Les
années passent, elles filent avec plus ou moins d’élégance, et si d’aucuns se
mettent en transe et dansent à chaque changement du nombre au crépuscule de la
pénombre, d’autres les regardent passer, sans regret, peut-on aimer une année
achevée ? Les années partent, s’enfuient dans des mémoires, elles glissent
et finissent par disparaitre, doit-on fêter la nouvelle née ou bien pleurer sur
feu l’année ? Puis finalement, au fond, doit-on croire qu’une année
démarre au 1er janvier, doit-on croire qu’elle se meurt sur son 31 ?
Le temps est un ruban qui danse dans nos mémoires, c’est un cerf-volant voguant
aux vents de nos évènements ; Tantôt il nous frôle, tantôt il nous
caresse, tantôt il nous hérisse les poils, tout compte fait, il ne nous laisse
pas indifférent. Indifférence ou pas, le temps vole et revient parfois nous
toucher, parfois au propre, parfois au figuré, parfois au présent, parfois un
vieux bout de ruban passé, toujours à temps mais il n’y a pas plusieurs ruban,
il n’y a que le ruban du temps. Est-ce pour cela que le monde s’essouffle de ‘bonne
année’ ? Tant pis et tant mieux, nul n’est besoin d’un minutage précis
pour se rappeler que l’un existe et que l’autre se meurt, nul besoin d’un mois
de janvier plutôt qu’un mois en fleur. Le temps est un ruban et nous sommes des
papillons, volant de date en date pourvu qu’elle signifie quelque chose, une
présence, un anniversaire, un souvenir.
L’armoire
aux souvenirs croule sous les paquets enrubannés, il s’en échappe des senteurs
différentes, des colorations variées et des mots d’un autre temps. Faut-il en
clore la porte, la clouer au pilori ? Faut-il allumer un grand feu et
mettre le feu à ces feux souvenirs ? D’autres paquets, d’autres rubans, d’autres
étapes viendront alors occuper l’espace, nos vies ne sont que de grands escaliers
où celui qui ne monte pas se vautre à la première marche, l’avantage étant de n’en
point connaitre le nombre. Tiens, encore un nombre, au fil du temps, les
nombres s’empilent, s’associent, se superposent et forment d’autres nombres que
le grand ruban viendra désigner d’un pli que l’on nommera date ou bien
rendez-vous, c’est selon. Oublions l’armoire, le lit, la chambre, oublions le
refuge, le pavillon, le chalet, partons à la recherche du rien, c’est autre
ruban qui parfois s’en vient, cette autre coquin qui se fait tout petit mais
qui sait si bien apporter à nos vies ce tout petit rien. Partons respirer le
grand air, allons près des falaises où s’époumonent dans de vagues relents ces
flots d’écumes caressant les rochers. Ils cognent à grand fracas mais la roche
résiste et tant mieux, sinon point de spectacle, nous ne serions que fétu sur
un château de sable aux vagues agonissant. Le bruit, les saveurs iodées, les
vagues, les gerbes d’écumes et le vent venant taquiner les cheveux rebelles,
percer l’étoffe à toucher le corps. Alors le regard se perd dans la lande, les
bruyères sont belles en cette saison, le paysage désert et les pensées
voyageuses, oubliant un premier de janvier, oubliant une fin d’année, parce qu’au
fond, ce qui compte, c’est bel et bien le temps présent, celui d’être ici, à
jamais.
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