Le
jour où tout s’arrête, il y a le silence. Tout d’abord bienfaisant, nous vivons
trop dans des mondes de brouhahas pour en avoir oublié la mélodie du silence.
Il y a la joie, le plaisir de pouvoir enfin écouter, tranquillement, de pouvoir
lire, écrire, parler, mais à qui, crier, mais pourquoi, tu ne t’entends
pas ? Parce qu’au bout d’un moment, le silence, c’est assourdissant,
surtout lorsqu’on est habitué aux bruits, même s’ils sont pénibles ces bruits
d’être bruyants, lorsqu’ils cessent, c’est con, mais ils manquent. C’est
pénible l’état de manque surtout lorsqu’il y a des tas de manques… On tourne en
rond, on vérifie mille fois son répondeur, on guette le moindre bruit que le
silence pourrait faire, mais non, rien. Rien parmi les riens, c’est vide, désert,
et le désert déshérite. Vide, néant, anéanti, le silence anéantit. Etat de
choc. Action-réaction. Une claque puis l’autre. Le silence et le choc. Fin du
premier acte.
Car
il y a un autre acte, toujours, on ne meurt pas de silence, non, on écoute le
message, on l’entend, on le prend, on essaie de le comprendre même s’il peut
surprendre. Il surprend toujours. Le silence est beau, il est libre, il envahit
tout, vos téléphones, vos boites mails, vos adresses, virtuelles comme réelles,
il visite tout, il ratisse tout, il bloque tout. Fini les bruits, le silence
est d’or même lorsqu’il ne dort pas. Résistance. Non, il ne sert à rien de
résister, il n’y a pas de combat, il y a une nouvelle donne, des bruits ne sont
plus, un silence est là mais pas tout à fait, il ne peut tout réduire au
silence, on entend bientôt une mouche voler, signe qu’il en en prit un coup le
silence. A moins que ce ne soit nos oreilles, qui cessant d’être sevrés de trop
de bruits familiers se mettent à écouter d’autres bruits autrefois étouffés, la
majorité laissant place à des minorités, mais ces bruits mineurs donnent le la
en sonnant le glas du silence étouffant. Avez-vous jamais écouté une mouche
voler ? Quoi ? Qu’entends-je ? Qu’ouïs-je ? Seraient-ce des
oiseaux ? Ici ? Je n’y avais jamais prêté attention…. Il est là le
grand mystère, on ne prête que peu d’importance aux minorités, tellement nous
sommes noyés dans des brouhahas autrement plus majeurs…Jusqu’à ce qu’ils
s’arrêtent. Fin du second acte.
Car
il y a encore un acte, il ne suffit pas d’entendre le silence du silence,
encore faut-il vraiment percevoir les bruits naissant, les bruits mineurs
montant en gamme, et se dire que, tous comptes faits, ce silence fait vraiment
du bien. Certes il surprend, trop habitué que nous sommes à ne point
l’entendre, puis il choque, on se demande quel fil on a donc débranché, mais il
révèle ô combien d’existences jusque-là noyé dans les bruits faussement trop
forts. Ceux qui parlent forts n’ont pas toujours raisons, ils cherchent le
volume qui manque à leur étoffe, ils cherchent à prendre la place quitte à
étouffer les autres. De l’air ! Enfin de l’air, merci le silence d’avoir
fait disparaitre ces mauvais sons, de t’être installé le temps que les oreilles
se reposent et se nettoient, puis d’être parti vers d’autres cieux laissant
enfin place à tout plein d’autres jolis bruits. Ils dureront un temps, un
certain temps, mais désormais, grâce à toi nous savons que rien n’est éternel
et qu’il est bon de rester aux aguets, l’oreille tendue, parce qu’un bruit tout
comme un silence, ça vit, ça meurt sans qu’on y prête vraiment attention. Fin
de l’acte.
Car
il y a d’autres actes, qui feront ou pas du bruit, des bruits, qui pèseront
peut-être aussi par leur silence, désormais c’est une cause entendu. Il n’y a
rien à regretter, les manques ressentis ne sont que de notre propre fait, les
absences des uns et des autres ne font que révéler la fragilité des liens que
nous avons tissé, quelques soient les vies, réelles et virtuelles, le monde est
en perpétuelle évolution, il ne sert à rien de vouloir quitter le manège avant
l’arrêt complet, pas plus qu’il ne sert de regarder s’éloigner le quai de la
gare. Merci aux silences, merci aux bruits, merci surtout à nos oreilles, à
notre écoute car sans notre écoute, comment pourrait-on se rendre compte de la
futilité ou non des bruits ?
1 commentaire:
Ah oui surtout en ce moment . Cela fait du bien d écouter le silence .c est paradoxal . Mais ce brouhaha fait mal aux oreilles et nous rendraient sourd . Je dirai stop et fermons les écoutilles . Dernier acte .
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