silence à l'écrit, cris sourd

Le silence scriptural est venu rejoindre l’aphonie volontaire, comme un ras le bol de cette société qui ne s’exprime plus que par la violence et la multiplication des actes assassins. Il fut un temps où mes maitres, messieurs Brassens, Brel et surtout Ferré, trouvaient des mots à mettre sur ces actes violents, des poèmes sans fin pour dénoncer la cruauté de l’abject, des illustrations démonstratives de cette évolution des mœurs qui se voudrait plutôt régression. Aujourd’hui la plume serait fiel et les chiens d’alors des toutous bien caniches. Aujourd’hui mon encre sent le aigre jusqu’à donner l’envie de gerber plutôt que d’écrire, il n’y a plus rien à décrire, comment croire encore aux contes défaits ? La mise à mort est plus souvent de mise que de miser sur le rouge ou le noir, n’en déplaise à Stendhal. Oui, on tue, à la kalachnikov comme à l’arme blanche, à la main comme au volant, on écrase tout parasite qui ne vit pas comme soi, on se délecte à broyer celui ou celle qui résiste, celui ou celle qui n’offre pas une clope, un billet, on tire pour un regard à peine de travers, au fond le respect de l’autre s’enfuit tout autant que le respect de soi.


Les mots ne sentent que la rose, de ces roses à tombeaux qui vous hérissent le poil et vous dérangent les narines, une odeur nauséabonde de sang et d’orphelin, de drames et de hontes. Putain, qui sommes-nous donc, pire que des chiens, pire que des loups, des faucheurs employés de la faucheuse, des abrutis ne maitrisant plus la subtile intelligence dont parait-il l’espèce fut dotée. Marre de lire ces lignes, marre de voir ces images, marre de vivre ce monde et ce mode, cette nouvelle mode. Le code de l’honneur n’est qu’un index bien dressé face aux trous du cul formant cette décadence et ayant choisi le raccourci du combat plutôt que du dialogue. Drogués d’un pouvoir bien plus de possessions que monétaire au fond, un pouvoir où il n’y a pas overdose mais manque permanent, on tue pour avoir sa came, ce manque de ce qu’on n’a pas, oubliant que le manque principal reste le manque d’intelligence, d’humanité et de vivre. Mort, assassinat, violence, vol, accident, démence, comment pourrait-on associer ces termes avec « humain » ? Ras le bol. J’éteins.


Que chaque lecteur puise en son âme et conscience dans les boues de l’information la pitance qui lui sied, pour ma part le niveau de saturation est atteint jusqu’aux vomissures des lèvres, je ferme donc le robinet et vous laisse à ces charmantes proses. Je vais laisser décanter et peut-être un jour reprendre la plume et son encre violette pour qui sait, écrire encore, des pleins, des déliés, des sourires, des rires, des délires, d’autres formes d’enchantement, ne vous en déplaise… Mieux vaut en sortir vivant.  

    

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