Urban aqua, mais c’est de l’eau de ville ça !
Allez, allez, à vos pinceaux, à vos bons mots, à vos stylos, à vos fusains et à
vos souhaits ! Si l’eau mouille, prenons garde de ne pas finir enrhumés
dans les rues de la cité et si t’es pas mouillé, à quoi ça sert ?
J’entends les mots du maitre troubadour « Regarde là, ma ville. Elle s'appelle Bidon, Bidon, Bidon, Bidonville.
Vivre là-dedans, c'est coton» Car si on a tous nos références, les miennes
restent culturellement attachées au sang occitan, celui qui rouge comme un
drapeau drapent un pays dont la Loire fut la frontière, dont l’Italie fut une
limite, les Pyrénées une muraille et l’océan une bordure.
Urban aqua, mais à quoi rêve la ville ? Ma ville
est rose, elle s’embrase lorsque le soleil couchant l’allume, faisant naitre
des reflets de feu aux murs de briques et aux arches de pierre, elle rêve à son
fleuve, l’eau en ville, l’aqua majeur, l’accord majeur celui qui donne le
tempo, selon la hauteur de son dos, celui qui donne le la, lorsque sa prairie des
filtres et ses berges se libèrent des flots, que l’herbe y verdit et
s’assouplit pour que s’assoupissent locaux et vacanciers, union à l’unisson des
flots, rêveries, musiques, causeries, lectures ou bien escalade, c’est tout
cela à chaque pas, à chaque mètre, à chaque brique, à chaque goutte, ici le
soleil brûle mais plus que tout, il réchauffe et irrigue les sens dans des
plaisirs sans cesse renouvelés, dans des sens qui ne peuvent être interdits.
Urban aqua, mais aqua réelle, l’eau latine, l’eau
divine, ce fleuve majeur, né en Espagne au trou del toro et peut-être même
ailleurs, sur ce pla de Beret, car il est farceur, au dessus de Baqueira,
Salardù ville royale en val d’Aran, c’est alors un modeste ruisseau, un
« riù garonna » qui n’est pas encore « Garonne » mais pour
de là nait la Garonne. Il coule de cailloux en cailloux, de pierre ne pierre,
il fuit l’Espagne, comme d’autres l’ont fuit en des heures sombres d’un temps
jadis et révolu, et ce fleuve qui quitte la montagne, non s’en y avoir pris sa
force et peut-être même la tonalité de son accent comme le disait notre maitre
troubadour, ce fleuve en descendant a choisit de s’en aller mêler ses eaux aux
eaux fortes de l’océan, plutôt que de basculer, comme sa cousine Aude vers les
eaux plus calmes de la méditerranée. Parler d’eaux fortes et d’aquarelle, cela
reste artistique, non ?
Urban aqua, là ou d’autres voient la ville, moi j’y
vois le fleuve, puissant ou nonchalant, nourricier, apportant sa fraicheur dans
nos soirées d’été, coléreux ou paisible, tout comme le peuple d’ici, et si les
façades sont belles ce n’est que parce que le miroir des eaux reflètent leurs
beautés tout en y renvoyant les rayons d’un soleil brulant. Que seraient les
quais de briques rouges sans le fleuve large qui coulent le long ? Que
seraient le pont neuf, toujours jeune en son nom même si de tous il est le
doyen sans ce spectacle offert, cette limite rive gauche – rive droite qui
n’existe que par la frontière des flots ? Et puis, que serait l’aquarelle
sans l’eau ? D’ailleurs, pourquoi n’y-a-t-il pas d »o » dans
aquarelle ?
Urban aqua, c’est comme ça, il n’est pas de limite, pas
de frontière, pas de combat, juste un défi, histoire de s’unir, de mélanger et
de partager la vision d’un même thème, selon que t’aimes ou non ceci plutôt que
cela, les murs de pierre plutôt que de brique, la version
« Bidonville » de Claude Nougaro plutôt que la version
« cité » ou bien encore « New-York avec toi » de Téléphone,
c’est cela la richesse, le partage de ces visions différentes, le kaléidoscope
aux multiples vues, les nombreuses facettes qui font briller le diamant du
collectif.
Urban aqua, c’est aussi ne pas oublier qu’avant la
ville fut le fleuve, celui qui abreuve, auprès duquel on vient se poser,
palissade de bois, huttes plus que maisons, avant d’en tirer les pierres, ces
moellons tout lisse, tout en courbe, d’avoir usé leurs arêtes en roulant et se
polissant depuis la mère Pyrène, polis au point de venir policer la nation,
bâtir les premiers mus en dur, ces murs dits « toulousain », enserrant
deux rangées de galets posés en sens opposés, entre deux rangées de briques
plates de ces briques dites « foraines » histoire de ne pas perdre
son sens du voyage ni de la fête. Mélange, opposition, opposition dans
l’opposition, terre de révolte, terre de culture, pourrait-il en être
autrement ? Pourrait-on y naitre autrement ?
Urban aqua, une ode à ma ville, une ode à mon cœur, à
mes racines, à mon terroir, peu importe la rime, la poésie est partout, dans
les murs de briques comme dans les trous, il n’y a pas d’image infime, mais des
couleurs partout, et si la marchande de bric-à-brac vent des brocs c’est aussi
pour donner du tempo, de l’accent à ces mots. La prose se pose, les mots
cognent et percutent, le soleil chauffe et la brique irradie jusqu’au cœur de
la nuit cette chaleur reçue, ce trop plein d’énergie, on ne vit que dans le
transfert, recevoir puis donner, donner sans recevoir, transmettre, offrir,
surprendre, comme surprend ce vent chaud lorsqu’on traverse la ville en roller
dans les premières soirées fraiches de l’automne, partout est la magie. Si je
devais dessiner ma ville autrement qu’en mots, cela serait surement en émaux,
tant la lumière et les reflets restitués en restent la clé, sorte de
fécondation in vitraux, que les hommes du moyen âge savaient composer, que
l’homme poético troubadour ennoblit dans ce qui reste pour nous autres de cette
terre capitale un joyau, un résumé non réducteur de cette belle cité, et je ne
pourrais quitter la page sans bien sûr m’y référer « ô Toulouse, ô moun
païs », je ne peux que conclure aux accents forcement chantant de
« Toulouse » évidement !
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