Le miroir des mots

Le silence ne s’exprime pas en pages blanches alignées dans une farandole de dates somme toute éphémères, non, le blanc d’une page n’est pas le linceul des mots qu’elle aurait pu porter mais à contrario le blanc des nimbes où se couchent les muses. Pourquoi donc chercher à comprendre ce qui n’est que pur hasard ? Faut-il donc vraiment trouver une raison, une explication tout aussi illogique à tout ? Si les textes ne s’affichent plus ici c’est qu’ils volent ailleurs, au gré des idées, au cours des étapes de mille vies vécues dans une même enveloppe de vie. Ce sont des papillons que l’on emprisonne dans une cage vitrée, celle du petit écran, des êtres éphémères qui se posent soudain sous tant de regards pour disparaitre dans un clic de fin. Envolés. Epuisés, les ailes se détachent et l’être se meurt, combien de bravos autour de ce halo d’artificialité ? Je cris, tu lis, il meurt… Simple trilogie d’une errance prosaïque, un pâle reflet de tant de nos vies, qui sait ce qui luit au fond de son puits ?


Les passions sont des maitresses dévorantes, épuisantes, nombreuses et fallacieuses, elles vous dévorent par leurs feux, elles vous consument par leurs ardeurs, elles vous consomment par leurs besoins, nymphomanie scripturale, que dalle… Il fait jour au fond de ses nuits, tout comme il a fait nuit au fonds de ses jours, les eaux profondes sont froides, noires et dépeuplées, le temps de refaire surface est venu, il fait si beau aujourd’hui. Ballet étrange des regards croisés sur ses mots alignés, mais qui donc peut comprendre autre chose que sa propre réflexion devant le miroir des mots ? Il est plus facile de rire et de chanter lorsqu’on a l’esprit gai, il est si facile d’imaginer ce que l’on connait déjà. Le temps est immuable, il n’accélère pas, nous nous empressons juste de vite oublier, de vite changer, de fuir ces présents qui nous dépassent, sans jamais se retourner. La vie empile ces bouts de vécus, elle écrit son expérience par ces bouts de vies, morceaux choisis. Ou pas. Les pas résonnent dans l’aube de la mémoire. Ils sonnent les hésitations, pour d’autres les regrets, comment pourrait-on regretter ce que nous n’avons pas vécu ? Pas à pas, les chemins se dessinent, étranges ramifications traçant comme un arbre de vie, une vie qui porte ses fruits. Ou pas. Fait-il toujours nuit ? La nuit nuit-elle au jour ou bien est-elle à jour née ?



Les mots glissent, les reliefs s’effacent, le galet se poli, tout glisse, tout passe même si rien ne s’efface. Un portrait ne se construit pas en un seul trait, l’esquisse se peaufine puis devient une base pour les traits, avant qu’eux-mêmes ne supportent la couleur, les couleurs, tout est ensemble, on n’ôte pas une pierre du mur à moins de vouloir voir le mur à terre. Il est un ordre en toute chose, même le désordre n’est qu’une expression différente de l’ordre, un ordre différent mais un ordre tout de même. Ce n’est pas parce qu’on ne voit pas de logique qu’il n’y en a pas, c’est logique non ? Même un profil lisse révèle ses aspérités dès lors que l’on prend la peine de s’y attarder. Encore faut-il s’y attarder… Au fond, le seul levier n’est autre que notre propre volonté. « Vouloir c’est pouvoir » dit le proverbe, sage maxime qui résume bien combien nous avons nos cartes en main, encore faut-il les utiliser, à bon escient. Alors oui, les textes sont des miroirs qui renvoient nos pensées mais au fond, sont-ils bien si polis que cela ? Polissons donc nos mots, nos phrases, nos pensées, il existera toujours des aspérités auxquelles s’accrocher, y trouver un appui, un instant de répit avant un nouveau départ, un autre départ…       



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