L'âne et le boeuf

Hiver. Il est à l’heure ou presque, né des couches de ces derniers jours blancs, les langes de verglas et de poudreuses étaient bien là et nous bien las de les rencontrer déjà…. Soit. L’hiver est là, fier et droit comme « i » vert, bien sur, elle était facile celle-là mais je ne pouvais pas la laisser passer pour autant. Autan, le fier autan, ce brave vent que bravent bien des cornes et autres objets, quand ce n’est point de personnes dont il s’agit. On parle bien de vent à décorner les bœufs, n’est-ce –pas ? Sachant qu’un bœuf est avant toute chose un taureau émasculé, sachant que selon la vindicte populaire, un homme trompé pour ne pas dire cocu, se voit paré de cornes, doit-on par simple raccourci prétendre qu’un bœuf possède des cornes qu’il doit aux adultères de sa compagne ? Je ne le crois pas, et à vrai dire, cela serait plutôt vache. Le vent d’ici, je le connais plutôt bien. Il est fier, puissant, il souffle et travaille les esprits les plus dérangés, ce qui le fait surnommé le « vent des fous », il soulève la poussière de ma terre sèche, il emporte les seaux de plastiques quand ce n’est pas la table de jardin qui se met à jouer au cerf-volant, aucun piège là-dedans, fusse pour des cerveaux lents, il fit craquer les ailes des moulins de mon pays maternel mais en aucun cas je ne l’ai vu décorner un bœuf. Soit était-ce parce que le bœuf n’est pas l’homme de la situation, soit parce qu’après tout, les cornes des bœufs sont plus solidement fixées que ma table de jardin. Aurais-je mal compris les propos entendus ? Serait-ce un vent à décorner les veufs ? Image sibylline peut-être, mais un veuf n’ayant plus de femme, à quoi en porter encore les cornes ? D’ailleurs, confidence pour confidence, je n’ai jamais du fréquenter de cocu car je n’ai jamais vu d’homme à corne, tout au plus des représentations du diable, mais celui-ci, vu l’enfer qu’il fait vivre à sa compagne, il ne serait que justice et pas justice de dieu, qu’elle s’en aille, sa femme je parle, essayez au moins de suivre, je disais donc qu’il serait quelque part justice que sa femme aille chercher le septième ciel en d’autres cieux. Oh ! Ne voyez pas là un conseil, juste un avis personnel qui n’engage que moi, et moi qui ne connait pas cette personne là ni son diable de mari. Mais retournons à nos moutons, ou plutôt à nos bœufs, qu’ils aillent par deux, puisque les deux font la paire, ne soyons pas vache avec eux, la cruelle étape qui les fit passer de taureau à bœuf suffit à leur peine, riez et souriez, ayez juste une pensée émue pour ces jeunes suppliciés qui furent castra après avoir été castré, plaisir de l’oreille, celle des autres, absence de plaisir pour eux, d’abord par abandon du personnel, ce membre de l’équipe qui s’emploie et s’active à bouter le plaisir en des lieux différents, ensuite par travail assidu pour tirer des cordes vocales le son cristallin tant attendu par leurs maitres fouetteur. La verge de branchage a remplacé la verge, l’opération n’étant pas si scientifique que cela, le succès peu souvent au rendez-vous, d’ailleurs, avez-vous entendu miauler un bœuf ? L’homme est un âne qui croit savoir….

Un âne ? Mais c’est une injuste comparaison envers le baudet que d’y faire ressembler les plus stupides de nos concitoyens, car lorsqu’on veut bien se donner la peine d’apprendre, l’âne n’est pas si âne que cela, il n’est pas plus têtu qu’on ne le croit, il peut avoir son caractère, certes, mais tout comme son maitre. D’ailleurs, lequel est le plus têtu ? Celui qui ordonne, ou celui qui ne fait pas ce qui est attendu ? Ce duo de choc et qui ne manque pas de charme est assez bien représenté dans la société humaine. Il est des paires de maitres et d’élèves tout le long de nos existences. Ne me faite pas écrire ce que je n’ai pas pensé, je ne pensais pas aux uniformes kaki, à peine aux souvenirs scolaires, et je pense à souriant qu’on affuble du bonnet d’âne celui qui n’est pas pour autant le plus digne représentant de l’image populaire de l’âne. Animal à part entière qui peut se targuer d’avoir trois descendances, l’ânon bien sûr, le mulet aussi et aussi le bardot. Contrairement à son compère de cette période de Noël le bœuf, il n’est pas nécessaire d’être émasculé pour être âne, et même si cela advint, il ne change pas de nom pour autant…. Tout au plus on croit pouvoir l’appeler hongre, j’aurais pu écrire « hongrois l’a pelé » mais ce genre d’humour à l’écrit ne le fait pas tout à fait. L’âne est un animal très intelligent, dont l’intelligence remplace souvent celle du mettre en évitant ainsi d’obéir à un ordre pour revenir plus rapidement à la position de départ et donc ainsi, limiter sa fatigue. Serait-ce donc un animal fainéant ? Pas du tout, c’est un animal de bât, vu le travail qu’il abat, et là ou le bat blesse, il est parfaitement exploité pour cela. J’ai vu des ânes soit disant dressés, alors qu’ils avaient bien leurs quatre fers aux sols fort intelligemment débarder du bois dans des endroits périlleux où le tracteur n’aurait pu être d’un grand secours, et ce, malgré toute l’intelligence de l’homme.

Je ne sais le vent qui soufflait à l’époque sur Bethléem, je ne pense pas que cela fut l’autan, pourtant l’âne et le bœuf durent s’abriter et s’enquirent d’une étable où crécher. Le vent qui souffle, froid et puissant en ces soirs d’hiver, conduisit un couple de voyageur à venir s’abriter en cette étable paumée, serrant par le fond nos compères précités. Que faisait-il sur la route en ces soirs d’hivers ? Pourquoi voir quitter l’autoroute ? Fuyait-il le diable, tiens, je l’avais oublié, ou, je lavais, oublié, mais que diable, peu importe les raisons, qu’ils fuient ou qu’ils y aillent au diable, il fait froid, il fait nuit, le vent souffle et la petite dame est à l’agonie, le terme échoit bientôt, et bientôt ils seront trois, enfin, cela le seront-ils plus tard, les échographies n’étaient pas encore nées, elles. Certains esprits chagrins ou coquins prétendent que des jumeaux furent, tout comme d’autres assurent que les rois mages furent quatre, théorie des nombres, théories du complot déjà et encore. De ce couple de voyageurs, on en a fait toute une histoire qui plus de deux mille ans après éclipse encore celle de l’âne et du bœuf, simplement voués aux seconds rôles. C’est aussi cela que je voulais relater, et, si d’aventure des crèches vous voyez, ayez une pensée pour le bœuf, l’âne et le vent qui un soir d’hiver poussa tout ce petit monde à s’abriter dans un coin d’étable, pas de quoi en faire un conte, non, tout juste à célébrer dans les temps qui suivirent, cette étrange nuit, ce soir de Noël où nous faisons un bœuf, passons pour des ânes d’offrir ces cadeaux non désirés alors qu’en ce temps-là les rois mages, livreurs de luxe apportaient des présents symboliques et non commandés.

Sourire toujours, essayez juste comme cela d’offrir de la myrrhe, de l’or et de l’encens à nos chères têtes blondes avides de jeux électroniques et autres informatiques….. ça devrait les faire rire, je suis sûr, mais de grâce, ne citez pas vos sources, assumez le plaisir d’apporter du plaisir par le seul sourire arraché, bien plus important que le sourire acheté…. L’hiver est là et bien là, le temps des festivités approche, le temps aussi de regarder en son cœur les belles images que l’année n’a pas voulu prendre le temps d’y voir. Le temps aussi de penser, de rêver et de dépenser pour chaque être cher de son cœur, ces êtres aimés et quand on aime, on ne compte pas….. Je ne conterais donc pas plus loin….

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