D’abord
il y a l’incompréhension, le choc, l’effroi, la stupeur, une forme de peur
panique qui nous fait nous renfermer ou bien au contraire nous exprimer,
parfois même avec véhémence, par l’accaparation des lieux, des personnes, des
situations, par écrit, par dessin, par une forme subite d’existence à tout
prix. Puis la fumée retombe et nous voilà, êtres éparpillés à déambuler dans
les ruines et les charniers de nos informations. Tous contre, tous solidaire,
tous patriotes, tous aux couleurs bleu blanc rouge d’une nation violée et
abasourdie de n’avoir rien vu venir. Entre fleurs et flammes des bougies, entre
mots et larmes, lentement la mémoire efface les terreurs et les peurs, du
moins, elle essaie. Plus rien ne sera jamais comme avant, mais au fond, cela
n’est-il pas toujours le cas de n’être plus jamais comme avant ? Et nos
journaux regorgent de faits divers tout aussi vides et creux mais dont le
papier servira toujours à allumer un feu, des mots creux pour noircir le
quotidien, un brûlot pour un jour sans fin. Cela rappelle hagard un tristement
célèbre 13 novembre, des chaines de télévision retenant en pure statistique un
audimat aux crochets des images en boucle dans des arrières-scènes de combats.
Là est notre débauche de moyen, d’image et d’avant-gardisme : retenir le
moindre regard avec un soupçon d’image monté sur une boucle infinie du temps.
Nous ne sommes qu’âmes en peine.
Devant
telle incompréhension, devant de pareilles douleurs, de telles peurs, les mots
sonnent le silence, les maux sont tels que les écrire, les décrire ne seraient
que pauvre, une sinécure. Le temps a passé, sans effacer les drames, en
estompant certains mauvais accents, certaines lourdeurs, certains
regroupements, certains étiquetages, le mal de l’Homme : vouloir tout étiqueter,
tout rassembler dans le même bocal. La religion comme prétexte, la consonance
des noms, la concordance des temps, voilà qui sonne plus que parfait quand tout
n’est qu’imparfait. Peut-on massacrer au nom d’une religion ? Faut-il
ouvrir nos livres d’Histoire, cherchez dans les pages premières de la
chrétienté, relire le temps des croisades, la curée contre les templiers, la
découverte de l’Amérique, la saint Barthélémy, l’édit de Nantes ou d’autres
holocaustes plus récentes ? Faut-il
s’arrêter à la première lecture aussi basique qu’un jeu d’échec aux pions noirs
contre des pions blancs, ou bien faut-il pousser plus loin les recherches,
l’analyse, relire les lignes de cupidité cachées en filigrane, retrouver dans
ces mauvaises guerres des butins à dérober, des cambriolages fort bien préparés
au nom d’un seul dieu se nommant Pouvoir et dont le sceptre se pèse en
or ? Combien de religions depuis la toute première n’est qu’un schisme,
une rébellion de la précédente ? Combien de querelle autour d’un même puits
fut-il alimenté par plusieurs sources ? Tant que ce monde ne sera que
richesse matérielle, il y aura toujours un contre l’autre, un impôt, une taxe à
naitre, un vol à commettre, une tentative de prendre le dessus et le contrôle.
Vous pouvez nommer vos dieux des noms que vous voulez, ils ne s’appelleront
jamais que euro, dollar ou yen. Comment pourrait-on vivre sans cela ?
Quelle est la référence sociale dans notre temps ? De la montre au poignet
jusqu’à la voiture garée, tout est évalué en billets. La grandeur de l’Homme se
limite-t-elle à une valeur numéraire ? J’ose croire que non, et il me
plait à espérer que je ne suis pas le seul. Du bleu-blanc-rouge de notre
oriflamme, de sa devise liberté-égalité-fraternité je ne vois qu’un même élan,
une même énergie, celle nommée ‘Amour’ avec des lettres majuscules, des lettres
égales, des lettres fraternelles, des lettres libres de toutes frontières, de
toutes religions, de toutes couleurs de peau, des lettres qui peuvent varier
selon les langages mais qui ne sont que le berceau vrai de notre Humanité. Des
lettres écrites avec le bleu du ciel, le blanc de l’innocence et le rouge de la
passion, parce que quand même, on peut avoir d’Amour sans passion, sans
innocence et sans lever la tête, le regard vissé dans le ciel.
Vendredi
13, simple concordance des temps ? L’Histoire a parfois de curieux
rebonds, templiers ou bien simple spectateur, massacre en règle dans les modes
du temps, le bûcher hier, les bombes et les balles aujourd’hui. Il n’y a pas
que le loto qui puisse avoir les boules ce jour-là, jamais nous ne pourrons
oublier, jamais une pensée n’oubliera de serrer notre cœur lorsque nous
franchirons les portes d’un stade, d’une salle de spectacle, un coin de rue,
une terrasse devenue trop célèbre. Jamais nous n’oublierons ni le drame, ni la
lâcheté, mais surtout, jamais nous n’oublierons d’Aimer, mais d’Aimer vraiment,
parce que nos vies naissent d’Amour et ne brillent que par Amour. Un vendredi
13 comme tous les autres jours. Aimez, mais aimez-vous vivants.
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