Ma bohème


Comment penser à la Bohème sans imager cela d’une belle bohémienne ? Mes souvenirs s’en vont à la voix pure De Noa interprétant « bohémienne » le temps d’enregistrer le disque de Notre Dame de Paris et alors l’esprit voyage et s’en va visiter Victor Hugo et les soubresauts de cabri de la belle Esméralda….

Comment ne pas songer à ce temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaitre comme le chante si bien Charles Aznavour ? C’est donc cela la bohème, loin des puissantes béhèmes qui remplissent les parkings de banlieue ?

Comment ne pas songer aux accents grinçant des vieux bois d’une roulotte, celle-là-même qui logeait encore une bohémienne au cœur d’or, qui sur ces maigres économies de ses maigres allocations, m’achetait des soldats de plastique qui devenaient les héros de mes jeux d’enfants lorsque j’accompagnai ma mère venant y faire son ménage dans mes après-midi de mercredi sans école ?

Comment ne pas entendre au creux de l’oreille grincer ces violons tziganes en de romantiques et mélancoliques mélodies à la simple évocation de ce mot de bohème ? C’est un peuple qui raconte son histoire, c’est une histoire qui raconte son peuple, ce sont des notes qui courent de corde en corde, chipées par les crins d’un archet, une note par homme et par femme, par enfant et par anciens, dispersés aux quatre coin du monde, transmettant à qui veut les légendes et les contes, les musiques et les traditions d’un peuple éternellement exilé...

Comment arriver à transcrire, l’émotion et les sons que ce mot « bohème » s’en vient colporter, trace colorée, plaintive et festive, gens de peu qui offrent tant, gens de nulle part qu’on retrouve partout, gens de roulotte toujours par les routes ?

Comment traduire la couleur, les images, les mémoires, sans en galvauder les sens ni l’essence, parce que nos dictionnaires sont trop pauvres et parce que nous les appauvrissons chaque jour davantage en privant de sens des mots à multiples tiroirs ?

Comment ne pas sourire en s’identifiant bohème, du papier, un stylo, un cahier, un crayon, assis dans un avion, ou bien encore dans le train, au chaud devant la cheminée ou bien encore respirant l’océan, parcourant les sentiers bien plus que les routes, s’émerveillant devant les trésors que la nature donne, sans forcer, sans attendre qu’on le lui demande, sans priver qui que ce soit  de quoi que ce soit ?

C’est tout cela ma bohème, n’en déplaise au grand Charles, Aznavour, je précise, on peut être grand par les talents sans l’être de taille, bien que ce monsieur le soit aussi, un artiste de taille. 

Oui, la bohème, c’est écrire et dessiner, écrire ou dessiner, penser, regarder, profiter, être libre au fond et n’avoir pour maitresses que le temps, la nature et l’inspiration….
  

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