Détours et contours de la langue

Paradoxe de notre langue, enfin, si tant est que nous parlions la même langue, tant parfois il est dur de se comprendre, paradoxe donc, histoire de rajouter un peu de complication dans la communication, pas mal de nos expressions fleurent bon le non-sens…. Du genre, par exemple, des manques qui pèsent, ou bien, pleurer de rire, ou encore une santé de fer, mettre du plomb dans la cervelle, un remonte-pente…. Notre vocabulaire est bien riche de ces expressions, certes imagées, mais tout de même jouant de l’image de deux sens opposés. Quelle belle chose que la langue française et combien j’envie nos cousins plus ou moins éloignés qui ont su la préserver bien plus que nous des modes anglo-saxonnes, des raccourcis et autres barbarismes. En disant cela, c’est bien évidemment des pensées qui voguent au-delà de l’océan, filant droit vers la belle province de Québec qui s’imposent. Pourtant, nos voisins suisses ou belges, n’ont pas attendu pour la respecter bien mieux que nous. Ils savent compter sur nos racines latines, passent de soixante à septante, d’octante à nonante dans une logique bien plus logique que nos comptes pas très ronds de compteurs ne sachant plus compter…. Soixante et dix…. Comme si nous continuions de poser l’addition à des fins perpétuelles ! Quatre vingt….. Voilà une multiplication qui vient au secours de l’écolier….. Quatre vingt dix….. Toute la panoplie arithmétique, multiplication et addition dans la même comptabilité….. Dès l’enfance, nos esprits sont torturés, les chiffres à peine digérés que voilà les nombres emmêlés. Passons aux jours, la règle est simple, à chaque jour sa planète ou son satellite, n’en déplaise à lundi, avec une terminaison en di, reste latin du jour latin, sauf que voilà dimanche qui prend les choses à contre-pied, inverse l’ordre et place le jour en premier, en faisant le jour du seigneur….. Bon, ça c’est donc l’exception qui confirme la règle, passons maintenant aux mois ! Mélange de logique, soit à la gloire de dieux du passé, des dieux passés ou même trépassés, le comble pour des immortels, puis des significations agricoles, avant de retrouver une logique numéraire à peine décalée de deux mois, septembre inaugure la série et voit son chiffre sept arriver en 9e position.

Pourtant, la couleur des expressions, les images plus ou moins fanées transposées dans nos discours, nos écrits, les formes vieillottes mais pas encore désuètes de la prose, font la richesse du propos, et, pour quelques spécimens dans mon genre, des pistes de jeu, jeux de mots ou jongleries, joie de l’écriture et comme disait le regretté maître Capello « calembours, joie de Calais » Joli calembour qui m’a permis de mémoriser le nom des habitants de cette belle ville de Calais, après avoir enfin compris que ce n’étaient pas tous des bourgeois, esprit corrodé pas trop d’écoute de cet autre maître qu’est pour moi Jacques Brel. En dépit des études dites scientifiques, j’ai toujours gardé un fort penchant littéraire, et même si mon latin court depuis bien longtemps derrière mon grec ancien, je suis resté accroc aux bons mots comme aux bons textes. Ajouter à cela un penchant historique, et voilà d’ou vient ce déséquilibre ! Esprit technique et logique, cherchant à comprendre le mécanisme des rouages de toute chose, bon, d’accord, sans le démonter, ça, c’était dans mes jeunes années, voire même mes très jeunes années, au cœur d’un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître, où je disséquais les jouets, de préférence ceux de ma sœur, enfin d’en capter la scientifique moelle….. Aujourd’hui, après quelques années de lycée, ou de patients professeurs nous ont enseigné cette logique implacable, captant du mouvement l’essentiel, apprenant à en déduire l’organisation, la rotation, l’implication dans le mouvement résultant, aujourd’hui donc, me voilà à pénétrer au cœur des objets sans les démonter, sauf quelques fois, mais bon, c’était juste comme ça, pour vérifier…. Que voulez-vous, on reste scientifique, technique et pratique ! Histoire de compléter la partition, l’écrit, les écrits et donc la lecture, le passé et donc l’histoire, animent les moments de répits de l’histoire présente. Autre facette de l’homme, moments de pause hors de l’atelier, quoiqu’on parle d’atelier d’écriture, non ?

Je me vois bien, attablé à l’établi, un mot un peu revêche coincé dans les mors de l’étau, ne bougeant plus, faisant le mort ainsi serré, un mot que d’une main habile je lime les contours des lettres, afin de rentrer sans casse, le mot précis dans la bonne phrase….. Des copeaux générés naîtront d’autres mots, plus ou moins ajustés, plus ou moins long, et même si aujourd’hui certains cherchent encore le mot le plus long, je peux dire que le compte est bon. A imaginer pareil fignolage, on pourrait supposer que chaque texte est longuement ciselé, pourtant, c’est bien tout le contraire, chaque texte se doit de jaillir d’un seul jet de matière, plus ou moins creuse, coulant encore visqueuse dans le creuset du papier. Et après, On me demande parfois ou je vais me creuser ainsi la tête ! C’est ainsi, c’est selon, c’est surtout sans prétention, au jeu de l’écriture chacun ses règles, chacun ses envies, ses résultats, l’essentiel est comme dans la vie, d’être en phase avec ses envies.

Petit cadeau, un bestiaire ainsi cueilli sur les pages du net, ce n’est pas de moi, je ne suis pas si bêtes !

Que vous soyez fier comme un coq, fort comme un boeuf, têtu comme une mule, malin comme un singe, chaud lapin ou fine mouche, vous êtes tous, un jour ou l’autre, devenus chèvre pour une caille aux yeux de biche. Vous arrivez frais comme un gardon à votre premier rendez-vous et là, pas un chat ! Vous faites le pied de grue, vous demandant si cette bécasse vous pose réellement un lapin. Le type qui vous a obtenu ce rencard, avec lequel vous êtes copain comme cochon, vous l’a certifié : « Cette poule a du chien, Une vraie panthère ». C’est sûr, vous serez un crapaud mort d’amour. Mais tout de même, elle vous traite comme un chien. Vous êtes prêt à gueuler comme un putois, mais non, elle arrive. Bon, dix minutes de retard, il n’y a pas de quoi casser trois pattes à un canard. Sauf que la fameuse souris est en fait plate comme une limande, myope comme une taupe, elle souffle comme un phoque et rit comme une baleine. Vous restez muet comme une carpe. Elle essaie bien de vous tirer les vers du nez, mais vous noyez le poisson. Vous avez le bourdon, envie de verser des larmes de crocodile. Vous finissez par vous inventer une fièvre de cheval qui vous permet de filer comme un lièvre. Vous avez beau être doux comme un agneau, faut pas vous prendre pour un pigeon !

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