Brumes magiques dorment dans la vallée, d’un sommet font une
île perdue au milieu de nulle part. Il est des matins ou le plafond est si bas,
si gris, que l’envie est plus encline à rester enfermé qu’à courir la montagne,
pourtant, quelques fois, la récompense est au bout, l’ascension dans les nuages
offre un paysage unique de sommets voguant sur une mer de nuage que n’aurait
sûrement pas renié Magritte.
Brumes uniques qui savent si bien voiler les flots de cet
océan sauvage, tout en s’entre déchirant pour laisser voir les contours si
familiers de cette emblématique montagne, repère immuable dans le paysage qu’il
est bon d’ainsi estomper pour mieux comprendre le vide qui serait en son
absence.
Brumes célestes, un soir de pleine lune et même de lune
bleue, s’en viennent masquer l’objectif qu’un tout autre objectif tente
d’immortaliser. Un clic pris, une image figée, c’est le temps suspendu, c’est
le temps immortalisé, c’est l’effet pris, l’éphémère qui son effet perd,
l’image a gelé le mouvement, la lune a jeté son regard perçant, et la lumière
fut.
Brumes, compagnes de voyages, jusqu’au bout des plus immobiles,
qu’ils soient sur un banc de pierre face à l’océan, assis sur un tronc d’arbre
au cœur de la nature, le cul sur une pierre instable au milieu de ces montagnes
ou bien encore debout à chercher son souffle dans une longue montée. S’arrêter
et vous voir défiler, belles fées toutes de gris vêtues, vos longues traines
glissent sans s’accrocher aux rochers, effleurent sans abimer les espèces les
plus fragiles, amusent le regard du voyageur devenu spectateur.
Brumes romantiques glissant sur le plan d’eau, effet irréel
délicieusement sensuel, soudain le décor fuit, disparait, laissant aux acteurs
la seule dimension, moment magique, féérique, seuls au monde, peut-être pas aux
mondes car il est toujours des mondes pour venir accentuer ou atténuer la
lumière à porter sur ces tranches de vies. Visages, vies sages, une lente
promenade sans repère pesant, juste marcher, converser, s’abandonner à l’autre,
à soi, vivre mais pleinement.
Brumes océanes, que serait ce bout du monde sans vous ?
Combien de fois, la dune est franchie en plein soleil pour qu’une fois de
l’autre côté, c’est une nuée ténue offerte aux regards ? Combien de
matins, le visiteur non habitué se désespère de s’éveiller sous un ciel gris,
avant que par magie, la marée s’en vient changer l’ordre des choses, et d’un
coup, le soleil fleurit ?
Brumes…. Comment peut-on traduire des « pensées
brumeuses » en des pensées vides de sens alors que vous portez justement
un masque sur les choses trop faciles à voir pour mieux nous démontrer combien
il faut apprendre à voir, à observer, à jouir de ces peu de spectacles offerts,
éphémères mais jamais austères ?
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