Une vie en plusieurs tomes

Il y a des pages qu’on tourne, d’autres qu’on déchire ; elles disparaissent alors à jamais… La vie est ainsi, succession de tomes qu’on écrit à deux ou quatre mains, parfois plus, parfois moins, de belles pages vite écrites aux accents du bonheur, aux lettres bien formées, toutes en couleur, puis des morceaux plus aérer, l’angoisse de la page blanche qui s’installe, puis des changements de paragraphe d’abord, de chapitre ensuite, et plus tard un changement de tome… Ces tomes alignés sur l’étagère de la vie, c’est l’histoire, les histoires de nos vies. Peu importe la grosseur des tomes, elle reflète mal l’intensité du contenu, peu importe le nombre de tome, on ne refait jamais sa vie, on la poursuit. Chaque étape, bonne ou mauvaise, est une marche de plus de franchie et à franchir pour accéder au palier supérieur, pour grandir et avancer dans sa vie. Bien sûr entre chaque tome, il peut y avoir un espace de poussière, un interstice sombre car chaque volume écrit, ne s’écrit pas toujours avec le même entrain, la même fluidité, nécessitant parfois de souffler un peu, sorte de mi-temps réparatrice entre deux parties animées. Question de vie et d’envie, question de personnalité, certains sautent allégrement d’un tome à l’autre, d’autres nécessitent une période de repli et de repos, travail de deuil à accomplir pour se réveiller à nouveau à la vie, comme la nuit sépare deux jours pour régénérer le corps et l’esprit… C’est ainsi, et cela dépend des personnes, aucun jugement à établir ni établi… Parfois, certains heureux élus, selon la formule consacrée, écrivent leur vie d’une traite, d’un seul volume. Sont-ils plus heureux ou moins heureux ? Difficile à dire, l’essentiel est que chacun trouve son rythme, la vie qui lui convient, assume ses choix et ses convictions, réussisse l’amalgame qui mène au bonheur, non pas égoïste, mais conjoint.

Aujourd’hui je clos un chapitre, un livre, un tome de ma vie, à quelques planches près, visitant là, la profondeur des sentiments réels qui animent et renforcent la noirceur d’un cœur qu’on croyait éclatant, mesquinement éclairé d’un beau jaune moutarde… Aujourd’hui je clos beaucoup de chose, ici ou là, matérielle ou immatérielle, loin d’un repli sur soi, plutôt une renaissance dans toute sa dimension, un nouveau départ pour un amour adulte, nécessitant de passer par toutes les phases de l’enfance, de l’adolescence au monde adulte, travail de deuil bien entamé, bien facilité il est vrai par des congés approchant et des récents épisodes, dévoilant les vraies personnalités, n’invitant pas aux regrets, bien au contraire. Un tome, mince, étroit, vite écrit, vite lu, assez marquant tout de même, mais un livre clos. Place à l’interlude, et pour le moment, place au serre-livres, histoire de garder les volumes bien dressés.

Dans ces tomes, il y a la vie, il y a des vies, dans ces tomes, il y a des envies, réalisées ou non, complètement ou non, il y a des joies, il y a des tristesses, il y a des heures de toutes les couleurs, il ya beaucoup de matière qui servent de base pour les tomes suivants, il y a la matière organique qui fera fleurir les prochaines fleurs, les plus belles, il y a un souhait, celui que le prochain tome, soit le dernier, le plus gros, le plus épais, car j’espère tout de même profiter encore longtemps de la vie, le plus riche et le plus gai, car il suffit maintenant ! Place aux belles choses !

Ce dernier tome, il est là, présent devant moi, sous forme de belles pages blanches, le stylo prêt à entrer en action, prêt à écrire les premières lignes, les premiers paragraphes… De ce livre-là, seul un personnage est connu pour l’heure… Patience, laissons le temps accomplir son œuvre…