Bonne heure ou bonheur?

Qu’est ce que le bonheur ? Question simple à la réponse simplement compliquée n’est-il pas ? Y-a-t’il un seul bonheur d’ailleurs ? A-t’on tous la même perception de ce qu’est le bonheur ? Je ne crois pas, et même, j’en suis sûr. La richesse de notre monde, de nos relations, est basée sur nos différences, sur l’envie de comprendre et d’apprendre, de savoir pourquoi cette différence qui peut au départ nous rebuter, attire d’autres personnes. Ne s’entoure t’on que de personnes semblables, et puis, semblables en quoi ? Semblable en tout ? Non, cela serait mission impossible ! Ce qui attire, c’est bien sûr des points communs, au moins un, qui sert de point d’accroche, de départ à la discussion, ce qui étoffe par la suite le discours, ce sont à la fois ces petits points communs qui se révèlent peu à peu, ces différences qui permettent d’apporter d’autres éclats de lumières sur des vies aux vitres parfois trop dépolies. Subtil mélange de choses connues et d’autres inconnues, de facettes aux reflets attendus comme à d’autres brillant de joyeux éclairs qui titille l’œil et l’esprit. Au fil de la connaissance, les pièces se révèlent être comme les pièces d’un puzzle, des formes complémentaires qui soudain s’emboitent parfaitement pour donner une nouvelle union, former un nouvel ensemble. Première étape, premier bonheur, celui de la compréhension, celui de la complémentarité, celui de l’atteinte d’une attente non attendue.

Le temps vide son grand sablier, avec ses rythmes magiques et alternés, trop rapide quand on les voudrait plus lent, trop doucement quand on voudrait que le temps passe plus vite. Au cours de ce temps, il y a la vie, les vies plutôt. Celles qui se frottent, celles qui s’affrontent, celles qui s’unissent, celles qui construisent, celles qui traversent des pauses pour rejoindre des mélodies, celles qui s’accrochent et se détachent avec ou sans regret, celles qui aiment et apprennent à aimer, car, si certains considèrent aimer comme un jeu, les règles ne sont jamais les mêmes, le jeu n’est pas toujours drôle, le jeu n’est jamais un jeu, même si parfois certains le préfèrent en jeu cruel. Au fil des pauses et des respirations, au fil des attentes et des manques, le fil, ce simple et fragile fil s’épaissit et se renforce, se tend et se relâche, se développe au point de tisser seul sa toile autour du binôme, transforme tel un alchimiste, le 2 en 1. Bonheur d’être deux et de ne faire plus qu’un, bonheur de réapprendre à aimer et d’aimer réapprendre à être. Bonheur de l’échange des sentiments, aimer et se sentir aimé, aimer et être aimer. Dès lors, le temps n’a plus de prise, court ou long, rapide ou lent, il ne peut que glisser sur ce bloc inamovible, indestructible, il n’a pas de prise sur ce qui germe, pousse et grandit, il ne peut que renforcer ce qui déjà est noué.

Et puis, il y a la vie, ses pièges, ses rires, ses pleurs, ses fleurs, ses aigreurs, ses colères et ses douceurs. Palette des sentiments, palette des émotions, elle souffle et ronge le crépi trop lisse posé sur les vraies pierres de la maison, révèle l’état véritable des murs, les ébranle comme pour en vérifier les fondations. Epreuve. Nouvelle épreuve, nouvelle étape qui teste la complémentaire union, celle nécessaire qui affiche l’émotion juste ressentie, celle qui sitôt perçue, sitôt reçue montre combien le signal émis est mauvais et permet de le canaliser, de l’étouffer, de le faire disparaître parce qu’il n’y a pas de raison de troubler l’autre, parce que le sentiment reçu est que la blessure infligée par-devers soi est comme une auto mutilation. Parce que soudain on comprend que blesser l’autre revient à se blesser soi, parce que soudain les yeux s’ouvrent sur ce qu’est la réalité du sentiment. L’autre et soi ne sont plus qu’un. Le bonheur est là, sous les yeux qui s’éveillent à la vie. Alors, d’un seul coup, vient la boulimie, celle de gouter encore et encore, de gouter très longtemps et même éternellement à ce bonheur-là. Subtil jeu de miroir qui renvoie à l’infini le bonheur émis en bonheur reçu, celui qui émet en même temps qu’il reçoit, celui qui transporte à l’infini ces sentiments, les amplifiant même au fil des aller-retour.

Histoire come un autre, mais autrement. Il y a du bonheur à chaque étape, et la somme des bonheurs forme le bonheur. De là à vouloir le définir pour tout le monde, il n’y a qu’un pas qu’il convient de ne pas franchir, ce qui est vrai pour un, n’est pas vrai pour l’autre. Encore une question qui reste sans réponse ? Non, pas tout à fait, et même pas du tout, réponse très personnelle sur un sujet touchant au ressenti et soumis à l’appréciation de chacun, selon son vécu, ses émotions et son état d’esprit. Suivant le moment de la vie aussi où l’on pose la question, car, quel que soit le ressenti et les réponses données à cette question, il est tout de même une chose qui reste véritable : Le bonheur est fragile et fugace. Il a vite fait de s’en aller voler ailleurs s’il manque d’égards, de soins, d’entretien et de réciprocité. Qu’il soit petit ou qu’il soit grand, il reste tendre et fragile, fort et passionnant. Les anglophones le disent fort et vert. Bon je sais, c’est une boutade, mais pouvais-je vraiment m’en empêcher ?

1 commentaire:

Fabienne a dit…

Ces textes sont une vraie bibliothèque : je clique un mot, le menu se déroule et je goûte. C'est délicieux !
Ma résonance, de ces mots de cet instant-là, perdure. Ils créent l'union.