Dépot de bilan

Une respiration au bord du monde, de ces pauses singulières et plurielles à la fois, nécessaires pour s'ancrer sur notre terre, notre planète nourricière, de ces étapes utiles pour plonger au plus profond ses racines et laisser circuler les énergies qui drainent notre corps, nous sommes le lien entre terre et cosmos, particule utile, partie de notre monde, notre place, notre monde, les pieds sur terre, la tête sur les épaules, les yeux levés vers le ciel. Retour au monde des roulettes, les rollers sont de sortie, cela faisait un bon moment déjà que je ne les avais chaussés, de puis au moins l'automne. La faute a pas le temps, la faute à la météo, la faute à la vie dans ces épisodes familiaux, la faute aux travaux ménagers, paysagers, jardiniers, la faute à ce temps qu'on trouve jamais, parce que de toute façon, l'excuse est tellement belle qu'en trouver une autre reviendrait à ...trouver le temps. Bref, les rollers n'ont pas vu le dehors de leur sac depuis l'automne et je fus presque surpris de les découvrir, un peu comme la découverte d'un cadeau au sortir de son emballage. Petite appréhension au démarrage, mais les premiers tours de roues montrent que comme pour le vélo, on n'oublie pas. Direction la longue piste cyclable toute fraiche de son nouveau revêtement, régal des roulettes, terminées les racines des pins ayant crevassées l'ancienne asphalte, juste à ouvrir les yeux sur les aiguilles et le sable qui pourraient venir entraver le mouvement. Côté sport, au delà d'une nécessité pour mieux canaliser les énergies, le roller est un bon exercice cardiaque, développant le souffle tout en tonifiant les muscles par ces mouvements réguliers du corps, balancement régulier du poids du corps sur la jambe gauche, puis sur la jambe droite, voilà qui met à rude épreuve la machine sur les premiers hectomètres le temps d’affiner le rythme, de passer ce cap-là où le coeur s'emballe dans une petite douleur presque familière pour ensuite trouver l'apaisement dans l'effort et le bien-être dans l'exercice. Le regard balaye les rives du Boudigau, à marée basse ce matin, les eaux parties vers d'autres rivages en attendant que la marée montante ne viennent regonfler ce lit des ses eaux salées. L'avantage des basses eaux réside dans la transparence du faible volume qui permet de mieux voir les bancs de mulets jouant à saute-banc de sable, sous le regard intéressé d'aigrettes venues là déjeuner. Un groupe de cycliste passant bruyamment font décoller ces beaux oiseaux blancs aux corps si graciles. Cohabitation pas toujours évidente en saison de ce ruban de bitume, piéton, cycliste, apprenti cycliste, rolleurs, et pire, chiens pas toujours perdus mais sans laisse qui divague sans se soucier de la maitrise des différentes montures ni même simplement de la rationalisation de la peur qu'il peut engendré chez l'autre. Ils sont bien gentils ces propriétaires de chien de nous rassurer en disant qu'il n'est pas méchant, mais si le chien cherche le jeu, le cycliste ou le promeneur ne le cherche pas forcément, l'enfant pleure, et le rythme est stoppé net le temps que les choses se passent. De toute ma vie, je n'ai connu qu'un seul chien digne de marcher au milieu des mobiles en tout genre, obéissant au simple mouvement du doigt, un vrai plaisir qui réconcilie avec les maitres, l'animal ne peut être responsable de son manque d'éducation. Et puis, il existe aussi et surtout une piste en sable sur l'autre rive plus adaptée aux coussinets et à la marche bucolique.


C'est ainsi que fonctionne notre monde, chacun avance avec ses œillères, fixe ses règles et oublie le partage des règles comme le partage tout simple. Le mode égoïste s'enrichit de la quête du profit personnel, «tu es mon 'ami' parce que tu m'apportes, mais surtout, ne compte pas sur moi en cas de besoin ni même en cas de non besoin » ainsi va le monde. On choisit ses amis, on ne choisit pas sa famille, c'est vrai, mais la famille du coeur surprend parfois cruellement. Le temps efface peut-être ce vernis trop superficiel qui d'abord attire et empêche le regard d'aller plus loin, et puis, la vie, les épreuves, les simples baisses de régime, ces phases simples pourtant de l'humanité, parce qu'on ne peut pas toujours être en haut, pilier solide pour tant de personne en quête de soutien, épaule amie pour conter ses peines et soulager ses émotions, non, le jour où le moral flanche, l'isolement devient une immensité telle que même le Sahara ne pourrait colorer. Dans mes études en électronique, nous avions appris ce composant grand dirigeant d'électrons : la diode. Le courant passe dans un sens, pas dans l'autre. Et bien dans la vie, le monde est peuplée de diodes : je prends ce que tu m'apportes, mais je ne te donne rien. C'est cela l'amitié virtuelle, on se clique, on se parle, on se rencontre parfois, mais toujours dans ce but-là. Apportes moi des rires, de l'humour, du partage, emmènes-moi promener, randonner, marcher, fais-moi découvrir les lieux, les endroits, accompagnes-moi au cinéma, au théâtre, en soirée, bref, quitte moi de cette solitude, mais par contre ne quitte jamais cette stature haute, ne m'ennuies pas de tes faiblesses, je ne suis pas là pour cela.... Constat. Ni amer, ni déçu. Lucide, je mesure chaque jour un peu plus ces diodes. Heureusement, le monde n'est pas que constitué de ces personnages-là, j'ai encore pu le vérifier ce matin, un coup de fil, quelques mots, un grand respect et ce qui a disparu depuis quelques temps dans beaucoup trop d'échanges : la compréhension.



Je roule, il fait déjà chaud, le soleil irradie mon visage, intérieurement aussi la température monte, mais ce n'est que pur bonheur. Les pensées voyagent aussi, dans les méandres d'un passé dépassé, sorte de bilan d'une vie. On peut être seul, c'est un état courant de nos vies, pas une fatalité, ni tout à fait un choix, simplement les conséquences momentanées d'un parcours ou de plusieurs parcours. Des vies de couples, de familles, une vie en couple, longue qui s'achève par des incompréhensions, par une grande incompréhension, résultant d'une absence de dialogue, c'est ainsi, la mère des enfants que je n'aurai jamais s'en va, sous d'autres cieux, d'autres liens amicaux prennent place, c'est si beau, si grand, si rassurant, mais ces liens-là aussi s'allongent, se détendent, et ne fonctionnent bientôt qu'en sens unique. Par la suite, j'ai croisé la route de la folie, sous ces différentes formes, ses hystéries, ses bipolarités, sa schizophrénie, j'y ai laissé des énergies, j'y ai pris de grandes leçons, de ce passage au monde réel, celui très loin du monde des bisounours, de ces marques au fer rouge qui reviennent régulièrement saigner, secouer, comme un fer aux pieds qui ôte la liberté de mouvements dans l'éventail des sentiments. Détruit. Puis le chemin m'a fait croiser des lumières différentes, des personnes en quête de bouée, de sauvetage, sans penser qu'être sauver est aussi essentiel que sauver, sortes de boomerang sans retour, ou bien encore des étoiles, qui sont heureuse de briller dans vos yeux mais qui bientôt ont besoin de briller dans d'autres, parce qu'il faut briller quand on est étoile et qu'à être étoile on est toujours étoile filante. Et puis il y a les mensonges, parce qu'est si facile d'inventer une réalité plutôt que d'admettre qu'on est jamais que ce qu'on est. Et puis, et puis, et puis..... STOP ! Basta cosi! Le monde tourne, les étoiles filent, les mensonges étouffent et détruisent, les amitiés à sens unique se nettoient très bien à coup de clic droit, à coup de nettoyage de répertoire, la pause sportive est bonne parce que courir, rouler, marcher, se défoncer aide à pousser ses limites, à faire cogner plus fort ce coeur dont on aimerait parfois qu'il explose dans un dernier cri, juste parce que là je suis heureux, juste parce que j'en ai assez. Assez de voir mes proches, mes amis, ma famille de coeur être victime de ces rouages en forme de crabes qui viennent sans cesse décimer le cercle si proche. Assez d'être victime de cette vaste escroquerie des sentiments, fussent-ils simplement amicaux, et pire, amoureux, allez donc escroquer ailleurs, je suis désormais exsangue, usé de tant de vampires rencontrées, au point de parfois regretter ce geste inachevé qui fut mien en début de ce blog, il y a presque quatre ans. STOP! Comme j'ai débranché ces perfusions virtuelles, comme je vais stopper mes allers simples vers les autres, parce que merde, je vis, j'existe et je suis moi. Comme j'apprécie ce bouton marche arrêt sur le téléphone mobile, parce que NON, je ne suis pas dispo juste là, comme ça, parce qu'on en a envie, parce qu'il faut compléter une table, vous donner l'occasion de soudain vous rappeler votre humanité. Non, je suis humain, particules de vie, particules de vies, d'envies, parce que même les clowns peuvent être tristes, parce que même ces mots sonnent la conclusion d'un recueil électronique dont le lourd couvercle va bientôt se sceller définitivement. Voilà. Je n'ai pas encore fini d'écrire, non, j'écrirai différemment, plus anonymement ou pas, plus secrètement ou pas, je sais aujourd'hui pourquoi je suis en vie, je scelle mon passé, et même si je suis encore dans mes 20 mètres carré de chrysalide, mes ailes vont se déployer bientôt, pour ce qui est ma vie désormais, pour accomplir mais surtout accompagner beaucoup de ces poussières qui volent au travers des rayons lumineux et les aider à rejoindre le chemin de la guérison. Je n'ai pas la prétention de guérir, non, juste celle d'être conscient, d'accompagner et d'aider à voir le chemin. J'ai été blessé, cruellement, profondément, des cicatrices qui vivent leurs vies et polluent encore la mienne. C'est ma vie, ma croix, mes stigmates. Les messages pourtant sont de plus en plus rapprochés, de plus en plus clairs, l'époque est au changement. Pertinemment. Adieu donc, âmes en peine, diodes en puissance, je ne peux rien contre vos mal-être qui ne sont que de votre ressort. On ne gagne jamais sans perdre, le jeu d'échec est en un exemple puissant. On ne peut se plaindre de son couple sans accepter la conséquence de le quitter. On ne peut multiplier les rencontres sans comprendre pourquoi, et derrière chaque pourquoi se cache un comment. On ne peut se chercher soi dans le regard de l'autre, seul son propre regard doit apprendre et réapprendre à voir au plus profond de notre intimité, parce que c'est le seul regard qui soit assez pur pour déjouer les pièges des mensonges trop longtemps distillés.


Long, oui, mais parfois la plume est en phase sans emphase et la vérité n'est pas toujours bonne, non pas à dire, mais à entendre et surtout, à comprendre.


Merci encore à ceux et celles qui sont là, sans attente, juste parce que l'humain est aussi humain, parce que quelques mots, un verre, une grillade, des rires au coeur de la nuit font chaud au coeur. Parce qu'aussi, si beaucoup ont vu et aimé « les petits mouchoirs » l'an dernier, trop peu en ont saisi le sens. Le soleil, les vacances, l'envie égoïste de profiter, ça évite de penser aux amis restés dans leur lit. C'est quand les gens sont en vie qu'ils faut les aimer et les vivre, non dans les souvenirs. La vie, c'est sans fard, sans masque, sans se travestir dans d'épais mensonges. Seule la mort porte un masque et fauche à l'improviste.


Profitez d'être en vie pour aimer les personnes que vous aimez de leur vivant.


Et puis, passez votre chemin, je n'ai plus rien à offrir.

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