Dans une époque
superlative, la moindre chose, fut-elle naturelle se doit d’être qualifiée de
machin truc bidule chouette certes, mais du siècle…. Pauvre monde. Alors oui,
les marées furent exceptionnelles, du moins par rapport aux jours précédents, une
forme de plus qu’hier et moins que demain car cette année verra pas moins de
quatre épisodes de ces fameuses marées, allons bon, ce n’est pas la fin du
monde ni celle du siècle, non ?
Les saisons rythment les
saisons, les mois passent et les feuilles restent blanches, sans angoisse de le
rester, parfois les pauses ont du bon et puis la vie c’est aussi de ne pas
faire tout le temps les mêmes choses, qu’elles soient du siècle ou non. C’est
un peu comme partir pour un long voyage, sans se retourner, parcourir mille
paysages, écrire mille lignes de nuages, savourer mille présents, puis un jour
revenir, ouvrir la porte de son ancienne cage, souffler sur la poussière grise,
la regarder s’envoler en éternuant puis retrouver un vieux cahier aux mots
gravés par une plume trop dure, de ces
plumes d’autrefois, un peu rouillée par l’acide, un peu émoussée par des
longues balades monochromes. Le temps ou bien la poussière, nul ne sait dire
qui des deux s’en vient estomper les contours trop rigides, les lettres pas
assez pleines, les mots trop vides, les sourires inversés, les tiroirs de la
mémoire s’en trouvent tout retournés, alors, les mots que l’on lit deviennent
des mots étrangers, des paroles d’hier mises au ban de tant de vies passées. C’est
loin, c’est long le monde, mais lorsque le monde s’enfuit, c’est long, c’est
vide, c’est loin et froid, parce que le monde au fond, c’est ce qui fait le
mieux le monde, peut-être bien. Le monde, c’est aussi la prison du monde, les
paroles se coupent, se donnent et se perdent, plus on est de fous et moins on
est nombreux, libres et étouffés, alors ce monde-là, on le fuit, on s’enfuit,
on s’envole avant de s’étioler, l’envol ou la camisole, ce n’est pas une fuite
mais une survie, une vie par-dessus la vie, quoi de plus vivant, quoi de plus
incompris ?
Il est des paysages à
couper le souffle… Mais pourquoi donc y aller y prendre un bol d’air ?
Il y a des étendues
sauvages où se perdent le regard, mais pourquoi est-ce dans ces immensités que
l’on réalise le mieux la petitesse de l’être et la nécessité de ne pas avoir d’avoir
comme une forme de devoir ?
Pourquoi rêver de liberté
et s’enfermer dans des prisons dorées, de ces cages dont on dore les barreaux
sous des tonnes d’argent ?
Le plus par le plus,
formule gagnante du moins. Travailler plus pour amasser plus, c’est moins de
temps à vivre pour vivre, un choix parmi tant d’autres. Dehors la nuit tombe, lentement mais sûrement,
elle s’étale et répand son ombre de lune, la course est gagnée, une pluie d’étoile
vient fêter cela. Il est trop tard pour ouvrir les volets trop tard pour
déranger plus la poussière, juste s’asseoir, écouter le bois crépiter dans les
flammes et parcourir ses vieilles lignes pleines de mots et de maux, des maux
en mots, mot à mot. Et puis qui sait, si au bout du cahier il reste un peu de
place, si dans le plumier il reste une plume avide d’encre, prête à reprendre
du service pour jeter l’ancre entre deux lignes, trouver son port loin de son
amer, oubliez la rouille et les grincements dans des glissements pleins de
déliées, si l’envie de se prendre au jeu rencontrait cette somme de si, si et
seulement si, peut-être bien que la formule n’en serait pas si mathématique
mais plutôt littérale…ou presque. Mais au fond, ceci est une autre histoire,
une forme de graphie, des dessins à dessein, plus tard… Pour l’heure il est
tard, les doigts plissent tout autant que les yeux, les pages retrouvent la
lumière et les mots sortent de l’ombre, un autre éclat…sans voix, un cri sourd
ou presque, les flammes dansent, l’écrit sourd pose ses idées en noir et
poussière grise que quelques larmes s’en viennent diluer et nettoyer, cela faisait longtemps que ce cahier était
fermé….
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