Récréation


Animer sans haine devient aimer, ou pour faire plus décomposé, « animer » sans « n » devient « aimer ». C’est troublant les lettres et les mots dès lors qu’on aime à jongler avec, on rajoute, on retire, on va, on vient, on glisse ici ou là, c’est une explosion de découverte, un mot derrière un autre, le plaisir de construire en faisant comme en défaisant…

La haine, le « n ». Pourquoi pas. Une lettre qui aime à se multiplier, à voyager et s’installer avec sa sœur jumelle, doubles « n » ici, mais pas là…. Voilà qui change le mot, le sens transforme un âne en Anne par exemple, il n’y a pas de quoi rester dans les annales non plus… D’autres consonnes qu’on sonnent bien dans nos vocabulaires, aiment à aller par deux, tout comme le « m », le « t », ou bien encore le « s », bon, il est vrai que le « s » non doublé ne se prononce pas pareil que le double « s », imaginez un peu le boucher faire mal à l’aise sans ses esses pour suspendre ses quartiers de viandes . Notons au passage, que le pronom possessif devient parfois générateur de trouble : le boucher serait-il maso pour suspendre ses propres quartiers de viandes ou bien, en fait, les quartiers à suspendre ne sont siens que le temps de l’avant-vente ? Diantre, que notre langue est à la fois étrange et prenante, jouissante devant tant de faculté à dire une chose puis une autre sans parfois même varier l’ordre des mots ; Je comprends qu’il soit parfois difficile de suivre et de s’entendre sur le sens d’un discours, mais des maitres tels Labiche ou Feydeau bien après Molière, ont su du quiproquo bâtir des stratagèmes afin que le rire fuse là où les mots furent quel que fussent les pièces écrites.

Et si on manquer d’air ?
Plaire sans air devient une blessure ; Ben oui quoi ! Plaire sans « r » est une plaie, non ? Certes sucrer s’allège et ce change en ….délices, prendre devient plus définitif, une paire devient une paie, moment magique du mois où le banquier retrouve le sourire…. Décidément, ce manque d’air devient étrange et révélateur, alors qu’avec un supplément d’air, un spot en plein air devient du sport ; dois-je encore composer ? Vive l’air qui nous fait vivre !

Plaire sans elle devient paire… Une paire de boules sans doute… Paire sans eux devient pair, voilà qui est important outre-manche, mais sans passer au saxon, restons latin, sans air, histoire de ne pas finir aux latrines. D’autres exemples sans doute ? Vois et aime devient vomis, pas très sympa, un crime par étouffement, donc sans air, deviendrait une cime, bizarre d’oser écrire que cela soit un sommet… Certes, parfois ce sont des voyelles qui voyagent et change le sens des mots. Démo ? Voler avec ou sans « i » reste un crime, alors qu’aimer sans « i » devient amer. Bigre, va falloir aussi dans l’orthographe tenir compte des voyelles, des demoiselles qui viennent colorer l’existence des consonnes quitte à parfois s’associer.

Des exemples, je suis sûr que vous allez en trouver d’autre, plein d’autres, il suffit parfois d’un déclic, d’un attention particulière, d’un sourire singulier pour que s’éveillent des pensées plurielles. Comme le chantait Charles Trenet « il suffit pour ça, d’un peu d’imagination »… Et l’imagination c’est le piment de nos vies, oser partir en songe, même éveillé, rêver, même en plein jour, aérer votre esprit, jouez de chaque menu chose qui passe et vous paraisse anodine dans votre vie, juste parce que votre esprit est trop occupé à des choses autres. Oui, c’est vrai, on a plein de labeur, plein de choses à vivre, à faire, mais rappelez-vous combien les récréations sont constructives : elles permettent de souffler, elles permettent surtout de recharger les batteries pour mieux accomplir les travaux plus sérieux.

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