Le lys n’a pas encore fleuri, ce n’est pas une
quelconque allusion a notre auguste monarchie sous prétexte de jubilé en
perfide Albion, non, plus prosaïquement il s’agit de cette fleur étrange,
renaissant chaque année de rien, quelques feuilles puis une tige gracile qui
croit, chaque jour un peu plus, avant de porter ces boutons lourds, boules
pendantes qui s’en viennent à éclore pour délivrer une fleur blanche,
immaculée, aux senteurs puissantes au point qu’un seul pied suffit à embaumer
l’air du soir comme du matin, parce que l’humidité plus dense s’en vient puiser
les essences afin de mieux les disperser. Ce lys baptisé chez nous « lys
de Marie » car fleurissant en Mai, le mois de Marie, redevient simplement
« lis blanc, lilium candidum »dans la botanique nationale, un côté
candide qui fait disparaitre la poésie mariale. Mais voilà, ce lys-là, et non
ce lilas, la saison est passée, celle du lilas, essayez donc de suivre ce que
vous lisez-là et que donc je lis-là aussi, ce lys-là n’a pas fleuri en Mai, encore
une conséquence de cette année bizarre à l’hiver fort rigoureux. N’y voyons pas
un quelconque présage de terribles malheurs, non, simplement un calendrier de
la nature déphasé de celui des hommes pour cause de jours blancs, nombreux,
serrés et congelés. Les anciens, vous savez ceux qui se servaient de leurs
neurones, de leurs vécus, de leurs expériences, du partage des connaissances
transmises par le long cycle des transmissions orales, de veillées en veillées,
d’apprentissage en apprentissage, car à l’école de la terre c’est chaque jour
qu’on s’en vient irriguer sa culture, défoncer le terrain de nos certitudes,
laisser reposer pour mieux récolter plus tard ce savoir savamment testé d’aïeul
en aïeul. Non, point de glaïeul, il s’agit bien du lys que nos aïeux
utilisaient comme point de départ du lent décompte qui séparent le travail de
la terre de la récolte de son sang, compte à rebours qui espace les labours du
velours, du dressage des sarments à la vendange, c’est à compter de la fleur de
lys cent jours pleins et ronds pour cueillir les grappes et emplir les tonneaux
ronds. Cela parait étrange lorsque citadin on croit en la rigueur tout
élémentaire du calendrier fut-il grégorien. Pourtant, à bien y réfléchir, le
froid, l’humidité, la chaleur qui dicte la floraison du lys, sont les mêmes
paramètres qui guident les premiers pas de la vigne puis lui lâche la grappe,
un peu comme la main du père lentement lâche la selle du vélo de l’enfant qui
fait ses premiers tours de roues sans l’aide des petites roues, et s’aperçoit
cent mètres plus loin que la main qui le soutenait est celle qui de loin le
félicite.
C’est étonnant et rassurant, de voir combien la nature
sait guider l’homme qui prend la peine de l’observer, de la mesurer et de la
comprendre. C’est un spectacle magique et une source d’énergie formidable pour
celui ou celle qui sait voir, prendre le temps de s’aligner sur ces repères
naturels qui sont nos repères fiables et réels dans un monde qui court,
accélère et oublie, parce que sans prendre le temps, on ne peut comprendre, on
ne peut apprendre, on ne peut retenir. Au fond, il n’y a rien d’étonnant, rien
d’étrange, juste un spectacle remarquable offert chaque jour, qu’il pleuve ou
qu’il vente, qu’il fasse chaud ou frais, chaque jour, chaque heure, c’est une
leçon de chose offerte, qui renvoie aux leçons de choses de l’enfance, à ces
cahiers fins aux pages remplies de textes, de feuilles séchées, d’expériences
et de premières découvertes, peut-être même d’une introduction à ce qu’est la
vie, ma vie aujourd’hui. Une fleur royale, loin des tulipes de Hollande….. Euh,
non, quand même pas un raccourci trop étatique, les tulipes que je préfère sont
botaniques et poussent dans certains coins de nos maquis, j’en connais quelques
sites et c’est toujours plaisirs à voir cette fleur si belle dénuée de toutes
ces transformations génétiques, rien ne vaudra jamais les beautés naturelles,
la nature regorge de trésors, en chaque saison, de chaque couleur, sur chaque
terrain, mais cela est une autre histoire, je retourne voir le lys de mon
jardin….
1 commentaire:
J'ai offert un bouquet de lys à ma maman pour sa fête dimanche dernier. Les fleurs commencent juste à s'ouvrir, les unes après les autres. Parfum envoûtant, entêtant même. Magnifique fleur. Mais attention aux étamines de celle-ci. Une poudre mauve foncée tombe lorsqu'on bouge la fleur un peu trop et elle tâche. Sur les vêtements, ça ne part pas.
Bref, un joli spécimen
Natacha.
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