Il y a deux mondes, le monde de la montagne, le monde
de l’océan, deux mondes différents, deux mondes de passions, deux terrains de
jeux et de découvertes, de leçons de choses comme nous disions autrefois, du
temps d’avant les sciences, de leçons de vie, mais cela, c’est partout, pour
peu qu’on veuille bien voir, entendre et apprendre.
Il y a un endroit où la montagne rejoint l’océan, où
l’océan vient jouer avec la montagne, où la résultante de ces deux forces
devient quelque chose de très puissant, de très fort, un peu comme si tout
devenait démesuré, peut-être tout simplement parce qu’on ne le mesure pas.
L’océan ne sait pas comment se jeter à l’eau, tantôt pente douce qui vient
timidement risquer de glisser un bout de roche dans l’eau claire, tantôt falaises
abruptes qui s’offrent aux coups de ces vagues puissantes qui s’y explosent
contre dans des gerbes d’écumes aux parfums iodés. Cet endroit, c’est ma terre
d’adoption, une source d’énergie, un écrin renfermant mille trésors, encore les
voir, apprendre à les voir. Certes, un trésor pour l’un n’est pas un trésor
pour l’autre, et si l’un attend d’y trouver des biens précieux en espèces
sonnantes et trébuchantes, il n’aura ni plus raison, ni plus tort que l’autre
qui y cherchera ce bien précieux, ce bien-être, cette ressource, non
chiffrable, non quantifiable mais tellement enrichissante. A chacun sa mesure,
il n’est nullement besoin de fonctionner à l’identique, le plaisir se cueille
selon la formule propre à chacun.
Ces montagnes, belles et fières, jouant avec les
nuages, déroutant les vents et servant de frontière, combien sommes-nous en s’y
abreuver de plaisirs pourtant si différents ? Il y a le berger qui mène
encore ses troupeaux, sans savoir si au fond, ce n’est pas son troupeau qui le
mène ; Il y a ces hommes et ces femmes de la terre qui y dressent des
clôtures comme une partition où les portées en files parallèles de fils
parallèles ne portent pas de croches, ni simples, ni doubles ni même triples,
où les blanches ne contrent pas les noires mais où pourtant poussent à
l’unisson, ici ce diamant rouge qui viendra réchauffer les plats après avoir
coloré les façades de l’automne, ce subtil piment d’Espelette, et là ces vignes
qui produiront ce nectar quasi violet, riches en tanins et en caractères, ce vin
d’Irouleguy ; Il y a encore ces randonneurs, et là encore dans des
plaisirs différents, celui qui gravit plus qui ne monte, l’œil sur la montre
tout autant que l’altimètre, fier d’enchainer les sommets dans un laps de temps
raccourci, ou bien celui qui « se
passege » comme on dit ici, c'est-à-dire, qu’il se promène, parce que
les yeux ne sont pas assez grands ni assez rapides pour tout embrasser, tout capter,
tout voir, parce que chaque pas qui l’élève est un pas de plus vers un point de
vue différent, parce que l’appareil photo converti au numérique n’arrive plus à
combler ces cartes mémoires sans fond, pensez donc, hier vingt-quatre ou
trente-six poses, aujourd’hui les giga s’empilent et les photos avec ; il
y a encore ces randonneurs à vélo, vélo de routes ou bien vtt, parfois motos et
plus souvent quads, ruban de poussières sur les pistes asséchées, ou bien
zombis de boues lors des sorties d’après pluies ; Il y a au-dessus ces
petits points accrochés à une grande voile, parapentiste ivre de bonheur de
tutoyer le ciel tout comme les vautours et voir de là-haut tout ce monde de
terrien, bergers, agriculteurs, randonneurs, cyclistes, motards, et même ces
irréductibles pottocks. Comment pourrait-on dire qu’un plaisir est meilleur que
l’autre ? Comment pourrait-on vouloir réunir et unir en un seul mode de
fonctionnement ces états si différents et au fond, si complémentaires ?
Et si je regarde vers l’océan en contrebas, que vais-je
y voir, si ce n’est pêcheurs, en bateau ou sur la plage, plongeurs, en profondeurs
ou bien juste sous la vague, surfeurs, sur les rouleaux déchainés ou bien à la
terrasse des cafés sur leur portable, baigneurs, jouant entre sacs et ressacs
ou bien défiant les courants, vacanciers, dorant sur le sable ou bien lisant
sur un banc, peut-être même écrivant, peut-être même dessinant ou peignant,
après tout, cela arrive parfois…. A chacun son endroit, à chacun ses plaisirs,
c’est cette diversité qui nous enrichit, et c’est cette proximité de terrains
d’expressions si différents qui fait aussi de cet endroit un lieu fort agréable
pour y séjourner, disons, toute l’année…
L’essentiel est de comprendre que
personne ne détient la bonne formule, mais plutôt, que nous sommes tous
porteurs d’une partie du code magique, parfois même de plusieurs morceaux par
la pratique, par l’ouverture à d’autres domaines, par la conscience que la
diversité est le vrai trésor de nos vies….
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