Entre tempêtes et dépressions, les vents soufflent et balayent
les paysages. Des vagues devenues furies, des embruns escaladant les falaises, des
bouts de végétations devenant oiseaux, marcher dans de tels spectacles est un
plaisir. Branches au sol, arbres tombés : autant de témoins de la
fragilité des racines. De nos racines. Au fond, qu’elles sont-elles ? On
nait sur un territoire, dans une culture, une famille, on grandit selon des principes,
des éducations, on se construit par des expériences, mais au fond, ne se
cherche-t-on pas tout au long de notre vie ? Nos racines sont multiples, on
fait nos premiers pas, nos premières radicelles dans le terreau familial. Celui
des parents, des grands-parents, des oncles, des tantes, des cousins, mais
aussi des lieux familiaux, habitations, paysages, fermes, nature, ville. On s’y
réfugie, par confort on s’y installe dans un mimétisme certainement ancré dans
nos gênes. Puis la vie, les épisodes, les coups aussi et surtout nous font
dévier de ces zones de confort pour fuir, voir autre chose, apprendre, s’échapper,
exister, ne plus rencontrer. Autant de raisons de construire d’autres racines,
de se construire. Sans coups, sans envie de chercher autre chose, ailleurs, nos
racines restent dans le pot familial, nous restons accrochés à ces vies
passées, ces vies antérieures. Il n’y pourtant pas, de façon si simple, juste ces
deux états, le terroir d’origine et la recherche d’un autre terroir où se développer.
L’être humain n’est pas si simple, si binaire. Parfois, c’est sans chercher qu’on
trouve un terroir où s’enraciner. Comme les graines aux vents s’en vont grandir
dans d’autres espaces, nos vies, nos pas, nos errances peuvent devenir la source
de notre future vie. Telle une rencontre entre deux êtres, les alchimies
terroirs – humains existent. Est-on fait pour la ville, ses foules, ses
agitations ? Est-on fait pour la nature, ses espaces, ses calmes et ses
silences à écouter ? Là encore, rien n’est binaire ni simple. Parfois le
doux mélange des deux permet de s’équilibrer. Parfois, nos coins de nature
vivent des extrêmes. Périodes estivales et ses foules touristiques, son brouhaha
étouffant ses silences, périodes hors du temps où l’on est seul sur les chemins
à écouter les vents, à sentir la nature, à vivre pleinement le moment, tel un
abandon. Période propice aux questionnements. Pourquoi suis-je ici ? Qu’est
ma vie ? De quoi ai-je envie ? besoin ? Les pas se posent, les
semelles glissent sur les pierres embrumées, les lapins doivent être tapis dans
leur terrier, les oiseaux de mers restent au sol, les vents violent déchainent
l’océan et pourtant, le cormoran se joue des flots et plonge pour sa pitance. Simple
rappel des besoins vitaux essentiels. Les pensées voyagent, vers les siens,
ceux disparus et ceux vivants, sur nos vies, celles alimentaires de nos professions,
celles de nos loisirs, celle simple d’être ici et maintenant, au cœur des éléments,
sur un rocher en plein océan, balayé par les vents. Résister aux poussées, sentir
ses vêtements se plaquer contre le corps, marcher à l’envie par envie. Personne
autour, du moins dehors, sur cette côte sauvage. Pas de bateau mais tellement
de couleurs que même l’appareil photo ne pourra qu’interpréter ces nuances de
verts, d’écume, de roches et de terres. Plus loin le phare esseulé semble
résister au naufrage. Les eaux se battent contre les rochers, elles ragent d’écumes,
jettent ces bulles de mousse sur les chemins autour. Quel bonheur de vivre ces
instants. De goûter aux joies simples que nous offre la nature. De sentir sous
ses pieds pousser de nouvelles radicelles, une façon certaine de s’ancrer dans
ces roches, de vouloir s’y enraciner. Sous les vents. Tout simplement.
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