Passions

Trois jours déjà depuis la reprise et comme toujours, je reste surpris de l’efficacité du travail à faire oublier les bienfaits de la longue parenthèse… En plein dans les turpitudes professionnelles, exactement comme si je n’étais jamais parti, voire même pire. Toujours cette façon de traiter les choses dans l’affolement le plus général, fonctionner toujours plus dans l’urgence même lorsqu’on a le temps d’analyser, d’appréhender, de simuler de réfléchir avant d’agir. Symptôme du monde moderne ou fonctionnement particulier de notre boite ? Méthode épuisante ou parfois, l’impression de débarquer dans un cauchemar vous prend, remise en cause des connaissances acquises par des individus fraîchement débarqués et refusant de s’appuyer sur les experts en place. Difficile de trouver ses marques, de garder sa motivation dans cela. Encore plus difficile de fonctionner sereinement comme cela. Impression lourde de lourdeurs alourdissant la belle mécanique horlogère connue jusque là sur le bout des doigts, moyen aussi de se détacher d’activités prenantes du temps de la passion… Comme la lassitude dans un couple, la passion anime la flamme, sans passion, la flamme se meurt et finit par disparaître. Pourtant, seule la passion amène au dépassement de soi, à la recherche d’une perfection toujours plus perfectible, à l’envie d’aller encore plus de l’avant. Bien sûr, la passion peut tuer, c’est même biblique.

Peut-on vivre sans passion ? Tout dépend si on a connu ou non la passion avant. Tant qu’on est dans l’ignorance, il est impossible de savoir ce que peut-être une passion, surtout une passion dévorante. Par contre, lorsque la passion s’étiole, se meurt et finit par disparaître, alors là, il devient dur d’y survivre. La passion provoque un état de transe, une impression d’invincibilité qui peut conduire à sa perte, et qui, lorsqu’on la perd, conduit à notre perte. Après la transe, le temps des frissons, des sanglots, le temps de la fuite en avant. Période sombre conduisant à la tombe, si ce n’est la sienne, celle de la raison de la passion. Après un temps, un certain temps, vient le réveil et l’éveil à la vie. Bibliquement, trois jours. Allégorie de la passion des hommes, similitude entre passion religieuse et passion amoureuse, les termes volent ainsi de cas en cas, les déroulements sont similaires. La passion est vécue, meurt parfois dans un sacrifice, le deuil commence, celui des deux parties, le réveil survient, parfois plus beau, plus intense, transfiguration et envol vers d’autres cieux.

Lorsqu’on vit une nouvelle passion, souvent plus intense, plus forte, si forte même qu’on se demande si on ne rêve pas, on est presque à chercher les pièges, le réveil qui va soudain sonner et mettre un terme à cette vie là, la cloche qui va sonner le glas et faire voler en éclat ce que nous vivons là, celle qui va révéler ce qui cloche tout de même car dans notre vécu, nous n’avons vécu que des choses qui ont toujours fini par clocher. Paradoxe de la nature humaine : au lieu de vivre béatement cette passion là, chercher ce qui peut clocher et appesantir sa vie à traquer le détail qui va tout révéler, au risque finalement de le provoquer. Pourquoi refuser l’abandon à la passion, et refuser d’abandonner cette traque inutile et perfide ? Pourquoi refuser d’être heureux et de se laisser porter par ce bonheur là ?


Décidément l’Homme est un animal complexe quoi qu’on en dise. Sommes-nous donc enfantés dans une douleur nécessaire et permanente au point d’aller sans cesse chercher la petite bête ? Sommes-nous trop nourris de cette douleur pour refuser de s’en passer ? Vivons la passion, pleinement, sans d’autres vues, sans d’autres envies que de la vivre pleinement. Libérons notre esprit de ce péché originel qui nous fait redouter en permanence les sifflements de ce serpent perfide. Soyons nous-mêmes en nous débarrassant de nos carcans forgés depuis trop de siècles pour enfin naître à la vie, c’est là qu’est la vie. Facile dites-vous ? Et bien, essayez un peu pour voir…

1 commentaire:

Anonyme a dit…

nous sommes tellement habitués à ce que la vie ne coule pas de source que les moments lisses nous semblent irréels

bizz

belle amie