La bascule

Juillet s’en va, sur la pointe des pieds, le sol est trop chaud. Août n’est pas encore là, c’est étrange ce sentiment de bascule du temps, comme si la moitié de l’année était plutôt située ici, en ce moment précis qui séparent les juilletistes des aoûtiens, chassé-croisé sur les routes, clôture d’un premier tome avant de commencer le second. Quel tome ! Long, non pas par les sept mois écoulés mais plutôt par l’intensité de ces sept mois-là, la richesse des évènements, l’étendu des sentiments, les caprices de la météo comme ceux d’une vie, de plusieurs vies qui se croisent, s’associent, se séparent, s’oublient, ou pas. Sentiment de frustration bien sûr, devant la force des choses, l’amertume des départs toujours trop tôt, pas toujours prévus, on a beau dire, on a beau faire, il est des deuils qui ne se font pas. Sentiment de maturité aussi, là où hier la colère l’aurait emporté, il est un recul, une abnégation et à défaut de prise de pouvoir sur le temps, une composition avec plutôt que contre. Qu’importe les échéances, nous en avons tous, tout se paye toujours un jour. Nous ne sommes que des produits à durée limitée, vivre c’est une stratégie, non un défi, vivre, c’est une activité à plein temps, il n’y a jamais de repos, peut-être est-ce pour cela qu’on parle de repos éternel.


L’Homme trop fier croit maitriser ses sujets et cette année, la nature a montré combien elle était la seule maitresse, pate à se défaire des parasites d’humains qui la bafoue, la détruise et l’irrite chaque jour un peu plus. Nous manquions d’eau, par nos gaspillages, notre vision de ressources quasi inépuisables, elle a vidé nos puis ces deux dernières années, elle nous a inondé de pluies, de neiges l’espace d’un hiver dévorant le printemps. Routes emportées, villages inondées, végétation dopée par cette manne céleste, les dégâts visibles sont énormes, d’autres plus sournois viendront, les ravinements souterrains, les poches d’eau dans les sols, les mouvements invisibles donneront d’autres signaux. Après l’eau, le feu, celui du soleil, des vagues de chaleur inondent l’été que nos grands spécialistes météorologistes nous avaient annoncé pourri, frais et peinant à s’installer. L’été est là, très chaud, provocant des orages parfois violent, parfois monstrueux par ces chutes de grêles et grêlons, détruisant un peu plus les biens et les cultures des Hommes. Que sera demain ? Les mers et les océans se réchauffent  très vite, au détriment d’une faune, à l’explosion d’une autre. La vie n’est qu’une succession de cycle, on cherche encore à savoir pourquoi et comment les dinosaures ont disparu, sans comprendre que nous sommes peut-être les suivants. Tout cela sonne noir, enfin, pas tout à fait, tout cela sonne noir du point de vue de l’Homme arrogant qui croit maitriser son sujet et qui en véritable despote campe sur ses positions. Ce n’est qu’une série d’alertes, de messages, d’incitation à réagir et ces coups de semonces ne sont pas le glas sonnant la fin de feu l’Homme. La conscience est une maitresse jalouse, sans la prendre, sans l’entretenir elle s’enfuit et peinera à revenir. Soyons humains, humbles habitant d’une planète malade, nous en sommes les virus. Mais si les virus rendent malade et parfois tuent, il ne faut pas oublier qu’ils peuvent soigner et protéger. Devenons les vaccins de notre monde, apprenons à atténuer nos actes violents, apprenons à agir et interagir avec notre milieu de culture avant d’être injecté dans le vaste monde. Chaque pas, chaque action compte, qu’elle soit bonne comme mauvaise, le bilan se fera en additionnant les plus et les moins. Nous avons pas mal de moins déjà, essayons chacun d’apporter un plus ou deux pour redresser notre bilan et en rendre la tendance positive. Maitrisons notre impact, apprenons le coût de l’énergie, aujourd’hui on consomme autant d’électricité l’été que l’hiver, on chauffe, on climatise, et parce qu’on est riche de technologie, on construit et on vit en dépit du bon sens. Désormais, même l’habitat des vacances doit être climatisé… Comment faisait-on avant d’avoir les moyens ? Des volets aux fenêtres ? Pas de grandes ouvertures en plein sud, des arbres pour l’ombre, espaces verts près des constructions, des vies en relations vraies avec la nature. A-t-on besoin d’aller chercher un hypothétique gaz se coinçant la bulle dans les schistes profondes au risque de trouer et de perdre à jamais des nappes phréatiques ? A-t-on besoin d’illuminer les vitrines de jour comme de nuit ? A-t-on besoin de voir en pleine nuit comme en plein jour ? Mais dis-moi, quelle couleur ça a une étoile ?


L’année bascule vers sa fin et chaque bascule constitue une période de réflexion, une pause, un pourquoi, des comment, on ferme le livre et on se demande si on a bien lu, si on a bien compris l’histoire, une respiration profonde avant d’ouvrir le second tome, un recul sur soi, sur sa lecture des choses du temps, car si les épisodes sont parfois communs, ils n’en demeurent pas moins différemment vécus et ressentis, c’est aussi cela notre richesse et communauté. L’écologie n’est pas une politique mais une république, dans son sens latin premier du terme, une chose publique. Une matière belle et simple qu’on pourrait appeler sciences naturelles, école des vies, surtout pas un secteur de pouvoir ni d’extrêmes, juste une école de vie, un entretien d’un bien loué le temps d’une vie… Et si l’écologie passait par l’éco logis ? Habiter de façon plus économe, c’est puiser moins dans les ressources, c’est penser qu’on n’a jamais rien sans rien.

   

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Je laisse la place a ceux qui veulent s entasser au memes endroits aux memes moments ...qui vont polluer ..encore un peu plus .