Des roses sans orties

Hier soir, pause musicale dans la semaine avec le concert de Francis Cabrel au Zénith de Toulouse. La circulation locale plutôt saturée, c’est pourtant assez tôt que nous avons pu nous y rendre, et profiter de la grande fraîcheur du soir pour patienter longuement dans l’attente de l’ouverture des portes. Je ne sais pour quelle raison il faut attendre ainsi pour pénétrer à l’intérieur du Zénith, car après tout, si les personnels de sécurité laissaient entrer les gens au fur et à mesure de leurs arrivées, cela fluidifierait les transits et éviterait les courses dans les escaliers à la recherche de la meilleure place. Attente patiente et fraîche donc, avant d’accéder enfin au saint des saints, cette belle salle du Zénith tant attendue, tant réclamée sur notre ville, pour notre belle agglomération, et même pour notre belle région. Le choix des places, c’est à la fois une bonne chose mais aussi une valse hésitation entre un côté plutôt qu’un autre, entre plus bas et pas très haut, mais bon, à force de chercher le graal, nous trouvons d’excellentes places face à la scène. Période d’attente encore mais au chaude cette fois, sentant les pieds qui dégèlent, les fourmillements repartir des doigts, observant les mouvements de la foule, les visages inconnues ou presque, le décor plutôt sobre, mais bon, c’est usuel chez Cabrel. Entre les décors assez poussés et élaborés de Renaud et ceux plutôt dépouillés de Cabrel, avec comme dénominateur commun durant de longues années la même bande de musiciens, presque tous issus de la région, de Cahors à Montauban, de Tournefeuille à Verdun sur Garonne, c’est un peu le retour à la maison qui s’opérait. Puis, Renaud a changé de voie et de voix, d’une période sombre, il est revenu, sous d’autres couleurs, entouré d’autres musiciens, mais par contre toujours fidèle aux décors travaillés. Ces deux artistes n’étant pas des mercenaires de la chanson, c’est entre 5 et 7 ans qu’il nous faut attendre pour à l’occasion d’un nouvel album, les voir en concert. Renaud, ce fut en 2007, Cabrel, hier soir…..

Les deux ont vieilli, l’un mieux que l’autre, en l’occurrence Francis CABREL. Une maturité qui lui fait désormais jouer de sa timidité naturelle, une plénitude établie, loin du star système, il est toujours resté fidèle à ses racines, ses amis, ses musiciens, même si hier, certains emblématiques comme Jean-Louis Roques ou Denis Lable n’étaient pas là, c’est en effectif réduit, 5 musiciens autour de lui, que Monsieur Cabrel a déroulé son show, tout comme il aurait fait dans une salle plus intimiste qui lui sied mieux, c’est certain, d’ailleurs hier soir, cela faisait bizarre de voir la fosse disposant de chaises…. Le public a vieilli, peut-être, du moins les autres, mais c’est toujours un régal ! Pour chauffer la salle, un groupe, plutôt un duo, le duo Grimm, venu d’Agen, avec des mélodies rappelant le Jacques Higelin de la grande époque puis un peu plus rythmées encore, ce qui au final nous a offert une superbe première partie fort agréable. Enfin, le voilà, arrivant dans la pénombre de la scène, presque timidement, sous les applaudissements du public venu presque voir un cousin, un ami, un copain, un gars du coin dont on oublie le succès national, et c’est parti pour 2H20 de spectacle, de chansons, tendrement soulignées de jeux de lumières, de projection de décor et de phrases extraites des chansons. Peut-être un peu moins communicatif qu’au précédent concert, mais il n’a jamais trop parlé au public, les chansons s’égrènent, surprennent l’oreille attentive du fan que je suis, car plusieurs d’entre-elles ont été réorchestrées pour l’occasion ce qui leurs apportent une autre lumière. Des textes assez travaillés, je dirais même de plus en plus au fil des années, des regrets aussi de ne plus entendre d’anciennes chansons, des reprises de Brassens que j’adore, comme cette belle version si bien appropriée des passantes, mais tout de même, vu la quantité écrite et offerte au fil des années, il fallait bien faire un choix. Festival de guitare, quasiment à chaque morceau l’instrument change, allant même jusqu’à la mandoline, ajoutant des notes d’humours aux notes envolées dans cette salle à l’acoustique parfaitement réglée.

Comme toujours, il y a eu le faux départ, les morceaux joués tout seul, les musiciens partis dans la coulisse, et le rappel, plutôt mollasson du public, pour enchaîner des rythmes un peu plus rock et terminer dans la communion du public sur le premier succès, « je l’aime à mourir » à la mandoline. Départ, au ralenti, mais vrai départ de l’artiste. Lumière sur la salle pleine, et retour sur terre, direction les autos sagement parquées, le toit gelées par les premiers frimas d’un hiver automnal, les bouchons de la sortie, à peine évités par quelques raccourcis connus d’enfance, et voilà, comme s’achève une soirée…. Parenthèse musicale dans le rythme effréné de la semaine, concert rare d’un artiste rare et discret, que je tenais à saluer, chaque album me ravit, chaque texte finement ciselé, et comme si enfin la maturité apportait l’assurance, des rythmes et des orientations musicales jouant sur un large éventail. Des chansons plaisirs, c’est ce que je dégage des albums, de plus en plus aboutis, des chansons d’amour comme il nous l’a dit et expliqué hier soir, comme il nous l’a montré, essayant de communiquer cet amour de l’humanité, de la vie.
Pour tout cela, pour vos albums, pour vos textes, vos chansons, votre façon de vivre, de savoir rester ancré dans ce terroir qui permet si bien de garder les pieds sur terre, même losqu'on tutoie les sommets, pour cette gentillesse et cette modestie pas si fausse, pour cette élégante timidité, la richesse de vos concerts, des rares que je regarde en DVD, je voulais vous dire merci Monsieur Francis Cabrel.
Chapeau bas l’artiste!
Hier soir, nous avons cueilli vos roses sans même apercevoir la moindre ortie.

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