Spleen

Vendredi. Jour de spleen. Ce mot bizarre échappé du temps, ce mot semblant sortir du fond des âges, ce mal décrit par des poètes désormais célèbre, ce mal qui de temps en temps me ronge. Hier soir, activité roller. Au départ d’un endroit que j’aime pour bien des raisons, bien des saisons, Port Sud, le canal du midi. Combien de fois en ai-je arpenté les abords ? A pied, en vélo, maintenant en roller. Temps idéal, ni trop chaud, ni trop venté, randonnée un peu rapide dès le départ, difficulté à trouver mon rythme, impression de pas tout maîtriser et de trop forcer. Endroit magique que l’œuvre de Pierre-Paul Riquet, endroit de souvenirs, passés et trop présents encore, endroit de projets, aller en vélo jusqu’à son terme, le bassin de Thau. Les projets font avancer dit-on, mais quand on les réalise jamais ?

Après la randonnée, apéro sympa et repas grillades. Comme souvent dans ces moments là, peu de monde enclin à mettre la main à la pâte, ou plutôt au gril… Je m’y colle. Bon, ok, j’adore ça ! Mais à enchaîner les grils, à voir se succéder les merguez, chipolatas, saucisses, lard et brochettes, à ne plus voir et respirer que cette fumée odorante et collante, mes pensées, elles aussi, s’embrument. Souvenirs des grillades faites ici ou là, des différentes bandes de copains. Que ce soit à la maison, en randonnée, chez eux, me voilà Vulcain, maître de forge… Et là, d’un seul coup, une grosse vague de spleen m’envahit, tente de me noyer. 2 semaines de vie, c’est encore un peu juste. Pourtant, je résiste, ou plutôt, j’ai fui.

Je réalise que mon propre ennemi c’est moi et d’abord moi. Je dois d’abord me battre, livrer ce combat contre moi. Arriver à être ne paix avec moi-même, trouver mes repères avant d’envisager quoique ce soit. Trop de choses ont vacillé ces derniers temps, trop d’instabilités générées sans se soucier de consolider, de s’ancrer dans une vie présente. Une vie trop tournée vers les autres et pas assez égoïste en fait. A trop chercher le bonheur des autres, à trop être serviable, on s’oublie soi, et lorsqu’on craque, bien peu de gens aimés, servis, sont là… Ainsi va la vie, nos vies. Triste et amère expérience vécue, je dois reconnaître que j’ai encore du chemin à parcourir. Pas facile de changer ses habitudes, pas faciles de devenir plus égoïste lorsque ce n’est pas sa nature.

Heureusement, le sport est là, roller pour le moment, mon vélo qui s’ennuie depuis trop de temps, les randonnées qui arriveront par la suite, puis les raquettes. La forme revient, la santé aussi, je le sens. Côté travail, pas mal d’incertitude, et, finalement, peut-être le moment de changer, de tourner aussi cette page là. Des opportunités en Chine, pourquoi pas après tout ? Le tout est d’être vraiment prêt à franchir le pas, ce pas là. Et puis, les sentiments, lutins malins et malicieux, jouant avec le feu, brûlant le cœur, le gelant, états bien instables, états qu’il me faut apprendre à maîtriser. Là aussi, il y a du chemin, et je sais que des mains sont tendues, et je sais que je ne suis pas seul, même si.

Spleen d’un vendredi, spleen de ma vie, ou plutôt d’un passage de ma vie. Certes, pas le spleen d’un autre vendredi bien trop noir, mais une certaine mélancolie, j’avoue. Vivement les congés, deux semaines à tenir encore. Tenir. Que de signification, que d’images dans ce mot. Bateau ivre dans la tempête, en bon capitaine, j’essaie de garder le cap, éviter la vague, non pas l’esquiver, mais l’affronter et la vaincre. Courage, le port n’est pas loin. Ce port de pêche et de plaisance, au chenal longé d’une estacade ô combien de fois parcourue…

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