Au bord de l'eau...

Une pause loin de la ville et de ses remous, une pause en des lieux régénérant, à respirer les embruns, à se retrouver, mon océan et moi, mon océan émoi, face à face, chacun dans nos tourments, l’un beaucoup plus démonté que l’autre, avec une force, une violence dans chacun de ses gestes, avec des déferlantes d’écumes qui viennent briser les lames les plus profondes, qui viennent purifier l’âme venant y puiser le réconfort, dans toute la démesure de ce rapport de forces déséquilibré. Face aux rouleaux compressant de l’océan, l’homme n’est plus que vulgaire grain de sable tout comme nous ne sommes au final que grain de poussière dans l’univers. Cela aide à relativiser les choses, à ordonner et donner le sens qui manque parfois à nos vies. Assis sur le sable humide des derniers jours de révoltes océanes, les yeux se perdent et errent au gré des rouleaux, spectacle sans cesse renouvelé, aux couleurs changeantes, où le vert profond blêmit d’écume avant de s’anéantir sur le sable orangé que je reconnaitrai parmi des milliers. Le temps s’arrête et s’écoule dans le même temps, paradoxe intemporel, on ne peut que subir le temps, même si on s’en accommode, nous n’avons jamais de prise sur lui. Tout passe, tout s’efface, seul le temps grave nos visages de ses profonds sillons bien maladroits pour compter nos âges contrairement aux cernes des arbres. La vie pèse de tout son poids sur nos existences, les bonheurs d’hier sont restés à la page d’hier, les bonheurs de demain sont encore en chemin, la page d’aujourd’hui est une page grise comme ce ciel bas se gonflant de reliefs aux dégradés de gris, grisant décor pour égayer les jours gris du présent car ce ciel là, associé à ces vagues-là, et ce sable inimitable se met à résonner d’allégresse et distribue sa force aux âmes en peines….. Spleen ? Non, juste que le crépuscule d’une histoire, la réalisation aussi que tout défile tout le temps, que chacune des pages d’hier est désormais bien tournée, tout cela met du vague à l’âme, et même du vague à larmes pourrais-je dire mais ces vagues de l’âme ne sont que bien pales face aux vraies vagues qui ont toujours su bercé ma vie. Une page se tourne, mais ce n’est pas la dernière, juste qu’il y a toujours de la nostalgie à se remémorer les beaux écrits qui ne sont pas si vieux.

Je ne suis pas tout à fait seul sur cette plage, de grands garçons sont venus jouer aux châteaux de sable, avec des moyens a faire pâlir d’envie les enfants les mieux outillés : de gros camions démesurés, des grosses pelleteuses, et voilà les jeux d’hiver de la côte océane : Récupérer le sable où l’océan et ses courants le dépose pour le ramener là où il fut prélever quelques mois plus tôt. Etrange sablier qui mesure les saisons : aux beaux jours l’océan arrache le sable sur les plages du front de mer, hors saison l’homme retourne le sablier, rapporte les grains volés sur les plages les plus huppées de la côte. Spectacle désolant de l’homme contre la nature, de ces engins insolites sur mes terres désertes et désertées. Opposition des genres, force motrice des flots contre force motrice des chevaux vapeurs, je souris de voir cet étonnant parallèle, hier encore les enfants et leurs seaux de plastique, aujourd’hui les adultes et leur engins d’acier. Je souris et je respire cette vie, cette force, profonde, je renais aux flots grondeurs, je mesure avec envie combien cet océan ami m’avait manqué, combien il a grossi ces derniers jours, je ne l’avais jamais vu aussi haut, aussi puissant, aussi impressionnant. Nous ne sommes que des enfants, des graines de vies dispersées sur le globe, des graines d’envies errant sur les terres de nos parcours improbables, à la recherche de notre lumière, cette douce flamme amie qui vient sautiller en notre âme, réchauffer nos cœurs et nos corps, activer par la même la notre et faire ainsi grandir le feu qui brule en nous.

Pause. Je regarde les flots, je me laisse porter par eux, je ne recherche point de phare, j’essaie pour l’heure d’oublier les phares du passé, même si certains ont laissé de très belles et très puissantes amitiés, l’avenir est ailleurs, devant, loin ou non, la distance n’est rien, ce qui compte c’est la vitesse à laquelle on avance. Chacun son rythme, chacun ses envies, chacun sa vie, chacun ses choix.

Tout cela nous est propre, personne, qui que ce soit, ne peut se permettre de les juger, juste de les comprendre ou non, juste de pouvoir ou non être là, de savoir écouter, partager si ce n’est les choses du moins les idées qui les provoquent, de vouloir ou non les partager…. Il n’est pas toujours simple d’être humain, encore moins d’être ami. Dans nos sociétés modernes où le temps ne semble n’être qu’un lièvre qu’on ne rattrape jamais, se rappeler combien l’amitié est un joyau parait peut-être dérisoire, mais cela se cueille à chaque excès de nos vies, les très bons comme les plus creux. On ne peut être et avoir été, aujourd’hui, on parait plus qu’on est….. Il est si facile de croire et de faire croire, plus dur d’assumer et d’assurer ce qu’on est sensé assumer. Soyons nous, tout simplement, le reste, vous verrez, ne sera que chose facile dès lors qu’on cesse d’essayer d’en mesurer et le contour et le contenu. Soyons naturel plutôt que calculateur, il y a suffisamment de manipulateur et d’usurpateur…..

Pause, mais pas eject. La touche Play est pour bientôt….

Aucun commentaire: