, de notre propre construction, parce que nous, pauvres imbéciles, nous n’avons pas su apprécier ni simplement voir les bonheurs que tu nous as distillé, en chaque instant, chaque larme, chaque rire, chaque heure, chaque minute, chaque seconde de nos vies. Merci de tout cela, des rires comme des larmes, ceux d’hier comme ceux d’aujourd’hui parce que si le corps n’est plus, l’âme demeure. Toujours. A l’eau, l’océan gronde ce soir, la lune s’y perd un peu en cache nuage, l’air est frais mais il est bon de s’y retrouver, d’y croiser les âmes, même dans les larmes, elles font du bien.