Une plage déserte

Une plage déserte, un vent frais qui par moment soulève le sable, un océan aux rouleaux nombreux et serrés, c’est l’idéal pour quelques pas. A quelques pas, c’était la vie, le monde, tout relatif à l’endroit, le bruit et l’agitation d’une petite ville. Ici, plus rien d’humain, la nature impose sa force et ses bruits, elle couvre et dirige, elle envahit l’espace, le sable, les airs, le temps aussi quelque part. On était loin de l’agitation estivale, et même hors saison des hors saisons, le vide, le calme, sans que cela soit la désolation. Accessibles. Ces endroits demeurent libre d’accès à qui veut méditer, se régénérer, s’abreuver aux sources de la vie, retrouver sa place dans le rythme du temps, se poser, faire son bilan, réfléchir, voir venir, lire son avenir dans ses propres décisions, reprendre la main, sa main sur la vie, sa vie.

Chaque humain qu’on interroge ne manque pas de faire part de son manque de temps, mais au fond, le manque est mal interprété, nous ne manquons pas de temps, nous manquons le temps. Le temps n’est pas un ennemi à combattre mais un allié à découvrir avant de nouer de solides liens. Ces mêmes liens qui l’avaient amené ici et maintenant, sur cette plage perdue dans une immensité de nature déserte malgré la proximité des hommes. Une chance, tant les bénéfices en sont grands. Quelques heures suffisent, quelques pas à respirer, à prendre le temps de s’offrir le temps d’avoir le temps. Peu importe le jour, il était là et il faisait jour. Peu importe l’endroit, enfin non, pas tout à fait. Ici c’était parfait, son parfait. Une communion vraie. Intense et nourrissante. Ce n’est pas une renaissance mais plutôt un réalignement sur les bonnes ondes du chemin de sa vie. Difficile d’expliquer, difficile de partager, chacun mène sa propre barque, chacun poursuit sa propre route, ce qui est vrai pour l’un ne l’est pas nécessairement pour un autre, même si parfois les chemins se croisent, se mêlent et s’entremêlent, rien n’est jamais construit pour durer, tôt ou tard les chemins se séparent, et plutôt que de focaliser sur la durée, mieux vaut pleinement profiter de l’instant présent. Ne pas cogiter sur ce qu’est sa vie à l’instant « t », ni vouloir à tout prix laisser une trace, chaque être nait avec un chemin à accomplir, des épreuves pour grandir et être à même de franchir des paliers, il n’y a pas de hasard, chaque route est bordée de signaux, de panneaux que notre attention, notre concentration, notre vitesse d’exécution nous permettent de voir ou non, et si nous ratons la bifurcation indiquée, ce sont des années passées à parcourir une autre route, à chercher sa route, à parfois ne pas comprendre le pourquoi des choses. Les plus élémentaires des choses sont parfois les plus sournoises, elles jouent de notre vigilance, elles nous tournent autour sans qu’on les voit, pauvres aveugles que nous sommes lorsqu’il s’agit de grandir…

Une plage déserte, c’est cette phase de sa vie qui devient un peu une phrase de sa vie.  Mais une plage déserte n’est pas un désert en page, c’est juste un moment au bout du bout de souffle, l’instant où courir ne suffit plus, l’appel d’air et l’appel du large, le point de rupture et non un point de non-retour, il y a toujours un retour, jamais de barrière, un vide salutaire, un rupture pour respirer, respirer pour reprendre des forces, des couleurs, respirer pour mieux repartir. Cet instant fait peur aux gens trop pressés, il doit leur sembler une envie d’ailleurs, un terme, il est vrai que pris dans la spirale du temps, on oublie qu’il y a une vie à côté de la vie, on ne voit plus les choses qu’en séquence, la vie après la vie, la peur de cet autre côté du miroir, sans savoir. Paradoxe de l’être humain, il a peur de savoir et peur de ce qu’il ne connait pas. Cercle vicieux, je ne connais pas, je n’apprends pas en cas de savoir…. Etrange. Etrange, comme un homme seul faisant quelques pas seul sur cette plage. De toute manière, un groupe marchant au hasard sur une plage déserte serait tout aussi suspect tant la bienveillance constitution de l’Homme ne reconnait comme sien que ceux qui vivent comme lui et rejette l’inconnu, celui qui est différent. Peu importe les jugements à l’emporte-pièce, on vit pour soi et non pour ressembler aux autres, on ne grandit pas à l’ombre d’un tuteur, bien au contraire.


Une plage déserte, quelques pas sur le sable balayé par les vents, les yeux perdus dans l’écume des flots en colère, c’est tout simplement une page de bonheur personnel. Parfois il est bon de savourer ces instants personnels et de s’abreuver de bonheurs. Précieux, quasi magique, c’est aussi et surtout pour mieux revenir…       

   

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Ce que je donnerai pas
Pour quelques pas....
Magnifique photo
Nat