Matin blanc

Matin blanc, première gelée, l’automne donne le ton à l’hiver pas encore né que son berceau est prêt…. Pare-brise à gratter, col de veste à relever, écharpe à nouer, les premiers signes cliniques sont bien présent. Les toits ont blanchi, les herbes folles de rester dehors par pareil temps sont complètement givrées et craquent sous les pas. Ce n’est pas encore l’immaculé de la neige, mais déjà cette pâleur donne aux paysages une douce lueur au jour naissant. Des tons pastel aussi loin que porte le regard, exception faite bien sûr des éclairages surpuissants de la ville. Les panaches de fumées s’élèvent droits dans le ciel sans vent, les moteurs des véhicules en chauffe le temps de redonner au vitrage un peu de visibilité crachent leur flot de vapeur dans ce froid sec. J’aime cette impression de mise à plat des choses, de ralenti, cette vision différente dictée par la nature. Le ciel flamboie dans son aube, signe hélas de tourments climatiques à venir, mais pour l’heure, c’est une douce lumière qui accompagne le défilé des paysages sur le bord de mes routes. Pourquoi ce bien être au contact des premiers frimas ? Parce que je suis enfant de l’hiver ? Pas seulement, et même quel en serait le lien ? De toutes les saisons je ne sais la quelle choisir. Toutes sont belles, toutes possèdent leurs atouts et leurs inconvénients. Chacune apporte son lot de plaisir, à condition bien sûr de savoir les cueillir, d’avoir envie de les vivre, d’y goûter pleinement. C’est sûrement cet éclat matinal différent, sa primauté dans l’année, peut-être aussi le fait qu’on y espère détecter le signe d’un retour au juste équilibre dans le cycle des saisons, retrouver un hiver froid et blanc, préparé par un automne en terminaison glaciale, afin de reposer et nettoyer la terre, les plantes, pour que le printemps se réveille éclatant, jouant de ses couleurs, des ses odeurs jusqu’aux chaleurs de l’été. Peut-être aussi, parce que ce froid sec, éveille les joies des belles flambées, des soupes chaudes, des plaisirs intérieurs, peut-être aussi parce que c’est ainsi, tout simplement !

De tout temps il y a ses supporters et ses détracteurs. Le froid comme le chaud, le sec comme l’humide, éternelle insatisfaction de l’espèce humaine, mode de fonctionnement naturel où il est bon de ne pas aimer, plutôt que d’aimer. Sont-ce là les suites du croquage de pomme par la belle Eve, notre mère à tous ? Ne rigolez pas, c’est biblique ! Nous sommes tous enfants d’Eve et D’Adam, et même que la génération suivante ne comporta que deux fils, enfin, jusqu’à ce qu’un tua l’autre. Notre patrimoine génétique, est donc issu d’une femme née de la côte d’un homme, et de deux garçons…. Chercher l’erreur ! Mais bon, là n’est pas le propos, je m’éloigne du sujet, je quitte le froid pour des sujets plus brûlant. D’ailleurs, en parlant de froid, il ne faut pas exagérer, la température flirte juste avec le zéro, et on a beau être sudiste, on a connu pire en matière de froid…. Attendre fin novembre pour goûter à la morsure du froid par une nuit sans lune est tout de même signe d’une année de douceur, même si les extrêmes n’ont pas atteint de valeurs record, les cieux furent tout de même bien cléments en ce 2008 qui brûle ses derniers feux. L’an dernier, quelques souvenirs océaniques me permettent de dater les premières gelées et même les épaisses gelées autour du 10 novembre, souvenirs d’un retour glacial à bord de ma fidèle monture de plastique en clôture de saison. L’art de la critique, presque toujours négative devient une seconde nature chez nos contemporains, c’est ainsi, cela m’est égal, je respire aussi bien l’hiver que l’été, et je reste ébahi devant les lumières offertes par la nature. J’aime donc ces matins blancs, et il y a bien longtemps que cela ne m’affecte plus, il fait le temps qu’il fait, et nous n’y pouvons rien, en dépit des discours de grands scientifiques moralisateurs. Cela n’a rien à voir avec une inconscience éco citoyenne, ce qui de plus serait très loin d’être le cas, mais une vérité.

Nous avons beau parler de la pluie et du beau temps, personne ne maîtrise le climat, et c’est tant mieux. De toute façon, il fait toujours beau, alors, à quoi bon râler contre la pluie, le froid, le vent ? Vivons notre temps à plein temps, en prenant le temps de profiter et de savourer le temps qu’il fait tel qu’il est. Quels que soient les nuages, présents ou brillants par leurs absences, il fait toujours soleil, il suffit de le savoir pour le voir. D’ailleurs, depuis ce matin pâle et blanc, le jour s’est levé et bien levé, le soleil brille, et le gel est parti se fondre dans le paysage. Ronde des saisons, des plantes vont disparaître, victimes de ce coup de froid, d’autres vont se renforcer, comme nous, changer de manteau pour traverser celle qu’on appelle improprement, la mauvaise saison. Il n’y a pas de mauvaise saison, il n’y a que saison, comme il n’y a pas de mauvaises gens, de mauvaises voitures, de mauvaises chaussures, rien n’est mauvais, tout à sa place, son rôle, son but. Rien ne sert de rejeter les choses simplement parce qu’on les trouve mauvaises, il faut comprendre, apprendre, voir toujours le bon côté des choses, s’en servir pour avancer, ne pas perdre de temps à focaliser sur le mal passé, les regrets ne sont que des marches arrières, au mieux des freins à main serrés qui bloquent notre évolution. Lâchons ce lest, libérons la machine, regardons toujours côté soleil. La pluie alimente la vie, le gel met les choses à plat du moins visuellement, puis il s’efface devant le soleil, apportant l’azote nourricier aux racines enfouis. Le cycle du jour alimente le cycle de la vie, éternel recommencement, étape nécessaire à l’évolution de la plante. Ce qui fut mauvais pour elle, l’aide à se fortifier pour mieux se régénérer. Bel exemple de la nature, non ? « Ce qui ne tue pas, rend plus fort » c’est bien connu, alors, pourquoi voir autrement ? Pourquoi regretter ce mal nécessaire à la vie ? Pourquoi critiquer ce temps froid et sec ? Relevons le col, nouons l’écharpe et avançons, il fait si beau dans la vie !

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