Pensées d'en haut

J’ai souvent écrit sur ces journées passer à randonner, ces plaques de plastiques attachées sous les pieds, j’ai souvent pris du plaisir à visiter la nature dans sa virginité, marchant dans des groupes plus ou moins nombreux, accompagné ou pas, entouré ou pas, que de chemins parcourus, que de chemin parcouru en ces huit années de raquettes. Ce week-end en fut révélateur, peut-être parce qu’enfin mes yeux sont ouverts, je parle là de ceux de l’intérieur, ces yeux qui savent tant voir la beauté des choses, une fois qu’on est arrivé à les sortir de leur nuit, peut-être aussi parce que je fais mes premiers pas tout seul dans ce monde si connu et à la fois si inconnu. J’ai beaucoup œuvré, râlé, et critiqué parce que ma seule vision des choses était la perfection, et ue je voulais que tout soit parfait, sans accepter ni de lever le pied, ni de recevoir des critiques, ni même, pire encore, de ne pas recevoir de félicitation eut égard au travail accompli. Cela j’en ai conscience aujourd’hui que mes yeux de l’intérieur ce sont ouverts, mais on ne revient pas en arrière, on ne rectifie pas le tir d’événements passés, par contre, on l’intègre, on pose un regard différent sur soi, sur sa vie et du coup, on est différent. Tant et tant de choses que j’ai faites par fausses bonnes raisons, tant et tant de choses que je n’ai pas faites par fausses bonnes raisons, c’est ainsi, rien ne sert de juger le passé, rien ne sert de vouloir le revivre ni le faire revivre, juste l’accepter comme une chose comprise, comme une leçon apprise, et l’intégrer pour passer au niveau supérieur. Revenir dans ce group de raquettes, retrouver ces gens qui m’ont vu et entendu râler tant et tant de fois est une chose excellente, car c’est un peu comme aller affronter l’adversité, se frotter aux opposés pour réaliser combien les changements sont accomplis. La plus belle des récompenses est d’entendre les autres, ces pas si anonymes que cela puisque cela fait un bail que nous nous connaissons, dire combien ils me trouvent changé, combien ils me préfèrent aujourd’hui à celui que je fus…. Comme j’ai pris l’habitude de dire, cela flatte mon ego, mais mon ego n’est pas moi. Je ne me cache pas derrière des flatteries, la plus belle récompense est pour moi de me plaire dans cette nouvelle vie. Etre moi, me plaire à moi, vivre avec bonheur cette détente, ce détachement au sens premier et noble du terme, réaliser les erreurs du passé, en tirer les leçons, avancer, être soi. Une fois cette perception acquise, cette envie d’avancer présente, ce détachement quotidien, il reste l’envie de poursuivre dans cette voie, une envie si évidente, puisqu’on est si bien, un bien être, une force jamais ressentie, un vrai réveil comme au sorti d’un trop long coma, d’un enfermement si terrible que nous en sommes en fait, nos propres geôliers. Plus qu’une envie, une foi, vivre, car on n’a jamais vécu jusque là. Repousser ces limites, cesser d’écouter ces fausses voix qui nous déconseillaient ceci ou cela, oser, prendre le risque, se dépasser, telle est la vie.

Aujourd’hui, j’ai repoussé mes limites, je suis parti en duo avec un guide dans une chevauchée immaculée direction le sommet. Jusque là, nous avions marché en groupe, et j’ai même ouvert la trace durant quelques pas, nombreux mais ce n’est pas le nombre qui compte. Ouvrir la marche n’est pas chose aisée, car il faut donner l’élan, le rythme, choisir le passage que tous prendront, et puis, quand le profil devient plus pentu, choisir de monter tout droit, ou de faire ces fameux zig et zag qui certes, allongent le nombre de pas pour atteindre l’objectif, mais allègent les mollets d’efforts à consentir pour s’élever. Dans ce choix-là, j’ai pris l’option confortable pour tous, celle des zig-zags lacérant la pente et nous menant tous au sommet, j’ai mesuré par ce choix, combien de belles choses en découlaient. D’abord, chaque marche dans un sens porte le regard vers un seul des côté de cette si belle chose qu’est al nature, vers ces sommets si beaux que sont nos Pyrénées. La marche suivante, le changement de sens suivant, c’est un autre décor, d’autres vallées, d’autres sommets, d’autres regards sur le groupe qui s’échine et gravit la pente sur la trace ouverte. Puis le plat, celui du repos, du vidage des sacs, le plat du choix facile et difficile. On se pose là tandis que d’autres font gravir un autre supplément. Choix dicté par la voix intérieure, celle qui protège et fuit la fatigue inutile. J’ai quitté mes raquettes, posé mes bâtons et me suis assis en attendant le retour de ceux partis en boucle supplémentaire. Et puis non, je me suis levé, j’ai rechaussé mes raquettes, et je suis parti, repoussant mes limites, celles que je m’étais fixées hier, celles qui m’allaient bien car elles m’empêcher de me mettre en danger. J’ai répondu à l’invitation du plus fou de nos guides, et nous avons gravi la pente en direction du sommet, de face, un tout droit mémorable dont je me refusais la possibilité d’y arriver. Bien sur, il y eut des passages délicats, des plaques de neige verglacée ou la raquette accroche peu, des palpitations à haut régime du cœur, mais quel plaisir de songer à ce qui devenait mon exploit, quel carburant pour le cerveau rêvant là de sommets et d’ailleurs, et enfin, quelle joie de voir le sommet, certes, pas dans son entier, car en m’approchant, je découvris avec effroi que ce n’était là que le début de l’éperon d’une crête, que ce sommet en cachait un autre, puis un autre, en encore un autre….. 4 pour le prix d’un !

La vie est ainsi, chaque victoire n’est que le début d’un nouveau combat, la préparation d’une victoire encore plus belle, il faut pour cela accepter de sans cesse repousser ses limites, et non repousser les limites. Etre soi, c’est accepter de se battre pour grandir et non pour s’élever une statue. Rien n’est jamais acquis, ni en amour, ni en amitié, ni pour soi. Sans cesse la page se blanchit, sans cesse il faut écrire, plus loin, plus fort, plus haut, mais la vie est à ce prix et la vie, c'est décidément ce qu’il y a de plus beau !

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