Conte de Noël

Il est de tradition, les soir de Noël ou plutôt, de la nativité, de raconter un conte, ces fameux contes de Noël justement, qui n’ont rien à voir avec les comptes de Noël que nos amis commerçants feront plus tard, dans toute la tendresse des chiffres froids et austères, mais qui donneront le baromètre de la consommation dans une période où le consommateur oubliera la sinistrose pour habiller de clinquant et de paraitre une fête religieuse d’une religion de plus en plus boudée. Ainsi vont les paradoxes, tout comme les humains, ils ne sont plus à une variante près. Donc, imaginons que nous sommes le 24 décembre, le soir, devant la cheminée où la buche de Noël éclaire la table de ses flammes crépitantes, et réchauffent les cœurs bien avant l’heure des cadeaux.
Il était une fois… oui je sais, c’est déjà fort usité mais après tout, n’est ce pas par là que la magie d’un conte ou d’une histoire s’en vient ? Il était une fois donc, une forme humaine, par un soir de vingt et unième siècle. Oui, je sais, rien de précis, mais de toute façon, là est-elle l’importance ? Homme, femme, enfant, allez donc savoir, il fait brouillard ce soir et mes yeux commencent à me trahir, quant au siècle, c’est là celui de la communication dans ses plus grandes formes, écran plat de cent cinquante centimètres trônant fièrement dans le salon, consoles connectées sur le réseau mondial du web, portable dernier cri possédant tellement de fonctions qu’en en oublierait presque qu’ils sont aussi des téléphones, tout un chacun est relié au monde entier dans une virtualité sans faille. Dès lors, les océans se trouvent bien plus propres, on ne jette plus de bouteille à la mer, un message roulé dedans, on envoie des SMS, Short Message System de leur nom de famille complet, vers des bouées, des numéros, des êtres, des formes humaines, enfant, femme, ou homme. Il était une fois, un soir de vingt et unième siècle donc, une forme humaine, jetant sa bouteille à la mer, non, suis-je bête ou vieux-jeu, non, envoyant de gentils messages courts vers des connaissances qu’on nommait en ces temps-là « ami », par sympathie beaucoup, par besoin de lien peut-être aussi pas mal, et puis aussi, parce que les iles désertes ne sont pas toutes entourées d’eau, parce qu’il est des soirs dans l’année où le soleil se couche fort tôt après s’être déjà levé très tard, fatigué sûrement puisqu’il ne réussissait pas à réchauffer la terre et la troupe entière de ses aïeux comme le chantait le barde Cabrel. Il est des soirs très longs, faisant suite à des jours très courts, très froids, des soirs dits de fête mais la fête n’y est pas. Alors les messages un à un s’égrène, alors les appels un vers un s’envole, alors il est des messages comme des oiseaux, certains sont migrateurs, ils s’en vont et ne reviennent jamais. C’est marrant ces messages, c’est tout petit, ça arrive avec ou sans bruit, c’est lu ou non, compris ou pas, ça dérange bien sur, tout le temps mais c’est tellement pratique, ça permet d’échanger sans se mouiller même et surtout les jours de pluie. Ça permet de croire aussi, en des liens, en des amitiés, en des relations, au fond, c’est assez trompeur. Et cette forme humaine peut à peu se déshumanisa, parce qu’autrefois, ce qui faisait l’humain s’appelait le cœur, avoir du cœur, et même, n’ayons pas peur des mots, avoir bon cœur. Mais à force d’avoir bon cœur, à force de donner son cœur, à force de puiser dedans, le cœur s’épuise, il se dessèche, tombe en miette et la vie s’en va, tout comme la batterie d’un téléphone portable affiche crânement le pourcentage de vie qu’elle a, sachant que l’imbécile accroché à ses reflets ne tardera jamais à l’alimenter, mais ce qui nourrit le cœur de l’homme, c’est bien plus compliqué qu’une simple prise dont on se sert sans se soucier qu’elle soit nucléaire. Sans recharge point de salut, sans lien point de vécu, et la flamme vacille et la flamme s’éteint, la forme humaine y perd sa chaleur, les cœurs de pierres ou les pierres reçues, autant de froideur qui congèle la vie. Alors la lumière s’éteint, le téléphone se meurt et l’homme disparait dans son propre linceul. Le feu de la buche bientôt le ranimera, à moins que ce ne soit les flammes de l’enfer sur terre, celles qui permettent au corps de finir en poussière. Délivrance, les poussières voleront au vent, ci ou ailleurs, qu’importe l’endroit, mais de préférence, que ce soit l’océan, il est vide de bouteilles et d’appels au secours, il est plein de vie et riche en énergie.
Bien sûr, tout ceci n’est qu’une fable, rien de toute cela n’est vrai, il n’est pas sur terre des âmes esseulées, des personnes solitaires dont on solliciterait des moments d’existence lorsque la notre est vide, non, tout cela ne peut exister, pas plus qu’il ne peut y avoir d’envie de disparaitre un soir de fête, une magie de Noel, impossible ! Impossible ? N’est-ce-pas ?
Profitez, ce n’est pas tous les jours fêtes, ni moment de retrouvailles, ni victuailles en abondance ni richesses déployées, profitez de vos proches, les choses passent tellement vite de nos jours….

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Au royaume des joujous modernes, l'être humain est roi. Le bonheur est dans le partage de la vie réelle, dans la chaleur humaine, pas dans des sms et autres messages aussi froids qu'impersonnels. Qui disent tout et rien à la fois.

"Elle n'a pas trouver mieux
Que son lopin de terre et son vieil arbre tordu au milieu
Trouver mieux que la douce lumière du soir, près du feu, qui réchauffait son père et la troupe entière de ses aieux
Au soleil sur les murs de poussière
Elle n'a pas trouver mieux, elle n'a pas trouver mieux...."
Pardon pour les fautes mais l'erreur est humaine et je ne suis qu'un être humain.

Il vaut mieux rire dans une chaumière que pleurer dans un palais. Proverbe chinois.

Natacha.