Première pluie...

Deux semaines de vacances automnales au bord de l’océan pour enfin y trouver la pluie. Cette belle pluie d’ici, qui tombe drue et droite, avec des accents de violence par moment comme si le ciel d’ici était pressé de se débarrasser de l’eau de là. Vieille histoire entre ciel et l’au-delà, sans que cela soit nécessairement une fin, la pluie violente inonde le sol peut habituer à drainer autant en si peu de temps. Et pourtant, dès la fin de l’averse, les flaques disparaissent avalées par le sable avide, les senteurs de terre végétale humide accentuées par les relents de térébenthine et autres saveurs mielleuses de bruyères, d’arbousiers et autres plantes de ce maquis landais reprennent le dessus, encore plus exacerbées par l’hygrométrie ambiante, incitant à revêtir la parka et s’en aller humer tout cela, comme une aromathérapie génératrice et régénératrice, nécessaire à renouveler la moindre parcelle polluée de mes cellules et de mon organisme fatigué et usé de cette longue année. Le calme d’octobre est là, le camping désert ou presque, les chemins forestiers, les pistes cyclables sont vides, le téléphone ne sonne plus, chaque brique de nos vies, retrouve sa place, chacun repartant dans le tourbillon de sa vie, de ses activités, délaissant les interconnections un temps tissées. Un petit moment de spleen qui traverse ce séjour, moment où les choses vécues s’évacuent, non sans quelques émotions. La vie est belle, très belle, des étapes la jalonnent, comme autant d’épreuves qu’il nous faut traverser, accepter, digérer avant de passer à l’étape suivante, aux épreuves suivantes. Point de négatif dans tout cela, les chocs et les échecs nous construisent, nous renforcent, font de nous ce que nous sommes. Jadis les cadrans solaires montraient fièrement cela dans leurs maximes : « toutes blessent, la dernière tue », « ce qui ne tue pas rend plus fort », … Ce sont donc là des vérités historiques !

Le spleen fait parti du personnage, complément de la bonne humeur, nous avons en chacun de nous un clown triste et un clown joyeux, une face joviale et une plus triste, Jean qui rit et Jean qui pleure, des instants de convivialité, de partage à deux ou à plusieurs, et des instants de solitude, nécessaire pour soi et aussi pour faire le point. Dans ces moments là, être à l’écart du monde, même dans vingt mètres carrés convient tout à fait, le téléphone dispose d’un bouton marche arrêt, les lectures sont suffisamment variées pour trouver celle qui conviendra le mieux, sourire ou réflexion cérébrale, magazine imagé ou livre plus sérieux, rythme de vie personnel pour un moment à soi, pour soi. Moment passager à passer, à vivre en toute quiétude, sans s’en affoler, simplement comprendre, non pas admettre, car l’admission de cela implique quelque part une réprobation, comme si chacun devait vivre la même vie qu l’autre, sans être soi, sans avoir des phases à soi, des moments à soi. C’est là toute la complexité des relations et des rapports humains, fonctionner à deux, sans que ces deux là soient dans la même unicité, du moins dans la même intégralité d’unicité. Etre soi et accepter l’autre tel qu’il est, ne pas fondre dans le moule de l’autre, ne pas contraindre l’autre dans son propre moule, respect mutuel pour relation enrichissante et enrichie. Tout cela paraît une évidence, et pourtant, l’expérience montre trop souvent que c’est l’inverse qui est fait. Confondre rêve et réalité, fantasme et existence, piège si facile, si confortable qui finit par refermer ses mâchoires sur la relation au point de la briser en deux vies, deux débris de ce qui fut une seule vision de vie.

Les plaies, même les plus abîmées finissent toujours par cicatriser, à une vitesse proportionnelle à la franchise de la cassure, aux éclats conséquents, le temps finit toujours par accomplir son œuvre, générant des hauts et des bas, toujours, des bas faisant débat, même en monologue, des hauts resplendissants. L’impatience est humaine, nous avons souvent tendance à défaillir dans sa maîtrise, pourtant, le temps nécessite du temps, et il faudra bien lui laisser le temps d’accomplir son œuvre…




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